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Vivre sans regrets – Texte : Stéphanie Dumas

Devenu adulte, on prend parfois le temps de penser à la vie que nous avons menée jusqu'à présent

Devenu adulte, on prend parfois le temps de penser à la vie que nous avons menée jusqu’à présent. On ressasse les événements marquants qui ont parsemé notre vie et qui nous ont parfois transformé afin de faire de nous la personne que nous sommes aujourd’hui.

Personnellement, j’aime aussi me dire que je ne dois pas avoir de regrets face à ce que j’ai fait ou pas. J’ai fait des choix, comme nous en faisons tous, mais j’ai vécu. Plus jeune, il m’est arrivé de rentrer au petit matin. Mon cadran sonnait alors déjà pour m’annoncer le début de la nouvelle journée. Même si j’étais fatiguée à ce moment-là, je ne regrette pas d’avoir vécu ces instants ni les folies que j’ai pu faire dans ma jeunesse.

Maintenant que je suis une adulte, je repense à tous ces petits ou grands événements et cela me fait sourire. Il y en a d’autres qui me mettent les larmes aux yeux évidemment. Néanmoins, je vis ma vie en étant heureuse des années qui sont passées, et ce, même si je me dis souvent qu’elles sont passées trop rapidement. C’est comme si le temps défilait de plus en plus rapidement depuis quelques années. La trentaine est arrivée et depuis, les journées passent en une fraction de seconde.

Le travail occupe le plus grand nombre d’heures dans une journée pour la majorité d’entre nous et la vie de famille occupe le temps restant ou presque. Nous devons chercher pour trouver des moments pour nous retrouver en tant que personne. C’est parfois tout un défi.

Malgré tout, il faut être heureux de la vie menée jusqu’à maintenant, des choix et des décisions prises qui font maintenant de nous qui nous sommes et de ce que nous avons réalisé. Il ne reste qu’à continuer d’avancer pas à pas sans regarder derrière…

Stéphanie Dumas

Elle s’appelait Fanny

Elle s’appelait Fanny.

Elle s’appelait Fanny.

Elle avait trente ans.

Elle était éducatrice à l’école de mes enfants.

Et elle est morte.

Noyée.

Un bête accident, probablement.

Par un magnifique dimanche ensoleillé qui sentait la fin d’année scolaire, le déconfinement et les nouveaux projets.

Une rivière, un bateau, du plaisir.

Avec tout ça vient un certain risque. Le risque de l’eau qui avale. Et qui tue.

Aux nouvelles, une jeune femme portée disparue dans la région. Recherchée par les équipes de sauvetage pendant 24 heures. 48 heures. Puis retrouvée. Trop tard.

Son nom révélé quelques heures à peine après la dernière cloche de l’année scolaire.

Sa photo aux nouvelles. Son sourire qui nous a rassurés toute l’année, même quand mes enfants lui avaient fait la vie dure toute la semaine. Son regard joyeux et intelligent qui enveloppait les enfants autant que les parents. Sa jeunesse qui la rendait si dynamique, si passionnée, prête à tout pour aider ses poussinots à s’épanouir. Tout ça s’est éteint en une fraction de seconde. Tombé à l’eau. Touché coulé.

Il me restera d’elle sa volonté infinie de trouver des solutions pour aider mes cocos. Son désir immense de marcher en équipe avec les parents et l’équipe-école dans la même direction, pour le bien-être des enfants. Cette capacité de ne jamais nous faire sentir mal ou coupables quand nos enfants dérapaient, et de nous faire sentir hyper fiers dès qu’ils progressaient.

Il me restera d’elle, aussi, la conviction qu’il faut toujours dire merci. Pas juste parce que c’est poli. Mais surtout parce qu’un « merci » fait du bien à celui qui l’exprime et à celui qui le reçoit.

Quelques jours avant sa dernière promenade en bateau, j’ai écrit à Fanny pour la remercier d’avoir si bien accueilli mes enfants, de les avoir accompagnés depuis septembre. Je lui ai souhaité de vivre une belle transition vers les nouveaux horizons professionnels qui l’attendaient après l’été. Une nouvelle vie… Qui aurait pu deviner que la transition serait si abrupte…

Quelques jours avant sa dernière promenade en bateau, mes cocos lui ont donné des cartes et des dessins pour la remercier. Je revois encore ce dessin d’un grand bonhomme allumette qui tient un petit bonhomme allumette pour l’aider « à reprendre ses esprits », comme m’avait dit mon garçon. C’est ce qu’il a retenu de Madame Fanny.

