Tag coronavirus

Ode à tous les travailleurs

Je le sais…

Mars 2020, vendre

Je le sais…

Mars 2020, vendredi 13. Les écoles ferment. L’état d’alerte est envoyé à travers le Canada. Le monde entier est paralysé. La pandémie a pris le dessus sur nos habitudes de vie.

C’est avec la peur au ventre que toi, tu te lèves tous les jours pour aller travailler. Tu as jugé nécessaire de contribuer au bien-être de la société. Tu t’exposes au danger pour exercer ton devoir de citoyen. Pour subvenir aux besoins de ta famille. Pour aider ton employeur à garder le cap sur son chantier. Pour approvisionner la population. Pour soigner les malades. Pour garder les enfants de ces gens qui s’exposent tous les jours. Pour répondre aux appels d’urgences. Pour reporter tous les rendez-vous planifiés dans divers services. Pour aider, tout simplement.

Je le sais que tous les matins, ça te tiraille par en‑dedans. Que toi aussi, tu aimerais rester chez toi, à l’abri de ce foutu virus. Suivre les nouvelles, profiter du temps de repos exigé avec ton enfant. Respirer. Loin du danger. Mais ta réalité est tout autre. Tu y vas une journée à la fois. Une heure à la fois.

Je le sais que tous les matins où tu déposes ton enfant dans un service de garde d’urgence, tu le fais à contrecœur. Que lorsque tu quittes la maison, tu te fais rassurant, en disant que tu prends toutes les précautions nécessaires. Mais je le sais aussi que tu es inquiet. Je le sais que tu espères croiser des gens consciencieux dans ta journée. Des gens qui, eux aussi, respectent les règles gouvernementales. Mais je le sais que ce ne sont pas tous les gens qui le font. Malheureusement. Pis je le sais que ça te fâche. Avec raison.

Je le sais que ça fait juste commencer et que tu es déjà fatigué. Le stress physique et psychologique est constant. Je le sais que tes mains n’en peuvent déjà plus. Cette surdose de lavage de main te donne la nausée. Tes mains brûlent. Ça fait juste une semaine. Ta tête est pleine. Tu cours pour toi‑même subvenir à tes besoins en fréquentant les lieux publics. C’est toi qui t’exposes constamment pour protéger ta famille. Mais je sais aussi que tu le fais avec tout ton cœur. Que tu n’y changerais rien, dans les circonstances.

Nager dans l’inconnu. Un inconnu si peu rassurant, c’est effrayant.

Je veux que tu saches que nous sommes tous derrière toi. C’est beau de te voir aller malgré cet état d’urgence. C’est beau de voir des gens avec tant de dévouement dans un monde si nombriliste. Tu me donnes espoir. Espoir que cette pandémie fera réaliser beaucoup de choses aux gens. Que l’entraide, l’amour et la résilience dont tu fais preuve donneront envie aux jeunes et aux moins jeunes de s’ouvrir sur le monde.

Pour toi, le caissier, le transporteur, l’adjoint, le journalier… merci. Des métiers souvent peu valorisés. Vous êtes des gens de cœur. Vos emplois se doivent d’être enfin reconnus. Dans cette tragédie, nous réalisons enfin l’importance de chaque emploi. Tous aussi importants les uns que les autres.

À tous les travailleurs acharnés, on vous envoie une grosse dose d’amour et de courage.

Ça va bien aller.

Maggy Dupuis

 

J’ai pleuré en faisant un pain aux bananes

La grande avait la bouche pleine de sucre, la petite les deux mains

La grande avait la bouche pleine de sucre, la petite les deux mains dans la farine. La cuisine était un foutoir total. Ma tête aussi. Pleurer moins fort que le bruit de la mixette était la meilleure option que j’ai trouvée.

Je voulais travailler les fractions dans un contexte réel. J’avais des intentions et des attentes. Des bananes et des pépites.

