Tumeur, au figuré – Texte: Audrey Boissonneault

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Te rappelles-tu son regard ? Au travers de la couleur de ses pupilles, l’on pouvait apercevoir une histoire, un livre ou même un chapitre amorcé, mais non terminé. Te rappelles-tu le sourire qui illuminait son teint pâle ? Te rappelles-tu les couleurs qui se propageaient dans ses traits de personnalité ?

Je vois, encore, ton ombre. Un peu partout, je t’imagine avec moi. J’entends ta voix m’affirmer que je ne choisis certainement pas la bonne voie. Quand je ferme les yeux, j’arrive à percevoir chaque trait qui t’appartenait. Lorsque je fixe ce point aussi, celui qui est droit devant moi. Ma vision s’embue par les larmes qui s’empressent de rouler sur ma peau déshydratée. Brusquement, ma main les secoue loin de leur origine, avant que mes yeux se referment, fortement.

La chaleur qui se propage, tout d’abord à l’intérieur de mes jambes, avant de s’attaquer à la moitié supérieure de mon corps. À la même vitesse, la colère se démène entre mes organes. Ma rage contre toi, moi ou simplement la vie en général ? Ma rage de vive. La vérité, c’est que tu es dur à suivre, un centième de secondes et ça y est : t’es déjà ailleurs. Tu ne t’en es jamais pris à moi, radicalement. Cependant, 152 nouveaux diagnostics par jour, ce qui équivaut à plus ou moins 55 600 cas par année. Alors que chaque 24 minutes, quelqu’un décède par ta faute. On en compte 61 en l’espace de 24 heures.

CANCER | N.M.

  • AU FIGURÉ
    Ce qui ronge, détruit.
  • PROVENANT DE LA FONDATION QUÉBÉCOISE DU CANCER.
    « Lorsque les cellules se multiplient de façon anormale dans un tissu sain, cela mène à la formation d’une masse appelée tumeur. Il existe deux types de tumeurs, les bénignes et les malignes ou cancéreuses. »

Je n’arrive pas à comprendre le pourquoi du comment. En fait, on restera avec nos questions sans réponse, avec nos peurs, j’imagine ? J’aimerais juste te prendre, t’arracher tous les droits que tu as volés et que tu gardes en réserve pour ta prochaine victime. J’ai de la chance de ne jamais être tombée face à face avec toi, mais j’en connais plusieurs qui ont fait partie des calculs, des décès, et quelques-uns auront été dans les statistiques pendant quelques années. D’autres auront été en rémission, puis il y a ceux à qui tu as arraché la vie.

ARTWORK BY: @sreejithpa

Pourtant, j’ai l’impression que si l’on devait te décrire, je n’utiliserais aucune des définitions que l’on voit ci-dessus. T’avoir dans nos vies, de proche ou de loin, c’est perdre pied. C’est te regarder couler dans les systèmes et dans les organes de chaque personne que l’on côtoie. C’est facile de te repérer chez nos pairs. Tu laisses ta trace, t’aimes qu’on te remarque. Tu es collant, fatigant pis tu ne lâches jamais l’affaire. Je n’aurai jamais de réponse à mes questions, je vais vivre avec, faut croire. Je te demande une affaire, d’habitude je ne supplierais jamais quelqu’un ou quelque chose que je hais, mais avec toi, je vais prendre une chance. Tu m’en as déjà enlevé, tu as déjà fait assez de mal. Je veux juste que tu prennes du recul, que tu t’éloignes puis que t’arrêtes de t’appuyer sur 152 personnes chaque jour, parce que sincèrement, tu n’es pas seul à avoir besoin de t’appuyer pour te reposer.

Juste va t’en, c’est ton tour, maintenant.

 

Audrey Boissonneault

 

 



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