Archives mars 2020

Ode à tous les travailleurs

Je le sais…

Mars 2020, vendre

Je le sais…

Mars 2020, vendredi 13. Les écoles ferment. L’état d’alerte est envoyé à travers le Canada. Le monde entier est paralysé. La pandémie a pris le dessus sur nos habitudes de vie.

C’est avec la peur au ventre que toi, tu te lèves tous les jours pour aller travailler. Tu as jugé nécessaire de contribuer au bien-être de la société. Tu t’exposes au danger pour exercer ton devoir de citoyen. Pour subvenir aux besoins de ta famille. Pour aider ton employeur à garder le cap sur son chantier. Pour approvisionner la population. Pour soigner les malades. Pour garder les enfants de ces gens qui s’exposent tous les jours. Pour répondre aux appels d’urgences. Pour reporter tous les rendez-vous planifiés dans divers services. Pour aider, tout simplement.

Je le sais que tous les matins, ça te tiraille par en‑dedans. Que toi aussi, tu aimerais rester chez toi, à l’abri de ce foutu virus. Suivre les nouvelles, profiter du temps de repos exigé avec ton enfant. Respirer. Loin du danger. Mais ta réalité est tout autre. Tu y vas une journée à la fois. Une heure à la fois.

Je le sais que tous les matins où tu déposes ton enfant dans un service de garde d’urgence, tu le fais à contrecœur. Que lorsque tu quittes la maison, tu te fais rassurant, en disant que tu prends toutes les précautions nécessaires. Mais je le sais aussi que tu es inquiet. Je le sais que tu espères croiser des gens consciencieux dans ta journée. Des gens qui, eux aussi, respectent les règles gouvernementales. Mais je le sais que ce ne sont pas tous les gens qui le font. Malheureusement. Pis je le sais que ça te fâche. Avec raison.

Je le sais que ça fait juste commencer et que tu es déjà fatigué. Le stress physique et psychologique est constant. Je le sais que tes mains n’en peuvent déjà plus. Cette surdose de lavage de main te donne la nausée. Tes mains brûlent. Ça fait juste une semaine. Ta tête est pleine. Tu cours pour toi‑même subvenir à tes besoins en fréquentant les lieux publics. C’est toi qui t’exposes constamment pour protéger ta famille. Mais je sais aussi que tu le fais avec tout ton cœur. Que tu n’y changerais rien, dans les circonstances.

Nager dans l’inconnu. Un inconnu si peu rassurant, c’est effrayant.

Je veux que tu saches que nous sommes tous derrière toi. C’est beau de te voir aller malgré cet état d’urgence. C’est beau de voir des gens avec tant de dévouement dans un monde si nombriliste. Tu me donnes espoir. Espoir que cette pandémie fera réaliser beaucoup de choses aux gens. Que l’entraide, l’amour et la résilience dont tu fais preuve donneront envie aux jeunes et aux moins jeunes de s’ouvrir sur le monde.

Pour toi, le caissier, le transporteur, l’adjoint, le journalier… merci. Des métiers souvent peu valorisés. Vous êtes des gens de cœur. Vos emplois se doivent d’être enfin reconnus. Dans cette tragédie, nous réalisons enfin l’importance de chaque emploi. Tous aussi importants les uns que les autres.

À tous les travailleurs acharnés, on vous envoie une grosse dose d’amour et de courage.

Ça va bien aller.

Maggy Dupuis

 

Lettre à mes collègues travailleurs sociaux

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En cette semaine des travailleurs sociaux, je veux nous dire merci. Nous remercier de nous lever encore chaque matin pour exercer ce métier qui peut être tellement beau, mais aussi tellement éprouvant. De quitter tous les matins en sachant qu’on doit se battre contre un système de géants qui voudrait qu’on traite les humains comme des numéros. Les uns après les autres, à la chaîne, comme si on travaillait dans une usine à réparer les cœurs blessés. Un petit pansement ici, une vis là, une nouvelle pièce ici, voilà monsieur, madame, vous êtes prêts. Si seulement c’était si simple… Pourtant, nos semaines ne ressemblent pas du tout à cela.

Lundi matin, toi, tu as déjà une dizaine de messages sur ta boîte vocale. Il me semble que tu as juste quitté pendant deux jours, mais bon, tu le sais que la souffrance, elle, ne prend pas congé le samedi et le dimanche. Tu le sais que tu vas devoir prioriser et que les crochets à côté des tâches qui restent en suspens attendront encore une journée de plus. Tu pars et tu t’en vas rencontrer monsieur Germain. Il a perdu sa femme récemment. Il est désemparé, ça faisait trente ans qu’ils étaient ensemble. Il ne voit pas comment il pourra vivre seul, dans sa grande maison, sans elle. Tu l’écoutes, tu essayes de lui expliquer que le deuil, ça prend du temps. Qu’il y a des jours où il ne verra plus le sens de sa vie et d’autres matins où sa peine sera un peu moins pire qu’hier. Tu lui souhaites bon courage et tu repars vers la résidence de madame Comeau. Elle a fait une chute en fin de semaine. Elle habite seule dans sa maison, elle a 92 ans. Ça fait des semaines que tu tentes de lui montrer les possibilités de résidences, mais non, pas question pour elle de se retrouver dans un « stationnement de personnes âgées qui attendent de mourir », comme elle le dit si bien. Tu lui cherches des ressources pour qu’elle ait un minimum d’aide à la maison, puis tu te dis que ce n’est que conversation remise avec elle.

