Tag races

Histoire de camion jaune

On vient de déménager. Un nouveau chez-nous, plus petit, plus tran

On vient de déménager. Un nouveau chez-nous, plus petit, plus tranquille, plus chaud en hiver, plus économique pour votre papa, mais surtout plus familial. Ici, les espaces vous permettront de jouer à la cachette, de courir partout en jouant à la tag et d’inviter plein d’amis.

Déjà, vos jouets s’accumulent, traînent et s’empilent. Reçus de vos cousins, cousines et amis. Il y a en tellement que je ne sais plus où les mettre. Et je trouve difficile de m’en défaire, pour certains du moins, car j’y ai tissé des toiles de souvenirs. Mais il faudra. Je crois que tous les jouets essentiels devraient être gratuits. On ne devrait pas payer pour une première bicyclette, un premier ballon, un premier cerf‑volant et surtout un premier livre. C’est essentiel à tous les enfants comme l’oxygène dans les poumons, les arbres dans les parcs, l’ombre un jour chaud d’été et le sable sur une plage.

Assis sur le balcon, vous dégustez vos glaces faites maison pendant que je termine ma sixième tasse de café. En regardant tous ces jouets, je réalise que nous ne manquons de rien. Il y en a assez pour amuser une garderie tout entière pendant une année. Ok j’exagère. Six mois! Et si nous en avions trop? Donner fait toujours du bien. Le geste humain multiplié par l’intention. Un camion jaune, payé 50 sous, traîne près de nous et souffre dans sa solitude. Délaissé, inanimé et aussi malheureux qu’un personnage du film Histoire de jouets. Il nous implore de lui offrir une nouvelle vie. Soudainement, une famille de quatre enfants, nos nouveaux voisins fraîchement débarqués du Burundi, se pointe dans notre champ visuel.

J’entends la demande du camion jaune et il me vient une idée : « Ouin, ok. Mon fils, s’il te plaît, prends le camion et va l’offrir au petit garçon là‑bas. Celui que tu vois au coin qui a les mains vides ». Les enfants doivent jouer et aucun d’eux ne devrait faire exception. Et j’aime vous lancer des défis mes chers enfants, vous amener ailleurs. Alors, tu me regardes droit dans les yeux pour bien valider ce que je viens de te dire. Je vois une bulle imaginaire sortir de ta tête comme celle qu’on voit dans les bandes dessinées : « Quoi, à eux? La grande famille que je ne connais pas? » Sous mon regard attentif et l’œil protecteur de ta sœur cadette qui te suit, tu t’exécutes, convaincu après tout du bien-fondé de ton geste. Ton nouvel ami, celui qui viendra cogner à notre porte pour apprendre les joies de l’hiver, celui qui élargira ton esprit, était content. J’ai vu de loin ta surprise de recevoir un gros câlin de sa maman que tu ne connais même pas. Et puis tu es revenu vers moi et nous avons pris conscience de ce qui venait de se passer. Dans un monde devenu trop virtuel, on peut encore serrer des mains et faire des accolades. Notre champ visuel restera le même, nous aurons l’occasion de mieux les connaître. Ça viendra.

Plus tard, à la pataugeuse, question de combattre cette canicule qui crache du feu, tu me poseras bien humblement LA question parmi les millions de questions que tu as en tête du haut de tes six ans. Elle était naïve et bien sincère. « C’est-tu vrai papa que les Noirs sont plus pauvres? » « Ben non mon fils. La couleur de la peau n’a rien à voir avec la richesse. Ce qui compte, c’est celle du cœur. Et d’être gentil. Tu sais, les enfants que tu as rencontrés pour la première fois ce matin ont sans doute laissé tous leurs jouets là où ils vivaient avant d’arriver ici. Ça prend beaucoup de place des jouets dans un avion ». Et je sais oh! combien tu aimes les défis, à quel point ton esprit compétitif est aiguisé. Et j’ajoute « Et en passant mon fils, je pense que nos nouveaux voisins courent très vite. Je pense aussi qu’ils font de la magie avec un ballon de soccer. Tu verras bien ». Allumé, tu captais le message aussi vite que tes mains sur un bol de jujubes. « Ils courent vite? » me demandes-tu. « Ils courent très vite. Tu vas aimer. Tu auras bien besoin de toutes les flammes des souliers offerts par ton grand cousin. Je te le dis! Et puis tu sais quoi? Je pense aussi qu’on vient de trouver les joueurs de hockey de ruelle qu’il nous fallait, tu sais, ceux que tu me demandais déjà de dépister avant d’arriver ici. Va te pratiquer à courir vite maintenant ».