Je me suis retrouvée à faire la vaisselle seule. Mais pourquoi dans ma classe de 26, je réussis à faire une soupe géante d’Iroquoiens et que j’ai tellement de volontaires pour laver et essuyer que je dois piger? C’est un secret bien gardé après le secret de la Caramilk ou quoi? Je sais par contre pourquoi les bananes congelées de novembre 2019 me rappellent ma tendance à procrastiner. Ça, c’est d’une évidence.

Pendant que le four cuisait ma déception, je suis allée nettoyer mon mascara. Mais pourquoi je me maquille pour faire un foutu pain aux bananes? Je suis en isolement total. En attente du résultat du test de la COVID-19 de la petite voisine que j’ai gardée le jour de la tempête. Je me regarde dans le miroir. Les doutes, ça fait vieillir.

Je n’ai pas voulu que tout soit parfait. 2019 me l’aura appris. J’ai voulu donner ce que je croyais le mieux. J’ai voulu être ce parent efficace comme Thomas Gordon le décrit dans son livre. J’ai voulu me reprendre…

Depuis une semaine, j’essaie de créer une routine sécuritaire pour les filles. Des choix, de la liberté, du temps, du plaisir dans l’incertitude. J’ai voulu me reprendre. Que tout ce que je donne à mes élèves depuis vingt ans, l’énergie, les sacrifices et les compromis, rejaillisse enfin sur ma famille.

J’ai voulu me reprendre en faisant de ma table de cuisine un quartier général, un bureau géant, et de la fenêtre, un tableau. J’ai voulu recréer la classe. J’ai voulu aider dans ma posture de prof.

Mais ça reste la maison, avec le chat qui marche sur la table. Et je reste la maman qui fait du pain aux bananes avec du mascara pas waterproof.

Je ne suis plus dans ma classe. Je n’y remettrai probablement pas les pieds avant septembre. Je vis une forme de deuil. J’avais des projets pour mes élèves que je suivais depuis deux ans. J’aurais dû le faire, ce feu dans la cour pour faire cuire du pain banique avec les parents. J’aurais dû les accrocher les cabanes dans le boisé. Les mésanges ne savent rien de la pandémie. Elles ne sont pas confinées.

Dans ma classe extérieure, j’étais utile. Pas comme dans ma cuisine. J’avais le sentiment de transmettre le goût d’apprendre. C’était ma plus grande mission. Les missions héroïques tombent dans les cuisines. Les projets nobles font place aux dictatures de la gestion du temps d’écran. Je me sens inutile pendant que mon chum travaille au sous-sol pour trouver des solutions pour sa compagnie. Il s’adapte, collabore et crée. Je l’admire. Pendant que la fille de la pharmacie place des Tylenol sur les étagères, que l’emballeur emballe le souper de la famille de cinq, que la femme teste des gens dans leur char et que tous les autres font des heures supplémentaires. Je les admire. Je souhaite presque que les « mesures de guerre » viennent me chercher pour contribuer.

J’ai voulu me reprendre… Mais je passe à côté de ce qui compte, on dirait. Il faudrait me déprogrammer. Nous déprogrammer. La pédagogie sociale, c’est quoi sans les autres? J’ai perdu mes repères, mes projets. Mes filles aussi ont perdu leurs repères. Elles ont dû dire au revoir à leur papa hier, sans trop savoir quand elles le reverront. La garde partagée n’est pas recommandée en temps de pandémie. Surtout quand un des deux parents travaille. Je n’ai jamais été maman à la maison. Je les admire, les mères pleines d’espoir et de force. Mes grands-mères. Je les admire.

Je suis née pour aider. Pour créer des liens. Je ne vis pas sans les autres. J’ai besoin des autres. Mes filles aussi. Les autres, c’est nous maintenant. Avoir toutes ces idées, mais devoir attendre. J’implose dans ma cuisine.

