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La prématurité, rien ne nous y prépare – Texte : Annick Gosselin

Une grossesse est un événement heureux. Rapidement à son annonce,

Une grossesse est un événement heureux. Rapidement à son annonce, on se met à imaginer le sexe du bébé, les prénoms, la décoration de la chambre, les premiers petits vêtements. On se met à lire tous les livres sur le déroulement de la grossesse, l’accouchement et l’allaitement. On suit des cours prénataux, on prépare un plan de naissance et on rédige une liste de ce qu’on veut apporter à l’hôpital. Bref, dans notre tête, on a un plan A : on accouche, on a un beau bébé à cajoler et on revient à la maison avec notre bébé au bout de deux jours.

Mais qui nous parle des plans B-C-D? Qui nous prépare mentalement à affronter une naissance prématurée et tout ce qui vient avec? Personne! La dure et cruelle réalité te frappe de plein fouet quand tu as les hormones « dans le piton ». 

Personne ne te parle de la césarienne d’urgence, du fait que tu ne pourras ni voir ni toucher ton bébé quand il sortira de ton ventre, que tu seras inquiète de son état plusieurs heures, car les médecins sont rapidement partis avec ton petit trésor, que ton conjoint l’a suivi et que tu restes seule avec la peur au ventre.

Ton ventre, il est maintenant vide et tu as la sensation de t’être fait voler ton bébé. Tu pleures, tu ne comprends pas pourquoi ça t’arrive. Tu te sens coupable, tu te demandes ce que tu as fait de mal pour que ton enfant naisse prématurément. Et tu n’as aucune réponse. 

On te dit rapidement que tu dois tirer ton lait, car ça aidera ton bébé. Mais tu n’as pas envie ; ce que tu voulais, c’était allaiter et surtout avoir le contact si doux avec ton bébé. Tout ton beau plan ne s’est pas réalisé, il te reste seulement des miettes d’inquiétude et de déception. 

Les heures passent et tu ne peux pas prendre ton bébé. Tu le vois, si petit et si fragile dans son incubateur, il est si loin, inaccessible. Tu voudrais le protéger, le tenir contre toi, mais c’est impossible. On essaie de te rassurer, mais ça non plus, ça ne fonctionne pas. 

Tes valises n’étaient pas prêtes, ton bébé n’a pas de vêtements et le peu que tu as sera clairement trop grand. C’est impossible pour toi de gérer cela, tu dois déléguer cette tâche, et encore une fois, ça te brise le cœur, car tu avais envie de magasiner toi-même les premiers vêtements de ton bébé. 

Et vient le temps où tu dois quitter l’hôpital, seule, le ventre et les bras vides. Tu as l’impression que ton cœur a été arraché. Tes prochains jours, semaines et même mois seront les mêmes : faire des allers-retours entre l’hôpital et la maison. Doucement tu te fais à cette routine, mais tu es comme figée dans tes émotions, tu ne réussis qu’à faire ce que tu dois faire, car tu dois le faire. 

Quand enfin vient la première fois où tu peux prendre ton bébé, tu ne peux que pleurer de joie. Ce moment tant espéré et imaginé pendant tes nuits sans lui. Tu voudrais le garder dans tes bras et t’enfuir avec lui à la maison, mais non. Pour son bien, il ne faut pas le prendre trop longtemps, il ne lui faut pas trop de changements à la fois. Donc tu retournes, soir après soir, chez toi avec ce grand vide. Tu te réveilles la nuit en pensant à ton bébé, tu appelles à l’hôpital pour savoir comment il se porte. Le lendemain matin tu cours le voir, il n’y a plus rien qui compte sauf de voir ton bébé aussi souvent que possible. 

Quand enfin on te dit que ton petit trésor peut sortir, étonnamment, c’est très déstabilisant. À la maison, on n’a plus les machines qui sonnent s’il arrête de respirer ou qu’il désature. Finalement, l’hôpital avait quelque chose de rassurant. 

Il faudra maintenant apprendre à vivre avec cette insécurité. Certes, la joie d’avoir enfin ton bébé avec toi en tout temps te remplira de bonheur. Mais tu n’auras pas la légèreté des premiers moments que tu aurais eus avec ton bébé s’il était né à terme. Tu resteras, probablement toute ta vie, avec une certaine amertume de t’être fait voler ton instant qui se devait d’être magique, celui de la naissance de ton enfant. 

Il se peut aussi que ça te prenne plusieurs mois à digérer tout cela. Il est possible que psychologiquement, tu aies besoin d’aide, car avoir un bébé prématuré, ça rime souvent avec un post-partum. Si cela arrive, il ne faut pas te sentir coupable, c’est juste plus que ce que n’importe qui peut tolérer comme douleur psychologique. Assure-toi d’être bien entourée et d’aller te chercher de l’aide. 

Je le répète, personne ne te prépare à vivre cela. Est-ce qu’on devrait davantage parler de cette possibilité dans les livres de grossesse et les rencontres avec les gynécologues? Je pense que oui. Il ne faut pas être alarmiste, mais cela arrive relativement souvent et ce serait bien que les mères puissent se préparer à cette éventualité psychologiquement. Savoir qu’elles peuvent avoir du soutien et que tout finira par bien aller. Tu finiras par aller mieux et ton bébé grandira en santé. 

