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Jumeau perdu, jumeau vécu (partie 2)

Vous-trouverez le lien de la première partie de cette collaboration

Vous-trouverez le lien de la première partie de cette collaboration spéciale au bas de la page.

Adieu, bébé jumeau… Les derniers mois de la grossesse allaient servir autant à faire notre deuil d’un bébé parti trop tôt et d’une expérience de vie avec des jumeaux qu’à préparer à accueillir notre bébé survivant.

La naissance d’un survivant

Nathalie : Après quarante semaines à barboter dans mon ventre format hippopotame, mon fils est né. Presque dix livres de bébé! J’avais passé la grossesse à le supplier de s’accrocher et à respirer pour lui envoyer de la force et du calme. En naissant, il a oublié de respirer, son cœur ne battait presque plus. Les soins médicaux l’ont convaincu de ne pas suivre son frère jumeau ou sa sœur jumelle. Il est revenu, et il a grandi. Nous n’aurions pas les photos mignonnes de jumeaux habillés pareil ni celles où ils dorment en se tenant par la main. Mais il arrive qu’on ait l’impression que le jumeau disparu n’est pas si loin…

Mélanie : Tu as hésité longtemps. Je saignais souvent. Je crois que tu hésitais encore entre partir rejoindre ta moitié ou rester. Trente-sept longues semaines à avoir peur, mais tu as décidé de rester et de te présenter plus tôt que prévu à trente-sept semaines et trois jours. La perte vécue pendant la grossesse faisait partie de toi. Tu étais un bébé difficile, tellement anxieux! Tu n’arrivais pas à te séparer de moi, tu avais besoin d’une routine que l’on devait suivre by the book, sinon tu pleurais sans être consolable. Même en vieillissant, tu étais constamment dans mes jupes. On me le faisait remarquer. Ç’a été comme ça, jusqu’à la naissance de ta sœur, vingt-deux mois plus tard. À ce moment-là, tu t’es collé à elle…

 

La place vide

Nathalie : Le bébé jumeau, nommé sans originalité « Bébé Étoile », a toujours gardé sa place dans notre famille. À part la photo de l’échographie et le souvenir de ma réaction à l’annonce d’une grossesse gémellaire, nous n’avons aucun souvenir symbolique de ce petit humain. J’ai donné mes livres au sujet des jumeaux. J’ai donné les pyjamas qui m’avaient servi à annoncer la double surprise à mon mari. Il nous reste l’histoire d’une vie trop courte et invisible.

Il nous reste aussi des histoires dans lesquelles on sent la présence du jumeau perdu. Des inconnus qui nous arrêtaient en s’étonnant que notre nouveau-né dégage une aura si bienfaisante et si puissante. Les nombreuses fois où on s’est fait dire que notre mini bonhomme avait une vieille âme, même avant qu’il parle. Notre fils qui nous dit : « Maman, mon ami Nathan, il est comme mon jumeau. »

Mélanie : Maintenant, il n’y a que le souvenir de toi, bébé jumeau. Ce souvenir du moment où j’ai appris ton existence et ta mort simultanément. Mais tu as laissé quelque chose chez ta sœur. Une empathie démesurée pour une petite fille de sept ans. Une sensibilité hors du commun. Cette sensibilité qui a permis à ta sœur de m’annoncer que j’étais enceinte, avant même que je fasse mon test de grossesse. Cette même sensibilité qui a fait venir ta sœur vers moi un matin en me disant : « Maman, tu n’as plus de bébé dans ton ventre! » avant même les premiers signes de la fausse couche qui allait suivre quelques jours plus tard…

Ce qu’il en reste

Nathalie : On n’a jamais caché l’existence du bébé perdu. Quand mon mari et moi avons démarré notre maison d’édition, on l’a nommée « Quatre et demi » : quatre enfants, plus un qui est à moitié avec nous, à moitié dans un univers parallèle. Chaque 14 juillet, j’ai une pensée silencieuse pour le jour de sa mort-naissance. Il arrive que nos enfants posent quelques questions, mais le deuil est fait. Il restera à savoir si le temps ramènera sa non-présence parmi nous, comme c’est parfois le cas lorsque l’enfant survivant se sent incomplet, cherche à combler le vide en s’inventant un ami presque réel, se sent coupable d’être celui qui reste, même en étant inconscient du lien avec son histoire intra-utérine.

