La dangereuse aventure de la vie

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Ah, le sentiment de sécurité! Nos sociétés modernes vouent un véritable culte au sentiment de sécurité. Nous aimons contrôler, planifier, prévoir, anticiper. Cela nous rassure. Nous accordons une importance primordiale au fait d’établir une routine stable pour notre enfant. Tout doit filer droit. C’est sécurisant pour le parent et pour l’enfant.

Et lorsqu’un grain de sable vient enrayer la machine, nous nous sentons perdus. Dépassés par les événements. Alors nous paniquons. Notre monde s’écroule. Notre illusion de contrôle s’évanouit. Notre vie s’est transformée en un gros tas de marde. Nous sommes victimes du mauvais sort. C’est « la faute à pas de chance » ou à un « mauvais karma ». Et pourtant, c’est dans ces moments de chaos que nous donnons le plus de sens à notre vie et que nous définissons qui nous sommes…

Alors pourquoi prônons-nous autant le principe de précaution?

Pourquoi martelons-nous sans cesse à nos enfants, dans les premières années de leurs apprentissages, qu’il faut être prudent ? On ne sait jamais ce qui peut arriver?! Mais que peut-il arriver? Personne ne le sait vraiment. Et quand on ne sait pas, on adopte, par défaut, le principe de précaution. Après tout, il vaut mieux être prudent.

La prudence prime sur le courage. Voilà ce que nous enseignons à nos enfants, chaque fois que nous leur répétons « Faites attention », « Soyez prudents », à chacun de leurs pas, à chacune de leurs explorations, à chacune de leurs nouvelles expériences. Mais à travers l’histoire de l’humanité, a-t-on déjà franchi des sommets, découvert des continents, donné naissance à des inventions révolutionnaires avec des expressions comme « Fais attention. Tu vas y arriver! »? Je ne crois pas qu’on puisse avancer dans la vie par excès de prudence… Attention! Je ne dis pas que la sécurité et la prudence doivent être négligées, et qu’il faut laisser nos enfants faire n’importe quoi tout le temps. Je dis juste qu’il serait bon de reconsidérer les priorités que nous fixons à nos principes.

Je m’explique. Si l’on fait de la prudence la réponse, par défaut, à tout problème, est-ce que nous n’entravons pas le développement de vie de nos enfants? Ne devrions-nous pas, plus souvent, les encourager à oser, essayer, tester leurs limites, apprivoiser leurs peurs, plutôt que de les alimenter par une attitude trop protectrice?

Je vous l’accorde : la routine est plus confortable et nous épargne bien des angoisses, à nous, simples parents. Continuer à faire ce que l’on a toujours fait, ne pas déroger du « comment faire » que l’on nous impose, nous ménager d’essayer autrement ou différemment, nous épargner des risques inutiles, prendre des décisions raisonnables, refouler notre instinct, etc.  Tout ça dans le but de protéger notre zone de confort. Celle que l’on s’est bâtie depuis notre tendre enfance, avec l’aide de nos parents, pour mieux survivre aux événements de la vie. Mais n’est-il pas ironique d’essayer de préserver notre peur de sortir de notre routine et de nos habitudes, parce que l’on nous a toujours enseigné à être prudents, mais jamais à être à l’aise dans le changement? Et puis, la vie, par nature, ne va-t-elle pas suivre son cours, que l’on soit confortable ou non avec les situations qu’elle nous présente?

Alors, pourquoi entretenir une routine trop bien établie et des habitudes de vie qui, à la longue, mettent en péril notre capacité d’adaptation et nos aptitudes à gérer les aléas de la vie?

Plus nous défendons la zone de confort de nos enfants, plus nous mettons en danger sa sécurité face à l’imprévisibilité de la vie. Pourquoi leur faire prendre un tel risque, alors?

Notre rôle de parents est de les préparer à la vie. Pas de les en prémunir.

Alors, enseignons-leur que la vie est un perpétuel changement, qu’elle est faite d’inattendus. Et que tout ce qui nous arrive n’est pas la « faute à pas de chance », un « mauvais karma » ou un alignement imparfait des planètes dans notre signe. Que nous ne sommes pas les victimes d’une conspiration des forces de la nature. Que finalement, tout ça fait partie de la vie. Que les imprévus soient bons ou mauvais, c’est dans la nature de la vie d’être fortuite et déstabilisante. Expliquons-leur que tout ce qui nous arrive, c’est seulement la vie, et ce que nous en faisons…

La meilleure façon d’apprendre à gérer l’imprévisible n’est-elle pas de s’habituer à y être confronté? Plus on prend l’habitude de faire face à des situations inopinées, plus on développe notre capacité à s’adapter, et plus, on est confortable de le faire.

Alors par prudence, encourageons nos enfants à prendre des risques dans la vie. Ne sait-on jamais, à force, ils pourraient trouver le courage de vivre leur vie…

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Vanessa Boisset