Mais en attendant, vivre la prématurité sans y être préparée, c’est juste trop. Trop gros et trop difficile. 

 

Annick Gosselin

Celles qui savent

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Un petit plus sur un bâton. Un cœur qui bat. Une silhouette parfaite sur un écran d’hôpital. Quand on tombe enceinte, pour la toute première fois, on ne le sait peut-être pas encore, mais on se situe entre deux mondes. On est une pas-tout-à-fait-maman. Une maman… qui ne sait pas encore. Parce que quand on met un enfant au monde, là, et seulement là, on bascule du côté de «celles qui savent». Et tout ce que nous avons pu observer chez les déjà-parents et qui nous semblait étrange jusque-là, tout ça, prend subitement un sens incroyable. Parce que maintenant, on sait.


On sait ce que ça fait d’accoucher. Peu importe la manière. Maintenant, on sait. Parce que même si on avait assisté à des accouchements en personne, et même si on avait lu tous les livres sur le sujet, je vous assure qu’on ne savait pas encore.


On sait qu’il est possible de passer des nuits blanches, des jours et des jours sans dormir… des semaines et des semaines sans dormir… des mois et des mois en carence totale de sommeil. Pas juste parce qu’on doit répondre aux besoins d’un petit être totalement dépendant de nous, mais parfois tout simplement parce qu’on passe des heures en parfaite admiration à regarder ce petit être dormir paisiblement.


On sait que les sujets de conversation qui nous passionnent peuvent parfaitement passer de la couleur d’une selle, à sa consistance et à sa fréquence… Et on sait que parler de caca peut tout à coup nous rendre très fières, oui, sans aucune honte.


Il fut un temps où on s’habillait à la dernière mode des magasins, et où on prenait le temps de se coiffer et de se maquiller au réveil. Et tout à coup, on sait à quel point tout cela est futile. On sait qu’on retire toute la fierté du monde à habiller et à coiffer ce petit être plus que soi-même.


Avant, on pensait qu’une paire de souliers et un sac à main suffisaient pour pouvoir sortir de la maison. Maintenant, on sait que toute sortie est impossible sans une valise contenant un nécessaire de survie, des vêtements pour une semaine et le magasin Costco au complet. J’exagère à peine.


On pensait qu’on savait bien manger. Jusqu’à ce qu’on révise notre guide alimentaire, pour être sûre de donner à notre enfant tout ce qu’il faut. Jusqu’à ce qu’on cuisine des purées, sans sel, sans sucre, et dans l’ordre indiqué sur le guide.


On pensait qu’on connaissait bien la vie et tous les petits trucs du quotidien. Maintenant qu’on a mis un être humain au monde, on sait qu’on ne connaissait rien à la vie. Rien du tout.


On ne savait pas à quel point un sourire pouvait nous faire fondre. On ne savait pas que le rire de notre bébé nous ferait pleurer à coup sûr. On ne savait pas que la Terre arrêterait de tourner et que le temps se figerait lors de ses premiers pas. On ne savait pas qu’un bisou donné de bon cœur, aussi baveux soit-il, pouvait nous inonder d’une émotion si forte.


On pensait qu’on ne se souvenait plus d’aucune chanson. Puis tout à coup, notre cœur se rappelle comment chanter. Il se rappelle comment offrir les mots les plus précieux à notre enfant pendant qu’on le berce le soir.


On ne savait pas ce que c’était l’amour. On pensait qu’on savait. Mais on a appris jusqu’où il était possible d’aimer. On a réappris ce qu’était l’amour et le bonheur.


On a appris que le plus beau cadeau de la Terre, c’était nous-mêmes qui pouvions nous l’offrir. Peu importe les trophées gagnés et les diplômes obtenus, on se couche maintenant le soir en se répétant qu’on a offert au monde la plus belle chose qui soit. On a créé un être humain, et c’est ça, le plus bel accomplissement d’une vie. Parce que maintenant, on sait.

 


Joanie Fournier

Quand ta fille passe… pour ta soeur !

 

 Oui, je suis cette f

 

 Oui, je suis cette fille-là!

 

Celle qui a subi les regards désapprobateurs parce qu’elle était enceinte à dix-neuf ans.

Celle qui s’est fait dire :

-Oui, mais ta carrière ?

-Ma quoi ? J’en ai pas… Elle n’est même pas commencée! Ça règle le problème!

T’sais quand tu n’as pas la même vision que les autres…

Celle qui se fait regarder drôlement quand je leur dis que ce n’était pas un accident.

Celle qui a été accueillie, lors de la première rencontre de parents, par des regards étonnés qu’elle traduisait par « ce n’est pas une rencontre de famille, c’est une rencontre de PARENTS. ».

Je suis la petite fille qui a toujours voulu un enfant à vingt ans. Je suis celle qui voulait grandir avec son enfant. Celle qui se disait que la vie serait plus facile en ayant un enfant jeune. Celle qui était naïve, certes, mais qui n’a pas eu peur de s’affirmer. Je suis celle qui vivait en appartement depuis un bout déjà, celle qui était autonome, qui allait au Cégep et qui travaillait en même temps.