Le choc est grand devant sa mort. La peine est grande pour nous, et je n’ose même pas imaginer celle de ses enfants, de sa famille, de ses amis, de ses collègues.

Mais au moins, nous n’avons pas le regret de ne pas avoir dit merci. Nous lui avons souvent exprimé notre gratitude et l’amour humain que nous avions pour elle. Ce sera maintenant un amour angélique et une reconnaissance éternelle.

Nathalie Courcy

Ode à ma dernière grossesse

Ça y est, dans les prochaines semaines, je vivrai mon dernier accou

Ça y est, dans les prochaines semaines, je vivrai mon dernier accouchement… Je n’ai plus aucun regret. Je suis pleine de gratitude pour cette dernière grossesse et je tenais à lui rendre hommage. J’ai porté dans le creux de mon ventre cinq petits humains. On entend souvent que chaque grossesse est différente et ça ne peut pas être plus vrai!

Quand j’entendais les autres mamans qui disaient adorer être enceintes, j’étais tellement jalouse… Moi, j’ai vécu des grossesses difficiles. J’ai vomi tous les jours, pendant toutes les grossesses. Je peux vous dire que ce n’est pas que du bonheur… J’ai eu de nombreux malaises et pertes de connaissance dans les épiceries. Je peux aussi vous dire que c’est vraiment gênant de se réveiller par terre avec une inconnue qui vous tapote le visage. J’ai été alitée pendant des mois pour éviter d’accoucher trop tôt… J’ai donc vécu mes quatre autres grossesses avec des maux au quotidien, beaucoup d’inquiétudes et de grands deuils.

La vie nous a apporté cette dernière grossesse alors que nous ne l’attendions plus. Nous savons avec certitude que ce sera la dernière, puisque mon cher mari était déjà vasectomisé quand on a appris que j’étais enceinte. Et c’est vraiment un sentiment étrange. Avoir cette certitude que ce petit être sera le dernier que je porterai. Et le savoir déjà, avant même qu’il ne vienne au monde.

On dit que la vie fait bien les choses… eh bien, elle a tenu à m’offrir ce petit miracle, qui me réconcilie chaque jour avec la maternité. Je dois accoucher ce mois‑ci. Je n’ai pas vomi une seule fois… Je n’ai pas perdu connaissance une seule fois… Je suis au repos à la maison, mais je ne suis pas forcée de rester couchée non plus… Et pour la première fois de ma vie, j’aime être enceinte.

J’aime être enceinte.

Merci, la vie, de m’avoir offert cette chance. Je profite de chaque instant, de chaque vague qui se dessine sur mon ventre. Je profite de chaque semaine de cette dernière grossesse. Je prends des tonnes de photos. Je prends le temps de parler à mon bébé et de le remercier pour chaque petit coup de pied. Il m’aura fallu tellement d’épreuves pour les apprécier…

Mon bébé, tu seras le dernier. Quoi qu’il advienne, tu seras le dernier. Le dernier à entendre mon cœur battre de l’intérieur. Le dernier que je sentirai hoqueter dans mon ventre. Le dernier que je bercerai, en me flattant l’énorme ventre arrondi. Le dernier à qui je chanterai sa berceuse…

À chacune de mes autres grossesses, je ne pouvais pas dire si la famille était finie ou non. Enceinte, j’avais constamment l’impression de vivre avec une épée de Damoclès au‑dessus de la tête… Nous vivions dans le seul souhait d’avoir enfin un bébé en santé. Mais quand les gens nous demandaient si nous voulions un deuxième ou un troisième enfant, je ne savais pas quoi répondre. Une partie de moi était si fatiguée déjà… Mais une petite voix me disait que ce n’était peut-être pas fini… Je n’arrivais pas à affirmer avec conviction que notre famille était complète.