Mardi matin, toi, tu reçois l’appel d’une femme et tu arrives à peine à comprendre ce qu’elle te dit au téléphone. Tu saisis quelques mots à travers ses sanglots et tu comprends qu’elle s’est fait agresser par un ami. Elle croit que c’est de sa faute parce qu’elle n’aurait pas dû boire pendant cette soirée‑là. Elle te dit que toute sa famille le lui rappelle constamment. Toi, t’essayes de lui dire qu’elle n’est pas responsable, mais c’est pas facile de lutter contre la parole d’une famille entière. Puis, tu rencontres une femme qui vient de quitter son mari après des années d’enfer. Elle tente de se convaincre que ce n’était pas si pire, qu’elle n’a pas trop sa place ici, qu’il y a d’autres cas bien pires qu’elle. Ça te surprend chaque fois de voir comment les gens se sentent illégitimes de demander de l’aide, alors qu’il n’y a rien de banal dans l’histoire que tu viens d’entendre.

Mercredi matin, toi, aujourd’hui tu dois rencontrer la maman du petit Rémi. Tu dois lui annoncer que son enfant sera placé en famille d’accueil. La rencontre est à peine commencée qu’elle te crie déjà des noms. Tu commences à être habituée d’entendre tous ces mots, mais il y a des jours où t’aimerais que ton parapluie soit un peu plus imperméable. Il y a aussi Rémi que tu dois aller chercher à l’école pour l’amener chez Lucie, la maman de sa nouvelle famille d’accueil. Il a six ans. Il ne comprend pas vraiment ce qui se passe, mais t’essayes de lui expliquer du mieux que tu peux qu’il va devoir faire dodo ici pendant quelque temps.

Jeudi matin, toi, tu rencontres madame Meunier qui vient d’être évincée de son logement. Elle te dit qu’elle ne sait pas où elle va aller. Elle doit quitter dans deux jours, mais elle n’a pas l’argent ni un bon nom pour se trouver un nouveau loyer. Tu réussis à lui trouver une place dans un organisme du coin. La dame est contente, mais te dit qu’elle n’ira pas. Pas question de laisser tomber Tigrou, son chat ; elle préfère vivre dans la rue plutôt que sans lui. Tu passes l’avant-midi à faire des téléphones pour trouver un endroit où elle pourra l’amener avec elle. Tu le sais, parfois, les animaux sont le seul ancrage qui permet aux gens de maintenir la tête hors de l’eau.

Vendredi matin, toi, tu rencontres un homme qui a fait une tentative de suicide hier. Il ne comprend pas pourquoi il est encore en vie. Il se traite de lâche. Tu essayes de comprendre ce qui a bien pu arriver pour qu’il en arrive là. Il te parle à mots couverts. Il a tellement honte. Il vient de se séparer, a perdu sa maison, ne voit plus ses enfants et vient de perdre son emploi à cause de ses problèmes de jeu. Tu l’écoutes et t’essayes de trouver le petit rayon de soleil dans sa tempête qui lui permettra de s’accrocher.

Le travail social, c’est ça : essayer de comprendre l’inexplicable. Me mettre un baume sur des blessures invisibles. Être ton propre outil de travail avec toutes les émotions qui viennent avec le fait de côtoyer la souffrance, le malheur et la misère tous les jours. Parce que tu as beau travailler dans ce domaine depuis 5 ans, 10 ans, 20 ans, chaque personne est différente et il n’y a malheureusement pas de recette magique.

Combien de fois t’es‑tu demandé pourquoi tu avais choisi ce métier‑là déjà ? Combien de fois as‑tu senti un regard de pitié et de tristesse quand tu as dit ce que tu faisais dans la vie ? Combien de fois as‑tu entendu le commentaire « Oh mon dieu ! Je sais pas comment tu fais pour faire cette job‑là ! » ?

Eh bien aujourd’hui, j’ai envie que vous, lecteurs, sachiez le secret de notre métier : la capacité à croire en l’autre. Nous, nous ne sommes que de passage dans la vie des gens pour éclairer leur chemin ; eux, ils font tout le reste. Il y a aussi notre flamme, notre flamme qui s’appelle l’espoir. L’espoir que notre travail, que nos luttes changent un peu les mentalités et par le fait même la vie des personnes. Et par‑dessus tout, ce qui nous permet de nous lever tous les matins, c’est que nous connaissons la capacité des gens à rebondir d’une épreuve, d’un drame. Nous le savons, nous en avons été témoins tellement souvent !

Et puis, je ne peux passer sous silence le travail acharné des travailleurs sociaux en ce temps de crise. Une profession qui passe sous silence, mais qui fait partie des services essentiels. Ils ne peuvent pas rester chez eux et prendre soin des leurs, parce que le virus ne diminue pas la détresse bien au contraire. Alors, mes chers collègues, merci d’exister !

Catherine Desgroseilliers

 

École branchée et écoles fermées

On dit que les enjeux à l’ère du numérique ne sont pas techniqu

On dit que les enjeux à l’ère du numérique ne sont pas techniques : ils sont humains et relationnels. L’importance de la situation de santé publique actuelle a entraîné la fermeture des écoles et nous invite tous à revoir notre mode de vie. Pour certains, la cohabitation sept jours sur sept avec leurs enfants et adolescents n’est pas tout à fait au point. Pour d’autres, trouver son équilibre en mode télétravail reste difficile. C’est normal de se sentir déstabilisé en ce moment. Je me le répète d’ailleurs régulièrement. Cette situation est hors du commun et elle exige de se réorganiser. Respirons et donnons‑nous du temps pour nous ajuster!

Les conférences de presse de notre gouvernement sont actuellement vraiment aidantes et conviviales. Trouvez‑vous? On se sent pris en charge et rassuré. Les actions de la population sont reconnues et valorisées. Les consignes et les mesures d’aide sont évolutives et clairement transmises. Et après? Comment choisir efficacement ses sources d’informations alors qu’on est submergé partout sur les réseaux sociaux, dans nos boîtes de courriel et à la télévision? Qui peut bien nous aider à relever ces défis?

Je connais un média qui a une ligne éditoriale et une mission bien particulière : l’École branchée – Enseigner à l’ère du numérique? Parce que les jeunes méritent le meilleur de nous‑mêmes tout au long de leur parcours scolaire, l’École branchée est le média qui accompagne les enseignants du primaire et du secondaire ainsi que tous les intervenants de l’écosystème éducatif, dont les parents.