Si nous le leur permettons, les enfants font tomber des barrières qu’ils utilisent pour bâtir des ponts d’or, sur lesquels pourra rouler le camion jaune à 50 sous. Notre chez-nous est soudainement devenu plus grand, plus chaleureux et surtout plus amical.

Marc-André Bergeron

La diversité culturelle, une richesse pour nos familles

Les derniers événements de janvier dernier ont ramené à l’avant-scène des sentiments et inter

Les derniers événements de janvier dernier ont ramené à l’avant-scène des sentiments et interrogations quant à l’immigration, les accommodements raisonnables, la radicalisation, etc. Je ne suis pas ici pour un débat d’idées sur ces sujets, mais plutôt pour partager une réflexion sur mon parcours depuis vingt ans.

Je suis une fille du 450, une vraie 450, et lorsque j’allais au secondaire dans les années 90, les étudiants s’appelaient Alexandre, Caroline, Sébastien, et les noms de famille étaient assez courants. Des Tremblay, il y en avait !

Ensuite, je suis sortie de ma banlieue pour le cégep de Laval. C’est vrai, là, le dépaysement a commencé à se faire sentir, mais encore là, j’avais un but : réussir ma technique et c’est ce que j’ai fait.

En 2002, je me suis retrouvée en milieu de travail suite à l’obtention de mon diplôme. Ce milieu était à Montréal-Nord. Alors là, pour la première fois de ma vie, j’étais en quelque sorte « la minorité visible ». Ce fut pour ainsi dire une adaptation.

Au-delà de cette impression, mes fonctions faisaient en sorte que je devais dire à des employés plus vieux, d’autres origines, d’autres religions que leurs gestes étaient non conformes. J’avais tout juste vingt-et-un ans. Je peux vous dire qu’il y a eu des accrochages, mais j’en suis sortie enrichie.

J’en suis tellement sortie enrichie, que j’ai même trouvé l’amour dans ce milieu de travail. En effet, je suis en couple avec un homme d’origine haïtienne. En mars, ça fait vingt-trois ans qu’il est au pays et il en a quarante-huit. Faites le calcul, parfois il lui arrive de dire qu’il m’a parrainée tant il s’est intégré. C’est d’ailleurs la clé, s’intégrer. Il me l’a toujours dit : tu prends pays, tu t’intègres et tu vis. Disons que dans son cas, il a bien compris, il a même choisi une Québécoise !

De mon union est née une belle grande fille de six ans et demi (oui, la demie est HYPER important). Nous habitons dans la banlieue est de Montréal. Si je regarde la photo de groupe de ma fille, sur dix-neuf enfants, il y a deux métisses (dont ma fille), un beau garçon avec des origines antillaises, un beau garçon d’origine arabe et une belle petite fille également d’origine arabe. Alors si vous faites un calcul rapide, c’est le quart qui est diversifié dans une ville de banlieue.

De plus, dans les dernières semaines, ils ont fait un calendrier en projet spécial. Il y avait d’inclus les anniversaires de tous les élèves, les jours fériés, les fêtes religieuses traditionnelles ainsi que les fêtes musulmanes qui y ont été intégrées. J’ai trouvé le projet bien fait, permettant l’intégration de tout un chacun, mais surtout sans rendre le tout compliqué !

Au fond, ma génération est probablement une génération de transition vers la diversité. Celle de ma fille est diversifiée et elle évolue de cette façon. Moi, j’invite n’importe quel ministre à aller s’asseoir dans la classe de ma fille. Il pourrait s’en inspirer pour faire avancer les projets de loi. Aussi, il constaterait que la diversité est une richesse et qu’elle se vit au quotidien dans le respect chez les enfants.

 

 

Evelyne Blanchette