Ces mots pour toi
Ce texte n’est pas signé. Mieux ainsi. Le vieux sage a gagné sur
Ce texte n’est pas signé. Mieux ainsi. Le vieux sage a gagné sur l’idéaliste impétueux qui empoigne le drapeau de la liberté d’expression. Cette liberté et ce besoin d’authenticité que je souhaite à nos enfants. Qu’ils soient heureux, libres et vrais. J’ai appris que je dois être plus que prudent avec toi. J’ai appris dans cette guerre juridique inutile et encore sanglante, que tu as déclenchée il y a quatre ans, que mes gestes et mes mots peuvent se retourner contre moi. Les braises sournoises et puissantes, qui ont brulé à jamais les ailes de nos souvenirs, sont encore actives. Je dois calmer les vents. Je ne veux plus d’incendie ravageur. Trop perdu déjà. Mais ces mots sont les miens et ils me font du bien. J’aimerais tant te les dire, pas d’un ex à l’autre mais d’un humain à l’autre. Que tu les reçoives sans peur, sans reproches et sans blâmes. Pour s’écouter et mieux comprendre certaines blessures de part et d’autre et pour prendre de tes nouvelles. La vie est fragile et courte. Il faut prendre soin de soi.
Comment a été ta route depuis notre séparation? La mienne a été chaotique. On s’est fait si mal. Trouves‑tu aussi? Quand je repense à nous depuis, je vois un remake du classique Kramer contre Kramer. As-tu trouvé la résilience? Un jour ou l’autre, la route nous offre une panne ou pire encore, un accident. La résilience, c’est comme la carte CAA, quand ça va mal, tu la veux. Et on espère reprendre notre route et se dire « Wow, j’ai survécu ». Je n’ai pas de confirmation, mais je pense être désormais abonné à vie à la résilience. J’ai des cicatrices dans la tête et sur le cœur. Profondes et visibles à l’interne. Comme celle‑ci qui me rappelle ton indifférence devant ma peine profonde de ne pouvoir exercer mon rôle paternel comme je le souhaite, égal au tien. L’égalité, tout aussi vitale que la liberté. Ou encore celle‑là qui me rappelle ta surdité volontaire devant mes cris d’urgence pour remplir un peu plus ce vide familial en moi. Et que dire de cette autre causée par ton manque de compassion alors que tu me voyais m’engouffrer dans ce sable mouvant juridique. Crois‑moi, j’essaie de donner un sens à tout ca. As‑tu aussi des cicatrices? Je ne sais plus rien de toi.
Tu m’as aussi permis d’en apprendre plus sur le lâchez ‑prise. Sur le besoin de vivre au jour le jour. Sur le besoin de devoir accepter ce qui est difficile à accepter. Le résilient sait reconnaître ses limites. J’ai eu la chance d’en parler pour m’aider. Mon psy chérant et toutes ces personnes au cœur charitable. J’ai appris à vivre le moment présent. À valoriser la qualité faute de quantité. Mention spéciale à ces femmes, mères aussi, qui m’ont rassuré dans ma paternité, mais qui ne te comprenaient pas. Elles ne comprenaient pas ton intensité maternelle hors norme. Elles ne comprenaient pas ce que tu as fait de la femme en toi. Elles me confiaient à tour de rôle des remarques auxquelles je ne savais pas quoi répondre : « Elle n’a pas de chum? », « Elle n’a pas refait sa vie? », « Ça va changer quand elle aura un chum. Ça va être plus facile pour toi. Elle aura besoin d’avoir une vie bien à elle. »
Depuis notre séparation, je me demande si tu as une vie bien à toi, une vie en dehors de nos enfants. Nos enfants parlent. Il n’est jamais question d’un amoureux dans ta vie. Je me demande comment tu fais. Je ne sais pas. Ça te regarde, bien sûr. C’est ton choix. Je te souhaite de rencontrer l’amour et de retrouver l’équilibre femme-mère en toi. C’est si important et si beau. Je te souhaite de prendre soin de toi. Que quelqu’un prenne soin de la femme en toi. Et comme le disait si bien une amie sage : « Les enfants ne nous appartiennent pas. Un jour, ils feront leur vie et hop! On se retrouve seul dans une maison trop grande. » Je te souhaite de bien faire la tienne. Je te souhaite aussi des REER amoureux. Ça aide, dit‑on, pour les vieux jours.
Voilà, c’étaient mes mots pour toi.