Ma grande, celle qui avait la bouche pleine de sucre, a vidé un pot pour le remplir de petits billets écrits sur des écorces de bouleau. Des prénoms à piger pour leur rendre des services, leur faire plaisir. Sa dysorthographie est évidente sur chaque petite écorce. Et puis? Elle l’a fait pour les autres.

Ma petite, celle qui avait les deux mains dans la farine, vient de m’embrasser par en arrière et dessine un arc-en-ciel avec « Ça va bien aller ». Elle le place dans la fenêtre. Pour les autres.

Le pain aux bananes embaume la maison. Cette maison qui abrite les doutes, de la musique, les chicanes d’enfants, les danses improvisées, la peinture éclatée, la cuisine en bordel, les poèmes à minuit moins quart, les crayons sur la table de la cuisine, l’amour qui se reconstruit. La maison qui est ce repère de la famille. Cette cellule commune qui était il y a cinq jours diluée dans le travail et les faux désirs de consommation depuis trop longtemps.

Je voulais me reprendre. Je suis les réflexions qui appellent aux changements. Je suis les doutes et la force. Je suis les bananes et les pépites. Je suis la prof et la maman. Vous êtes ces parents qui doutent dans leur cuisine. Vous vous pensez seuls. Vous vous trompez. Nous sommes ensemble dans cette cuisine. Et c’est avec vous aussi que j’aimerais partager ce pain aux bananes, même si les bananes sont de 2019.

Quand tout sera terminé, que l’école aura repris, que les familles seront revenues à l’essentiel, que les mésanges auront de nouvelles cabanes, que je me sentirai utile même dans une cuisine, nous ferons un pain aux bananes collectif digne du Record Guinness. Ensemble. Nous contribuerons. Ensemble. Nous nous reprendrons.

Catherine Lapointe

https://ecolebranchee.com/pleurer-en-faisant-un-pain-aux-bananes-covid-19/

 

#Covid19 Revenir à l’essentiel en temps d’arrêt forcé

Cette semaine marque le début de la période de ce temps d’arrêt

Cette semaine marque le début de la période de ce temps d’arrêt forcé pour prévenir la propagation de la COVID‑19. Par quoi et par où commencer quand on doit rester à la maison avec ses enfants, que ce soit pour faire du télétravail ou non? Je dirais simplement de revenir à l’essentiel❣️Mais, concrètement qu’est‑ce que ça veut dire? Stocker du papier cul? NON!
Pour moi, ça veut dire d’utiliser cette période pour réaliser ce qui m’importe sincèrement.

Dimanche soir, j’ai soudainement repris conscience de la réalité entre deux prestations à La Voix et j’ai hurlé. Comment décrire ce hurlement?! C’était le cri d’une émotion qui vacillait entre « J’ai gagné à la loto! » et celui où j’étais convaincue que je n’allais pas survivre. C’était confus! Vous me suivez?
Mes enfants m’ont regardée étrangement et mon mari m’a demandé : « Qu’est-ce qu’il y a? »
J’ai répondu en riant : « Je viens de réaliser que je suis avec les enfants toute la semaine. »
On a ri. Ce fut un moment de grande prise de conscience. Celle où j’ai, comme on dirait, laissé tomber ma résistance, celle qui souhaitait une semaine productive, malgré ces circonstances exceptionnelles.

Comment revenir à l’essentiel?

Revenir à l’essentiel présentement, ça veut dire d’utiliser cette période pour réaliser ce qui m’importe sincèrement. Et je me questionne, j’observe, je propose et je choisis. La question qui roule dans mon esprit en ce moment, c’est : Comment profiter de ce temps pour en faire quelque chose d’important dans ma vie? Les pistes de réponses évoluent et se précisent.

