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À 95 ans devant un ordi

Dans mon temps, il y avait les hommes, les femmes et les enfants.</p

Dans mon temps, il y avait les hommes, les femmes et les enfants.

Dans mon temps, on était soit hétéro ou assez courageux pour avouer son homosexualité. Ou pas.

Noir ou blanc.

That’s it.

Je vous vois vous préparer à la rébellion avec votre cargaison de roches à me lancer par la tête.

« Ce n’est pas parce qu’on n’en parlait pas que ça n’existait pas ! »

Je sais. Je comprends. Je suis d’accord. Je suis la première à prôner la liberté d’être et de choisir qui on est, à défendre la liberté de parole et d’identité. Alors, gardez vos roches et servez-vous-en pour construire un chemin sur lequel on pourra marcher ensemble.

Mais quand même, devant une réalité en expansion dans la société et dans ma maison, je me sens prise au dépourvu, mal outillée.

La binarité n’est plus à la mode. Moi, je suis une femme hétérosexuelle. Ben plate. Mais c’est ce que je connais. Quelques amis homosexuels ou transgenres, des téléromans qui montrent des personnages de toutes sortes, mais rien si on compare à ce que j’entends de la bouche de mon ado.

Selon ses dires, aucun de ses amis ne se définit comme gars ou fille, et aucun ne se définit comme hétéro. Ils voient la personne et non son sexe. Tout à leur honneur ! On est loin du scandale provoqué par la déclaration de Cœur de pirate qui se définissait comme queer*. Vous vous souvenez du tollé que ça avait créé ? Des débats sans fin sur cette nouvelle réalité inventée, sur son besoin de faire parler d’elle. Des défenseurs de la liberté de genre et d’orientation. Du clash des générations et des cultures.

Ça fait deux ans de ça. Deux ans. C’est court, deux ans, pour une révolution ! Alors que le monde entier (ok… moins une vingtaine de personnes, peut-être !) s’offusquait de voir sa binarité réconfortante s’effondrer, l’Internet s’emparait d’un vocabulaire et de réalités différentes et évolutives qui occupent maintenant l’espace, et pas seulement celui qui est cyber. Nos enfants ont grandi dans ce nouveau monde qui autorise la différence, qui lui donne ses titres de noblesse.

LGBTQ+:

Où le + prend tout son sens.

Les sept couleurs de l’arc-en-ciel ne suffisent déjà plus.

 

Devant mon ado qui refuse maintenant les surnoms affectueux genrés (donc exit, les cocos et les cocottes, les ma belle et les mon beau… alors je suis en quête du surnom doux mais neutre, si vous avez des idées !) et qui exige qu’on transforme son prénom en diminutif neutre ; devant l’habillement noir ou coloré de mon ado qui annonce maintenant comment elle se perçoit chaque matin (gars, fille, rien du tout, tout en même temps) ; devant l’adaptation constante que mon cerveau doit faire entre le IL et le ELLE ; moi, comme parent d’une génération pré-Béatrice Martin, je me sens dépassée.

Comprenez-moi bien. J’aime mon enfant, je l’accepte avec une bienveillance inaltérable, peu importe comment elle/il se sent et se définit. Le pont de la communication entre nous est établi depuis longtemps et ne menace nullement de s’affaiblir. Je m’efforce de modifier ma façon de l’appeler et de faire comprendre à la fratrie une réalité qui appartient à un autre âge que le leur. Mais j’ai besoin de temps.

J’étais enceinte et déjà, je l’appelais par son prénom, choisi avec amour. Chaque jour depuis sa naissance, je dis son prénom sur tous les tons, j’utilise ses petits surnoms remplis de tendresse. Mon enfant n’est pas que son prénom, elle dépasse de loin ses surnoms. Mais c’est quand même tout un changement dans notre quotidien. Une habitude à perdre, une autre à prendre, alors même que l’identité et l’orientation de mon ado sont en mutation. Un questionnement au long cours. Elle cherche, elle se cherche, elle progresse, elle s’ouvre, je trouve ça admirable, beau. Je l’accepte, tout comme j’accepte de la voir cheminer et de l’accompagner sur son parcours.