L’École branchée est en première ligne pour soutenir la communauté éducative et les parents pendant ce temps d’arrêt qui pourrait se prolonger. Plusieurs dossiers évolutifs sont déjà publiés, dont un métarecensement d’outils et de ressources pédagogiques à connaître, un dossier de ressources pour l’enseignement à distance, une revue quotidienne de la couverture des grands médias en ce qui concerne l’éducation ainsi que d’autres articles qui sont mis à jour sur le site ecolebranchee.com.

Pour les parents, une section complète offre gratuitement des ressources pour coéduquer à l’ère du numérique. Qu’est‑ce que vous y retrouverez? Un magazine École branchée destiné aux parents, une série de chroniques, d’entrevues et de capsules vidéo destinés à favoriser le développement de la relation entre les enseignants, les intervenants et les parents. La relation parent-enseignant est déterminante dans la réussite des jeunes. Et parfois, elle n’est pas si simple à établir. Elle unit deux univers, école et famille, qui composent la vie de nos jeunes. Comment mieux communiquer afin de favoriser le bien-être et la réussite des jeunes à l’ère du numérique? C’est exactement ce qui a inspiré la création de ces ressources.

« Cette période présente un défi relationnel qui risque d’avoir de profonds impacts. Contribuer à la bonne circulation de l’information et au resserrement des liens entre les familles et les écoles au bénéfice des jeunes sera notre rôle dans les prochaines semaines », explique la directrice de l’École branchée, ma grande amie Audrey Miller, qui a aussi participé à la création du groupe Facebook Écoles fermées, parents sollicités!, ayant réuni près de 10 000 membres en sept jours. Dans ce groupe, vous rencontrerez des gens géniaux qui partagent le meilleur de qui ils sont et de ce qu’ils font pour inspirer d’autres parents à rendre cette période éducative et agréable, sans pression ni prescription.

Pour faire que cette période compte, il importe d’y prendre du plaisir en trouvant ce qui convient à chacun de nous.

Stéphanie Dionne

 

J’ai pleuré en faisant un pain aux bananes

La grande avait la bouche pleine de sucre, la petite les deux mains

La grande avait la bouche pleine de sucre, la petite les deux mains dans la farine. La cuisine était un foutoir total. Ma tête aussi. Pleurer moins fort que le bruit de la mixette était la meilleure option que j’ai trouvée.

Je voulais travailler les fractions dans un contexte réel. J’avais des intentions et des attentes. Des bananes et des pépites.

Je me suis retrouvée à faire la vaisselle seule. Mais pourquoi dans ma classe de 26, je réussis à faire une soupe géante d’Iroquoiens et que j’ai tellement de volontaires pour laver et essuyer que je dois piger? C’est un secret bien gardé après le secret de la Caramilk ou quoi? Je sais par contre pourquoi les bananes congelées de novembre 2019 me rappellent ma tendance à procrastiner. Ça, c’est d’une évidence.

Pendant que le four cuisait ma déception, je suis allée nettoyer mon mascara. Mais pourquoi je me maquille pour faire un foutu pain aux bananes? Je suis en isolement total. En attente du résultat du test de la COVID-19 de la petite voisine que j’ai gardée le jour de la tempête. Je me regarde dans le miroir. Les doutes, ça fait vieillir.

Je n’ai pas voulu que tout soit parfait. 2019 me l’aura appris. J’ai voulu donner ce que je croyais le mieux. J’ai voulu être ce parent efficace comme Thomas Gordon le décrit dans son livre. J’ai voulu me reprendre…

Depuis une semaine, j’essaie de créer une routine sécuritaire pour les filles. Des choix, de la liberté, du temps, du plaisir dans l’incertitude. J’ai voulu me reprendre. Que tout ce que je donne à mes élèves depuis vingt ans, l’énergie, les sacrifices et les compromis, rejaillisse enfin sur ma famille.

J’ai voulu me reprendre en faisant de ma table de cuisine un quartier général, un bureau géant, et de la fenêtre, un tableau. J’ai voulu recréer la classe. J’ai voulu aider dans ma posture de prof.

Mais ça reste la maison, avec le chat qui marche sur la table. Et je reste la maman qui fait du pain aux bananes avec du mascara pas waterproof.

Je ne suis plus dans ma classe. Je n’y remettrai probablement pas les pieds avant septembre. Je vis une forme de deuil. J’avais des projets pour mes élèves que je suivais depuis deux ans. J’aurais dû le faire, ce feu dans la cour pour faire cuire du pain banique avec les parents. J’aurais dû les accrocher les cabanes dans le boisé. Les mésanges ne savent rien de la pandémie. Elles ne sont pas confinées.

Dans ma classe extérieure, j’étais utile. Pas comme dans ma cuisine. J’avais le sentiment de transmettre le goût d’apprendre. C’était ma plus grande mission. Les missions héroïques tombent dans les cuisines. Les projets nobles font place aux dictatures de la gestion du temps d’écran. Je me sens inutile pendant que mon chum travaille au sous-sol pour trouver des solutions pour sa compagnie. Il s’adapte, collabore et crée. Je l’admire. Pendant que la fille de la pharmacie place des Tylenol sur les étagères, que l’emballeur emballe le souper de la famille de cinq, que la femme teste des gens dans leur char et que tous les autres font des heures supplémentaires. Je les admire. Je souhaite presque que les « mesures de guerre » viennent me chercher pour contribuer.

J’ai voulu me reprendre… Mais je passe à côté de ce qui compte, on dirait. Il faudrait me déprogrammer. Nous déprogrammer. La pédagogie sociale, c’est quoi sans les autres? J’ai perdu mes repères, mes projets. Mes filles aussi ont perdu leurs repères. Elles ont dû dire au revoir à leur papa hier, sans trop savoir quand elles le reverront. La garde partagée n’est pas recommandée en temps de pandémie. Surtout quand un des deux parents travaille. Je n’ai jamais été maman à la maison. Je les admire, les mères pleines d’espoir et de force. Mes grands-mères. Je les admire.