En ce moment, je m’imagine en profiter pour changer nos habitudes, faire ce qu’on aime, rédiger et réaliser ma bucket list, épurer ma maison, jouer dehors avec les enfants. Honnêtement, quand l’annonce de la fermeture de l’école a été faite, j’avais prévu contrer cet état de panique qui est passé en lièvre dans mon esprit en étant structurée. Vous savez, être la maman under control qui a un parfait horaire de vie pour ses enfants. Être une fière mère parfaite!

Puis, j’ai décidé de prendre la vie comme elle allait venir et choisir avec ma gang au fur et à mesure ce qui allait nous convenir. Je veux qu’on se crée de bons moments ensemble durant ces temps hors de l’ordinaire. De ces moments où on se crée des souvenirs qu’on évoque quand on devient vieux. Je nous imagine dans vingt ans nous remémorer en famille cette période où la COVID‑19 a marqué le monde : Vous vous souvenez, nous avons été cloués à la maison pendant plus de deux semaines. On a sorti tous les Legos pour en faire le plus gros robot… Ou on a vidé la bibliothèque pour se lire histoires les plus drôles qu’on avait. Ou on a joué la plus longue partie de Monopoly, c’est toi qui avais gagné. On a joué des matchs de hockey interminables. Ces souvenirs seront certainement différents pour chacun et chacune de nous, parce que nous sommes uniques. À nous de créer ce qui nous fera vivre des moments magiques avec nos enfants. Pis c’est pas obligé d’être compliqué ni extraordinaire!

Maintenant, je commence par quoi? Aller jouer dehors, juste après mon café!

Qu’est‑ce qui va m’aider?

Cette semaine, je ne serai pas une mère parfaite. Pour m’aider, je vais simplement mettre dans mes journées beaucoup de douceur, d’humour et de force, sans forcer. Oui, parce que je devrai être ferme avec ma tribu sur l’intention de nos journées. Je vais assurément me connecter avec mon cœur d’enfant. Oui, me connecter avec cette partie de moi qui sait apprécier chaque moment et me guider vers l’essentiel. Je dois avouer que je l’avais un peu oubliée ou négligée sous une pile de priorités. « Faire » me permettait de cocher des éléments de ma liste de tâches au lieu d’« Être » connectée pour les réaliser sans forcer. Ce temps d’arrêt sera certainement bénéfique pour freiner l’évolution de la pandémie, mais surtout pour m’aider à revenir à l’essentiel et regarder arriver doucement le printemps.

En espérant que cela vous aidera à faire de ce temps d’arrêt un temps qui compte pour vous et votre famille.

Stéphanie Dionne

 

Je suis l’héroïne silencieuse

Ce matin, je bois mon café comme à l’habitude, avant ma journée

Ce matin, je bois mon café comme à l’habitude, avant ma journée de travail. Pourtant, rien n’est normal. Je n’ai pas faim, je suis nerveuse. Ce matin, bizarrement, mes enfants viennent avec moi. Je ne veux pas, je veux les protéger. C’est mon rôle de maman, non?

Pourtant la société a besoin de moi. Pendant que d’autres seront sur la ligne de front, moi je veillerai sur ce qu’ils ont de plus précieux… leurs enfants.

Cette crise de la COVID-19 nous happe de plein fouet. Je comprends que je dois, moi aussi, répondre présente.

Mais je comprends aussi que je prendrai soin des enfants des gens qui ont le plus de risque d’être exposés : médecins, infirmières, infirmiers et autres. Donc mes risques d’être exposée sont élevés.

Mes enfants seront avec moi, car c’est la consigne : je dois me rendre au travail avec elles. Tu me diras que mon conjoint a seulement à rester à la maison. Mais à la fin de ma journée, je vais où?

Pour le moment, nous ne savons pas où cette crise nous mènera. Mon travail sera d’expliquer l’importance du lavage des mains à mes petits. On le fera en jouant, parce que tout ça doit rester un jeu pour eux.

Nous sommes les grands, c’est à nous d’avoir peur. Tu sais, nous serons le papa dans La Vita è bella. Parce que c’est un peu une lutte contre la guerre tout ça. Un combat contre un être microscopique, mais un combat tout de même.

