Finis, les suivis!

Pendant des années, mes enfants ont eu des rendez-vous trrrrrrrès régulièrement. De toutes sortes. Et quand ce n’étaient pas des rendez-vous, c’étaient des appels de l’école pour que j’aille les chercher pour X-Y-Z raisons. C’était presque un emploi à temps plein.

Chaque année, le décompte des congés restants créait du stress. Chaque semaine, je devais quitter le bureau en catastrophe à cause d’une urgence. « Bye boss, je t’explique par texto! ». Juste aller à la salle de bain était devenu stressant, parce que je savais que le téléphone risquait de sonner pendant les deux minutes d’absence. Ma voisine de bureau était habituée : si elle entendait sonner, elle regardait qui appelait et si c’était l’école ou le CLSC, elle me textait pour que je revienne rapidement des toilettes. Dépêche-toi, fais pipi, ça presse!

Rentrer des congés d’une ou deux heures, le temps des rendez-vous, faisait partie de ma définition de tâche. Méchante perte de temps! Pars en courant, va chercher l’enfant à l’école, va au rendez-vous, ramène l’enfant à l’école, retourne au bureau clencher une heure de travail, sinon, tu vas dépasser le nombre d’heures auxquelles tu as droit dans ton année. Étourdissant, épuisant. Pas évident, se concentrer, quand on travaille en constante interruption. Tu as beau être une championne de la contorsion temporelle, mais ça tire du jus.

Mon calendrier familial ressemblait à celui des parents de joueurs de hockey, sauf que les pratiques et les tournois étaient remplacés par des rendez-vous. Et quand il n’y avait pas de rendez-vous, j’en profitais pour appeler pour prendre des rendez-vous, ou pour chercher de l’information pour aider mes enfants. Le cerveau constamment à ON, l’appréhension tout le temps dans le piton.

Et là, dans la dernière année, les rendez-vous se sont espacés. Des dossiers ont été fermés parce que la situation s’était stabilisée, le besoin n’était plus là. On a retiré des médicaments devenus inutiles (t’sais, quand la pharmacienne connaît ton numéro de téléphone par cœur…). On a finalement repris le dessus! Le travail acharné a fini par payer et on est rendus une famille autonome, qui vole de ses propres ailes.

J’ai encore le réflexe de rouler des yeux quand le téléphone sonne pendant le jour, convaincue qu’il y a un problème à l’école, une crise, une panique, une tête dans le bol de toilette. Mais non, c’est un collègue qui appelle, tout simplement. Ou le dentiste, pour confirmer le rendez-vous de suivi annuel, comme il le fait avec toutes les familles normales.

Je m’habitue tranquillement à cette normalité. Je me remets tranquillement de l’épuisement parental. Je retrouve ma concentration. Je soigne mes appréhensions. Je constate la baisse d’anxiété, le sommeil qui s’améliore, le plaisir qui augmente. J’apprends à avoir confiance que la stabilité persistera. Toute une reprogrammation du cerveau, ça, je vous jure!

Mais le plus beau, ce sont mes enfants. Eux aussi ont maintenant le temps de prendre du recul. Ils ne sont plus constamment sortis de l’école pour un rendez-vous ou une urgence. Ils n’ont plus à expliquer leur cas à un autre spécialiste. Ils ne sont plus toujours en train de marcher sur le bord d’une falaise à se demander de quel bord ils vont pencher. Ils prennent conscience de notre vécu des dernières années et du fait que la tête de cochon (d’autres appellent ça de l’amour inconditionnel) de leur mère les a aidés sauvés. Ils remercient ceux qui les ont soutenus, ceux qui ne les ont jamais abandonnés. Ceux qui ont fait la différence.

« Merci, maman, de toujours avoir été là pour nous. Nous aussi, on sera toujours là pour toi. » : N’est-ce pas la plus belle parole guérisseuse de la terre?

 

Nathalie Courcy



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