Mais ça me brasse quand même. Je me sens comme une mamie de 95 ans qui n’aurait jamais vu d’ordinateur et qui devrait du jour au lendemain apprendre à utiliser Internet, Office et Photoshop. Ça se peut que j’aie besoin de temps. Moi aussi, je chemine.

* Queer: «Personne qui n’adhère pas à la division binaire traditionnelle des genres et des sexualités, s’identifiant à une identité de genre ou à une orientation sexuelle non conforme ou fluide.» http://www.lapresse.ca/arts/vie-de-stars/201606/16/01-4992516-coeur-de-pirate-se-dit-queer.php

Eva Staire

L’ami gai…

On entend souvent dire... (Moi-même, je l’ai déjà dit à la bla

On entend souvent dire… (Moi-même, je l’ai déjà dit à la blague) :

« Toute femme devrait avoir un ami gai! »

« Y’a pas meilleur ami pour une femme… qu’un gai! »

Eh bien, savez-vous quoi? C’est VRAI…

MAIS… car OUI… il y a un MAIS…

Savez-vous ce qui fait d’un homosexuel un « meilleur… meilleur ami »?

Non, ce n’est pas son orientation l’important.

Ce n’est PAS parce qu’il aime la mode… et peut nous conseiller.

Ce n’est PAS parce qu’il danse comme Travolta sur la piste de danse.

Ce n’est PAS parce qu’il cuisine bien et autre chose que des ailes de poulet…

Non…

Ce n’est PAS parce qu’il « comprend » les hommes puisqu’il en est un.

Ce n’est PAS parce qu’il aime les soirées pyjama.

Ce n’est PAS parce qu’il tripe sur Bridget Jones et son journal en braillant.

Ce n’est PAS parce qu’il peut nous coiffer et nous teindre les cheveux.

Il est le meilleur meilleur ami parce qu’il SAIT être empathique.

 

Il a connu (et plusieurs connaissent encore) les jugements, le courage de s’accepter. Le défi de s’affirmer et de s’aimer dans une société qui, même si elle se dit « ouverte », contient encore é-nor-mé-ment de stéréotypes comme ceux que j’ai énumérés plus haut.

Ce n’est PAS parce qu’ils sont… « différents ».

Mais c’est parce qu’ils SONT… « différents ».

Une différence qui dépasse celle de la personne qui couche à leur côté la nuit. Ils sont différents de certaines personnes qui regardent le monde en établissant des listes bien établies… des catégories…

Ils sont différents, car ils connaissent la persécution verbale, physique ou seulement celle qui se vit dans un regard désobligeant. Dans cette blague maladroite à laquelle ils ont appris à rire pour éviter le malaise à la personne qui l’a dite. Dans cette expression péjorative utilisant des termes socialement acceptés comme « tu cours comme un fif! »

Ils sont différents, dans leur façon de faire face à tout cela. Ils sourient ou se détournent, mine de rien. Ils nient encore trop souvent qui ils sont, avec douleur.

Cette douleur intérieure qui leur sort par la peau. Cette intimidation si souvent présente qu’elle en est devenue banale et invisible pour tellement trop de gens.

Cette douleur qui, parfois, devient si grande, qu’ils ne pensent plus qu’à l’éteindre.

 

Le problème, c’est qu’éteindre leur douleur finit par éteindre leur vie.

L’ami « gai » est un bon meilleur ami, car il a autant de sentiments que tous, mais accepte de les ressentir et de les vivre. Il ne se brime pas, lorsqu’il se libère de l’importance des jugements, comme le font les hétérosexuels.

En fait… le gai est juste le meilleur ami parce qu’il est vrai et parce qu’il a connu des épreuves différentes, qui lui ont appris ce que beaucoup apprennent plus tard… ou… trop tard… ou jamais…

Mais au final, l’ami ne devrait pas être l’ami gai. L’ami devrait être l’ami, tout simplement.

Parce que le gai, il n’est pas gai, il est HUMAIN.

Pour ceux qui voudraient connaître les activités de la Fierté, voici le site : http://www.fiertemontrealpride.com/

Simplement, Ghislaine