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L’éducatrice à la maison ou la sans-papiers

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Comme je l’ai déjà mentionné, je suis une responsable d’un service de garde à la maison. J’exerce ma profession en accueillant chez moi des minis et ce, depuis maintenant près de quinze ans. 

Auparavant, j’étais éducatrice en installation. Là où s’entremêlent tout au plus 80 enfants. J’ai obtenu ma certification en 1993 et depuis, j’ai poursuivi, à coups de formations annuelles, tout ce que j’ai pu apprendre afin de bien soutenir parents et enfants qui complètent mon quotidien. Afin de m’améliorer, de me moderniser. D’ajouter à mes compétences acquises diverses façons d’intervenir, d’observer et de m’ajuster à cette clientèle en pleine évolution.

L’automne dernier, je m’étais inscrite avec une amie à une formation échelonnée sur plusieurs semaines à un peu moins d’une heure de chez moi. Le même trajet emprunté pour aller me perfectionner. Ajouter du plus à mon service de garde. Apprendre à soutenir les enfants dans leurs apprentissages langagiers. 

Nous étions environ vingt éducatrices. Plus que majoritairement responsables en milieux familiaux. Nous avions toutes les mêmes objectifs. Les enfants. Les soutenir et les aider dans l’acquisition du langage. Nous détenions des années d’expérience sous notre chapeau de responsables. Pour avoir œuvré en installation, ces éducatrices formées étaient des femmes compétentes. Leurs propos étaient enrichissants et leurs passions débordantes. 

Un jour, l’une d’elles nous a lancé à la blague, mais avec une certaine pointe au cœur, qu’elle était « sans‑papiers ». Qu’elle n’avait pas de diplôme en petite enfance. Qu’elle ne possédait pas ce qui la qualifiait du statut honorifique d’éducatrice. Pourtant.

Je ne connais pas son passé. Ce qui fait qu’elle n’a pas de diplôme. Mais je sais qu’elle est une maman de plusieurs enfants. Dont certains avaient des troubles de langage. Qu’elle est une responsable déterminée. Qu’elle accueille avec bienveillance ses minis à elle, chez elle. Qu’elle m’en a appris sur ses méthodes d’observation. Que ses discours étaient justes, véridiques et méthodiques. Elle en connaît des trucs, des méthodes et des astuces. Elle s’ajuste en tout point. Elle est débrouillarde et en fait bénéficier toute sa petite marmaille. Accueillir un enfant à besoins particuliers n’a plus de secret pour elle. Elle ne se rebute pas devant un défi, elle fonce tête première et le relève avec brio. Comme si son manque de scolarisation l’obligeait à toujours se justifier. À toujours en faire plus.

Cela m’avait peinée. Constater à quel point les responsables en milieux familiaux ont, malheureusement, un jugement trop facile à leur égard. Combien des années à travailler peut parfois les désabuser de ne pas être considérées. Dans un monde où la performance est à un niveau supérieur, pourquoi toujours vouloir discréditer les années d’expérience acquises sur le tas? Pourquoi cette femme généreuse d’elle et de tout ce qu’elle peut offrir pour rendre le quotidien de tellement d’enfants si agréable doit-elle se vautrer dans le silence? 

Elle répond aux critères exigés par le ministère de la Famille. Elle se perfectionne chaque année. Elle donne sans compter. Elle est exemplaire.

Je vous le dis, malgré mes connaissances, mes diplômes et surtout celui de ma technique en petite enfance, ses expériences sur le terrain valent plus que tous mes diplômes cumulés. Elle brillera longtemps dans le cœur de bien des parents. Elle restera gravée tout aussi longtemps dans la mémoire de tant d’enfants.

À toutes ces responsables qui œuvrent « sans papiers », sachez que je vois votre travail. J’entends vos discours aimants offerts à votre petite clientèle. Je ressens votre don de vous. Je reconnais que vous êtes importantes dans le développement des enfants. Qu’à votre image, vous accueillez au sein de votre milieu, de votre vie, ce que vous considérez comme très précieux.