Mélanie : Il n’y a que très peu de personnes au courant qu’il y a eu cette grossesse multiple. Plusieurs parents de jumeaux m’ont dit que ma fille avait un comportement de jumelle. Cette disparition fait partie d’elle. Elle est restée une petite fille anxieuse, qui a peur de tout, mais surtout de l’abandon. Une petite fille qui a besoin de sa sœur pour faire face à de nouvelles situations. L’absence de ce jumeau fait partie de la vie de Jillian tous les jours, on le sent, on le sait qu’il lui manquera toujours quelque chose. Comme si elle lui tendait la main chaque jour, mais sans qu’il puisse la lui serrer…

http://jumeauxandco.com/grossesse-gemellaire-2/le-syndrome-du-jumeau-perdu/

http://jumeauxandco.com/interviews/conseils-dexperts/devenir-parents-de-jumeaux-quels-impacts-psychologiques/

Première partie : http://www.mafamillemonchaos.ca/on-jase/jumeau-perdu-jumeau-vecu-premiere-partie/

Nathalie Courcy et Mélanie Paradis

Mes fausses couches à répétition

J’ai toujours su au plus profond de moi que je serais mère. Même

J’ai toujours su au plus profond de moi que je serais mère. Même qu’envisager ma vie sans enfants était impossible, ça ne figurait pas dans mon plan de vie. Après avoir vécu la mort de mon frère et survécu moi-même à des cellules cancéreuses, j’ai finalement trouvé celui qui serait un jour mon Chéri Mari.

Tout s’alignait finalement pour moi… Comme mon immense joie de voir un + sur mon test de grossesse!  Mais qui aurait cru que ce bonheur se transformerait en cauchemar ? En tout cas, pas moi…

Ce mal de ventre : celui allumant ton instinct, t’alertant qu’il se passe quelque chose, que ça ne va pas bien. Cette chaleur qui s’installe dans tes entrailles, la boule dans ta gorge, le mal dans ton plexus solaire… Moi, je me disais que c’était l’utérus qui grandissait, ouin, j’avais lu ça dans mon livre, que je devais seulement me reposer davantage.

 

Voici l’histoire de cette grossesse, et des suivantes…

 

Ce soir-là, enceinte de huit semaines, je suis au cinéma pour la première tant attendue de Harry Potter. Le film se termine. Je vais aux toilettes où je constate que je saigne. J’appelle le 811 immédiatement. L’infirmière, empathique, me rappelle que cela peut arriver dans le premier trimestre, que ce n’est pas nécessaire de m’inquiéter maintenant. Le lendemain, les saignements n’ont toujours pas cessés, on va donc à l’hôpital. L’attente commence : prises de sang, tests urinaires et finalement, l’échographie.

Dans cette salle sombre, avec cette envie qui me presse la vessie, je m’allonge. La dame polie, mais aussi froide que la pièce peut l’être, commence son examen. Moi, dans ma tête et dans mon cœur, je veux qu’il n’arrive rien à mon précieux bébé. Au bout d’un moment, elle lève la tête et dit :

-Madame, vous n’êtes plus enceinte.

Mon monde s’écroule. La vie m’a quittée. Pas la mienne, mais celle de mon bébé.

Je retourne donc chez moi, l’âme en miette, avec mon Mari Chéri, lui aussi tout en morceaux. La fausse couche, c’est commun, mais ça, je ne le savais pas. À partir de ce jour, non seulement je le savais, mais en prime, je le vivais …

Même si cet être n’est pas resté longtemps, il m’a marquée, car il était important et déjà aimé. Je devais me résoudre à le laisser partir. Laisser la vie continuer, malgré le vide qui m’habitait, dans tous les sens du terme.

Le regard des autres; la pitié qui teinte leur malaise… Ce bébé, il n’a pas vraiment existé, et pourtant, cette grossesse a occupé tant de place dans nos vies.

