Tag arts

L’arrivée des Opossums: mon dernier coup de cœur – Texte: Joanie Fournier

J’ai été éducatrice à l’enfance pendant longtemps. Je me passio

J’ai été éducatrice à l’enfance pendant longtemps. Je me passionne pour la littérature jeunesse depuis encore plus longtemps. Je collectionne les albums pour enfants et j’en ai plus que mes bibliothèques ne peuvent en contenir. À mon sens, l’amour de la lecture restera à jamais le premier pas vers la réussite scolaire de nos enfants. Les livres leur ouvrent un monde rempli de surprises, de folies, de grandes aventures et de morales marquantes.

Les livres nous font vivre toutes sortes d’émotions! J’ai éclaté de rire la première fois que j’aie lu le livre De la petite taupe qui voulait savoir qui lui avait fait sur la tête ou encore Pétunia, princesse des pets. Comme plusieurs, j’ai pleuré toutes les larmes de mon corps en racontant à mes enfants Je t’aimerai toujours. Je me sens nostalgique quand je revois les classiques de mon enfance, comme La soupe aux sous. Je me revois encore sur mon pupitre de deuxième année en train de le lire… Les livres nous marquent et forgent nos apprentissages. Nos librairies cachent tellement de petits trésors…

Mais cette année, j’ai fait une nouvelle découverte! Je suis tombée par hasard sur un auteur surprenant… et je pense sincèrement que son parcours mérite d’être connu. L’auteur dont je veux vous parler se nomme Keenan Poloncsak. J’ai appris qu’il avait un petit atelier de reliure à l’ancienne et qu’il reliait lui-même ses propres livres pour enfants! Un vrai travail de moine… Il est à la fois l’auteur du livre, son illustrateur et son éditeur. Il relie chacun de ses livres à la main, un à un. Et pour couronner le tout, ses livres pour enfants sont multilingues. Pour être honnête, j’ai été tellement impressionnée par la qualité de son travail que j’ai poussé mes recherches un peu plus loin…

J’ai appris qu’il avait toujours été passionné par le dessin et qu’il a commencé à dessiner ses propres bandes dessinées en 2007. Deux ans plus tard, il écrivait et illustrait son premier livre bilingue pour enfant : Rufus le Chat. Il a ensuite choisi de se spécialiser dans la reliure et la réparation de livres anciens. Il a cumulé des expériences enrichissantes, entre autres auprès de la présidente de l’association des relieurs du Québec. Il est ensuite devenu l’apprenti de Laura Shevchenko, à l’atelier La Fille du Relieur, Smith’s Falls Bookbinding, qui lui a légué son atelier à Montréal en 2020. Il habite à Montréal, tout près de son atelier. Petit fait historique : situé quelque part entre le fleuve et la rue Sainte-Catherine, et entre le Vieux-Montréal et le quartier Hochelaga, ce quartier de Montréal appartient à l’ancien faubourg Québec et portait, dans la culture populaire, le surnom du « Faubourg à M’lasse ». C’est de là que vient le nom de l’atelier de Keenan Poloncsak : Le Relieur des Faubourgs.

Voyant que je m’intéressais à son travail minutieux, Keenan Poloncsak m’a généreusement fait découvrir son quatrième livre jeunesse : L’Arrivée des Opossums. J’ai été agréablement surprise par la qualité du livre: relié à la main, finement illustré, accessible pour les enfants et écrit en quatre langues! Pour chaque illustration, on peut retrouver une phrase de l’album écrite en français et traduite sur la même page en anglais, en hongrois et en farsi. Quelle belle façon de sensibiliser nos jeunes enfants à différentes langues! En écrivant ce roman, on constate que l’auteur a voulu informer les enfants sur l’arrivée relativement récente de l’opossum sur notre territoire québécois. En effet, le petit marsupial vient du sud des États-Unis et monte de plus en plus vers le nord.

Comme je le disais, Keenan Poloncsak auto-publie ses livres, de la première étape de la conception jusqu’à son expédition, et il n’utilise que des matériaux faits au Canada. Je me serais attendue à un prix exorbitant, sachant tout le travail que cela représente. Pourtant, le livre se vend sur son site internet pour une trentaine de dollars seulement. Il est donc sensiblement au même prix que tous ceux que nous retrouvons en librairie. Les livres de cet auteur sont disponibles dans plusieurs bibliothèques du Québec, mais son souhait le plus cher est qu’un maximum d’enfants de la région puissent en profiter. De ce fait, il propose également des lectures pour les bibliothèques, les écoles et les services de garde éducatifs à l’enfance.

