Et vint le mouche-bébé…

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Et vint le mouche-bébé…

 

Un nouveau-né, c’est tellement mignon. Lorsque nous le tenons dans nos bras à la maternité, notre admiration sans bornes nous rend aveugles. Nous ne voyons pas le chemin ténébreux que nous devrons prendre lorsqu’il sera enrhumé.

 

Et pour être enrhumé, il le sera souvent, trop souvent. Au premier gros rhume de ma première cocotte, j’ai dû consulter. Grosse fièvre. La petite pleurait beaucoup lorsqu’elle était couchée. Diagnostic : otites dans les deux oreilles. La pédiatre a prescrit un antibio et m’a recommandé de faire des toilettes nasales avec de l’eau saline et l’utilisation du mouche-bébé. J’étais ignorante au sujet du mouche-bébé. Mon âme était encore à ce moment-là épargnée par cette horreur.

 

Je me suis donc présentée à la pharmacie avec la prescription et j’ai demandé à mon cher pharmacien qu’il me montre le fameux mouche-bébé. Il se met alors à m’en expliquer le fonctionnement. Il a beaucoup insisté sur le fait qu’il y avait un filtre et que les sécrétions nasales ne pouvaient pas remonter jusqu’à ma bouche. Son insistance venait sûrement du fait que mon visage était aussi vert qu’un piment, et qu’une rivière de sueur me roulait sur le côté du visage.

 

J’avais très bien compris l’explication. Je devais mettre le bout avec le réservoir dans le nez de ma fille et mettre l’autre bout du truc dans ma bouche, et aspirer le contenu du nez de ma fille. Je me sentais glisser le long d’un chemin parsemé de « Non! Je ne vais pas faire ça! », de « Est-ce que c’est vraiment anti-morve dans la bouche? », de « J’ai vraiment pas le goût d’aspirer sa morve verte (voir même glue) » et de « NOOOOOOOONNNNNN!!! ». Le pharmacien a fini son explication avec l’argument fatal : ma fille respirera beaucoup mieux par la suite et c’est bon pour son bien-être. Je suis partie avec la petite boîte de l’engin entre les mains, toujours aussi incertaine et écœurée par le fonctionnement.

 

Une fois revenue à la maison, j’ai expliqué le tout à l’homme. Réaction de dégoût accompagnée la phrase de non‑retour : « C’est pas moi qui va faire ça certain ». On s’installe à deux pour réussir à tenir bébé pendant l’opération. Je crois que je suis passée dans une sorte d’état second la première fois que je l’ai fait. Je me suis transformée en mini aspirateur et j’ai aspiré le contenu en me disant : « C’est ta fille, cette morve est à moitié à toi… » (Je voulais une raison pour justifier ce que je m’apprêtais à faire.) J’ai rempli le petit réservoir en une seule aspiration avec une seule narine. J’ai vidé le tout, en me demandant si tous les bébés de la planète n’étaient pas connectés avec ma fille, car son si petit nez ne pouvait pas contenir autant de morve à lui seul. J’ai recommencé avec l’autre narine. En vidant le réservoir la deuxième fois, je suis revenue à la réalité et j’ai eu mal au cœur le reste de la journée. Je revoyais l’opération en flashback.

 

Avec le temps, et trois bébés plus tard, l’utilisation du mouche-bébé est devenue de plus en plus facile. Aussi facile que prendre un mouchoir et lui essuyer le nez. Il m’est même arrivé d’oublier de mettre le filtre et d’avoir le contenu du nez d’une de mes filles directement dans la bouche. J’ai vomi… et l’homme a tellement ri…

 

Cet engin de l’horreur a tout de même une grande qualité. Il soulage vraiment bébé congestionné. J’ai appris par la suite qu’il y en avait à piles pour lesquels l’aspiration ne se fait pas manuellement. Un mini aspirateur à nez. Je suis tout de même restée avec mon bon vieux mouche-bébé manuel. J’aime le risque : pas besoin de sauter en parachute pour avoir de l’adrénaline. Un bon gros rhume pour bébé et le tour est joué.

 

Mes filles ont grandi et appris à se moucher. Le mouche-bébé a lentement disparu… pour être remplacé par la douche nasale… un autre cauchemar que je vous raconterai sûrement un jour.

 

Mélanie Paradis