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Tu as juste à te parler…

J’ouvre les yeux, je jette un regard au cadran : 3 h 36. L

J’ouvre les yeux, je jette un regard au cadran : 3 h 36. Le silence de la nuit est encore bien présent. Je referme les yeux, souhaitant me rendormir rapidement. Il est trop tard, mon cerveau s’est mis en marche.

Les idées se bousculent dans ma tête. Des scénarios épouvantables prennent vie. Je sens cette brûlure caractéristique dans mon ventre. Elle monte en moi graduellement. Ma respiration s’accélère de plus en plus.

J’ai envie de crier, de pleurer. Je tremble de tout mon corps. J’ai chaud, je transpire abondamment. La crise de panique m’envahit tranquillement.

Je choisis une lettre : C. Allez Mélanie, trouve tous les mots qui commencent par C. Concentre‑toi. Tu dois focaliser sur autre chose : cadran, cabane, cadeau, chien, chat. Je n’y arrive pas, je me projette au chevet de ma fille intubée qui lutte pour sa vie. Je me maudis de l’avoir envoyée à l’école. Elle a attrapé ce truc par ma faute.

Je ne contrôle plus ma respiration, je respire tellement vite. La poitrine me serre, j’ai peur de mourir. J’ai un déluge de larmes qui roulent sur mes joues. Je tremble tellement que mes dents claquent ensemble. Je veux que ça finisse. La crise de panique a gagné. J’ai perdu tout contrôle.

Respire ! La respiration, c’est la clé de tout. Je peux surmonter ça. J’y suis déjà arrivée. Je dois être plus forte que mon anxiété. Je ne suis pas cette anxiété.

Lentement, la crise s’en va. C’est plus facile pour moi de respirer. Je ne vais pas mourir. Lentement, ma respiration reprend un rythme plus normal. Cheval, cuillère, chaudière, crème, crème glacée. Ça va mieux, 3 h 59. Le sommeil me gagne enfin. Les larmes roulent encore sur mes joues.

Je vis avec mon anxiété depuis l’âge de neuf ans. Je me souviens parfaitement de ma première crise. Je me souviens de ma mère couchée avec moi et qui me dit : « Respire, ça va passer, tu peux y arriver. Allez, trouve des mots avec moi. »

J’allais bien depuis un bout de temps. Ma médication m’aidait énormément. Mais depuis que la COVID est apparue, mes crises d’anxiété sont revenues en force. J’ai repris mon suivi psychologique, ma médication a été augmentée. Je gère mal, très mal. Je vis une anxiété généralisée. C’est un problème de santé mentale, pas une anxiété normale que la population vit.

Alors à toi qui me dis « Tu as juste à te parler » : je sais que tu n’as jamais vécu ça, parce que tu saurais. Ne me dis surtout pas qu’on est tous dans le même bateau, parce que ce n’est pas le cas. Mon bateau à moi, il est plein de trous. J’essaie tant bien que mal de le patcher pour affronter la tempête et les vagues qui me frappent les unes après les autres sans répit. Mon bateau prend l’eau et j’ai vraiment peur de couler.

Mélanie Paradis

J’ai accouché de l’anxiété – partie 1

Il y a quelques mois, je me suis levée, un bon matin de semaine, av

Il y a quelques mois, je me suis levée, un bon matin de semaine, avec un goût amer dans la bouche. Pourtant, la veille, je n’avais rien fait de vraiment spécial. J’avais commencé ma journée à 6 h. Je m’étais habillée avec mes vêtements choisis la veille, maquillée pour avoir l’air moins blanche que je ne l’étais déjà et aplatis mes cheveux entre deux gorgées de café. Puis, j’avais réveillé les enfants afin de débuter leur journée avec cette routine à la fois usée et rassurante : habillage, déjeuner, lavage des dents et tout le bataclan.

Puis, vint le moment de cette dernière gorgée de café froid pour aller les déposer à la garderie, leur seconde demeure.

La journée s’était déroulée comme à l’habitude. Mais je me souviens d’avoir partagé mes pensées entre la tâche demandée et mes enfants qui me manquaient effroyablement. Plus qu’à la normale.

Je vous évite la routine du soir entre le retour à la maison, les cris de supplice d’enfants affamés qui semblaient n’avoir rien mangé depuis trois semaines et le concours de celui ou celle qui aura la lourde tâche de baigner dans le bain en premier.

Petite routine d’un parent qui tente de bien concilier la vie de famille et le travail. Néanmoins, ce jour-là, j’avais une écœurantite aiguë de ce train de vie. J’avais un poids sur les épaules. Une belle grosse brique qui semblait vouloir m’accoter au mur l’instant d’une inspiration. Au point où les étourdissements venaient me troubler sans cesse et que le cœur ne demandait qu’à fuguer de mon corps. J’ai voulu reprendre mon souffle, mais j’avais mal.

Il se passait quoi avec mon corps? Je n’avais jamais vécu de tels symptômes physiques. Étais-je malade? Non, je n’avais pas le temps de l’être. Je devais me ressaisir.

Les semaines ont passé. Et un soir, les palpitations ont recommencé de plus belle. Plus intenses, plus douloureuses. Ce même goût amer dans la bouche aussi. Comme du métal.

Je me souviens d’avoir tourné en rond, dans le grand lit, à me demander si j’étais en train de faire une crise cardiaque. J’étais jeune et j’avais pourtant l’impression d’être sur mes derniers miles. Et plus j’avais cette idée en tête, plus j’avais cette pression constante sur mon abdomen. Je ne voulais pas mourir.

Laissez-moi vous dire que j’ai rapidement pris rendez-vous avec ma médecin de famille pour qu’elle puisse me diriger vers un cardiologue. Prenant ma demande au sérieux, la secrétaire m’a offert un rendez-vous dès le lendemain. Bien heureusement, elle avait compris ma détresse.

Après un examen complet, une panoplie de questions et une seconde vérification de mon cœur (à ma demande!), la médecin pose son diagnostic.

« Votre cœur va très bien! Je ne vous réfère pas en cardiologie puisque ce que vous avez ne provient pas directement de là. »

Oh… Intérieurement, j’ai le cœur en chamade. Des chaleurs et des palpitations et elle prétend que mon cœur n’est en rien en cause de toutes ces manifestations physiques!?

« Vous faites de l’anxiété, madame! »

Quoi? Un trouble anxieux? Mes inquiétudes constantes, c’était ça? Le cœur qui me sort littéralement de la poitrine, c’était ça aussi? Et toutes les fois où je n’ai pas réussi à faire face à une situation parce que la nausée me prenait?

« Oui, et ça vient de tout ce que vous avez vécu, madame. Dont les naissances difficiles de vos enfants… Des traumatismes qui ont laissé des traces »

(…)

Une prescription plus tard, les questions dansaient dans ma tête…
L’anxiété, c’est génétique? Est-ce que mes enfants auront le même trouble que moi? Comment bien m’outiller et les aider si c’était le cas? Mais comment allais-je trouver la sérénité pour vivre à travers cette anxiété?

Je réalisais maintenant la complexité de ce trouble, auquel j’avais donné naissance, en même temps que mes enfants…