Maintenant, oui. Et c’est vraiment une drôle de sensation, toute nouvelle pour moi. Je n’ai pas de peine. Je suis certaine que ce bébé sera le dernier. Et je me sens bien avec ça! Je n’aurais jamais pu penser être aussi sereine avec la fin d’une aussi grande étape dans ma vie… Mais je n’ai aucun regret.

Je vivrai mon dernier accouchement… Je suis peut-être naïve, mais j’ai moins peur cette fois‑ci. Je connais la douleur, je sais que je vais survivre. Je suis persuadée, cette fois, que ce bébé vigoureux ira bien. Je le sens en moi. J’ai confiance en ma force de le mettre au monde, et je lui fais confiance pour tout le reste.

Le jour de sa naissance, je laisserai dernière moi une grande partie de ma vie. J’ai le sentiment que c’est un nouveau chapitre qui commence. Un chapitre où j’élèverai mes enfants, où je penserai à leur avenir, sans regarder derrière moi.

Merci, mon dernier bébé, de m’avoir permis de terminer cette étape dans la sérénité et dans la paix. Merci d’avoir éliminé mes peurs, mes regrets et mes deuils. Merci d’avoir aidé mes peines à guérir. Merci de me permettre de porter la vie, une ultime fois.

Joanie Fournier

 

J’aurais voulu être… moi!

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On nous dit toujours de ne pas regarder derrière, que c’est du passé. On nous suggère de regarder droit devant et de vivre le moment présent. Sauf que dans la vie, on change. Plus les années passent et plus on évolue. Nous vivons certaines épreuves ou certains évènements qui font de nous des personnes différentes. Est‑ce qu’on devait avoir des regrets? Je ne pense pas. Si nous sommes devenus ce que nous sommes aujourd’hui, c’est grâce au passé. Est‑ce que parfois, on voudrait avoir vécu notre vie différemment? Peut‑être.

Pour ma part, il y a ma vie avant la dépression et ma vie après la dépression. Quand on est au bout du rouleau, quand on touche le fond du baril, quand on est à bout, choisissez l’expression qui vous convient, il y a des prises de conscience obligatoire à faire. Ici, le constat a été bien simple : je n’ai pas vécu ma vie jusqu’à maintenant en m’écoutant pour vrai. Je n’ai pas respecté mes valeurs. Je n’ai pas fait ce qui me rendait heureuse et fière. Au contraire, j’ai fait ce que la société voulait que je fasse. Pour plaire, pour être dans le rang, pour ne pas déranger, pour ne pas trop faire parler de moi, pour être acceptée, pour ne pas faire de vague, etc.

Alors j’ai accouché à l’hôpital, mon premier enfant a eu quelques vaccins, mes enfants ont porté des couches jetables, j’ai acheté des purées, ils ont eu des jouets, trop de jouets, beaucoup trop de jouets en plastique, mes enfants sont allés à la garderie, puis à l’école, puis au service de garde, puis au camp de jour. 

Si j’avais écouté ma petite voix intérieure, si j’avais décidé de vivre selon mes valeurs et si j’avais assumé mes choix, ça ne se serait pas passé comme ça! J’aurais voulu accoucher en maison de naissance. Je suis contre les vaccins. J’aurais voulu utiliser des couches lavables et j’aurais fait mes propres purées. J’aurais eu le courage de dire à ma famille que ça suffit les jouets. Je serais restée à la maison avec mes enfants. J’aurais adoré leur faire l’école à la maison. Je ne me serais pas limitée à une maison. J’aurais voulu avoir une caravane et voyager en famille pour voir le plus de choses possible.

N’ayez pas peur de vivre selon vos convictions, vos valeurs et vos choix. Assumez, choisissez, soyez vrais. Ça va peut‑être choquer ou bousculer des gens. Des gens qui, comme moi avant, restent dans le rang pour ne pas déranger. Laissez de côté la phrase « Mais qu’est-ce que les autres vont penser?! » On s’en fout de ce qu’ils vont penser.

Est‑ce que c’est trop tard pour moi? Pour certaines choses, oui… Je ne pense pas que mes enfants, à l’âge où ils sont rendus, aimeraient l’idée de manger de la purée faite maison par maman! Mais pour ce que je peux changer, il me reste du temps. Et pour le reste, ce sera dans une autre vie. Et cette fois, je me fais la promesse de vivre pour moi.

Valérie Grenier