Miroir miroir…ma famille, mon reflet – Texte: Émilie Vincent

Je me souviens de cette fameuse peine d’amour à l’adolescence, celle qui enlève toute saveur a

Je me souviens de cette fameuse peine d’amour à l’adolescence, celle qui enlève toute saveur aux aliments, qui transforme les secondes en heures et qui nous projette dans une autre dimension ou notre âme en peine somnole le temps que notre insupportable douleur s’apaise. On devient alors spectateur de notre vie, à l’extérieur de nous-même…absent.

Il m’arrivait d’éclater en sanglots, sans crier gare et de constater, en essuyant mes yeux embrouillés de larmes que mes parents pleuraient avec moi, en silence.

Le poids de ma douleur était alors moins lourd à porter puisqu’il était partagé avec mes alliés, ma famille. C’était tellement réconfortant de sentir que, malgré mes jeunes 17 ans, j’étais prise au sérieux. Mes parents étaient parvenus à comprendre ce que je vivais selon ma perception, malgré que du haut de la leur, ils savaient très bien que je m’en remettrais et que ce n’était qu’une question de temps. Voilà une grande leçon d’empathie que l’on m’enseignait en reconnaissant ce que je vivais selon ma perception, sans tenter d’ajouter une morale à mon histoire, de rationaliser ma peine ou de me conseiller diverses façons de me changer les idées. Simplement comprendre ma douleur en se branchant à ma vision de la vie. Mon monde s’écroulait mais je ne serais pas seule à le reconstruire. Nous étions une famille.

C’est dans ce genre d’épreuve que le mot « famille » prend tout son sens.

Les plus grandes leçons de vie que mes parents m’ont enseignées, je les ai apprises en les observant, tout simplement. Je m’appropriais tout ce que j’aimais et j’en faisais un bout de ma personne. Mes parents ont pu me laisser bâtir mon être en toute liberté, sans crainte, car ils avaient mis toutes les plus belles pièces à ma disposition. Je n’avais qu’à choisir parmi le lot de valeurs qui s’offraient à moi. Je crois que c’est pour cette raison que, malgré mes nombreux détours, ils ont toujours eu confiance que je reviendrais sur le droit chemin.

Tout ce que mes parents me faisaient vivre et qui me rendait heureuse, j’avais envie de le partager aux autres en leur faisant vivre à mon tour. Le fait que mes parents m’acceptent comme j’étais m’a rendu tellement ouverte aux autres ! J’ai appris à m’écouter et à dire non en observant ma mère respecter ses propres limites. J’ai appris à me détacher de la haine et me tourner vers le pardon en observant mon père aimer et s’aimer assez pour ne pas entretenir de haine en lui. J’ai appris à apprécier la vie dans toute sa simplicité en voyant mes parents arborer la leur avec un émerveillement qui se renouvelait au quotidien, comme si rien n’égalait la chance qu’ils avaient d’être qui ils étaient, sans chercher à posséder davantage ou à faire plus.

C’est en voyant mon entourage incarner les vertus qu’ils prônaient que j’ai pu en ressentir pleinement les bienfaits et que j’en ai compris l’importance.

En tant que parent, la plus grande richesse que nous pouvons léguer à nos enfants, c’est d’être le meilleur de nous-même, sur le plan intérieur.

Arrêtons de nous concentrer sur ce que nos enfants pourraient améliorer et reportons cette énergie sur nous, pour devenir de meilleures personnes intérieurement.

C’est en nous observant nous relever après être tombés que nos enfants assimileront la résilience.

C’est en nous observant reconnaître nos erreurs et nous reprendre que nos enfants développeront l’humilité.

C’est en assumant l’humain imparfait que nous sommes et en reconnaissant l’être digne d’amour en notre enfant parfois turbulent et agité que nos enfants apprendront à s’accepter et à aimer sans exiger.

C’est en écoutant nos enfants sans jugements qu’ils auront envie de nous écouter en retour.

C’est en s’émerveillant devant nos enfants et en reconnaissant qu’ils ont beaucoup à nous apprendre qu’ils auront envie d’apprendre de nous.

Cessons un peu de demander aux autres et donnons ! Cessons un peu d’exiger aux autres et soyons !

Nos enfants imitent ce qu’ils voient. Ils sont un miroir de nos propres failles, certes, mais aussi de nos grands dons et de nos qualités profondes. Réalisons que notre plus grande influence sur nos enfants passe par la manière dont nous appliquons nos propres enseignements à notre quotidien. Éduquer positivement, c’est être au meilleur de sa personne à chaque jour.

Émilie Vincent