C’est pas un bon papa

Dis-moi pas ça ! Ça ne m’intéresse pas de juger le monde. Sérieusement, je me demande jamais ça, moi : « Est-ce que c’est une bonne mère ou non ? » J’ai juste croisé des parents. Des êtres humains. Certains qui rushent plus que d’autres…

Je déteste les raccourcis ! Cette espèce de paresse mentale qui pousse certains à vouloir tout catégoriser. Classer les petits carrés avec les autres petits carrés. Pas de place pour la subtilité, les zones grises, les formes floues, l’évolution… Si tu n’es pas parfaitement carré, on te balance dans la chaudière des morceaux brisés sans possibilité de rédemption.

Je refuse de juger les autres parents avec toi. Même si tu veux me flatter en me disant que, moi, je suis une bonne mère. Hey ! Je le sais ben trop que c’est un titre que tu te permettras de me retirer à la moindre erreur. Ceux qui se permettent de juger que tu es une bonne mère sont souvent les mêmes qui se permettront de juger que tu ne l’es plus !

Pourtant, un parent, ça tâtonne, ça essaie, ça se réajuste avec le temps… J’ai répondu à chaque pleur nocturne de bébé pendant un an, puis j’ai décidé qu’il était assez grand pour comprendre que la nuit, c’est la nuit. Honnêtement ? J’étais juste pu capable. Bonne mère ou mauvaise mère ?

J’ai l’air super cool d’avoir fait l’école à la maison à mes enfants pendant cinq ans, mais j’ai quand même supporté que mon aîné soit malheureux à l’école pendant deux ans avant de me décider. Bonne mère ou mauvaise mère ?

J’ai géré les anxiétés de mon fils face à l’eau pendant des années de façon douce et progressive… Enfin, à sept ans, il commence à nager ! Il a du plaisir dans l’eau. L’été suivant, à huit ans, il fait une rechute : « Maman, je ne sais plus nager. Ça me prend une veste de sauvetage. » Nenon, pas question, tu manques juste un peu de confiance, mon coco. Je décide de pousser un peu. La panique pogne. Je me suis plantée dans la difficile valse entre pousser juste assez pour dépasser ses limites et éviter le déclenchement de l’alerte générale. Bonne mère ou mauvaise mère ? 

Alors s’il vous plaît, garde pour toi ta sanctification À MOINS QUE le but soit de m’encourager dans une situation difficile. Par exemple, me souffler que je suis une bonne maman quand je peine à gérer une crise, que je patauge dans mes incertitudes ou que je viens de faire une gaffe… Là, ça risque d’être apprécié. Je comprendrai l’intention de soutien derrière ces mots qui ont beaucoup de poids.

Et je tolérerai aussi que tu catégorises un parent de compétent si tu es incapable de m’en nommer un mauvais dans ton entourage. Je t’accorderai le bénéfice du doute. C’est peut-être juste ta façon de montrer ton acceptation en général. Quand tout le monde reçoit automatiquement l’étiquette « bon parent », l’étiquette n’a plus de réelle valeur.

Mais sinon, tourne ta langue avant de me demander de me prononcer sur la qualité d’un parent, parce que la discussion ne fera pas long feu. Je ne suis pas naïve, je sais que la DPJ a des piles de dossiers de mauvais parents. Mais justement, je leur laisse la tâche ingrate de juger une personne sur la base de ses actes. Moi, je ne suis pas capable. Je vois des actes horribles, mais je ne vois pas de personnes horribles.

Elizabeth Gobeil Tremblay



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