À toi, ma Frisky.

Du plus loin que je me souvienne, tu fais partie de mon passé.

Nos grands frères allaient à la même école secondaire et ont le même âge. On allait les reconduire au terminus avec les larmes aux yeux.

Puis nous aussi, on a le même âge.

Dans une école où il n’y avait que trois classes par niveau scolaire, on avait de fortes chances de se retrouver dans les mêmes classes.

Un jour, le prof t’a assise en arrière de moi.

Ces éléments ont dû y être pour quelque chose dans mon attachement pour toi.

On se voyait le weekend, on passait des heures à parler de tout et de n’importe quoi au téléphone.

Tu m’apprenais à taper rapidement sur le clavier, je me souviens même de la police que tu employais toujours, elle est maintenant aussi la mienne.

Tu as toujours été plus jolie que moi.

J’étais si fière de me promener à tes côtés, je me disais : « Moi, je suis SON amie! » J’étais sans doute la petite grosse laide à côté du pétard, un peu comme ton faire-valoir.

Tu attirais tous les gars, en particulier ceux qui retenaient mon attention. Mais bonne amie comme tu es, tu les as toujours repoussés.

Je suis déménagée à Montréal, mais notre amitié a continué.

On continuait à se parler au téléphone.

J’avais l’impression d’avoir laissé une partie de ma vie dans mon petit patelin.

Le temps a passé, nos discussions se sont espacées, mais dans mon cœur, ma meilleure amie était encore là.

À la veille de mes vingt ans, on a repris contact. Puis tu as, une fois de plus, été témoin du plus grand deuil de ma vie. Celui de ma fille.

Tu es venue aux obsèques pour m’offrir tes bras pour me réconforter.

Quelques mois plus tard, la cigogne avait cogné à ma porte de nouveau. Je faisais attention à cette petite vie plus qu’à la mienne.

Puis Lily-Rose est venue ensoleiller ma vie.

À son baptême, tu nous as offert, à elle et moi, une carte que je garde encore précieusement. Tu lui écrivais son histoire, un peu celle de sa sœur partie au ciel.
Dans mes pires moments, je la lis encore aujourd’hui et je pleure comme un bébé.

Tu as aussi offert de petits jouets à ma fille, jouets que je garde précieusement.

Quelques années ont passé, Olivia est apparue dans mon bedon.

Tu étais toujours proche de nous, sans l’être trop.

J’avais même, avant sa naissance, décidé que tu serais la marraine idéale pour ma petite dernière.

Tu me connaissais mieux que bien des gens de mon entourage, et je savais que s’il m’arrivait quelque chose, tu serais toujours là pour bien t’occuper d’elle et lui parler de moi.

Puis la bombe est tombée.

Quelqu’un avait fait mal à ma petite prématurée. Dix fractures avaient été infligées à un si petit bébé.

Tu as été une des seules personnes qui me croyait innocente. Tu savais qu’en moi, aucune malice ne se trouvait, en particulier envers mon bébé. Je n’aurais jamais pu m’en prendre à ma propre chair.

Lorsqu’on a trouvé le coupable, tu m’as encore épaulée.

Tu étais là pour me soutenir, pour me souhaiter bonne chance lors de mes passages en cour.

Je savais que si j’avais de la peine, tu en avais aussi.

J’ai vécu une dégringolade inimaginable.

Cette fois, tu t’es reculée, et tu m’as dit que ça en était trop pour tes fortes épaules.

Je me disais qu’en reprenant ma vie en main, j’aurais une chance de regagner ton amitié.

Malheureusement, plus de dix ans plus tard, j’attends encore.

Je passe régulièrement près de ton travail et j’ai le cœur en miettes, malgré toutes ces années.

Je t’envoie parfois des demandes d’amitié par les réseaux sociaux, et je les retire puisque j’ai peur de la réponse que tu pourrais m’écrire.

J’ai vieilli, mais mon cœur souffre toujours autant de ton absence.

Je souhaite à mes filles de trouver leur Frisky à elles. Mais je leur souhaite que contrairement à moi, elles fassent attention de chérir cette amitié aussi précieuse qu’un diamant, car une amie comme toi, ça n’a pas de prix.   

 

 

Johannie Bousquet



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