Et toi, tu te berces

Ça a commencé tout doucement.

Tu étais tout petit dans ta chaise haute.

Je t’y ai déposé devant quelques jouets sur ta tablette et tu as commencé.

Tu t’es mis à te balancer de l’avant à l’arrière, on riait… c’était drôle.

Mais depuis, tu te berces encore un peu chaque jour.

Oui, je l’avoue, ça m’a parfois gênée devant de nouveaux ami(e)s.

Tu demandais « Avez-vous un divan? »

Et aussitôt que tu le trouvais, tu t’installais et commençais à te balancer.

Par gêne, par malaise, par ennui, par fatigue. Toi, c’est ta façon de gérer ça.

C’est de te bercer.

Et là, il y a eu «  les gens »  et leurs précieux commentaires qui ne sont tellement pas nécessaires :

— Avez-vous déjà pensé à consulter?

— Avez-vous des autistes dans vos familles?

— Ce n’est pas normal qu’il fasse ça, moi je m’informerais.

— Il va se faire mal.

— Ça ne doit pas être le fun pour lui et vous devez être tannés qu’il fasse ça.

Et j’en passe.

Écoute, logiquement selon toi, est-ce qu’on en a parlé à son médecin?

Nous qui sommes ses parents et qui désirons le meilleur pour notre enfant?! Oui, nous avons abordé le sujet avec SON médecin. Ai-je besoin de t’en donner le compte rendu à toi, l’inconnu? Non.

Ai-je besoin de te dire que oui, nous avons de l’autisme dans notre famille proche? Ça te regarde, toi, l’impoli? Ça te rendrait peut-être mal à l’aise (ou pas) une fois informé.

Est-ce que tu crois bon que je te dise que oui, des fois, c’est irritant de le voir se bercer d’avant en arrière pendant qu’on essaie d’écouter un film en famille?

Qu’on aimerait qu’il cesse.

Mais ça ne te regarde pas!

Il se berce et nous, on chante…

Il se balance et nous, on s’en contrebalance. Comprends-tu ça?

Son médecin nous a dit que c’était un excellent signe d’autosuffisance et que, comme il sait se bercer lui-même, il n’a pas besoin que personne ne le fasse pour lui.

Il se connaît et se suffit.

Quand il vit une situation qui l’angoisse ou quand il se sent fatigué, il se berce pour se calmer ou pour s’endormir.

Te voilà rassuré. Mais moi, je savais déjà que mon enfant était juste différent et ça me plaisait de te faire parler!

Lisa-Marie Saint-Pierre

 



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