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« Maman, j’aime les filles. »

Ma fille avait d

Ma fille avait demandé à toute la famille de rester à la table après le souper. Elle avait quelque chose à dire. Elle avait besoin d’être écoutée. Entendue. Acceptée. Aimée.

« Maman, j’aime les filles. »

Son frère a répondu : « Hein? Ça veut dire que tu m’aimes pu?! »

Sa sœur a répondu : « C’est correct tu sais, c’est important de suivre ton cœur! »

Et moi, j’ai répondu : « Comment tu te sens d’en avoir pris conscience? »

Pas plus compliqué que ça.

Elle nous aurait annoncé que sa couleur préférée était maintenant le jaune que ça n’aurait pas fait moins de vagues.

Elle nous a expliqué que depuis quelque temps, elle avait réalisé que les garçons ne l’intéressaient pas, qu’elle ne les regardait même pas. Que même si aucune fille en particulier ne l’attirait, c’était vers le sexe féminin qu’elle se sentait appelée. Qu’elle avait pris le temps d’en parler avec sa meilleure amie et qu’elle aussi, elle avait bien réagi.

Tout le monde a quitté la table comme si de rien n’était. Notre journée a continué. Aucun signe de catastrophe nucléaire. Pas de tsunami à l’horizon. Et c’est parfait ainsi.

Plus tard, ma fille est revenue me voir en disant : « Tu le savais, toi, hein, maman? »

          Oui. Je m’en doutais. J’en avais même glissé un mot à ton père.

          Mais comment as-tu su? Même moi, je ne le savais pas!

          Je t’ai portée dans mon ventre, je t’ai portée dans mes bras, et je te porte toujours dans mon cœur. Grand-maman dirait : « Je te connais comme si je t’avais tricotée ». Je le sentais, c’est tout.

          Et tu ne m’en as jamais parlé?

          Non. Je voulais respecter ton rythme à toi. Je ne voulais pas te mettre de pression sur les épaules ni d’idées dans la tête. Je savais que quand tu serais prête, tu serais assez honnête avec toi-même pour prendre conscience de ton attirance pour les filles. Et j’avais confiance, je savais que tu nous ferais assez confiance pour nous en parler. Rien ne pressait.

J’ai pensé, pendant une seconde, que je pourrais ajouter que l’attirance change parfois, qu’on peut être attiré par les gars et les filles, bla bla bla. Je me suis tue.

La théorie, elle la sait. Les nuances du désir, elle les connaît même si elle ne les a pas encore expérimentées. Elle en entend parler régulièrement à l’école secondaire, à la télé, sur YouTube. Elle sait où s’informer. Elle sait qu’elle peut me poser toutes les questions du monde. Alors je me suis tue. Je ne voulais pas lui donner l’impression que je l’orientais vers d’autres options que celle qu’elle venait de choisir ou d’accepter.

Ce que je voulais, c’est qu’elle se sente bien, tout simplement. Qu’elle se sente aimée dans toute son identité. Elle aime les filles, point. Si elle a besoin d’accompagnement, elle l’aura. Si elle a besoin d’information, elle l’aura. Mais elle n’a pas besoin qu’on en fasse tout un plat, qu’on en fasse une publicité au Super Bowl ou qu’on la remette en question.

Ce soir-là, en me mettant au lit, je me suis dit que le Monde a bien évolué. Et que c’est parfait ainsi.

 

Eva Staire

Lettre à ma fille : Si jamais tu étais gaie

Au cours de ton développement, il y aura beaucoup d’impasses et d

Au cours de ton développement, il y aura beaucoup d’impasses et d’obstacles que nous allons surmonter ensemble. D’autres fois, tu devras grandir et surmonter les épreuves sans moi ni ton père. Dans ta vie, il y aura peut-être un moment stressant, une parcelle de ta vie que tu n’avais jamais dévoilée et qui devra faire surface. Tout sera rendu beaucoup trop évident dans ta tête pour penser que ce n’est qu’une phase comme la plupart des parents disent. Tu choisiras une date, une heure. Tu espionneras nos comportements pour être certaine que le moment parfait est arrivé pour nous en parler.

Sache que si cette journée existe dans notre famille, ce moment où tu décideras de nous exprimer ton choix d’être gaie ou trans, ce sera le plus beau jour de ma vie. Pour moi, mon travail de maman sera accompli avec succès. Tu seras une femme accomplie, une personne forte qui ne vit pas dans la peur ni selon les intentions de la société. J’accueillerai avec joie tes copines ou je t’accompagnerai dans tes changements.

J’espère que d’ici ce temps la société aura évolué et que le choix de vie de chacun sera accepté. Que les termes « sortir du garde-robe » ou « coming out » seront désuets et qu’à partir du plus jeune âge nous accepterons la différence. Je souhaite de tout mon oceur qu’il y ait en abondance des contes de princesse-qui-tombe-amoureuse-d’une-autre-princesse et que nous aurons le réflexe de dire ‘’Quand tu vas être plus grande et que tu vas avoir un chum OU une blonde…’’ plutôt que d’imposer une idée qui met des doutes dans la tête alors que ça ne devrait pas.

D’ici là, si les tabous ne sont pas tombés, pour nous, tu seras toujours notre raison de vivre et nous serons heureux peu importe ton choix. Ton orientation sexuelle ne changera pas qui tu es ni la manière dont je te perçois. Tu es et resteras toujours notre petite fille que nous aimons inconditionnellement. Les gens qui t’entourent pourront être cruels avec tes décisions, mais sache que si un jour tu dois nous faire ce type de révélation, nos bras, grands ouverts, t’attendront pour t’encourager, te consoler et t’aimer. Petite-fille, la façon dont tu décides de vivre ta vie est la tienne. Ne laisse jamais personne te dire le contraire. Tu feras déjà face à beaucoup d’épreuves difficiles à surmonter, ton orientation sexuelle ne devrait pas faire partie de ceux-ci mais devrait plutôt être une célébration. Nous t’acceptons comme tu es et comme tu seras.