Je suis née pour aider. Pour créer des liens. Je ne vis pas sans les autres. J’ai besoin des autres. Mes filles aussi. Les autres, c’est nous maintenant. Avoir toutes ces idées, mais devoir attendre. J’implose dans ma cuisine.

Ma grande, celle qui avait la bouche pleine de sucre, a vidé un pot pour le remplir de petits billets écrits sur des écorces de bouleau. Des prénoms à piger pour leur rendre des services, leur faire plaisir. Sa dysorthographie est évidente sur chaque petite écorce. Et puis? Elle l’a fait pour les autres.

Ma petite, celle qui avait les deux mains dans la farine, vient de m’embrasser par en arrière et dessine un arc-en-ciel avec « Ça va bien aller ». Elle le place dans la fenêtre. Pour les autres.

Le pain aux bananes embaume la maison. Cette maison qui abrite les doutes, de la musique, les chicanes d’enfants, les danses improvisées, la peinture éclatée, la cuisine en bordel, les poèmes à minuit moins quart, les crayons sur la table de la cuisine, l’amour qui se reconstruit. La maison qui est ce repère de la famille. Cette cellule commune qui était il y a cinq jours diluée dans le travail et les faux désirs de consommation depuis trop longtemps.

Je voulais me reprendre. Je suis les réflexions qui appellent aux changements. Je suis les doutes et la force. Je suis les bananes et les pépites. Je suis la prof et la maman. Vous êtes ces parents qui doutent dans leur cuisine. Vous vous pensez seuls. Vous vous trompez. Nous sommes ensemble dans cette cuisine. Et c’est avec vous aussi que j’aimerais partager ce pain aux bananes, même si les bananes sont de 2019.

Quand tout sera terminé, que l’école aura repris, que les familles seront revenues à l’essentiel, que les mésanges auront de nouvelles cabanes, que je me sentirai utile même dans une cuisine, nous ferons un pain aux bananes collectif digne du Record Guinness. Ensemble. Nous contribuerons. Ensemble. Nous nous reprendrons.

Catherine Lapointe

https://ecolebranchee.com/pleurer-en-faisant-un-pain-aux-bananes-covid-19/

 

Trop loin

Maman, j’aimerais tellement habiter plus près quand la vie t’en

Maman, j’aimerais tellement habiter plus près quand la vie t’envoie un coup dur. Je croyais que ce serait plus facile lorsque je rentrerais au Québec. Que les 650 km qui séparent le Saguenay de l’Outaouais seraient de la petite bière comparés à l’océan qui faisait barrage entre nous pendant deux ans. Mais que je sois sur un autre continent ou à la frontière de l’Ontario, c’est toujours aussi difficile. Tu m’annonces une mauvaise nouvelle et je voudrais te serrer dans mes bras… sauf que je dois me contenter d’un téléphone pour essayer de te réconforter et ça me déchire en dedans.

En plus, je sais que je possède le meilleur remède pour te remonter le moral. C’est peut-être toi qui m’as tricotée, mais je connais les aiguilles et la chaude laine de la tricoteuse! Je sais bien ce qui pourrait t’aider : tes deux petits-fils qui débordent de joie de vivre et savent nous faire oublier la souffrance le temps d’un éclat de rire. Mais je ne peux pas t’offrir ce précieux antidote aux idées noires présentement. Lui aussi, je l’ai apporté trop loin.

L’épreuve qui a frappé notre famille aujourd’hui, c’est que la vie de ta mère, ma grand-mère, s’est soudainement retrouvée menacée. Bouleversée, j’ai replongé dans le même sentiment d’impuissance qui m’avait dévastée il y a deux ans quand tu m’annonçais ta biopsie. Je m’en souviens encore comme si c’était hier…

 

Le téléphone avait sonné… Bruit insolite dans ma maison italienne. Habituellement, famille et amis nous contactaient par vidéo… On s’installait devant l’ordinateur, à heure convenue, pour retrouver nos êtres chers. Ce coup de fil surprise m’avait donc automatiquement rendue nerveuse.

Tu n’avais pas étiré le supplice inutilement et m’avais rapidement annoncé l’objet de ton appel. Suite à deux mammographies anormales, tu avais dû passer une biopsie. Tu attendais maintenant les résultats… Qu’on t’annonce si tu avais un cancer du sein ou non.

La première vague d’émotions fut si forte que je n’aurais pu prononcer un seul mot sans me mettre à pleurer. Heureusement pour moi, tu as tout de suite enchaîné avec le récit des deux dernières semaines. Tout s’était déroulé pendant mon voyage en France. Tu attendais mon retour à la maison pour ne pas gâcher mes vacances de Pâques (une vraie maman!). Mais tu savais que je serais en colère si tu me cachais plus longtemps l’attente insupportable que tu devais endurer. Ta vie avait viré boutte pour boutte en deux semaines.

Mon premier réflexe était de vouloir être près de toi. Foutu téléphone! Il y a des choses déjà tellement difficiles à dire, tu ne devrais pas avoir à les répéter. « Excuse-moi, la ligne a coupé. Tu as dit que tu croyais que c’était grave ou que ce n’était pas grave? » Et maintenant, c’était à mon tour de parler. Mais la ligne était tellement mauvaise que tu n’entendais rien de ce que je disais.

Je peux t’imaginer, dans ton salon, fixant un banc de neige gris par la fenêtre… Tu viens d’annoncer à ta fille que le cancer est revenu dans ta vie et tu n’as même pas bien compris ce qu’elle t’a répondu. J’aurais voulu que tu sentes qu’on était avec toi. Qu’on te soutiendrait autant que la première fois que ces maudites cellules atypiques étaient apparues. Du temps où on habitait dans la même ville et qu’on pouvait remplir ton congélateur de bons petits plats avant l’opération. Qu’on pouvait t’organiser un Noël de rêve pour t’entourer d’amour et te faire sourire.