Le temps a passé, la plaie ne se refermait pas. Ma peine se transformait en angoisse paranoïaque. Le besoin viscéral de tomber enceinte était presque malsain. Je ne pouvais que penser à cela. Les conversations où il n’y avait pas de lien vers ma future maternité ne m’intéressaient plus. L’intimité avec mon chéri n’était portée que vers la possibilité d’une nouvelle grossesse. Je ne le faisais plus par amour;  seulement dans le but de devenir maman.

 

♥ Je prends un instant pour remercier mon Mari Chéri pour toute sa patience, son amour et son soutien. Il a été le phare de notre amour. 

 

marykaAu total, j’ai vécu trois fausses couches avant d’avoir le privilège de terminer une grossesse et pouvoir tenir enfin dans mes bras, ma belle Maryka. Le chemin fut difficile : les traitements de fertilité et la prise de médicaments avant/pendant la grossesse ont demandé beaucoup d’amour et de patience de la part de mon conjoint. Malgré le fait que cette grossesse-ci se soit très bien passée, l’inquiétude fut constante pour moi. Par contre, la chance incroyable que j’ai eue de pouvoir devenir mère a effacé toutes traces de ce parcours malheureux.

C’est ce que je croyais à ce moment-là…

 

Une année et demie a passé avant que nous soyons prêts à accueillir de nouveau un enfant dans notre famille. Cette fois-là, j’étais certaine que tout se passerait bien puisque nous avions reçu un « cocktail » qui « fonctionnait ». Malheureusement, j’ai aussi perdu ce bébé, à douze semaines de grossesse. Le mur m’avait frappé de plein fouet, me faisant vivre cet échec, encore une fois.

J’avais, bien sûr, ma belle cocotte pour m’aider à voir la vie du bon côté. Par contre, mes démons intérieurs, eux, n’avaient pas dit leurs derniers mots. Mon retour dans l’anxiété bouffait toutes parcelles de mon esprit, échec après échec, en raison de mon incapacité à rester enceinte.

À ce moment, les gens faisaient comme s’il ne s’était rien produit. Qu’est ce qu’ils auraient bien pu dire pour m’aider, me consoler? Mais, il y a aussi ceux qui ont tenté de diminuer ma douleur. Maladroitement. Une m’a demandé :

-Si après tout ce temps, tu as enfin un enfant, et que c’est une fille, vas-tu l’appeler « Désirée » ?

Une autre m’a offert de coucher avec mon mari et ainsi devenir la mère porteuse de MON bébé. Tant de mots, ou parfois absence de mots, et d’attitudes qui me transperçaient davantage.

Mya-Rose est arrivée la grossesse suivante, m’apportant résilience et bonheur. Cette petite fleur qui était si pressée de s’incarner. Sa venue a jeté un baume sur mes plaies et me redonna confiance en l’avenir.

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Deux autres grossesses ont suivi. On en voulait quatre! Toutes deux se sont terminées par des fausses couches. J’ai alors compris que je serais toujours prête à accueillir un nouvel enfant dans notre famille, mais que je ne pourrais plus faire face à la perte d’un enfant. Car pour moi, ils ont tous été MES enfants, NOS enfants. Notre famille restera comme elle est… Magnifique!

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Notre chemin vers la maternité-paternité (parentalité) a été intense, bousculé par des désordres hormonaux, rempli de peur; de peine; de douleur; d’angoisse et de médication. Mais l’amour qui existait entre mon Chéri Mari et moi nous aura permis d’en sortir plus fort.

Nous sommes les fiers parents de deux belles filles! À chaque instant, pour chaque moment précieux, je suis remplie de gratitude, car je sais que ce privilège, celui d’être parent, est immense. Je prie souvent et remercie mes six petits anges qui m’ont choisie et m’ont offert leur amour, même si ce fût l’instant d’un moment.

Je sais que mon histoire à moi se termine bien, que d’autres n’ont pas eu ma chance, que certaines vivent un chemin similaire au mien, sans toutefois parvenir à donner naissance à un enfant. Chaque jour, j’ai une pensée pour ces femmes. Je fais la seule chose que je peux faire :  prier pour elles. Je sais à quel point je suis choyée, c’est pour cela que je savoure et vénère chaque instant de la vie!

Namasté