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Semaine de sensibilisation aux troubles alimentaires | Les rencontres de groupe – Texte: Kim Boisvert

Là, écoute-moi bien, j’vais te parler dans mes mots à moi, souv

Là, écoute-moi bien, j’vais te parler dans mes mots à moi, souvent un peu trop secs, pas assez huilés, mais les vrais, ceux qui t’aideront à comprendre dans quoi tu t’embarques.

Le jour où j’ai accepté que j’avais besoin d’aide, j’ai pris le téléphone et j’ai appelé à la Maison L’Éclaircie. Le premier contact, c’est quand même un bon pas de fait. Je me souviendrai toujours que je m’étais dit que là, ça avancerait, que j’aurais les trucs pour m’enlever les doigts de la gorge. J’étais excitée et nerveuse, fébrile et craintive. J’croyais que peu importe qui appelait, on avait immédiatement une place. Mais c’est pas tant ça, parce que t’sais, ça coûte des sous offrir des soins de qualité et des groupes de soir. Les subventions et les dons ne pleuvent pas. Quelques jours plus tard, j’ai rencontré Josée. Oh Josée, rien que d’y penser, j’ai envie de l’embrasser dret’ là. De l’amour en barre. Pis de l’amour dans cette rencontre, ça en prend parce que c’est là, pendant 1 h 30 que tu dis EXACTEMENT tout sur ton passé de trouble alimentaire, de pesées, d’habitudes pis toute pis toute. Et faut pas tu te censures parce que t’sais, t’es quand même là pour guérir, hein ? C’était la première fois que je m’entendais dire à voix haute :

« Je me fais vomir environ 1 fois par jour quand ça va moins bien, 2 fois par jour si ça ne va pas du tout et parfois, j’arrive à sauter des jours. Oh, et aussi, je peux manger un sac de Chipits, un demi-litre de crème glacée et un chips en 10 minutes. Tout ça la nuit, parce que t’sais, faudrait pas que mon chum s’en rende compte. Oh, et aussi je me pèse 4 à 5 fois par jour. Oh, je calcule le nombre de calories que je dépense au gym, sinon ça ne me sert à rien d’y aller. »

Et ça a continué pendant 1 h 30. À savoir ce que je m’interdisais, ce que je calculais, etc. Tu sors de cette rencontre‑là avec l’amour de Josée sous le bras et ta fierté sous l’autre. Parce que tu sais que tu dois délaisser un des deux et accepter l’autre pour pouvoir avancer, le temps que l’amour vienne de toi.

Ensuite, une fois que t’as été choisie, tu commences les rencontres de groupe, les Hunger Games commencent. La première rencontre, tu compares les autres. Dis pas que tu le feras pas, on le fait toutes. Sinon on s’entend que nous ne serions pas assises dans ce salon d’une vieille maison qui craque de partout. On se juge et on juge les autres. Alors on se juge secrètement en se disant pleins de débilités. Je me suis fait demander si c’était comme les AA. Si j’y étais déjà allée, j’aurais pu juger. Mais mettons qu’on se fie aux films, parce qu’on sait tous que les films, c’est vrai, eh bien ça y ressemble un peu, mais en beaucoup plus chaleureux. On se prend une place sur un vieux divan défoncé ou une chaise berçante tellement confortable qu’à toutes les réunions, on essaie de l’avoir, une doudou pour se réchauffer ou se cacher les cuisses dans mon cas parce que t’sais, elle, elle est bien plus mince que moi.

Et là tu te fais rentrer dedans. Tu te le fais dire, que t’es malade. Et tu échanges sur tes sentiments, ta situation. Tu vois ton trouble t’arriver en pleine face, parfois par le regard d’une autre participante. Le cœur va te déchirer de peine et de honte, parfois même de rage. Dans mon cas, ça a été violent et sauvage comme processus. Parce que j’étais pas si malade que ça, dans ma tête. Quand tu te rends compte que tout ce que tu fais, c’est pas normal, la pilule est dure à avaler. Autant que le huitième biscuit que tu t’enfiles devant le miroir en pleurant, en te disant que anyway, t’es juste bonne à ça. Mais souviens-toi que c’est dit dans l’amour, et que si les premières discussions et les activités n’étaient pas dirigées vers l’acceptation du fait que OUI, t’es malade, que tu souffres d’un trouble alimentaire, bah ça ne servirait à rien.