Ce qui avait été un soulagement la première fois (réaliser qu’on pouvait aider par notre simple présence) était maintenant ma plus grande source d’abattement. Je devais faire le deuil de pouvoir offrir un câlin à ma mère au moment où elle en avait le plus besoin. Le soleil éblouissant de la côte méditerranéenne m’agressait. La grisaille se serait mieux accordée à mes états d’âme.

Quand les kilomètres nous séparent de nos proches et nous empêchent de traverser une épreuve ensemble, le poids de cette épreuve est cent fois plus lourd. Comment faire quand des gens si près de notre cœur vivent si loin de nous?

Pour vous laisser sur une note plus positive, je veux quand même préciser que les résultats de la biopsie, reçus quelques semaines plus tard, nous annonçaient une bonne nouvelle : pas de cancer. Ça ne change pas grand-chose à la distance entre une mère et sa fille, mais ça fait toute la différence du monde quand tu as peur de perdre ta maman.

Elizabeth Gobeil Tremblay

 

#Covid19 Revenir à l’essentiel en temps d’arrêt forcé

Cette semaine marque le début de la période de ce temps d’arrêt

Cette semaine marque le début de la période de ce temps d’arrêt forcé pour prévenir la propagation de la COVID‑19. Par quoi et par où commencer quand on doit rester à la maison avec ses enfants, que ce soit pour faire du télétravail ou non? Je dirais simplement de revenir à l’essentiel❣️Mais, concrètement qu’est‑ce que ça veut dire? Stocker du papier cul? NON!
Pour moi, ça veut dire d’utiliser cette période pour réaliser ce qui m’importe sincèrement.

Dimanche soir, j’ai soudainement repris conscience de la réalité entre deux prestations à La Voix et j’ai hurlé. Comment décrire ce hurlement?! C’était le cri d’une émotion qui vacillait entre « J’ai gagné à la loto! » et celui où j’étais convaincue que je n’allais pas survivre. C’était confus! Vous me suivez?
Mes enfants m’ont regardée étrangement et mon mari m’a demandé : « Qu’est-ce qu’il y a? »
J’ai répondu en riant : « Je viens de réaliser que je suis avec les enfants toute la semaine. »
On a ri. Ce fut un moment de grande prise de conscience. Celle où j’ai, comme on dirait, laissé tomber ma résistance, celle qui souhaitait une semaine productive, malgré ces circonstances exceptionnelles.

Comment revenir à l’essentiel?

Revenir à l’essentiel présentement, ça veut dire d’utiliser cette période pour réaliser ce qui m’importe sincèrement. Et je me questionne, j’observe, je propose et je choisis. La question qui roule dans mon esprit en ce moment, c’est : Comment profiter de ce temps pour en faire quelque chose d’important dans ma vie? Les pistes de réponses évoluent et se précisent.

En ce moment, je m’imagine en profiter pour changer nos habitudes, faire ce qu’on aime, rédiger et réaliser ma bucket list, épurer ma maison, jouer dehors avec les enfants. Honnêtement, quand l’annonce de la fermeture de l’école a été faite, j’avais prévu contrer cet état de panique qui est passé en lièvre dans mon esprit en étant structurée. Vous savez, être la maman under control qui a un parfait horaire de vie pour ses enfants. Être une fière mère parfaite!

Puis, j’ai décidé de prendre la vie comme elle allait venir et choisir avec ma gang au fur et à mesure ce qui allait nous convenir. Je veux qu’on se crée de bons moments ensemble durant ces temps hors de l’ordinaire. De ces moments où on se crée des souvenirs qu’on évoque quand on devient vieux. Je nous imagine dans vingt ans nous remémorer en famille cette période où la COVID‑19 a marqué le monde : Vous vous souvenez, nous avons été cloués à la maison pendant plus de deux semaines. On a sorti tous les Legos pour en faire le plus gros robot… Ou on a vidé la bibliothèque pour se lire histoires les plus drôles qu’on avait. Ou on a joué la plus longue partie de Monopoly, c’est toi qui avais gagné. On a joué des matchs de hockey interminables. Ces souvenirs seront certainement différents pour chacun et chacune de nous, parce que nous sommes uniques. À nous de créer ce qui nous fera vivre des moments magiques avec nos enfants. Pis c’est pas obligé d’être compliqué ni extraordinaire!

Maintenant, je commence par quoi? Aller jouer dehors, juste après mon café!

Qu’est‑ce qui va m’aider?

Cette semaine, je ne serai pas une mère parfaite. Pour m’aider, je vais simplement mettre dans mes journées beaucoup de douceur, d’humour et de force, sans forcer. Oui, parce que je devrai être ferme avec ma tribu sur l’intention de nos journées. Je vais assurément me connecter avec mon cœur d’enfant. Oui, me connecter avec cette partie de moi qui sait apprécier chaque moment et me guider vers l’essentiel. Je dois avouer que je l’avais un peu oubliée ou négligée sous une pile de priorités. « Faire » me permettait de cocher des éléments de ma liste de tâches au lieu d’« Être » connectée pour les réaliser sans forcer. Ce temps d’arrêt sera certainement bénéfique pour freiner l’évolution de la pandémie, mais surtout pour m’aider à revenir à l’essentiel et regarder arriver doucement le printemps.

En espérant que cela vous aidera à faire de ce temps d’arrêt un temps qui compte pour vous et votre famille.