Alors je te demande, s’il te plaît, à toi, de respecter les consignes du gouvernement. Tu les connais, je ne les répéterais pas.

Fais‑le pour ceux et celles qui sont sur la ligne de front.

Fais‑le pour nous, les héroïnes silencieuses… les éducatrices.

Mélanie Paradis

 

Déception saisonnière

Depuis de nombreuses années, j’ai ce sentiment au printemps…</p

Depuis de nombreuses années, j’ai ce sentiment au printemps…

En fait, ça fait bientôt quinze ans. Le temps, le boulot, la famille, les amis et toutes mes responsabilités actuelles n’y font rien. Si je ferme les yeux, je m’y replonge complètement. Cet hier, celui qu’on ne désire ni aujourd’hui ni demain. Pourtant, tout semblait si parfait.

J’avais passé l’été à bien m’y préparer. Une espèce de maturité naissante. Mon père m’avait inscrit à un camp de perfectionnement. Pour celui‑là, je m’y étais donné à fond. J’ai aussi mieux assumé le stress de la période de sélection. Ce court moment, où d’autres vous remettent à votre place.

Enfin, je faisais le double lettre. U13 Pee-Wee BB.

Nous avions une saison formidable. Quatorze jeunes qui formaient une équipe. Un ensemble, fort de chacun de nous. Chacun de nous, fort de l’ensemble. Solidaires. William et Thomas sont restés mes amis. Nous jouons toujours le jeudi soir, le souffle court et moins de rapidité qu’autrefois.

J’aimais beaucoup notre entraîneur. Patrick était motivé, mais juste. Surtout, il nous a communiqué la responsabilité. Le jeu, c’est le nôtre. Du banc, il ne peut ni arrêter les rondelles ni compter de buts. Encore moins fournir les efforts nécessaires.

À la mi‑saison, nous étions déjà qualifiés pour faire les séries régionales. Les Seigneurs avaient le vent dans les voiles depuis une dizaine de matchs. J’étais le deuxième marqueur de la ligue. Avec espoir encore d’être le meilleur. Ma plus belle saison « à vie », comme je le disais alors.

Tout était prévu. Grand-papa Gaston y serait comme chaque année. Il avait ajusté son séjour pour y être. Lui, moi et le hockey, c’était lié. Il était celui qui m’avait accompagné si souvent aux activités, parce que mes parents ne pouvaient pas. Enfin, pas tout le temps. Cette année‑là, c’était le premier hiver qu’il passait en Floride. Au chaud, comme il disait à tous. Avec son clin d’œil espiègle.

Tout semblait possible, même le championnat…

Puis, la décision a été prise. Évidemment, sans nous. Nous prenant complètement par surprise. C’est terminé! Plus de matchs, plus de séries, plus de saison. La pandémie et le virus avaient gagné. J’ai tellement pleuré. Seul, dans ma chambre. Effondré par le choc. Mon premier, de ceux qui nous marquent à jamais.

Je ne vous parle pas de ma déception sportive. Je pense à mon grand-papa Gaston, mort en Floride. En mars 2020, l’année de la COVID-19.

Tu me manques tellement, grand-papa…

michel

 

Ma gang de malades

C’est une sensation étrange ces jours‑ci que d’aller dans un

C’est une sensation étrange ces jours‑ci que d’aller dans un commerce américain. Que ce soit Costco, Target, Walmart ou l’épicerie du coin, des étagères sont vides. Au pays de la démesure, même au fin fond du Nouveau-Mexique, une folie passagère germophobe a pris le contrôle des étalages : on ne trouve plus de lingettes désinfectantes. Dans plusieurs commerces, on peine aussi à trouver du savon à mains, de l’eau embouteillée et du papier de toilette. Et ce n’est pas juste ici : des Australiennes ont fait la manchette il y a quelques jours pour s’être querellées afin de déterminer qui aurait le privilège d’acheter du papier de toilette.

