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La mère poule

Oui

Oui, je suis une maman poule et je l’assume pleinement. Dites merci à mon anxiété. Telle une vraie maman poule, je dois toujours avoir mes enfants à l’œil. Je porte une attention particulière à ma couvée. J’aime me sentir en contrôle de tout, ça me calme. Je vous entends déjà dire que je dois couper le cordon. Je vous jure que j’essaie très fort.

Mais là, c’était impossible. Mes deux plus vieilles ont eu une invitation à une fête d’amie. Jusque-là, tout allait bien. C’est lorsque j’ai vu l’heure de la fête, de 18 h 30 à 11 h. Oui, le lendemain matin! Mes filles allaient découcher. Une première, pour elles et pour moi. Si je leur accordais la permission. Et j’ai succombé, j’ai dit oui.

Jusqu’au fameux soir, je me trouvais bonne. Je gérais bien. Mais le soir venu, c’était une tout autre histoire. Premièrement, j’ai envoyé papa les reconduire. Pourquoi? Parce qu’en route, j’aurais trouvé mille et une raisons pour ne pas les laisser dormir là. Je me connais, j’aurais pu aller jusqu’à inventer un fantôme vivant dans la maison. Mes filles très froussardes et anxieuses auraient choisi « par elles‑mêmes » de ne pas y dormir. Avant de me coucher, j’ai même déposé le téléphone sur la table de chevet dans l’espoir qu’il sonne parce que mes filles avaient changé d’idée.

Alors je me suis retrouvée en pleine nuit, à regarder les heures s’égrainer. À en vouloir à l’homme de si bien dormir, malgré l’absence de nos filles, malgré mon angoisse. Je me suis fait les scénarios les plus horrifiants. Si jamais elles font un cauchemar. Qui les consolera? Finalement, je ne les connais pas, ces parents-là. Ce sont peut-être des trafiquants d’enfants. Lorsque j’arriverai demain matin, il n’y aura plus personne dans la maison et je ne reverrai plus jamais mes filles. Qui sera là? Peut-être y aura-t-il un pédophile. Et si, et si, et si.

J’aurais voulu pouvoir secouer le sablier du temps, dans l’espoir de le faire passer plus vite. Que la nuit cède enfin sa place au matin. J’ai déjeuné avec un nœud dans l’estomac. J’attendais que l’horloge affiche enfin 8 h.

Heureusement pour moi, nous avions quelque chose de prévu le dimanche, un voyage à Québec. Nous avions donc averti que nous passerions plus tôt que le fameux 11 h.

8 h. J’ai sauté dans la voiture. Suivre les limites de vitesse était un véritable combat. J’ai stationné la voiture. La fenêtre de la maison était ouverte. J’ai entendu les cris de joie et de plaisir de mes filles. Quel soulagement! Elles étaient toujours vivantes.

Je les ai vues sortir de la maison en courant. Elles sont venues vers moi avec le regard brillant, en me disant : « Maman, on a réussi à dormir toute la nuit ». J’ai compris qu’elles avaient leur petite appréhension. Que je leur avais apprise. Une belle leçon. Elles sont capables de vivre, un peu, sans maman.

J’ai eu un petit pincement au cœur. J’ai dû accepter de les voir grandir. J’ai dû accepter qu’elles aient de moins en moins besoin de moi.

Est-ce que la prochaine fois sera plus facile?
Je vous jure que non.

Mélanie Paradis

 

Mon fils ne se laisse plus gérer par l’anxiété; il danse avec elle

Je dis souvent à la blague que si vous cherchez dans le Larousse la

Je dis souvent à la blague que si vous cherchez dans le Larousse la définition du mot anxiété, vous y trouverez le nom de mon père. Je le dis sans méchanceté et avec une certaine gratitude. Oui absolument, de la gratitude, car sans ce fait, je serais probablement intransigeante avec les gens qui en souffrent et mon empathie serait assurément moindre.

Je suis toujours peinée de voir à quel point cet état n’est pas reconnu au même titre que n’importe quel autre état physique dont nous pourrions être atteints. Peinée de voir tous les préjugés associés…

Toute jeune, j’ai expérimenté cet état à tellement de reprises. La plupart de mes actions étaient soigneusement choisies pour éviter des sorties, actions, événements qui me causaient du stress. Vous savez, même avec les becs du 31 décembre à minuit, j’en ai passé du temps à la toilette, le temps que ce soit terminé. Me réveiller la nuit et imaginer une troupe de voleurs sanguinaires parcourant ma maison…pour un plancher qui a seulement craqué légèrement… Majoritairement non réaliste comme peur et non fondées, mais tellement réelles dans ma tête d’enfant et d’adolescente.