Je vous encourage à garder la flamme en vous, à perfectionner vos acquis, car cela reste toujours stimulant d’en connaître davantage. À garder en vous la raison ultime qui fait de vous une responsable. Vous êtes indéniablement une partie importante dans le réseau des milieux de garde. Je vous honore toutes pour votre travail donné sans compter.

 

Mylène Groleau

 

Les ados et Internet

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«Moi, dans mon temps»… Je ne pensais jamais dire ça une fois dans ma vie. Du haut de mes trente-trois ans, je viens d’avoir une belle claque au visage.

Moi, dans mon temps, Internet à treize ans n’existait pas. On vivait nos expériences, une étape à la fois et surtout, dans l’intimité. Maintenant, à treize ans, les ados ont leur cellulaire. On leur en fournit un en promettant qu’une fois par mois, on va fouiller dedans pour question de sécurité… ce qu’on laisse tomber bien assez vite parce que nos enfants, on leur fait confiance.

Le cellulaire fait partie intégrante de leur vie, il est «scotché» à leur main et c’est la catastrophe si on les sépare.

Moi à treize ans, je voyais mes amies, on dansait, on chantait et on riait. On avait nos petits chums et on jasait dans le sous‑sol, collées sur eux. Sans plus.

Aujourd’hui, à treize ans, elles s’abonnent à des sites de rencontres pour adultes en mettant une fausse date de naissance. Elles voient des profils de garçons qui mentent sur leur âge et surtout, elles voient des vidéos qu’elles ne devraient pas voir, à treize ans…

Moi à treize ans, j’avais un appareil photo, on se prenait en photo lors de nos partys de sous‑sol, on s’arrangeait pour qu’elles soient belles parce qu’on devait attendre quelques jours avant de les voir. Pas question d’avoir des photos ratées ou encore des photos gênantes parce qu’un inconnu s’occupait de les faire développer! On ne voulait pas avoir honte en allant les chercher!

Aujourd’hui, à treize ans, elles font des selfies et des «shooting photos» avec le ventre à l’air à moins trente, dehors. Au début, on pense que c’est inoffensif même si ça nous rend inconfortables par en dedans, mais on les laisse faire, parce qu’on leur fait confiance.

Moi dans mon temps, j’en ai bu de l’alcool, pour essayer. Oui, même à m’en rendre malade, parce qu’à treize ans, on ne sait pas boire! Parce qu’à treize ans, on commence à faire nos expériences. On expérimente, le mot le dit, c’est normal.

Aujourd’hui, à treize ans, il faut boire de l’alcool, sinon on est out

Moi, dans mon temps, on jouait à la bouteille. Ben oui, on l’a tous fait. On embrassait notre voisin de droite pis on trouvait ça drôle. Mais c’était dans l’intimité, entre amis.

Aujourd’hui, les ados se dévoilent sur Internet, à la vue de tout le monde. «Oui, mais on s’en fout, ils ne voient pas notre visage».

Et là, notre monde s’écroule. On réalise que les ados d’aujourd’hui sont loin de ce qu’on était «dans notre temps». Oui, la vie change, elle évolue, parfois beaucoup plus rapidement qu’on le souhaiterait, mais ce n’est pas une raison pour accepter n’importe quoi. On passe pour des méchants ou des vieux dépassés qui ne comprennent rien. Mais mon cœur de maman n’arrive pas à comprendre la naïveté des ados.

On a beau leur donner une confiance aveugle, je réalise qu’il faut quand même faire la police du cellulaire de temps en temps. Juste pour les protéger, avant que ça aille trop loin. Même si nos ados trouvent qu’on exagère, même si nos ados nous disent «c’pas grave m’man», on se doit, en tant que parent, de faire notre boulot, que ça plaise à nos ados ou non.

Faites‑le, même si vous pensez que vos ados n’ont rien à se reprocher : jetez un œil à leur contenu de cellulaire… ça pourrait peut-être sauver bien des catastrophes.

Tania Di Sei