Quand mes peurs me rendent visite

J’ai eu de la visite en fin de semaine. De la grande visite. C’était la journée parfaite, avec un beau soleil et une température idéale! Tout a commencé par : «Mamannnnn, est-ce qu’on peut aller se promener en vélo dans la rue, s’il te plaîîîîîît? » C’est précisément à ce moment-là que la grande visite est arrivée et ils étaient plusieurs.

La peur qu’un étranger les aborde, la peur qu’elles tombent, la peur qu’elles se perdent ou pire, la peur qu’elles se fassent enlever. Eh! Oui, mes peurs m’ont rendu visite ce week-end! Je sais qu’habituellement, c’est dans la rue qu’on fait du vélo, mais chez nous, on fait du vélo sur le gazon. Bizarre, me direz-vous, vous avez tout à fait raison. Voilà pourquoi, en fin de semaine, tout a changé…

Cette journée-là, mon cœur et ma tête se sont chicanés. Ma tête me disait qu’enfin, mes filles jouaient dehors, qu’enfin elles ne passaient pas leur temps dans la maison à se plaindre qu’elles n’ont rien à faire… Et il y avait mon cœur de maman qui hurlait : un étranger pourrait leur parler, elles pourraient se faire enlever ou elles pourraient se perdre. Toutes les horreurs qu’on lit dans les journaux, c’est assez pour nous faire paniquer et fabuler.

Est-ce qu’il y avait des enlèvements dans notre temps, probablement. Est-ce qu’on en parlait autant qu’aujourd’hui? Peut-être pas. En fait, la simple pensée que mes filles pourraient disparaître me donnait le goût de vomir. Nous, les mamans, on est des championnes pour se faire des scénarios tous plus fous les uns que les autres. J’ai déjà sermonné mon mari parce qu’il avait permis aux filles d’aller chercher le courrier à la poste qui est à seulement deux maisons en marchant… Oui, je suis peureuse.

J’ai quand même permis à mes filles d’aller jusqu’au panneau d’arrêt. Pendant ce temps, je me changeais les idées. La vaisselle, le balai, l’époussetage, le lavage, etc. Je devais m’occuper, une vraie folle de la propreté. Quelques minutes plus tard, je leur ai permis de descendre la côte… J’évoluais! J’avais les oreilles grandes ouvertes à l’affût du moindre cri. Je me trouvais bonne et relativement calme. Le sourire de fierté de mes filles me rassurait.

Je me suis alors donné un grand défi : permettre à ma plus grande d’aller reconduire son amie, en vélo, deux rues plus loin! J’étais dans ma tête, à ce moment précis, la maman la plus cool du monde et surtout, la moins peureuse! Une maman qui passait par-dessus ses propres peurs pour laisser de la liberté à ses enfants.

Alors que moi, j’étais si heureuse d’annoncer à ma fille que je lui donnais la permission de faire quelques kilomètres de plus, j’ai vu son visage à elle changer. Son grand sourire a fait place à des yeux incertains. Pas question de me dire ce qui n’allait pas devant son amie. À neuf ans, on a de l’orgueil, quand même. Elle a demandé à son amie de l’attendre dehors pour pouvoir me dire qu’elle avait peur de revenir toute seule à la maison sans son amie…

Assez grande pour vouloir faire du vélo dans la rue et aller de plus en plus loin, assez grande pour aller à la poste et assez grande pour m’avouer qu’elle a peur de revenir à la maison toute seule. Après avoir fait tout ce ménage pour me changer les idées, une petite marche de santé pour accompagner ma grande à vélo m’a fait le plus grand bien.

Valérie Grenier



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