Alors que la saison de la grippe bat son plein, c’est une autre bibitte qui fait la une : le coronavirus (COVID-19).

Ce qui est un peu ridicule dans cette situation est que, malgré toute cette attention médiatique, chez l’adulte en santé, les symptômes du coronavirus sont similaires à un rhume. Oui, c’est dramatique un bateau de croisière en quarantaine, mais en réalité (et ce qui ne fera pas la une aux nouvelles), nous serons des milliers à avoir contracté le COVID-19 sans le savoir. Alors, soyons responsables et limitons les occasions de contaminer les autres.

Cette crise illustre aussi quelques faits déroutants qui semblent indiquer que pour certaines personnes, la survie personnelle est aux dépens de l’autre.

Cette compulsion d’accumulation et de surconsommation fait peine à voir. Ça te donne quoi de désinfecter ton bureau au travail et tes poignées de porte trois fois par jour avec ta douzaine de caisses de lingettes désinfectantes accumulées au détriment de ton voisin si celui‑ci n’a pas de savon pour se laver les mains? Est‑ce que tu te sens mieux avec tes 2 000 rouleaux de papier de toilette accumulés dans ton garage?

Est‑ce que ce sont les mêmes personnes qui se présentent au travail en toussant et avec une fièvre parce qu’elles ne veulent pas utiliser leurs journées de congé? Ces personnes sont‑elles différentes des trois passagers sur mon vol des États-Unis à destination de Montréal dernièrement qui, après avoir entendu l’équipage partager un message expliquant les symptômes à déclaration obligatoire à la douane canadienne, ont immédiatement cessé de tousser?

Je me suis demandé si ces voyageurs avaient des attentes différentes quand il était question d’être eux-mêmes exposés à la maladie de quelqu’un d’autre. Ne serait‑il toutefois pas irraisonnable de demander à quelqu’un qui ne sait pas s’il est contagieux de s’abstenir de prendre l’avion? Je n’ai pas de réponse à vous offrir, mais l’arrêt soudain de la toux après le message de l’équipage me laisse croire que ce qui était primordial pour eux était de passer sous le radar des douanes.

Cette peur de la maladie a non seulement engendré une pénurie artificielle en magasin et une augmentation indécente des prix en ligne, elle exacerbe la propension humaine à élaborer des théories du complot. Le virus a été créé en laboratoire! Le gouvernement cache la vérité! Fake news! Les Chinois ont fait exprès!

Ah, les Chinois. Plusieurs situations ont été reportées où des actes haineux ont été transmis envers des Asiatiques, perçus par certains comme responsables de la maladie. Des attaques dans les transports en commun, des messages d’intimidation, des billets d’opinion, etc. On a toujours une bonne raison pour pointer du doigt.

On n’a qu’à porter attention au mouvement survivaliste et à l’offre grandissante d’ensembles de nourriture sèche destinés à affronter les catastrophes naturelles pour comprendre que l’homo sapiens est obsédé par sa survie. D’un point de vue biologique, ça se comprend. N’est-il pas naturel pour toute forme de vie d’assurer sa subsistance et sa survie?

Mais de là à accumuler dans ton garage une douzaine de caisses de lingettes désinfectantes et tout le papier de toilette que tu as pu trouver, Bob? Vraiment?

Ceci dit, comme pour la grippe saisonnière, il est recommandé de prendre des précautions et d’être attentif à la maladie dans les situations où vous pourriez exposer une personne immunodéprimée ou au système immunitaire affaibli. Si tu ne te sens pas bien, laisse faire Dr Google ; va voir ton médecin et reste à la maison.

