Ode au chocolat
Oh! Chocolat, toi qui m’appelles sans arrêt! Que tu sois noir ou blanc, en pépites ou en copeaux, garni de flocons d’érable ou de sel de mer, je t’aime. Que dis-je? Je t’adore. Tellement que je te mangerais tout cru. Ou en fondue.
Dire que quand j’étais petite, je n’aimais pas le chocolat. Sauf le chocolat de Pâques. Et juste les lapins vides. Je n’aimais pas les jeans non plus. Je préférais mes joggings rose bonbon.
Le chocolat, maintenant, ça me fait me sentir comme si j’étais dans mon ensemble de coton ouaté rose des chevilles au ras du cou : confortable et sans stress, à l’abri des intempéries émotionnelles, mais pas vraiment sexy.
Mon métabolisme m’a toujours assez bien servie. Sans arborer la selvitude d’un mannequin photoshopé, j’ai longtemps pu manger le triple de ce que mes amies mangeaient et me maintenir sous la barre critique du surpoids. Et Dieu sait que ce n’était pas parce que je dépensais des calories en bougeant. Le sport et moi, ça ne fait pas très bon ménage. Je déteste transpirer et je hais avoir froid, ce qui élimine la plupart des options.
Quand j’ai déménagé en appartement pour le cégep, je suis partie avec mes dix-sept ans et mes valises. Alors que plusieurs étudiants du collégial découvrent l’alcool, ma drogue à moi, c’était les pâtes et le chocolat. Il y a pire dans la vie, me direz-vous! Mais à long terme, ça s’accumule et ça rend aussi dépendant.
À ma première grossesse, je suis tombée dans une orgie de tomates. J’en mangeais huit fois par jour. Heureusement qu’elles poussaient dans ma cour, sinon je me serais ruinée. Aux trois autres grossesses, je me suis reprise en matière de cochonneries alimentaires. J’ai pris jusqu’à soixante livres sous différents prétextes : les études, la fatigue, la baisse de moral, la colère, l’éloignement, les « moi je suis faite comme ça, alors à quoi bon surveiller les quantités que je mange? », l’insomnie (vous savez, la nuit, quand on ne dort pas, la boîte d’Oréo crie très fort!)… J’ai perdu toutes ces livres chaque fois, bravo à moi!
Mais à l’approche de mes quarante ans, avec un emploi de fonctionnaire, un stationnement au centre-ville et une monoparentalité temporaire, je ne marche plus, je ne fais plus de karaté, je ne vais plus à la piscine et… je mange! Du chocolat, entre autres. Et les fonds d’assiettes de mes enfants, parce que j’ai appris que gaspiller, ce n’est pas bien pour la planète.
Depuis mes onze ans, j’ai aussi développé l’habitude de bouffer (là, on n’est plus au stade de manger en dégustant) sans arrêt pendant ma semaine. J’avais tellement mal à l’utérus et au dos que je préférais souffrir d’une indigestion.
C’est bien connu, la nourriture n’endort pas que les crampes menstruelles. Ça soulage aussi (lire : ça fait oublier temporairement) les émotions sombres. C’est rare qu’une salade au tofu fasse disparaître les blues. Les calories vides sont beaucoup plus efficaces! Je ne fais pas partie du fan-club des accros aux chips, et la bouteille ne m’interpelle pas plus qu’au cégep. Mais, j’ai de la misère à résister à la fraise fraîche trempée dans le chocolat, que la fraise y soit ou non. Je dois me parler fort pour remplacer le chocolat chaud triple crème fouettée à la cannelle avec des pépites de miel par un bon thé. Et le pot de Nutella, on n’en parle même pas.
J’aime manger équilibré. Et ça va de soi, j’aime être en santé. Mes enfants m’appellent parfois madame Tofu (il faudrait que je trouve des recettes de tofu au chocolat… ça doit exister!). J’ai la réputation d’une personne qui mange santé tout en me gâtant à l’occasion. Ces temps-ci, l’occasion se présente souvent.
Si au moins, ça me faisait du bien… Dès que je me brosse les dents, je recommence ma quête du goût du chocolat. Quand l’ennui se met de la partie, mes antennes à bouffe s’activent. Mon métabolisme se déglingue, ma culpabilité culmine. Vous imaginez le mauvais exemple que je sers à mes enfants sur un plateau de pâtisseries (oups… de crudités)? J’ai le cerveau en bouillie, l’énergie en chute libre, et, oh ?
Désolée, je dois y aller… le frigo m’appelle!
Je vais aller lui dire de se la fermer. Parce que les joggings roses, c’est bien beau (euh… non!), mais j’ai besoin de réapprendre à manger et à me gérer.