 

 

Ma fille, elle était voulue. Point.

Je suis celle qui n’a PAS mis sa vie sur pause car je suis celle qui a décidé d’ajouter un complément à sa vie. Je ne suis pas celle qui s’est privée de faire des activités et je ne suis pas celle qui s’est privée de faire des soupers entres amis. Mon bébé, je l’amenais partout avec moi. Ma fille dormait partout, elle était habituée de voir des gens, d’aller au restaurant et chez des amis. J’amenais son parc et hop, à l’heure du dodo, le tour était joué! J’étais une maman jeune mais qui savait s’occuper de son bébé, malgré tout.

 

Onze ans plus tard…

 

Je suis ENCORE celle qui se fait regarder drôlement, parce que ma fille fait presque ma grandeur.

Je me fais parfois dire :

-Hein! C’est ta fille ? Wow, je pensais qu’elle était ta sœur!

Ça me fait sourire. Sourire parce que ma fille est magnifique; elle grandit bien et elle est bien élevée. Et, OUI, les gens sont surpris. Et ça aussi, ça me fait sourire.  Ils s’attendaient à quoi ?

 

Ce n’est pas toujours facile, je l’avoue…

 

Élever une ado, quand on a encore notre cœur d’enfant, ça fait en sorte que les flammèches arrivent vite. Parfois TROP vite.  Mais je suis celle qui est capable de prouver aux autres que ma fille n’était pas une erreur de parcours et qu’elle ne le sera jamais. Je suis celle qui est capable d’être fière du chemin parcouru, celle qui a surmonté des montagnes et celle qui les déplacera pour elle. Je suis celle qui combat à tous les jours les jugements, les critiques et les opinions des autres. Je sais ce que je vaux et je sais ce que je fais pour ma fille.

On a chacun son parcours de vie. Moi, j’ai choisi le mien, j’ai trente et un an, je suis maman d’une préado de 11 ans et je suis fière d’entendre ma fille dire à ses amies :

« Moi, ma mère est cool! »

 

Tu aurais été un grand-papa si précieux

J’ai toujours su que je voulais des enfants. C’était fort, je l

J’ai toujours su que je voulais des enfants. C’était fort, je le sentais à l’intérieur de moi. Cependant, mes histoires d’amour étaient catastrophiques. Alors, j’ai décidé que j’aurais des enfants quand même.

 

J’allais fonder une famille toute seule

Je me disais que mes enfants n’auraient pas de papa, mais qu’ils auraient de magnifiques modèles masculins, surtout grâce à mon père qui serait un grand-père précieux.

 

 Mais il n’en a pas été ainsi… 

J’ai rencontré mon futur mari sur Tinder (oui, Tinder peut fonctionner) et il est un papa merveilleux. Ce qui est pour le mieux, car mon idéal était de fonder une famille à deux, de pouvoir partager les joies et les défis de la vie familiale avec lui. Je croyais sincèrement que ce n’était pas pour moi et je suis très heureuse de ce changement de plan.

Entre mon idée d’avoir un enfant seule et la rencontre de mon chéri, mon père est décédé. Je ne lui avais pas parlé de mon projet. J’avais peur qu’il croit que je ne considérais pas important la présence d’un papa dans la vie d’un enfant. Alors que c’est tout le contraire, que c’était en grande partie parce qu’il était un papa si bon et si présent et qu’il serait un grand-papa extraordinaire que j’ai pu faire ce choix.

 

Aujourd’hui, je pense souvent à mon père

 

Une partie de moi aime imaginer qu’il connait mon fils, qu’ils se sont rencontrés avant sa naissance, qu’il l’a bercé et qu’il vient encore le voir parfois. Du moins, j’en rêve et ça me fait du bien d’y croire.

Ma mère et moi nous disons souvent à quel point il aurait adoré être grand-père, quelle blague ou quel commentaire il aurait fait. Nous sommes certaines qu’il aurait versé une larme en prenant son petit-fils pour la première fois, qu’il aurait joué avec lui, qu’il aurait su le réconforter facilement; il était si bon avec les bébés, qu’il lui aurait fait faire des culbutes et qu’il lui aurait donné des « vitamines » à profusion (il nommait les câlins ainsi).

Ce sont de beaux souvenirs qui remontent, nous y pensons et en parlons avec joie. Je pense souvent à ce qu’il me dirait, ce qu’il penserait. J’aime que mon fils me permette de penser souvent à mon père avec amour et douceur.

D’un autre côté, ça me rend triste et nostalgique de savoir que mon bébé ne connaîtra pas son grand-père. Je me demande comment je réussirai à lui transmettre un peu de son grand-papa même s’il ne pourra jamais être dans ses bras, découvrir ses goûts musicaux, jaser de super héros, apprivoiser son humour et argumenter avec lui.

J’ai l’impression que je ne trouverai jamais la réponse, mais j’espère que mon père continuera de m’habiter et qu’à travers moi, ma mère, mes sœurs et mon frère, il aura aussi un impact sur son petit-fils.