Petit papillon

Pour la première fois, j’ai pleuré devant ma fille.

Avant, je jugeais. Je jugeais pour ne pas essayer de comprendre, c’était plus facile. Je me faisais une carapace en pensant que rien ne m’atteindrait. Dans le silence, dans le noir, je pleurais.

Un jour, ma vie s’est transformée en cauchemar. On t’a fait mal, on t’a enlevée à moi. Toi, si petite, tu n’avais que dix semaines. Dix semaines de vie et tu connaissais maintenant l’enfer. Quelqu’un de proche s’en est pris à toi. Malgré la rage qui m’habitait, je me montrais forte. Dans le silence, dans le noir, je pleurais.

Un jour, on m’a emmenée dans une pièce froide avec un inconnu. Un inconnu qui ne cessait de me répéter les mêmes questions. Me rongeant le peu d’ongles qu’il me restait, je ne comprenais pas ce qui arrivait. Après plusieurs heures à me poser mille et une questions, j’ai lu par-dessus son épaule cette phrase qu’aucune mère, aucune blonde ne veut lire : «*** avoue avoir commis v-faits contre ****** (ma fille).»

Ce policier m’a laissée dans le silence. J’ai fermé les yeux. Encore une fois dans le noir, je pleurais. J’étais confrontée à une réalité, pire que tous les scénarios du monde.
Ma fille avait été violentée et moi, je n’avais pas vu, je n’avais pas su entendre sa douleur.

Maintenant grande fille, tu as presque six ans. Depuis plus de cinq ans et demi, je rage dans mon coin. J’essaie de voir le positif de cette histoire d’horreur, même si honnêtement, j’ai beaucoup de difficulté à y arriver.

Grâce à certaines personnes si importantes à mes yeux, je réussis à garder la tête hors de l’eau. Chaque jour, vivre sans ta présence à mes côtés est l’équivalent d’un coup de couteau au cœur. J’ai beau te serrer dans mes bras quand je te vois, j’ai toujours la sensation que tu m’en veux. De ne pas t’avoir entendue pleurer pendant ces moments de calvaires que tu as vécus.

Je ne suis pas la mère que tu voudrais, mais je sais qu’un jour tu comprendras.
Je t’aime, mon bébé.

 



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