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Maman, papa, je vous entends – Texte: Nancy Pedneault

Il y a longtemps que j’ai envie de vous en parler. Mais chaque fois, les mots restent pris dans ma

Il y a longtemps que j’ai envie de vous en parler. Mais chaque fois, les mots restent pris dans ma gorge. Je ne sais pas comment vous dire ça…

Maman, papa, je vous entends.

Mon cerveau d’enfant est en formation, mais mes oreilles entendent très bien. Alors, quand vous passez des commentaires sur moi, je vous entends et surtout, je vous crois. Vous êtes ma référence.

Comme je suis encore petit, je ne fais pas la nuance entre une mauvaise journée et un mauvais enfant.

Quand vous discutez à mon sujet à la garderie, je vous entends. Je ne comprends pas tous les mots, mais je sais qu’il ne sont pas positifs: tannant, dort mal, crise. Je crois que je suis méchant.

Quand vous parlez à mon prof, devant moi, en disant que je suis anxieux, je deviens anxieux. Je crois que je le serai toujours. Je ne sais pas que c’est momentané et qu’il est possible de trouver des solutions. Je vous crois.

Quand vous dites à vos amis et à la famille que je suis un enfant difficile, je vous entends. Je sens que je ne m’améliorerai jamais. Je vous crois.

Papa, maman, je vous en prie, faites attention aux mots que vous utilisez quand vous parlez de moi en ma présence. Laissez une trace positive dans mon cerveau.

Voici quelques trucs :

L’acronyme TDAH n’est pas un petit nom d’amour. Pourtant, je suis énergique, enjoué et créatif. Soulignez mes bons côtés.

Plutôt que dire que je suis beau, dites de moi que je suis intelligent et débrouillard. Je développerai ces qualités.

À la place de malcommode, vous pourriez souligner que je suis curieux et drôle.

Vous voyez, ce n’est pas difficile!

De votre enfant qui vous croit sur parole.
Nancy Pedneault

Aimer n’a pas de sexe – Texte: Joanie Fournier

Les enfants posent des questions. C’est normal, ce sont des enfants. Câ€

Les enfants posent des questions. C’est normal, ce sont des enfants. C’est leur rôle de poser des questions sur la vie. Et je pense que tous les enfants se posent les mêmes questions, mais selon leur génération, leur culture, leurs valeurs, ce ne sont pas tous les parents qui donnent les mêmes réponses. Je pense cependant qu’il est important de donner l’heure juste à nos enfants. De leur expliquer les choses telles qu’elles sont, tout simplement.

Chez nous, ces discussions font partie du quotidien. Je ne me rappelle pas qu’on ait eu UNE discussion sur la sexualité ou sur l’amour, par exemple. Je sais qu’on en parle souvent parce que certaines phrases clés sont répétées souvent ici. Par exemple, j’ai toujours répété à mes enfants, depuis aussi longtemps que je me souvienne, qu’ils ont le choix. Ils ont le choix d’être en couple, ou pas. Ils ont le choix de se marier, ou pas. Ils ont le choix de vouloir des enfants, ou non. Ce n’est pas parce que moi j’ai voulu me marier à l’église devant Dieu, que moi j’ai voulu une grande famille, que moi je suis tombée amoureuse d’un homme, qu’ils doivent faire la même chose. Ce sont mes choix de vie à moi, mes préférences à moi, ce qui me rend heureuse, moi.

Je leur répète constamment qu’ils pourront aimer qui ils veulent. Garçon, fille, cisgenre, transgenre, intersexe, peu importe. Mais, il y a bien une condition ! La personne choisie doit les respecter, les aimer, les traiter avec amour et bienveillance. Parce que je m’en fiche de savoir que mon enfant est hétérosexuel, homosexuel, asexuel, etc. Ce qui m’importe, c’est qu’il sache être dans une relation saine où il se sent aimé, respecté et en sécurité.

J’espère secrètement que mes enfants ne feront jamais de « coming out ». Parce que je ne veux pas qu’ils pensent avoir besoin de se mettre dans l’une de ces catégories. Nul besoin de sortir du placard quand tu n’as jamais été forcé de t’y cacher, non ? Je me dis que je leur souhaite de connaître l’amour, avec un humain formidable. Ils méritent d’être aimés et de connaître ces petits papillons.