C’est donc avec plaisir que je partage cette découverte avec vous. Personnellement, mes enfants ont beaucoup apprécié la lecture de L’arrivée des Opossums. Le livre a suscité de belles réactions et entraîné des discussions sur les sujets de l’immigration, de l’intimidation, du rejet, de la mort, et même de l’adoption. Je pense qu’il peut facilement être utilisé comme déclencheur pour des sujets plus délicats. Et mon cœur de maman était si fier de voir mes petits poser tant de questions sur les langues écrites dans le livre. Je pense qu’il s’agit d’un excellent moyen de les sensibiliser aux autres cultures et aux différentes calligraphies.

Finalement, je salue bien humblement cet auteur talentueux, qui mérite amplement que son travail soit partagé et lu par des milliers d’enfants. Je continue d’être fascinée par nos artisans locaux et je trouve important de se rappeler tout le talent qui se cache tout près de nous. Je ne gagne absolument rien à parler de son œuvre, je trouve seulement que son travail gagne vraiment à être connu.

Joanie Fournier

P.-S. Voici le lien vers le livre en question.

Les valeurs à la bonne place

Je suis fière de ma fille. Je suis tout le temps fière de mes enfa

Je suis fière de ma fille. Je suis tout le temps fière de mes enfants, mais là, je suis encore plus fière. Ma fille aînée a les valeurs à la bonne place et elle est capable de défendre ses convictions. Je vous explique.

Ma Peanut est dans un programme spécialisé en arts au secondaire. Elle tripe sur l’art, elle en mange, elle en rêve. Elle veut devenir prof d’arts au cégep et fait tout pour y parvenir. Elle consacre 80 % de son temps d’éveil à la pratique artistique. En congé, ça monte à 98 %. C’est à se demander si elle n’apporte pas ses pinceaux dans la douche.

Depuis quelques semaines, elle travaille sur un projet d’arts pour un cours : un calligramme, c’est-à-dire qu’elle utilise les mots et diverses calligraphies pour créer une image. Elle avait choisi de représenter une de ses chanteuses préférées. Elle a traduit les paroles d’une chanson, pratiqué différentes calligraphies, dessiné les esquisses, fait les calques… Bref, elle y a mis des heures et des heures, est même allée aux périodes de récupération en arts pour améliorer le produit fini.

Elle en était à la dernière étape du projet quand une bombe lui est tombée sur le cœur. Un peu par hasard, elle a appris que la chanteuse qui lui servait de modèle (pour son projet et dans sa vie) était accusée d’avoir violé une autre chanteuse dans le passé.

On avait déjà discuté de la vague de dénonciations qui ramasse plusieurs personnalités publiques dans le tsunami #MoiAussi. Mais elle ne connaissait pas vraiment les personnes dont il était question. Là, ça la touchait en plein cœur, dans son âme de jeune adolescente qui admire une vedette et qui écoute ses chansons vingt heures par jour, qui lit tout sur elle et qui la place au centre de ses conversations avec ses copines et ses parents.

Quand elle a su, elle a pleuré. Beaucoup. Elle a confronté la nouvelle de la dénonciation avec d’autres sources. Toutes rapportaient la même histoire. La chanteuse elle-même ne niait pas le geste même si elle en minimisait l’impact. Ma fille a discuté avec sa meilleure amie, tout aussi admiratrice et donc, tout aussi choquée. Elles ont failli effacer tous ses albums de leurs appareils électroniques, mais elles se sont retenues. « On se donne quelques jours pour y penser. » La distinction entre l’œuvre produite par un artiste, la personne elle-même et les actions d’une personne peut être difficile à faire, même pour un adulte.

Puis, ma belle Peanut m’a annoncé qu’elle ne pouvait pas continuer le calligramme représentant cette chanteuse. Qu’elle refusait d’exposer ce projet au vernissage de fin d’année. Qu’elle ne pouvait pas contribuer à faire connaître quelqu’un qui avait abusé d’une autre personne. Elle a pris l’initiative de contacter son enseignante, lui a expliqué la situation, a demandé la permission de refaire le travail au complet.

En fin de semaine, ma Peanut passera encore plus d’heures que d’habitude à pratiquer son talent artistique. Elle traduira la chanson d’un autre chanteur (en gardant en tête que l’image projetée par les personnes [connues ou non] n’est qu’une partie de la réalité). Elle dessinera des esquisses, fera les calques. Elle s’assurera de pouvoir remettre son projet d’arts dans les délais prévus au départ. Et elle sera fière, parce qu’elle aura su défendre ses valeurs et ses convictions.

Bravo, ma Peanut ! Tu es un modèle à suivre.