J’ai pleuré dans des rencontres, j’ai été soulagée d’être moins pire que je pensais dans d’autres. J’en ai fait des cauchemars parfois et à d’autres moments, j’suis arrivée à la maison en riant. Ça nous chamboule, mais ça nous fait tellement grandir ! Tu te découvriras, te retrouveras, pour vrai. Les intervenantes sont là pour toi, pour ton trouble et ton cœur. Pour t’aider et t’accueillir, et les autres participantes et toi, vous développerez une cohésion surprenante. C’est vraiment beau, de travailler ensemble contre un problème. L’esprit de groupe est vraiment fort. Laisse-toi bercer, pour une fois.

Lors des rencontres, tu dois accepter d’être toi, entièrement. Si t’as pas envie de partager, on ne t’obligera pas. C’est toi qui décides si t’es prête ou non à guérir. Mais sache qu’y’a que toi qui peux faire le chemin, et que t’es capable de le faire ce chemin. Le plus génial, c’est que tu ne fais pas le chemin seule cette fois‑ci. Ça fait toute la différence.

Ma mère nous disait : comment ça se mange un éléphant ? La réponse est bien simple, à la cuillère. Alors, prends ta cuillère, appelle à la Maison L’Éclaircie ou chez ANEB et ne reste pas seule. Pis si tu veux m’en parler en privé, contacte-moi et on va en jaser, avec autant d’amour que Josée.

K.

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P.-S. Si tu veux soutenir un de ces délicieux OBNL, vas‑y fort. Même 2 $, c’est déjà ça. Moi, ça m’a sauvé la vie.

Semaine de sensibilisation aux troubles alimentaires | l’importance de s’entourer – Texte: Kim Boisvert

Si vous me suivez depuis quelque temps ou si vous me connaissez, vou

Si vous me suivez depuis quelque temps ou si vous me connaissez, vous ne serez pas surpris d’apprendre que j’ai souffert, et souffre encore, de boulimie. J’en parle maintenant beaucoup plus ouvertement puisque j’ai appris à faire mon chemin là‑dedans, à me pardonner et à avancer. Ce n’était toutefois pas le cas il n’y a pas si longtemps.

Laissez-moi vous parler de Julie, ma Julie, qui était intervenante à la Maison L’éclaircie (Maison sœur de ANEB, à Montréal) lorsque j’ai commencé mon processus de guérison. J’ai longtemps attribué mon évolution à tout l’amour qu’elle mettait dans chacune de nos rencontres, mais je sais bien qu’elle préférerait que je dise que c’est moi qui ai fait tout le boulot. Mais ce n’est pas tant vrai. C’était clairement un travail d’équipe. J’aimerais que vous compreniez que quand on souffre d’un trouble alimentaire, un des plus gros problèmes est qu’on se sent bien seul face à ce démon, ce petit monstre qui gruge absolument tout de notre personnalité et qui remplit notre tête de noirceur. Avec Julie, je ne me suis pas sentie seule. Au début, lorsque j’ai appris qu’elle était nouvelle, j’ai immédiatement été déstabilisée. Je ne retenais pas qu’elle était une professionnelle de qualité qui avait été choisie pour ses compétences, mais simplement le fait qu’elle venait d’entrer dans la Maison L’Éclaircie. Pour moi, elle ne connaissait rien, ne me comprendrait pas, ne saurait pas où aller. En partant, je perdrais mon temps, j’en étais convaincue. Le trouble en était convaincu.

J’ai quand même décidé de me prendre en main et d’aller à nos rencontres. Ça n’a pas été long et j’ai senti en moi le changement. Je ne savais pas à quel point mettre des mots sur des maux, bien que décousus, pourrait être aussi libérateur. Elle n’a jamais abandonné, elle ne m’a jamais abandonnée, même les fois où je l’ai fait moi-même. Son écoute honnête, remplie de compassion, a fait de nos réunions des moments de paix. À travers nos heures passées ensemble, j’ai appris à partager ce trouble, sans détour ni honte, puisqu’elle me permettait d’exister avec et sans le trouble. Elle comprenait ma manière de penser, anticipait mes réactions et comprenait la violence que je m’infligeais. Elle était là pour m’aider, pas me juger. Nos rencontres étaient sereines et tumultueuses à la fois et je me souviens de chacune d’elles. J’ai créé un lien fort avec mon intervenante et sans ce lien, mon cheminement n’aurait pas été le même.

J’ai longtemps voulu régler mon trouble alimentaire seule. Mais comprenez-moi bien, c’est presque impossible. C’est un processus long qui prend beaucoup de temps et d’amour. Souvent, au début, cet amour si nécessaire n’existe simplement pas envers nous et notre corps. Ça vient par après. Avec le soutien et l’aide. Osez tendre la main. Osez appeler et prendre rendez-vous. Je vous souhaite de trouver votre Julie, celle qui vous donnera l’espoir et qui vous fera voir que c’est possible de s’en sortir.

K.

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