Avant que tu partes – Texte : Audrey Boissonneault
Allongé, la tête vers le mur de ta chambre. Les yeux si secs, alors que ton cœur pleure. J’ai l’impression de pouvoir te sentir. Dans le coin opposé de celui où je suis, je me sens observée ou plutôt, j’ai le sentiment que l’on jette un dernier regard sur moi.
La tempête était prévue. Elle était inscrite à l’agenda, mais elle était perçue comme un orage lointain. Alors que, du jour au lendemain, tout a été chamboulé. Elle arrivait, le jour même. Prête à t’amener, à te conduire vers un tunnel lumineux.
J’aurais préféré vivre la situation à laquelle on m’avait préparée, bien qu’on s’oppose à la vérité, que l’on cherche solution après solution. Au moins, mon temps auprès de toi aurait augmenté au chronomètre. Parce qu’il y avait tant de choses qu’il te restait à m’enseigner.
Je t’avoue que j’en suis, encore, chamboulée. Trop de fois, je me pose la question suivante : « Mais qu’est-ce qu’il me dirait, qu’est-ce qu’il ferait ? »
Tu as laissé une profonde cicatrice sur le dessus de mon cœur. La cicatrisation se fait durement et lentement. J’en viens à me demander si elle se fermera, réellement, un jour. De toute évidence, la plaie sera douloureuse, à chaque pensée.
Il y a plusieurs phrases que j’aimerais t’adresser. Tant d’affection que j’aimerais te donner. Entendre le son de ta voix, de ton rire. Revoir les traits de ton visage. Je donnerais tout pour t’entendre chialer, même. Tu m’as appris beaucoup, tu sais. Je me réfère à la jeune fille que j’étais et la jeune femme que je suis, et j’espère, toujours, te voir sortir de nulle part.
Chaque personne ayant perdu un être cher se demandera : pourquoi, lui. Ces mots ont résonné sans cesse pendant plusieurs années. Encore aujourd’hui, ils font surface. Je ne peux pas m’empêcher de me questionner sur la façon dont tu me regarderais, le sentiment de fierté que tu aurais, les conseils que tu partagerais avec moi, mais surtout, les souvenirs que l’on créerait.
J’arrive encore à percevoir les manies que tu avais, ton froncement de sourcils et ton sourire lorsque tu nous taquinais. Je me souviens de petits détails qui me réchauffent le cœur, lorsqu’il devient trop froid. Je suis chanceuse de pouvoir me souvenir de certains moments, détails précis et d’arriver à voir les choses qui nous rassemblent même en étant aussi loin.
Avant que tu partes, j’aurais tout donné pour te sentir me serrer dans tes bras. Avant que tu partes, j’aurais aimé sentir tes lèvres sur mon front et ta main dans mes cheveux, comme lorsque tu me consolais. Avant que tu partes, j’aurais aimé que tu me dises tes peurs, mais aussi ce qui te rend fier. Avant que tu partes, j’aurais aimé pouvoir te regarder, droit dans les yeux, et te dire à quel point je t’aime et que je n’aurais pas pu demander mieux. Parce que oui, TA personne manque à ma vie. Tu manques à ma vie. On t’a enlevé, on t’a amené loin de moi, mais jamais je n’oublierais les souvenirs et les détails qui me restent de toi. Avant que tu partes, j’aurais aimé te dire que je suis fière de toi et qu’à mes yeux, tu l’as gagnée, ta bataille.
Avant que tu partes, je t’aurais répété, une nouvelle fois, que je t’aime d’un amour inconditionnel.
À la mémoire de mon papa.
30 mai 2013
Audrey Boissonneault