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Qu’est-ce qu’ils feraient l’un sans l’autre… Texte: Nathalie Courcy

Mon grand doudou d’une décennie est arrivé dans mon ventre comme

Mon grand doudou d’une décennie est arrivé dans mon ventre comme un jumeau, mais quand il a été prêt à peser sur le piton Eject à quarante semaines, il faisait cavalier utérin seul depuis six mois. Je me revois à l’échographie confirmant qu’un des fœtus avait été expulsé et que l’autre avait 50 % de risque d’être évacué malgré son petit cœur en santé boum-boum. Méga freeze émotif. Triste de ne pas avoir la chance de connaître mon bébé et l’expérience gémellaire. Soulagée en imaginant une vie peut-être un peu plus simple à gérer avec un bébé à la fois. Heureuse qu’un des deux bébés soit encore bien accroché. Inquiète qu’il ait le réflexe de suivre l’exemple de son jumeau.

Et je me vois en train de me dire « mais qu’est-ce que mon bébé vivant retiendra de ce traumatisme ? » Perdre son frère ou sa sœur avec qui il partageait l’espace depuis plus de trois mois. Perdre son complice des premiers instants. Perdre la seule personne qui le côtoyait vraiment depuis sa conception. Comment un bébé même pas né vit-il ce deuil ? Comment ça s’exprime, quand le subconscient et la recherche identitaire se mélangent ?

Notre bébé étoile a sa place dans notre famille et nos conversations. Il fait partie de la gang, comme grand-papa décédé beaucoup trop tôt pour rencontrer ses petits-enfants. Il existe dans notre cœur à défaut d’exister dans nos souvenirs. Une seule photo en noir et blanc, mais toute sa place.

Né après lui, mon grand bonhomme sera tout de même toujours son grand frère. Lui, il a continué à grandir. Il a depuis longtemps dépassé les quelques centimètres que notre bébé étoile ne dépassera jamais. Mon grand, il a conscience qu’il manque une partie de lui. Et il a longtemps cherché cette partie.

Quand mon petit (plus si petit que ça, quand même !) dernier est arrivé, fiston a trouvé un ami. Et plus le temps passe, plus le confinement perdure, et plus ils se rapprochent puisque l’amitié n’est pas diluée à travers d’autres. Une fusion fraternelle. L’un ne va pas sans l’autre. L’un ne VA pas sans l’autre, dans le sens où ils ne se sentent pas tout à fait eux-mêmes quand leur douce moitié ne se trouve pas dans le centimètre carré à côté.

Quand je cherche une photo de l’un, c’est mission impossible. L’autre a toujours sa face, un pied, une main, dans la photo. Ou son corps complet par-dessus son frère. Ils perdent leurs dents en même temps, ils sont malades en même temps, ils sont bougonneux en même temps. Ils ont le même humour, le même accent qui ne vient pas des parents. Même à l’heure du dodo, après quatorze heures à jouer ensemble, ils ont encore besoin de se coller, de se chatouiller, de se raconter leur vie. Comme s’ils ne la savaient pas déjà par cœur ! Comme s’ils n’étaient pas déjà le personnage principal dans l’histoire de l’autre.

Mes boys, que feriez-vous l’un sans l’autre ? De quoi auraient l’air vos journées depuis que la société s’est refermée sur elle-même il y a presque un an ? Comment auriez-vous vécu les déménagements, les changements d’école, les grandes émotions ? Qui seriez-vous en version solo ?

Éventuellement, les amis ne seront plus virtuels mais bien présents dans votre quotidien. Vos deux ans de différence se feront sentir. L’entrée au secondaire laissera le plus jeune derrière. Et le plus vieux devra s’adapter à une nouvelle vie tout seul comme un grand. Vous devrez défusionner, au moins quelques heures par jour. Décoller la crazy glue des siamois. Mais vous le savez, je n’ai même pas besoin de vous le dire : vous resterez toujours complices. Des infinis banounous, comme vous le dites si bien, dans votre langage juste à vous. Des jumeaux dont la plus grande différence est la date de naissance…

Nathalie Courcy

Être maman

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Nous devenons une maman à l’instant même où les nausées du matin nous font réaliser le grand changement qui s’opère dans notre corps. Un jour, des papillons au creux de notre ventre nous confirment qu’un petit être est là : en nous. Un hôte bien particulier qui sera désormais notre priorité. Il change tout : nos repères, nos priorités, nos valeurs. Et il donne un sens insoupçonné à notre vie. Nos enfants poussent en nous et je crois qu’ils seront toujours une partie de nous.

En effet, quand nous sommes au travail, nous nous demandons toujours ce qu’ils font : sont-ils en route pour l’école? Ont-ils oublié leur boîte à lunch? Ont-ils pensé à prendre leurs affaires de sport? Leur clé de maison?

Quand nous passons du temps avec notre amoureux, nous nous préoccupons : sont-ils bien? Ont-ils chaud, froid, faim, peur? Sont-ils en sécurité?

Si dans leur regard, il y a de la tristesse, notre cœur pleure. Si leurs yeux pétillent de joie : notre cœur rit lui aussi. S’ils relèvent fièrement la tête et bravent les défis, notre cœur déborde de fierté.

Nous sommes eux, un peu… même s’ils détestent que l’on dise cela : MON bébé, MON enfant, MON grand… Ils veulent être EUX-MÊMES et se détacher… 

Alors, avec amour et résilience, nous leur faisons croire qu’ils sont libres. Mais au fond de notre cœur, la fusion ne nous quitte jamais vraiment. Quel que soit l’âge de nos enfants, ils seront toujours nos petits. Un cœur de maman aime, pardonne, donne sans compter, et bat au rythme de celui de ses enfants.

Si quelqu’un ose toucher à nos enfants ou les blesser, nous devenons des lionnes sans pitié; s’ils sont aimés et respectés, nous sommes apaisées.

Tous les livres de psychologies veulent nous forcer à les laisser aller, mais dans le fond de mon cœur de maman, mes trois bébés feront toujours partie de moi. Comme une continuité de la vie que j’ai semée. Ils sont un peu moi… Mais chut… Ne leur dites surtout pas…

Je garde ce secret au fond de mon cœur. C’est cela être maman : continuer de trembler chaque fois que nos enfants perdent l’équilibre, mais sans le leur montrer…