Le secret maudit (version soft de « Le maudit secret »)
– Chut! Mamie arrive demain pour la fête de ta sœur. Il ne faut pas le dire, c’est une surprise!
Ça, c’est un beau secret. Un secret qui fait du bien. Un secret qui fait sourire le cœur. L’enfant qui le reçoit aura toute la misère du monde à le garder pour lui tout seul parce qu’il sait que les personnes concernées adoreraient vivre cette surprise tout de suite. Une telle bonne nouvelle, ça se partage!
Ça, c’est un secret qui donne le goût de danser et de courir vers l’autre.
– Chut! Ne dis jamais à personne ce qui vient de se passer. Si tu le dis…
Ça, c’est un secret maudit. Un maudit secret rempli de caca qui pue. C’est un secret qui traumatise le cœur, qui le fait brailler en cachette jusqu’à la fin des temps, que le secret trouve son chemin ou non vers une oreille accueillante.
L’enfant qui le reçoit aura toute la misère du monde à décider s’il doit le cacher de tous ou s’il peut oser le déposer dans le cœur d’une personne aimante et protectrice. La honte, la peur de trahir l’initiateur du secret ou de trahir sa propre personne. C’est un secret qui donne le goût de mourir par en dedans, de s’enfuir de soi, de s’isoler. C’est un secret qui donne la nausée.
Chaque enfant (chaque adolescent aussi… une petite piqûre de rappel est nécessaire à l’occasion) devrait apprendre la différence entre les secrets qui font du bien et ceux qui tuent. La main qui touche les fesses innocentes et la main qui s’élève sous le coup de l’alcool et de la colère ne doivent pas être protégées par le silence et la solitude. La menace n’a pas sa place, qu’elle existe en mots ou en gestes.
Chaque parent, chaque adulte de confiance devrait trouver les mots et le moment pour faire comprendre aux enfants qu’ils doivent apprendre à connaître et à écouter la petite voix en eux. Celle qui leur dit de crier, de refuser le secret, de trouver LA personne de confiance qui prendra soin de l’enfant et du secret qu’il s’est fait imposer. Celle qui leur dit « Non, ce n’est pas ta faute. » Et chaque adulte qui reçoit la confidence d’un maudit secret devrait croire l’enfant qui a osé vivre dans la vérité et défier le manipulateur.
Nathalie Courcy