Pourquoi encore revenir sur les droits des femmes?
Ouin, pourquoi, hein? Pourquoi chaque année, doit-on revenir sur le
Ouin, pourquoi, hein? Pourquoi chaque année, doit-on revenir sur les droits des femmes, sur l’égalité des sexes, la lutte contre la violence faite aux filles et aux femmes? Depuis le temps, il me semble que le message a dû passer?…
Eh! Bien… non. Dans la loterie de la vie, j’ai tiré le bon numéro. Je suis née dans un pays qui traite les filles et les femmes à peu près de la même manière qu’il traite les garçons et les hommes. Bien sûr, on n’est pas tout le temps payées autant pour un travail équivalent; plusieurs petites filles grandissent avec l’idée que leur vagin leur interdit de viser les postes de pouvoir politique ou économique ou même les jobs « de gars ». Et pourtant, je connais des soudeuses passionnées, des mécaniciennes hyper compétentes, des opératrices de grue qui battraient n’importe quel opérateur dans n’importe quelle compétition professionnelle.
Mais tout de même, ici, dans notre coin du monde, on naît « égales » aux détenteurs de pénis. On peut jouer au ballon, aller à l’école, graduer de l’université ou apprendre un métier, faire du fric, devenir première ministre. On peut rester célibataire, se marier, divorcer; si on devient veuve, notre vie n’est pas finie et on n’est plus obligée de marier le frère de l’autre pour survivre. On EST, qu’on soit femme ou homme. Et je suis reconnaissante d’être née dans un pays et dans une famille qui prônent l’humanité avant tout, d’avoir rencontré des hommes qui ont pris soin de moi, qui m’ont traitée comme un être humain et non comme un punching bag.
Mais autour de moi, il y en a qui n’ont pas eu ma chance.
Des amies qui se sont fait battre par leur chum. Le couteau sur la gorge, la menace dans l’œil, le nouveau-né dans les bras. Elles ont dû se sauver de chez elle comme si c’était de leur faute. Elles ont dû se cacher comme si elles étaient les coupables. Elles ont dû payer pour pouvoir garder et protéger leurs enfants. Elles ont dû se reconstruire, comme si elles avaient donné le droit à leur ancien amoureux de les détruire à grands coups de mots et de claques.
La fille d’un ami qui a été tuée en 1989, parce qu’elle voulait devenir ingénieure. Et parce que le tueur en voulait à toutes celles qu’il pensait féministes. Il se trompait entre femme et féministe, entre droit de s’exprimer et droit de tuer.
Des amies à qui on a réussi à faire croire que la vie se déroulait en rose ou bleu, à qui on a coupé les ailes : « Tu veux apprendre à jouer au hockey? Ben non, c’est pour les gars. Toi, tu peux jouer à la ringuette. Ou à la Barbie. »; « Toi, ta place, c’est à la maison. Tu as voulu des enfants? C’est à toi de les élever. Pis ça te sert à rien d’essayer de me contacter, je pars pour la semaine. »
Des amies qui ont dû frencher ou se laisser pognasser pour monter les échelons. Dans un monde où la Journée internationale des femmes serait devenue inutile, on n’aurait pas besoin de se laisser toucher et de faire semblant de jouir pour obtenir une promotion. La compétence devrait suffire. Le salaire ne devrait pas être proportionnel au décolleté. La violence et l’abus ne devraient pas être tolérés, ne devraient pas exister. Les chromosomes XX qui nous font femmes, ne devraient pas être synonymes de XXX.
Des fillettes burkinabé qui ont été affamées et forcées de se promener nues pendant des jours devant tout le quartier parce qu’elles avaient volé quelques dollars. Et quand toi, la Blanche occidentale choquée par tant de cruauté, tu essaies de dire ton mot, on te répond de te la fermer. Toi, tu n’existes pas. Ta blancheur te donne le droit de parole si et seulement si tu es d’accord avec les hommes du clan. Et si tu acceptes de te faire vendre contre des dromadaires ou des chèvres.
Une jeune femme rencontrée en Égypte, qui devait cacher à son père que son futur époux était catholique, au risque de se voir interdire de se marier avec celui qu’elle aimait. Sans compter ces trop nombreux endroits dans le monde où les filles n’ont aucune chance de recevoir une éducation scolaire ou un diplôme, où le clitoris des filles se fait charcuter et où le droit de vote est assassiné avant même d’avoir existé. On considère les femmes comme amputées de cerveau et de volonté, simplement du fait qu’elles sont nées avec deux chromosomes X.
Alors, en ce 8 mars, je choisis de rappeler à mes filles qu’elles ont les mêmes droits que les garçons, qu’elles ont le devoir de se respecter (et de respecter les autres), qu’elles ont une histoire à honorer et un avenir à faire briller. En ce 8 mars, je choisis de rappeler à mes garçons que les filles ont les mêmes droits qu’eux, qu’ils ont le devoir de les respecter (et de se faire respecter), qu’ils ont une histoire à connaître et à changer.
En ce 8 mars, je suis fille, femme, sœur, épouse, mère, tante, cousine, amie, marraine, entrepreneure, auteure, fonctionnaire, rêveuse, fière… Je SUIS.
Nathalie Courcy