Stéphanie Dionne

 

Je suis l’héroïne silencieuse

Ce matin, je bois mon café comme à l’habitude, avant ma journée

Ce matin, je bois mon café comme à l’habitude, avant ma journée de travail. Pourtant, rien n’est normal. Je n’ai pas faim, je suis nerveuse. Ce matin, bizarrement, mes enfants viennent avec moi. Je ne veux pas, je veux les protéger. C’est mon rôle de maman, non?

Pourtant la société a besoin de moi. Pendant que d’autres seront sur la ligne de front, moi je veillerai sur ce qu’ils ont de plus précieux… leurs enfants.

Cette crise de la COVID-19 nous happe de plein fouet. Je comprends que je dois, moi aussi, répondre présente.

Mais je comprends aussi que je prendrai soin des enfants des gens qui ont le plus de risque d’être exposés : médecins, infirmières, infirmiers et autres. Donc mes risques d’être exposée sont élevés.

Mes enfants seront avec moi, car c’est la consigne : je dois me rendre au travail avec elles. Tu me diras que mon conjoint a seulement à rester à la maison. Mais à la fin de ma journée, je vais où?

Pour le moment, nous ne savons pas où cette crise nous mènera. Mon travail sera d’expliquer l’importance du lavage des mains à mes petits. On le fera en jouant, parce que tout ça doit rester un jeu pour eux.

Nous sommes les grands, c’est à nous d’avoir peur. Tu sais, nous serons le papa dans La Vita è bella. Parce que c’est un peu une lutte contre la guerre tout ça. Un combat contre un être microscopique, mais un combat tout de même.

Alors je te demande, s’il te plaît, à toi, de respecter les consignes du gouvernement. Tu les connais, je ne les répéterais pas.

Fais‑le pour ceux et celles qui sont sur la ligne de front.

Fais‑le pour nous, les héroïnes silencieuses… les éducatrices.

Mélanie Paradis

 

Déception saisonnière

Depuis de nombreuses années, j’ai ce sentiment au printemps…</p

Depuis de nombreuses années, j’ai ce sentiment au printemps…

En fait, ça fait bientôt quinze ans. Le temps, le boulot, la famille, les amis et toutes mes responsabilités actuelles n’y font rien. Si je ferme les yeux, je m’y replonge complètement. Cet hier, celui qu’on ne désire ni aujourd’hui ni demain. Pourtant, tout semblait si parfait.

J’avais passé l’été à bien m’y préparer. Une espèce de maturité naissante. Mon père m’avait inscrit à un camp de perfectionnement. Pour celui‑là, je m’y étais donné à fond. J’ai aussi mieux assumé le stress de la période de sélection. Ce court moment, où d’autres vous remettent à votre place.

Enfin, je faisais le double lettre. U13 Pee-Wee BB.

Nous avions une saison formidable. Quatorze jeunes qui formaient une équipe. Un ensemble, fort de chacun de nous. Chacun de nous, fort de l’ensemble. Solidaires. William et Thomas sont restés mes amis. Nous jouons toujours le jeudi soir, le souffle court et moins de rapidité qu’autrefois.

J’aimais beaucoup notre entraîneur. Patrick était motivé, mais juste. Surtout, il nous a communiqué la responsabilité. Le jeu, c’est le nôtre. Du banc, il ne peut ni arrêter les rondelles ni compter de buts. Encore moins fournir les efforts nécessaires.

À la mi‑saison, nous étions déjà qualifiés pour faire les séries régionales. Les Seigneurs avaient le vent dans les voiles depuis une dizaine de matchs. J’étais le deuxième marqueur de la ligue. Avec espoir encore d’être le meilleur. Ma plus belle saison « à vie », comme je le disais alors.

Tout était prévu. Grand-papa Gaston y serait comme chaque année. Il avait ajusté son séjour pour y être. Lui, moi et le hockey, c’était lié. Il était celui qui m’avait accompagné si souvent aux activités, parce que mes parents ne pouvaient pas. Enfin, pas tout le temps. Cette année‑là, c’était le premier hiver qu’il passait en Floride. Au chaud, comme il disait à tous. Avec son clin d’œil espiègle.

Tout semblait possible, même le championnat…

Puis, la décision a été prise. Évidemment, sans nous. Nous prenant complètement par surprise. C’est terminé! Plus de matchs, plus de séries, plus de saison. La pandémie et le virus avaient gagné. J’ai tellement pleuré. Seul, dans ma chambre. Effondré par le choc. Mon premier, de ceux qui nous marquent à jamais.

Je ne vous parle pas de ma déception sportive. Je pense à mon grand-papa Gaston, mort en Floride. En mars 2020, l’année de la COVID-19.

Tu me manques tellement, grand-papa…

michel

 

Enceinte et amoureuse

Mon amour, depuis des années, je sais que je t’aime. On partage c

Mon amour, depuis des années, je sais que je t’aime. On partage chaque journée du quotidien ensemble. On encaisse les mauvaises nouvelles et on souligne les promotions. Pendant tout ce temps, on a eu nos hauts et nos bas, comme tous les couples. Mais aujourd’hui, il faut que je t’avoue quelque chose… Quand je suis enceinte, je suis encore plus amoureuse de toi que je ne l’ai jamais été. Je veux prendre le temps de t’écrire à quel point je t’aime, et surtout, les raisons qui font de toi la meilleure personne avec qui vivre cette aventure…

1- « T’es tellement belle… » : Tu me répètes tout le temps à quel point tu me trouves belle. Même à l’aube de cet accouchement, même avec 50 livres en plus, même avec mes quatre nouveaux mentons et ma souplesse de camion… même quand moi, je me regarde et que j’ai envie de pleurer. Toi, tu restes avec cette étincelle dans les yeux, rempli d’amour et de gratitude pour la vie. Tu me répètes que tu me trouves belle de la tête aux pieds, pis en plus, tu le penses.