J’ai appris parfois par moi-même, parfois avec de l’aide extérieure, à gérer mes émotions, à les vivre au lieu de les fuir et à repousser mes limites. Dommage que fréquemment, celles-ci m’aient empêchée de faire des choix tout à fait en accord avec mon être. Par exemple, j’aurais adoré être journaliste, mais la seule pensée d’étudier à l’extérieur m’en a empêchée, la peur de manquer mon coup était plus forte que tout. Avec ma personnalité actuelle, je n’aurais absolument pas hésité. Dommage, mais parfait en même temps, puisque j’ai emprunté d’autres chemins qui m’ont permis d’être un humain empathique, pour qui le laisser être est capital. On dit qu’avec l’âge vient la sagesse et je confirme que c’est tout à fait vrai.

Ensuite est arrivé le premier plus beau cadeau de ma vie, mon fils. Oui, grâce à lui, par qui la tradition anxieuse s’est perpétuée, un mini-moi de mon père, j’ai tellement appris, tellement compris, tellement réfléchi. Je n’ai pas été parfaite, j’ai été moi, toute là pour lui. Grâce à lui, j’ai compris mon propre passage. Je nous ai fait confiance à tous les deux, convaincue que cet enfant m’était destiné par sa sensibilité jumelle à la mienne (dès sa naissance: très sensible aux bruits, mouvements brusques et stimulations soudaines. Très affectueux et aimant être dans son univers personnel; préférant jouer à la maison que d’aller chez les autres.).

D’une grande intelligence perspicace, on ne pouvait pas lui en passer de petites vites comme le veut l’expression. Il a gagné de nombreuses médailles d’or à l’invention de scénarios catastrophes, du genre : bac de poubelles dans la rue, vu de loin, qui devient tout à tout coup un agresseur à la forme humaine à trois têtes. Le nombre de fois où je ne me suis même pas imaginé ce qui se passait dans sa tête et où j’aurais voulu comprendre avant, partager son sentiment. Mon cœur de mère a souvent eu mal pour lui. Pour ses six ans, nous lui avons offert un chien, une des meilleures idées de ma vie; la zoothérapie, ça fonctionne! Ce chien a été la meilleure oreille poilue au monde!

Tout juste avant son adolescence, les allergies alimentaires sont entrées dans sa vie, tellement ce dont on n’avait besoin pour ajouter au stress… SUPER SARCASME ICI! Elles lui ont créé de nombreuses peurs, pas toujours rationnelles, mais bien réelles pour lui. Il a pratiqué un niveau d’évitement catégorie élite à ce sujet, et tranquillement, il a apprivoisé à sa façon.

Le gros du travail, ce n’est pas moi qui l’ai fait. Non, c’est lui qui a accepté de se faire aider, pas toujours de gaieté de cœur, mais il l’a fait; il pourra toujours s’en féliciter! La tentation de faire à sa place, de prendre les rênes a souvent été présente, mais j’ai résisté. J’ai toujours su au fond de moi qu’avec tout l’amour que j’ai pour lui, c’était le meilleur chemin, le plus beau cadeau à lui faire pour la vie. J’ai développé une patience et une résilience dont je ne me croyais pas capable avant, et c’est tant mieux.

Merci à mon fils pour ce cadeau. Il en a passé des étapes et il a eu de merveilleuses personnes sur sa route: sa famille, ses amis, des spécialistes, des professeurs qui l’ont bien compris, des directeurs d’école présents comme je n’aurais pas osé exiger d’eux. La vie est bien faite, parfaite avec tous ses détours !

Aujourd’hui, il ne se laisse plus gérer par l’anxiété; il a appris à danser avec elle! Parfois, c’est un petit set carré, parfois c’est un beau tango. L’important, c’est de persévérer. En fait, on sait tous les deux que nous pouvons franchir tous les défis; la vie nous l’a appris et on ne peut que faire confiance. Il y a parfois des bas, qui sont de moins en moins bas, et des hauts, qui sont de plus en plus hauts.

Je suis très fière de mes deux enfants, très fière de mon ainé, et je suis une maman comblée de les avoir dans ma vie. Ils sont ce qui m’a appris à me tenir debout, à écouter mon instinct de mère et d’aller jusqu’au bout pour eux. Épatant tout le merveilleux qui nous attend à tout moment lorsqu’on y croit!

Carpe Diem !