Quand il n’y a plus d’espoir, il y a l’Espoir.

Devenir parent = vivre dans une montagne russe émotive 24 heures sur 24. Ok, 23. On se permet quand même une heure de dodo. Parfois entrecoupée.

Devenir parent = se rendre compte que chaque étape de développement a son côté merveilleux (le premier sourire, les premiers pas, l’entrée à la maternelle, la découverte de l’amitié…) et son côté pénible. Euh… de quoi est-ce que je parle, moi là? Un myriagone dont chacun des 10 000 côtés est plus désespérant que l’autre, peu importe sous quel angle on regarde la bibitte.

Pourquoi, donc, a-t-on des enfants, voulez-vous ben me dire? Parce que même quand il n’y a plus d’espoir, il y a l’Espoir.

J’ai vécu des années de catastrophes émotives avec mes enfants. La couche qui fend sous la pression en plein vol au moment où on se rend compte que le sac à couches est resté dans la voiture… ce n’est rien à côté de ça!

Quand tu te lèves le matin en étant déjà épuisée, en appréhendant avec toutes les raisons du monde les quinze prochaines crises de la journée; quand tu ne trouves plus rien de positif à dire ou à penser à propos de ton enfant, parce que vraiment, il n’y a plus rien; quand chaque seconde est occupée à éteindre des feux de forêt et à gérer des tsunamis; quand tu as perdu le décompte des guerres mondiales qui ont éclaté entre tes enfants (juste pendant les dernières 24 heures… et ça dure depuis… tu ne le sais même plus tellement ça fait longtemps); quand tes interventions ne sont plus que des réactions. Ou pire, des démissions; quand tu n’oses même plus te regarder en face parce que tout ce que tu trouverais à te dire, c’est : « T’es la pire mère du monde ». Quand toutes les sources d’aide professionnelle et personnelle que tu as recrutées sont aussi dépassées que toi…

Tu te dis que l’espoir, il est parti prendre son Bovril avec ce qui te faisait aimer la maternité. Ils doivent se faire un gros party bière-nachos-boule disco, mais toi, tu creuses ta tombe.

La « Been there done that » en moi te dit de ne pas lâcher. Garde en tête et au cœur la raison qui t’a poussée à avoir des enfants. Garde à l’esprit ton mini papout tout rose qui est sorti de ton ventre et que tu as aimé inconditionnellement (ce qui ne veut pas dire que tu aimes tout ce qu’il fait, incluant les cacas gluants et les insultes d’ados). Entoure‑toi de personnes qui croient autant que toi (dans tes bonnes secondes) que lumière il y aura, même si les nuages sont gris foncé qui tire sur le noir opaque. Et les personnes qui jugent, qui savent toute toute toute mieux que toi et qui te tirent vers le bas, éloigne‑les. Loin, loin, loin.

Pour avoir eu des filles qui ne pouvaient pas se tolérer à moins de sept milliards de kilomètres (bref, une sur Terre, l’autre sur Pluton, et encore…), je peux vous dire que le désespoir, je sais c’est quoi. Ç’a pris des années, des thérapies, de l’aide pour elles, de l’aide pour moi, beaucoup de sacrifices, de doutes et de remontées en selle, mais on l’a eu! Mes filles sont super méga amies! Elles rient, elles se collent, elles sont complices. Elles sont au paradis à l’idée de se retrouver dans la même école secondaire en septembre. Qui l’aurait cru? Moi.

Ma cocotte qui déprimait huit mois par année, qui était fâchée contre la Terre entière du premier «Bonjour» jusqu’au dernier «Bonne nuit» de chaque jour, sans exception… est revenue cette semaine avec le méritas de l’attitude positive. Reconnue pour sa joie de vivre. Vlan!

J’ai aussi un petit bonhomme qui nous en a fait voir de toutes les couleurs, passant de l’être le plus affectueux et empathique à la tornade qui détruit tout sur son passage, incluant les relations et l’estime personnelle. Je peux vous dire que le désespoir, je sais c’est quoi. Je le voyais déraper, prendre racine dans les comportements délinquants, envoyer promener la directrice d’école dès la maternelle… Je me disais : « Ça y est, lui aussi, je l’ai brisé ». Capout. Mais non! Fermeté + bienveillance + écoute et observation pour trouver les vraies causes du mal-être + ressources aidantes = on est repartis dans le bon sens!

Ça ne veut pas dire qu’on est à l’abri des dérapes éventuelles. Mais maintenant, je sais que ça passe. Je sais qu’on peut souvent comprendre les causes et intervenir. Je sais qu’on peut agir au lieu de seulement réagir (ou ré-agir, répéter les mêmes actions qui répètent les mêmes effets).

C’est plate, mais comme dans beaucoup de situations, il faut souvent frapper notre mur pour se réveiller. Il faut parfois se péter la gueule sur la dalle de béton pour se donner l’élan de remonter vers la lumière.

On a le droit de se sentir désespéré. Temporairement, du moins. Mais on n’a pas le droit de perdre Espoir en nos enfants et en nous. On leur doit ça. On se doit ça, parce qu’au départ, notre désir de mettre au monde (relis ces mots : notre désir de mettre au monde… de créer une vie qui n’existerait pas sans nous; de créer un monde qui serait différent sans eux… c’est magique, non?) était pur et bien intentionné, porté vers le beau et le bon. Comme les enfants qui en sont issus.

Tu ne vois plus d’espoir? Trouves-en, même si c’est juste dans un repli de chandail qui sent la poudre pour bébé. Même si c’est juste dans un regard enragé porté sur toi; au moins, il y a regard, donc il y a relation. Même si c’est juste dans mon témoignage. L’Espoir est là. Plus ou moins près, et tu es plus ou moins prête à le saisir, mais il existe.

Nathalie Courcy



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