2- Ta présence. Je te sens auprès de moi à chaque seconde. Même quand tu es au travail, je sais que tu t’inquiètes pour moi, pour nous. Je sais que tu t’inventes du temps dans la journée pour m’écrire un texto, juste pour savoir comment je vais. Tu t’inquiètes quand je vomis, tu t’inquiètes quand j’ai des contractions. Je te sens près de moi, tout le temps. Même la nuit, quand je me lève aux heures pour aller aux toilettes… Je sens que ton sommeil devient plus léger, comme pour guetter le moindre signe qui pourrait indiquer que j’aurais besoin de toi.

3- Quand on parle de l’accouchement, tu deviens vulnérable. Tu appréhendes ce moment parce que tu sais que tu t’y sentiras si impuissant. Tu me répètes que même si je veux accoucher naturellement, j’ai le droit de flancher si j’ai trop mal. Tu me répètes que tu as si peur de me perdre, moi. Tu l’aimes ce bébé, de tout ton cœur. Mais c’est à moi que tu penses quand tu as peur que ça tourne mal… Et moi, je te rassure en te disant que tout va bien aller, même si au fond, moi aussi j’ai peur.

4- Tes petites attentions. Parce que chaque fois que tu me ramènes du chocolat, tu me confirmes que j’ai choisi la bonne personne avec qui partager ma vie. Chaque petit déjeuner au lit le samedi, je sais que tu le fais avant que les nausées arrivent. Chaque fois que tu m’apportes une doudou sur le divan, pour me réconforter. Même si je n’ose pas te dire à quel point il fait chaud dans mon corps, je m’enroule dedans, juste parce que je me sens aimée.

5- Et mes sautes d’humeur! Ces crises qui pourraient faire fuir les plus trouillards… Mais pas toi. Toi, tu me regardes pleurer sans raison, manquer de patience et même te crier dessus, et parfois, je le vois, ton petit sourire en coin… Celui qui confirme que j’ai l’air un peu folle en ce moment… mais qui est tellement rempli d’amour en même temps… Ce petit sourire qui dit que ça va passer et qu’on va en rire dans quelques semaines ensemble. Parfois, même deux secondes après une grosse crise, on se regarde et on pouffe de rire ensemble. Parce que moi aussi, je me trouve ridicule…

Mon amour, je n’aurais pas pu choisir un meilleur humain pour partager la parentalité. Je suis fière de porter ton enfant, je n’aurais pas voulu l’avoir avec personne d’autre sur cette Terre. Même avec Nick Carter. Je t’aime. Tellement. J’ai hâte de te présenter ton fils, j’espère qu’il te ressemblera. Merci d’être si attentionné avec moi, avec nous. Merci de m’aimer autant que je t’aime.

À tous les partenaires de vie remplis d’amour… Merci…

Joanie Fournier

 

Je fais l’école à la maison… à mon enfant intérieur – Texte: Karine Jetté

Je fais l’école à la maison. En me lançant dans cette grande av

Je fais l’école à la maison. En me lançant dans cette grande aventure, je savais d’ores et déjà que c’était la meilleure décision possible pour mes enfants à moi. Mais je n’avais pas réalisé sur le coup que ce n’était pas seulement pour mes deux garçons (et ma fille dans quelques années) que je faisais ce choix. Je n’avais pas réalisé qu’il y avait un quatrième enfant dans l’équation. Mon enfant intérieur…

Quand on devient parent, on dit souvent à quel point c’est merveilleux de redécouvrir le monde à travers les yeux de nos enfants. Être parent-éducateur (surtout en mode plutôt unschooling dans mon cas), c’est pareil. C’est redécouvrir le véritable plaisir d’apprendre. C’est reprendre le contrôle de notre éducation et réaliser que ça ne s’est jamais terminé, même après avoir quitté l’école. C’est comprendre enfin ce que nos profs voulaient dire quand ils disaient qu’on utilisait les mathématiques dans la vie de tous les jours. Spoiler alert : ils avaient raison!

Dans les dernières années, la petite fille qui est en moi a tellement trippé. Ensemble, on s’est émerveillées de la transformation d’une chenille de monarque en une fascinante chrysalide vert et or, puis en papillon magnifique qui a finalement pris son envol sous nos yeux ébahis. On a fait des expériences sur la glace, joué avec les couleurs et la lumière. On a exploré des forêts remplies des trésors de la nature et épluché des encyclopédies pour apprendre à reconnaître les différentes espèces de champignons. On a étudié le système solaire, le corps humain et le règne animal, pas avec des manuels fades, mais avec des projets interactifs et des livres superbes qui m’ont fait comprendre à quel point la vie est un miracle. On a collectionné des roches et découvert un fossile de coquillage. On a trouvé une mante religieuse, une chenille mauve qui aimait les fleurs de menthe, observé de près une chauve-souris qui s’était perdue dans notre maison… On a arpenté des villes à l’architecture magnifique et des sentiers recouverts de feuilles mortes, escaladé des montagnes, flotté en kayak sur des rivières. On a trouvé des grenouilles dans une mare, observé des couleuvres dans leur environnement naturel, nourri des oiseaux au creux de notre main. On a fait pousser de l’asclépiade pour nos monarques, des tournesols pour nos abeilles. On a pris soin de nos pissenlits et mangé des hémérocalles. On a pourchassé des montgolfières en vol et aidé l’équipage lors de son retour sur la terre ferme. On a dessiné des arcs-en-ciel. Beaucoup d’arcs-en-ciel!

Au contact de mes enfants, j’ai redécouvert mon amour de la langue française, au point de réaliser mon rêve de jeunesse et de devenir écrivaine. J’ai appris plus sur la géographie mondiale dans la dernière année que dans mon parcours scolaire en entier. Je me suis enfin octroyé le droit d’approfondir mon intérêt pour les plantes médicinales et leurs propriétés. J’ai appris à cultiver mon propre jardin potager et à manger le fruit de mon travail (ok, on en a encore beaucoup à apprendre de ce côté!). J’ai appris que j’aime apprendre, que j’aime me passionner pour un sujet et me laisser emporter par la frénésie qu’il suscite en moi. J’ai probablement emprunté plus de livres à la bibliothèque dans les dernières années que dans toute ma vie avant ça. J’ai joué à des tonnes de jeux plus stimulants les uns que les autres et j’ai réalisé à quel point on apprend à travers le jeu, et pas juste ceux qu’on dit « éducatifs ». J’ai réappris à me battre pour défendre mes droits.

