Maman, je veux mourir
Tu ne le sais peut être pas mon grand, mais souvent, je te
Tu ne le sais peut être pas mon grand, mais souvent, je te regarde marcher. Je vois ce boulet que tu traines derrière toi. Malgré tes seulement onze ans, on dirait que tu portes un poids énorme sur tes épaules. Dire qu’il y a trois ans, tu avais osé me dire que tu aurais aimé mourir. Tu disais que tu n’osais pas passer à l’acte, mais que tu n’aimais pas la vie.
Mon cœur de mère a été détruit à ce moment. Être maman est supposé être tellement valorisant, mais moi, je me voyais vraiment comme la pire mère du monde. Moi qui t’ai toujours tout donné, qui ai fait vraiment de son mieux. Pourquoi ta vie était-elle si difficile? Pourquoi étais-tu si malheureux!?! Mes autres enfants étaient souriants, affectueux et pleins de vie. Qu’avais-je fait de différent avec toi?? Est-ce que c’était notre faute, à moi et ton père ?
Tu as toujours pensé que le monde ne t’aimait pas. Il est vrai que tu as vite été étiqueté à l’école. Les gros mots sortaient vite lorsque quelqu’un t’accrochait par accident dans la cour. Si quelqu’un osait te dénigrer même si léger soit-il, tu explosais tel un volcan. Des fois, c’était des pleurs. Des fois, tu te figeais comme un piquet, les points serrés, maitrisant ta colère. Toi qui n’a jamais frappé personne. Toi qui ne réagis que quand il y a un élément déclencheur. Tu es perçu par les autres comme étant un « petit criss »; celui qui n’est pas fréquentable. Tu as été longtemps seul dans ton coin.
Nous avons travaillé fort, moi, toi et ton père pour que tu remontes la pente. Aujourd’hui ça va mieux, ta vie sociale se porte mieux aussi. Ton diagnostic de TDAH (trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité) a peut-être aidé dans tout ça, même si des fois je ne suis même pas sûr que ce soit le véritable problème. Je vois toujours ce boulet que tu traines pis ça me chicote. J’ai peur que tes idées noires reviennent. J’essaie de rester positive, car je sais que tu es et que tu seras une bonne personne.
Au lieu de voir ça, toi, tu ne fais que penser aux mauvaises réactions que tu as eues. Tu regardes trop en arrière, car ce que tu détestes le plus est de décevoir le monde. Juste à onze ans, tu crois que ta vie est partie trop tôt tout croche et que tu n’arriveras jamais à rien. Mais moi, mon ange, je le vois ton potentiel, ton cœur immense et ton sens de l’empathie trop très développé! À un tel point que toutes les émotions qui montent en toi te sont insupportables et tu ne sais pas comment toutes les gérer.
Pourtant, malgré tous tes efforts et améliorations, il y a toujours des parents qui osent me dire que tu n’es pas fréquentable. Même si j’entends leurs enfants parler super mal et dénigrer les autres. Même si tu as un très bon début d’année, même si tu as travaillé d’arrache-pied pour mieux gérer tes émotions pour que tu sois mieux perçu. Malgré tout ça, tu restes étiqueté aux yeux du monde, au détriment de ta perception de toi-même. C’est à cause de ce monde-là que j’ai peur pour toi; ce monde remplit de jugements faciles, et ce, sans même te connaître vraiment.
La dernière chose que je veux est de réentendre que tu veux mourir.