Éloge funèbre 2.0 — Texte : Audrey Boissonneault

Il y a, déjà, huit ans, je lisais mon texte d’adieu devant chaque personne qui pleurait ta mort. Je repense souvent à ce moment et parfois, j’aimerais pouvoir réécrire ce discours. Je m’assurerais que chacun des mots soit démêlé, que les images ne soient plus floues et que mes émotions soient apparentes. J’aurais aimé pouvoir mettre ma maturité ainsi que ma naïveté sur papier, pouvoir décrire tout l’amour que j’ai envers toi. Jamais tu n’auras, réellement, conscience de ce texte, mais je le placerais tout près de mon cœur, à tes côtés. Au creux de celui-ci, je continuerais de souhaiter que cet éloge funèbre arrive sur ton chemin.
Papa, les mots qui suivront te seront entièrement dédiés.

Lorsque nous sommes jeunes, on nous apprend à marcher, à boire, à manger, à parler, à nager, à apprécier le contact humain, à nous attacher aux personnes qui nous entourent, mais personne ne nous enseigne à vivre sans les personnes les plus importantes à nos yeux. On nous partage une vie commune, sans nous faire prendre conscience que rien n’est permanent. On m’a appris à faire du vélo à trois et à deux roues par la suite, on m’a avertie de mettre un casque et des protège-coudes, mais personne ne m’a expliqué comment faire lorsqu’on perd la deuxième roue. La naïveté des générations se décrit en un mot : INVINCIBLE. Nous croyons que nous sommes inatteignables, que rien ne peut nous arriver. Peu de personnes nous font prendre conscience qu’un jour, tout peut s’écrouler. Il suffit d’un léger geste, d’une inattention et sans le réaliser, le tout défile.

On m’a souvent dit que j’étais trop jeune pour perdre mon père. En réalité, c’est lui qui était trop jeune pour partir. On m’a arraché mon modèle paternel. On m’a enlevé chaque moment père et fille qui aurait eu lieu. Je n’aurai, jamais, la chance de revoir les yeux brillants de fierté de mon papa. Il ne pourra plus me féliciter pour mes diplômes, il n’aura pas la chance de voir sa fille à son bal de finissants, à sa graduation ou même à son mariage. Bien que la communication verbale n’a peut-être pas été le meilleur aspect t’entourant, j’arrivais à comprendre les messages derrière chaque phrase superflue. Je n’arriverais pas à me faire à l’idée que jamais, je ne recroiserais ton mauvais caractère, mais aussi, ton sourire qui ne se trouvait pas loin de là.

La colère surgit en moi, lorsque j’entends quiconque se plaindre de ses parents. La vérité c’est que je donnerais n’importe quoi pour ressentir tes bras qui m’entourent et ta voix qui me chuchote : « Je t’aime ma cocotte. »
Mon géniteur n’était pas parfait, comme personne d’autre, mais mon papa, lui, savait me démontrer l’amour, le bonheur, le courage, la volonté et bien évidemment, l’espoir. De mes yeux de petite fille, j’ai su voir un modèle, un héros et de mes yeux de jeune femme, j’arrive encore à m’imaginer la force et la fierté dans ses yeux souffrants. Papa, tu m’avais préparée à beaucoup de choses, y compris ton départ, mais accepter que nous n’ayons plus de conversations, d’activités, de fous rires, de moments chaleureux est, littéralement, impossible.

Je ne te dirai pas adieu, papa, je vais te dire à la prochaine. Nos chemins se recroiseront, je te le promets. Dans mes rêves ou même au paradis, j’aurai la chance de te dire qu’il n’y a aucun mot pour décrire à quel point tu me manques et que je t’aime.

Tu es merveilleux papa, merci d’avoir été l’homme que tu étais, n’oublie pas que je t’aime et veille sur moi, d’accord ?
Essaie de me protéger du mieux que tu peux et fais-moi signe de temps en temps s’il te plait.
Au revoir, papa, on se voit bientôt. Je t’aime.

Audrey Boissonneault



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