La porte bonheur (ou entre deux mondes)
Lorsque deux adultes se séparent, c’est généralement parce que rien ne va plus dans le couple qu’ils formaient. Il est donc préférable qu’il en soit ainsi. Surtout si des enfants sont nés de cette union. Dans ce cas, la séparation permet aux deux adultes de continuer leur équipe parentale pour le mieux‑être des enfants. En tout cas, c’est l’idéal souhaité.
Sauf que parfois, pour ne pas dire trop souvent, après la séparation, rien ne va plus dans l’équipe parentale non plus. C’est généralement le cas au sortir d’une relation toxique ou de violence conjugale. Alors, les enfants se retrouvent à grandir dans deux univers séparés, où la communication entre les deux parents, lorsqu’elle existe, est sous tension. Mais la communication est généralement quasiment inexistante, voire impossible, lorsque l’on parle d’un contexte de violence psychologique. Les enfants n’ont alors aucune passerelle entre les deux univers à la dérive dans lesquels ils grandissent. Ils se retrouvent, dès lors, en conflit de loyauté et surtout, perturbés par ce manque d’arrimages entre leurs deux maisons. Là est le danger pour leur équilibre émotionnel et mental, ainsi que pour leur besoin de stabilité et de sécurité.
Comme il faut être deux pour construire un couple, il faut aussi être deux pour que la séparation se passe sans trop de heurts pour les enfants. Malheureusement, la maturité émotionnelle des parties concernées n’est pas toujours au rendez‑vous et souvent, les blessures narcissiques du passé prennent le dessus sur l’intérêt des enfants. La séparation devient alors une déclaration de guerre envers l’ex et l’occasion de lui faire payer l’échec du couple déchu. Il ne faut jamais sous‑estimer ce que quelqu’un qui a mal à l’ego est prêt à faire pour reporter ses souffrances sur l’autre.
Ces tristes histoires engraissent les avocats et engorgent les tribunaux. Triste à dire, bien que trop vrai.
Lorsque l’on entre dans ce cercle vicieux de règlements de compte post séparation, en oubliant où se situe l’intérêt des enfants dans ce chaos, c’est bien illusoire de croire que, soudainement, celui qui entretient cette relation malsaine par l’entremise des avocats, cessera d’agir ainsi et reviendra à la raison pour préserver l’intérêt des enfants. Car c’est plus fort que lui. C’est une question d’ego, de contrôle et de mainmise sur l’autre. Une façon de maintenir un lien avec l’ex, tout en privant les enfants de l’unité et d’une continuité familiale.
Alors, comment préserver les enfants dans ce genre de situation?
Il y a plusieurs petits gestes qui peuvent être posés par le parent conscient de l’impact de ce conflit sur ses enfants. Tout d’abord, éviter d’évoquer les histoires des parents devant eux. Rester à l’écoute des besoins et surtout du ressenti des enfants face à cette situation dont ils ne sont pas responsables, même s’ils en subissent les dommages collatéraux. Et si les enfants n’ont pas la permission de passer d’une maison à l’autre avec leurs jouets, doudous ou quoi que ce soit qui leur permettrait de créer un pont entre leurs deux univers, dans ce cas, faites preuve d’imagination et de créativité pour établir un lien entre les deux résidences des enfants, sans avoir besoin du soutien ou de la collaboration de l’autre parent.
Pour ma part, voici une des solutions que j’ai privilégiées : mes enfants m’avaient indiqué qu’ils avaient une petite porte de fée chez leur père. J’ai donc décidé d’en construire une chez nous afin que les fées puissent se promener de chez le père à chez moi et veiller, en tout temps, sur les enfants. Ainsi leurs deux univers restent connectés, sans que cela dépende d’une entente entre les deux parents.
Cette petite porte leur permet de rester des enfants et de s’évader dans un imaginaire sans parents, sans tensions, sans violence, et sans conflits de loyauté. Un monde qui leur appartient et qui les sécurise. Une porte comme un phare dans l’océan du ciel. Une étoile où les rêves qui y font escale sont éternels. Cette deuxième étoile à droite, qui les guidera tout droit jusqu’au matin, vers de meilleurs lendemains, loin des histoires de grands.
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Vanessa Boisset