Pour plus d’information sur le coronavirus, je vous invite à consulter : https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/maladies/2019-nouveau-coronavirus.html

Note de l’auteure : Depuis l’écriture de ce texte, la gouverneure de l’état du Nouveau-Mexique et le président des États-Unis ont déclaré l’état d’urgence. Les écoles sont fermées pour une période de trois semaines et les étagères des épiceries sont vides dans tous les départements (denrées non périssables, produits ménagers, produits frais, boucherie, etc.).

Genevieve Brown

Coronavirus, mais dans quelle merde nous as-tu mis?! 

Je vais parler du coronavirus, mais pas de son aspect médical. Non,

Je vais parler du coronavirus, mais pas de son aspect médical. Non, plutôt de ses répercussions. Le virus en tant que tel ne me fait pas peur, sauf pour les membres de ma famille pris avec des maladies pulmonaires ou avec un système immunitaire affaibli.

Je travaille comme technicienne en laboratoire dans une pharmacie communautaire. Je suis en première ligne avec les patients. Je n’ai pas de protection essentielle contre ce virus, ni gants, ni masque, ni désinfectant. TOUT EST EN RUPTURE D’INVENTAIRE PARTOUT. C’est très inquiétant. J’ai une famille avec deux jeunes enfants. Je suis stressée au maximum. Mes patrons font leur maximum pour nous aider, mais c’est impossible en ce moment. J’angoisse × 100 000.

Mon conjoint travaille dans l’industrie de l’audiovisuel. Tous ces contrats sont annulés jusqu’en juin. Il risque très fortement de perdre son emploi. Ce qui veut dire que je risque de perdre ma maison, ma voiture. Soyons réalistes, l’économie va être très affectée et l’industrie dans laquelle mon conjoint travaille ne repartira pas à plein régime lorsque la pandémie sera écartée.

Mes enfants… ils ne comprennent pas ce qui se passe. Maman et papa ne sont pas comme d’habitude. Même si je m’efforce du mieux que je peux de garder une vie normale, rien n’est pareil. Comment expliquer à mes enfants pourquoi les gens sortent de l’épicerie du coin avec des paquets de papier de toilette en quantité phénoménale? « Maman, est‑ce qu’ils ont la gastro? » a été leur question.

Un vent de panique s’est installé et tout part en vrille. Je suis angoissée comme je ne l’ai jamais été. Je suis en état de stress à un niveau inexplicable. Le futur me fait peur, je ne sais pas à quoi va ressembler demain. J’ai peur pour mes enfants. Je n’avais jamais connu de peur aussi intense. J’en ai mal physiquement.

S’il vous plaît, je vous en prie, au nom de ceux qui sont malades, mais aussi au nom de ceux qui risquent de tout perdre, prenez vos responsabilités d’êtres humains. Lavez-vous les mains. Si vous êtes à risque d’avoir contracté le virus, prenez les précautions mentionnées par le gouvernement. S’il vous plaît, ne soyez pas égoïstes avec les paquets de papier de toilette et offrez votre aide à vos voisins âgés, handicapés ou malades. Soyons des êtres humains. Soyons respectueux envers chacun.

Une maman essoufflée

L’humanité sur pause

On y est. Nous avons atteint ce moment, ce temps d’arrêt imposé,

On y est. Nous avons atteint ce moment, ce temps d’arrêt imposé, mais combien nécessaire. Des « vacances » à la maison, dans la simplicité.

Ce soir, en repassant le fil des événements, je suis fière de vivre ici. Je suis fière, enfin, qu’on soit des humains responsables, pour une fois. C’est beau de voir toute cette solidarité. Beau et déstabilisant à la fois.

Nous ne sommes pas habitués à être aussi bons les uns envers les autres.

Nous ne sommes pas habitués à nous occuper simplement, sans fla‑fla.

Nous ne sommes pas habitués à offrir notre aide à un étranger et surtout, à en recevoir.

Cette crise, elle aura ça de beau. Elle aura rapproché les humains, elle sera parvenue à faire ressortir ce qu’il y a de plus beau en eux : l’empathie.

