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Quand la vie t’oblige à devenir humaine… Texte : Marie-Ève Piédalue

Tu passes ta vie à savoir exactement ce que tu veux, quand tu le veux et comment tu y arriveras. Tu

Tu passes ta vie à savoir exactement ce que tu veux, quand tu le veux et comment tu y arriveras. Tu es une performante, une overachiever comme on dit. Ta vie se déroule à la vitesse grand V pendant que dans ton carnet « to do », tu coches plus vite que Flash :

–  Trouver l’homme de ta vie

–  Réussir au travail

–  Acheter la maison

–  Adopter bébé chien

–  Avoir un enfant

–  Vivre une couple de fausses couches

–  Avoir un autre enfant

–  Changer l’auto pour la familiale

–  Travailler

–  Retourner à l’université pour le fun (t’as le temps anyways)

–  Garder une saine vie de couple… parce que t’sais, ça se travaille !

–  Continuer à voir tes amies

–  Essayer de te garder en forme

–  Voyager

–  Gérer calendrier, rendez-vous, ménage, inventaires, devoirs des enfants

Et ta tête se remplit, se remplit, les pensées se mélangent.

Et tu juges, tu juges gros comme le bras ceux qui n’y arrivent pas. Ceux qui sont plus lents, ceux qui font des choix différents des tiens et ne mènent pas tout de front. Tu juges parce que toi aussi, t’as tout ça à faire et même plus et tu cours ta vie, mais tu y vas pareil t’entraîner et tu fais le gâteau en fondant avec quatre couleurs différentes entremêlées sur chacun des quatre étages de ses Ninja Turtles pour ton quatre ans et surtout, jamais il ne te viendrait dans la tête de choker ton souper de filles ou de dire non à un événement ou à un projet, parce que ça se fait juste pas… Les autres, c’est trop important. Quand tu prends un engagement… tu le tiens ! Et tu les prends tous.

Et puis un jour… PAF ! BOOM ! POW! Tu reçois un giga uppercut en pleine poire et le robot que tu étais disjoncte complètement, tu ne comprends plus. Tu ne vois pas comment c’est arrivé, tout allait si bien, tu étais en contrôle. Avoir besoin de se reposer, c’est pour les faibles, on se reposera quand on sera mort (maudit que t’as hâte que ça arrive !). Ton cerveau a juste pas le droit de te faire ça mais bon, ça a l’air que tu n’es qu’une simple mortelle et comme tu es compétitive, tu te prends THE débarque, celle comprenant toutes les options de luxe. Ton centre de contrôle, ben y contrôle à peine ta capacité à mettre tes shorts.

C’est là que tu vas comprendre petit à petit ceux qui te disaient de ralentir, de choisir tes combats, de t’écouter, de mettre tes priorités claires et plein de trucs ésotériques desquels tu riais. Tu vas comprendre que oui, tu es humaine. Un peu plus chaque jour, tu es humaine et ça vient avec son lot de déchirements internes ; choisir entre le lavage et la vaisselle pour ce soir parce que tu es brûlée, entre le souper d’amis qui te ferait tant de bien ou te coucher tôt pour avoir la force d’enchaîner les cours de soccer, gym et piscine samedi pour tes trésors. Chaque choix venant avec la fatale réalisation que malgré tes efforts, tu es incapable de tout faire en même temps. Ça vient aussi avec le fait de savoir dire non ; et ce non, c’est une des choses les plus difficiles à assumer pour toi.

Tu en viens à la conclusion que tu devras choisir tes priorités pour garder la beauté, l’essence de qui tu es. Afin d’être tout ça et plus encore pour ta petite famille, celle-là même que tu as tant voulue et que tu oubliais en la relayant au rang de tâche cochée sur ta « to do » à force de courir partout.

Toi la championne de la course, cours donc jusqu’au parc avec tes enfants qui ne demandent rien de plus que d’être avec toi et si t’as pas le temps de faire le filet de porc aux panais et poires soir, ben une fois de temps en temps, la poutine de la cantine, c’est le prix à payer pour passer du bon temps avec tes enfants et savoir pour qui tu te dois d’être humaine.

Humanoïde en formation

 

Quand supermaman accroche sa cape

Je suis fatiguée ces temps-ci. Changement de saison ? Peut-être

Je suis fatiguée ces temps-ci. Changement de saison ? Peut-être bien ! Tout ce que je sais, c’est que mon niveau d’énergie est bas, très bas. Les nuits ne sont plus assez longues. Les matins viennent beaucoup trop vite. Les fins de semaine sont une bénédiction. Je traîne de la patte.

Je voudrais pouvoir prendre un bain chaud, une coupe de vin et un bon livre m’accompagnant. Un bain sans interruption. T’sais celui où personne ne vient te rejoindre ou quand tu finis à quatre dans le bain sans trop savoir comment c’est arrivé. Ou quand personne ne vient faire son numéro deux, question d’embaumer ton moment de paix.

J’ai envie de ranger ma cape d’infirmière. Ne plus avoir à gérer le Tylenol de celle qui fait de la fièvre, l’antibio de celle qui a un streptocoque ou les pompes de la dernière qui bronchospasme à tout vent. J’ai pas envie de sortir le thermomètre aux quinze minutes parce qu’il y en a toujours une qui est bouillante au toucher.

J’ai envie de ranger ma cape de ménagère. Ne plus avoir à faire le ménage. À ramasser tout ce qui traîne dans la maison. J’ai envie d’oublier les paniers de vêtements sales qui débordent ou ceux de vêtements propres qui attendent depuis trop longtemps que je les plie et les range.

J’ai envie de ranger ma cape de cuisinière. Ne plus avoir à prévoir les repas de la semaine, pour finalement me rendre compte le moment venu que j’ai pas du tout le goût de manger ça. J’ai pas envie de consulter tous les sites de recettes possibles pour trouver de nouvelles idées et me rendre compte qu’il me manque toujours un ingrédient et qu’il faudrait que je passe à l’épicerie.

J’ai envie de ranger ma cape de secrétaire qui gère l’emploi du temps de tout le monde. Qui appelle pour les rendez-vous chez le docteur, l’optométriste, chez le chiro, à l’école, etc. Celle qui doit ensuite remanier son horaire pour honorer chacun de ces rendez-vous.

Je suis cette supermaman qui a juste besoin d’un petit moment à elle. Un pur moment de solitude, que certains qualifieraient d’égoïste (« Tu as voulu des enfants ben c’est ça… ») Me louer une chambre d’hôtel just for me. Toute seule une fin de semaine complète à prendre soin de moi, juste de moi.

Une fin de semaine pour accrocher toutes mes capes pour ne devenir que moi.

Et revenir à la maison et me rendre compte à quel point tout le monde m’a manqué…

Mélanie Paradis