Échouer

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Échouer. Savoir qu’on a tout donné, mais avoir le sentiment d’échouer tout de même. Parfois, il y a de ces moments où rien ne semble bien aller. Ces moments où on nous annonce une mauvaise nouvelle par-dessus une autre, et ainsi de suite. Ces moments où il y a plus de noir que de blanc. Ces moments où une grosse boule nous tient par le ventre et nous paralyse. Ces moments où on a mal.

Pour être honnête, ces dernières années m’ont semblé remplies de ces moments… beaucoup trop souvent à mon goût. La perte d’un bébé, la perte d’un emploi, la perte de repères, la perte de gens auxquels on tient… Beaucoup de pertes, il me semble, en si peu de temps. Chaque fois que j’avais l’impression de me sortir enfin la tête de l’eau, une autre nouvelle me faisait replonger. Dix mètres sous la surface. Pas d’oxygène. Pas de masque.

Devant les autres, tout semble si facile. Ils ne voient que les bons côtés… On semble plus fort, plus enclin à la réussite. Parce que t’sais, l’herbe est don’ plus verte chez l’voisin! Les autres n’y voient que du feu. Pis maudit qu’on est bons comédiens pareil! Ça aide…

La vérité, c’est qu’il y a des passes moins agréables que d’autres dans la vie. Et qu’on était en plein dedans. Ce n’était pas une dépression majeure, ce n’était pas le désespoir sans fin, c’est juste que lucidement, on voyait bien que le pourcentage de mauvaises nouvelles était anormalement élevé depuis quelque temps.

Et là, là, un moment arrive où on se dit que c’est assez. On se dit qu’on reprend notre vie en main. On se dit que c’est le premier jour d’une belle passe. Parce que t’sais, maudit qu’on est naïfs des fois! Comme si on pouvait avoir le contrôle là‑dessus… Comme si on pouvait empêcher le mal de nous approcher. Comme si on pouvait empêcher l’inévitable d’arriver. Ben non, ça marche pas d’même!

Parce que même si on le veut très fort, on ne peut pas empêcher tous les accidents, on ne peut pas bloquer tous les cancers, et surtout, on ne peut pas éviter toutes les souffrances. Il y a sur cette Terre tellement de choses hors de notre contrôle. Et la seule chose qu’on peut vraiment contrôler, c’est d’arrêter de vouloir les contrôler.

Je me suis confiée à l’âme la plus noble et aimée qui soit sur cette Terre (elle se reconnaîtra). Je lui disais que j’en avais assez. Que j’avais hâte que le vent tourne. Que je voulais que tous nos efforts payent, maintenant, là, tout de suite. Et vous savez ce qu’elle m’a répondu? «Échouer, c’est comme accoucher. Quand tu en as vraiment assez, que tu voudrais plier bagage et revenir à la maison, que tu te dis que c’est vraiment le pire du pire que tu peux humainement endurer… Eh bien, c’est à ce moment précis que tu mets au monde quelque chose de merveilleux. Et en une seule seconde, tout ce que tu as enduré a un sens. En une seule seconde, toute cette douleur a sa raison d’exister. Parce que c’est fini. Et que le meilleur est à venir.» C’est la plus belle métaphore que j’ai entendue de toute ma vie.

Alors j’ai continué de pousser, malgré la douleur, parce que je savais que toute cette souffrance aurait bientôt un sens. J’ai fait confiance à la vie. Et vous savez quoi? J’ai bien fait de tenir bon. Parce que la vie m’a ensuite servi des occasions en or sur un plateau d’argent, et j’ai eu la vivacité nécessaire pour les cueillir au bon moment. J’ai fait des choix de vie différents et j’ai misé sur ce qui allait bien. Et j’ai bien fait.

J’ai appris que je ne pouvais pas tout contrôler. Et non, vous non plus. Alors à tous ceux et celles qui se sentent complètement vidés et qui en ont marre des mauvaises nouvelles, redressez-vous, respirez et poussez un bon coup. Ayez confiance. C’est bientôt le début d’une nouvelle vie. PROMIS.

 

Joanie Fournier