Je me sens vivante, en évolution constante. Je me sens en paix. Parce que je nourris quotidiennement mon enfant intérieur, cette petite fille curieuse qui est toujours au fond de moi et qui a grandement souffert de mon passage obligé dans le monde adulte. Cette petite fille avide de liberté et d’aventures, que j’ai trop longtemps mise de côté pour jouer aux grands.

Que vos enfants soient à l’école ou à la maison, je vous souhaite de connecter avec vos enfants et de jouer. Jouer véritablement. Apprendre. Explorer.

Et croyez‑moi… Votre enfant intérieur vous en remerciera.

Karine Jetté

Ma gang de malades

C’est une sensation étrange ces jours‑ci que d’aller dans un

C’est une sensation étrange ces jours‑ci que d’aller dans un commerce américain. Que ce soit Costco, Target, Walmart ou l’épicerie du coin, des étagères sont vides. Au pays de la démesure, même au fin fond du Nouveau-Mexique, une folie passagère germophobe a pris le contrôle des étalages : on ne trouve plus de lingettes désinfectantes. Dans plusieurs commerces, on peine aussi à trouver du savon à mains, de l’eau embouteillée et du papier de toilette. Et ce n’est pas juste ici : des Australiennes ont fait la manchette il y a quelques jours pour s’être querellées afin de déterminer qui aurait le privilège d’acheter du papier de toilette.

Alors que la saison de la grippe bat son plein, c’est une autre bibitte qui fait la une : le coronavirus (COVID-19).

Ce qui est un peu ridicule dans cette situation est que, malgré toute cette attention médiatique, chez l’adulte en santé, les symptômes du coronavirus sont similaires à un rhume. Oui, c’est dramatique un bateau de croisière en quarantaine, mais en réalité (et ce qui ne fera pas la une aux nouvelles), nous serons des milliers à avoir contracté le COVID-19 sans le savoir. Alors, soyons responsables et limitons les occasions de contaminer les autres.

Cette crise illustre aussi quelques faits déroutants qui semblent indiquer que pour certaines personnes, la survie personnelle est aux dépens de l’autre.

Cette compulsion d’accumulation et de surconsommation fait peine à voir. Ça te donne quoi de désinfecter ton bureau au travail et tes poignées de porte trois fois par jour avec ta douzaine de caisses de lingettes désinfectantes accumulées au détriment de ton voisin si celui‑ci n’a pas de savon pour se laver les mains? Est‑ce que tu te sens mieux avec tes 2 000 rouleaux de papier de toilette accumulés dans ton garage?

Est‑ce que ce sont les mêmes personnes qui se présentent au travail en toussant et avec une fièvre parce qu’elles ne veulent pas utiliser leurs journées de congé? Ces personnes sont‑elles différentes des trois passagers sur mon vol des États-Unis à destination de Montréal dernièrement qui, après avoir entendu l’équipage partager un message expliquant les symptômes à déclaration obligatoire à la douane canadienne, ont immédiatement cessé de tousser?

Je me suis demandé si ces voyageurs avaient des attentes différentes quand il était question d’être eux-mêmes exposés à la maladie de quelqu’un d’autre. Ne serait‑il toutefois pas irraisonnable de demander à quelqu’un qui ne sait pas s’il est contagieux de s’abstenir de prendre l’avion? Je n’ai pas de réponse à vous offrir, mais l’arrêt soudain de la toux après le message de l’équipage me laisse croire que ce qui était primordial pour eux était de passer sous le radar des douanes.

Cette peur de la maladie a non seulement engendré une pénurie artificielle en magasin et une augmentation indécente des prix en ligne, elle exacerbe la propension humaine à élaborer des théories du complot. Le virus a été créé en laboratoire! Le gouvernement cache la vérité! Fake news! Les Chinois ont fait exprès!

Ah, les Chinois. Plusieurs situations ont été reportées où des actes haineux ont été transmis envers des Asiatiques, perçus par certains comme responsables de la maladie. Des attaques dans les transports en commun, des messages d’intimidation, des billets d’opinion, etc. On a toujours une bonne raison pour pointer du doigt.

On n’a qu’à porter attention au mouvement survivaliste et à l’offre grandissante d’ensembles de nourriture sèche destinés à affronter les catastrophes naturelles pour comprendre que l’homo sapiens est obsédé par sa survie. D’un point de vue biologique, ça se comprend. N’est-il pas naturel pour toute forme de vie d’assurer sa subsistance et sa survie?

Mais de là à accumuler dans ton garage une douzaine de caisses de lingettes désinfectantes et tout le papier de toilette que tu as pu trouver, Bob? Vraiment?

Ceci dit, comme pour la grippe saisonnière, il est recommandé de prendre des précautions et d’être attentif à la maladie dans les situations où vous pourriez exposer une personne immunodéprimée ou au système immunitaire affaibli. Si tu ne te sens pas bien, laisse faire Dr Google ; va voir ton médecin et reste à la maison.

Pour plus d’information sur le coronavirus, je vous invite à consulter : https://www.canada.ca/fr/sante-publique/services/maladies/2019-nouveau-coronavirus.html

Note de l’auteure : Depuis l’écriture de ce texte, la gouverneure de l’état du Nouveau-Mexique et le président des États-Unis ont déclaré l’état d’urgence. Les écoles sont fermées pour une période de trois semaines et les étagères des épiceries sont vides dans tous les départements (denrées non périssables, produits ménagers, produits frais, boucherie, etc.).

Genevieve Brown