Aujourd’hui, j’ai vu quelqu’un retourner des paniers d’épicerie à l’intérieur afin d’aider le commis débordé. J’ai vu des gens qui ne se connaissaient pas échanger entre eux sur la situation. J’ai reçu un texto d’une voisine qui m’offre de prendre mes filles au besoin.

Aujourd’hui, du moins pour nous, au Canada, l’humanité s’est mise sur pause.

Pendant les deux prochaines semaines, je vais prendre du temps de qualité avec mes filles et prendre soin de la cocotte de mes amis parce que j’ai cette chance d’être enseignante et donc, en isolement. Ce sera ma bonne action.

Et toi, quelle sera la tienne?

Karine Lamarche

 

Coronavirus, notre projet de société

Je suis née blanche, en Amérique du Nord, dans une famille de la c

Je suis née blanche, en Amérique du Nord, dans une famille de la classe moyenne. J’ai voyagé, je suis éduquée, j’ai une maison, deux automobiles, l’électricité, l’internet et l’eau courante à chaque jour de ma vie. Nous avons tout ce qu’il nous faut pour être heureux, ici, au Québec.

Et pourtant, notre système de santé est souffrant, le taux de suicide est très élevé, les inégalités sociales sont encore d’actualité. Je réfléchis à ce qui nous arrive avec le coronavirus et, si je mets de côté mes angoisses personnelles, j’arrive quand même à trouver qu’il y a du beau qui ressort de tout ça. Nous avons enfin un projet commun au Québec : aplatir la courbe de contamination du virus pour maintenir le cap avec les services de santé. Après, quand ce sera passé, on pourrait mettre autant d’énergie sur notre survie à long terme, non?

Je vois la situation actuelle, entre autres, comme un appel à l’élévation des consciences. Une prise de recul sur tous les privilèges que nous tenons pour acquis : être logé, nourri, l’éducation, les soins de santé, les services municipaux, etc. Retomber un peu en mode de survie (je sais bien que c’est de la survie de luxe), ça aide à rester humble et à avoir de la gratitude pour tous nos privilèges.

Après tout, les peurs qui nous habitent face à ce virus, que ce soient une crainte financière, une crainte pour la santé de nos proches ou de nous-mêmes ou encore la peur de manquer de nourriture… ou de papier de toilette (!) habitent des millions de personnes sur le globe, et ce, même sans le virus. Camp de réfugiés, inégalités sociales, crise environnementale, inégalités entre les hommes et les femmes et j’en passe… il me semble que nous devrions poursuivre sur notre lancée de solidarité après le passage du virus. Je sais bien que c’est utopique, mais il reste que la situation actuelle nous permet de voir tout le pouvoir que nous avons quand l’enrichissement d’un petit groupe d’humains n’est plus la priorité et quand on met l’économie au service des gens et non à leur trousse.

La terre s’autorégule pour assurer sa survie. Je ne crains pas pour elle, je crains pour nous. L’humanité semble déconnectée de son essence première : la nécessité d’être en relation profonde et bienveillante avec ce qui nous entoure. Même si je suis très sensible à tous les gens touchés par la maladie et aussi par toutes les morts, ça me donne confiance de voir le Monde sur pause, contraint de s’entraider pour le bien de tous. Sortir de notre nombril, de notre vie effrénée et de nos obligations pas si fondamentales que ça finalement, pour penser au « nous », au collectif, au bien de tous. Peut-être qu’à travers tout ce chaos, nous allons retrouver l’essentiel : être ensemble, en santé à essayer de vivre le moment présent sans tous les artifices qui nous éloignent de qui nous sommes.

Je sais bien que même si le virus touche les riches autant que les pauvres, les inégalités demeurent, mais ça me donne quand même l’espoir d’une amorce de réflexion, de discussion, de changement.

Sur ce, je m’en vais me laver les mains! 😉

Roxane Larocque