Nathalie Courcy

L’art qui fait du bien

Oui, je sais. Le cahier de coloriage zen que vous avez reçu à votr

Oui, je sais. Le cahier de coloriage zen que vous avez reçu à votre fête est intitulé « Art-thérapie ». Et vous y croyez! Bien sûr, prendre le temps de colorier, seul, avec nos enfants ou entre amis, ça aide à se calmer le pompon. Mais ce n’est pas de l’art-thérapie. C’est du coloriage. Ou une forme de méditation. Une façon de se mettre le cerveau à off et d’inviter notre enfant intérieur le temps d’un coucou.

L’Association des art-thérapeutes du Québec définit l’art-thérapie comme « une discipline des sciences humaines qui étend le champ de la psychothérapie en y englobant l’expression et la réflexion tant picturale que verbale ». Alors c’est quoi… on s’assoit, on jase et on gribouille? Parfois, oui, mais pas tout le temps. Ça dépend des objectifs définis avec le thérapeute, de notre état émotif et physique, de nos préoccupations du moment et de ce que perçoit le thérapeute.

Quelqu’un qui serait submergé par les émotions pourrait être guidé vers des figurines et un bac à sable. Le choix des figurines sera important, mais aussi le langage verbal et les gestes, les hésitations, le rythme des mouvements, tout comme la façon de placer les figurines dans l’espace. On est loin d’un jeu naïf de Barbie ou de Transformers! Un paon échevelé qui baboune devant une carpe aplatie peut révéler bien plus que des mots pesés et filtrés par le conscient.

L’art-thérapeute peut nous amener à créer à partir d’une silhouette complète ou partielle (une partie du corps ou le buste), en deux ou en trois dimensions. Notre main optera pour les crayons-feutre ou de bois, les pastels ou la peinture, les plumes ou les mouchoirs. La manipulation du matériel, les textures, la pression exercée sur les outils, tout parle. Et croyez-moi : on se révèle même si on essaie de se censurer.

Ne se couronne pas art-thérapeute le premier venu : les art-thérapeutes doivent avoir réussi un programme universitaire spécialisé de deuxième cycle ainsi qu’une formation dans les domaines des arts et de la psychologie. L’art-thérapeute est formé pour analyser nos réactions et nos créations. On n’est pas au royaume de l’œuvre d’art ni du jugement critique, et encore moins de la psycho pop à cinq sous. Le rouge ne signifie pas nécessairement l’amour ou l’agressivité, et le noir peut révéler un sentiment de bien-être, de vide, d’insécurité, name it.

Le plus beau dans cette histoire, c’est qu’on peut trouver beaucoup de plaisir dans les séances d’art-thérapie. Quand on pense thérapie, on imagine souvent le divan de Freud ou le psy à lunettes qui prend des notes sans arrêt en dodelinant de la tête. Pensez plutôt à un espace multicolore, rempli d’outils de création qui vous invitent à vous laisser aller. La relation de confiance avec le thérapeute se construit au fil des coups de crayons et de ciseaux. Mais aussi au fil des silences et des bouleversements. L’art-thérapie, ce n’est pas une séance de bricolage version école maternelle. On est en plein dans le travail sur soi. Et ça marche.

Ma première rencontre avec l’art-thérapie remonte à un atelier qui permettait de visualiser ce qu’on voulait de l’année à venir. C’était un soir de janvier, un petit groupe, une amie, des inconnues, une art-thérapeute inspirante et des piles d’images de magazines, de livres, de catalogues de tissus. Le tapis volant d’Aladin aurait porté mon corps que je ne me serais pas plus sentie voler. Une rencontre avec moi-même à travers le miroir des images et l’accompagnement de l’art-thérapeute.

Depuis, je rencontre cette professionnelle régulièrement. Je compte les dodos avant mes rendez-vous, comme un enfant impatient que Noël arrive. Alors, imaginez un enfant qui va rencontrer un art-thérapeute! Le côté ludique de la création et des couleurs facilite la communication et approfondit l’échange. Il est bien moins effrayant de représenter notre peur de mourir avec de la pâte à modeler ou du carton qu’avec des mots.

L’art-thérapie peut aussi trouver sa place dans les milieux de travail, les résidences pour personnes âgées, les maisons d’accueil pour femmes battues… bref, partout où il y a de la souffrance, des relations pas toujours roses et des questionnements. Comme les thérapies traditionnelles, l’art-thérapie ne fait pas de magie instantanée. Mais avouez que ça vaut la peine de l’essayer?

Association des arts-thérapeutes du Québec
Canadian Art Therapy Association