J’ai souvent l’impression que notre génération aime mettre des mots sur des gens, des catégories où les encadrer, des boîtes où les restreindre… Dès que quelqu’un sort des catégories connues, on lui en invente une ! Un nouveau mot, un nouveau concept. Pourvu qu’on ait tous une case où se ranger. Je n’ai jamais compris…

Tant que ton cœur bat et peut aimer, à mes yeux, tu es un humain. C’est aussi simple que ça. C’est un garçon ou une fille ? C’est un humain. C’est un hétérosexuel ou un homosexuel ? C’est un humain. D’où il vient ? De la Terre. Je n’ai pas ce besoin d’enfermer des gens dans des cases pour leur accorder de la valeur. À mes yeux, on naît tous égaux et ce sont nos actions qui déterminent la personne que nous voulons être. Donc si tu me traites bien, je te respecte.

Peut-être justement que si chaque enfant pouvait s’habiller comme il veut, choisir le métier qu’il veut et décider de la personne qu’il aime, la paix serait plus facile à obtenir pour tous. Peut-être que finalement, c’est la prochaine génération qui a tout compris. Si seulement tous les enfants pouvaient avoir réellement le choix. Je connais trop d’enfants à qui les parents imposent leurs valeurs et leurs propres choix. Je connais trop de parents incapables d’ouvrir leur esprit.

Et si nos enfants connaissaient en fait les réponses à leurs propres questions ? Peut-être justement qu’il faut arrêter de penser que c’est aux adultes d’apprendre aux enfants. Peut-être que c’est le tour de nos enfants de nous apprendre la vie. Peut-être qu’ils savent mieux que nous comment être un bon humain…

Joanie Fournier

 

Tu seras la plus belle femme rondelette enceinte – Texte : Kim Boisvert

Je vous le jure, c’est une vraie phrase qu’on m’a dite quand

Je vous le jure, c’est une vraie phrase qu’on m’a dite quand j’ai annoncé ma grossesse à une bonne connaissance.

« Tu seras la plus belle rondelette femme enceinte qui existe sur la Terre tout entière ».

J’serai pas la plus belle femme enceinte tout court, non ! Je serai la plus belle femme rondelette enceinte.

J’étais enceinte de jumelles, 4 mois de fait avec une bedaine bien apparente, et j’en avais aussi une avant, of course. J’imagine que le RONDELETTE vient qualifier ma bedaine d’avant. Mais être enceinte, ça ne nous rend pas déjà plus rondelette ? Qu’on le veuille ou non ? J’pensais qu’à la base, c’était pas si important, que tout le monde était conscient que la femme subit une transformation extrême inversée et que c’était pas si facile à vivre. Du moins, pas pour toutes. Mais enceinte, j’ai compris que mon corps n’appartenait pas juste aux deux petits Aliens tout à fait sympathiques qui poussaient en moi. Oh ! Non, mais bien à tout le monde qui avait une opinion, qui voulait toucher à mon ventre ou même juste me donner des conseils santé sur comment bien me nourrir. Laissez-moi manger ma crème glacée.

J’avais juste envie de crier « Écoute-moi bien, Madame, jusqu’à tout dernièrement, je vomissais ma vie du matin au soir et maintenant, si je ne vomis pas, tout me lève le cœur ou presque. Je suis rendue à avoir une bonne journée d’énergie sur deux. C’est pas si parfait, mais ce qui rentre est toujours mieux que ce qui sort. Alors si je te dis que mes bébés grossissent, mais que j’ai pris une seule minuscule livre depuis le début de ma grossesse gémellaire, j’pense pas que t’as le droit de juger ma situation, encore moins de me rappeler que comme j’étais déjà rondelette avant, je viens désormais avec une deuxième étiquette. Parce que je sais bien que ce n’était pas normal que mes bébés grossissent sans que je prenne de poids. »

Mais encore là, c’est normal de mettre une étiquette sur le corps d’une femme enceinte. La plupart du temps, c’est fait sans méchanceté, parce que la maternité semble donner le droit à qui le veut bien de commenter cedit corps comme s’il n’appartenait à personne. La propriétaire de ce corps doit vivre au quotidien avec des changements, des peurs et dans mon cas, le miroir.

Le choix de mots pour qualifier une femme enceinte ne devrait jamais porter sur la grosseur. Parce que se faire dire qu’on est rendue une belle rondelette enceinte ou une grosse toutoune, ça ne devrait pas faire pas partie de la normalité de la maternité. Je préférais de loin avoir les nausées que d’entendre les gens parler de combien j’étais énorme ou combien je le serais !

La grossesse est censée être empreinte de bonheur et de légèreté. D’amour et d’excitation. Pourtant, chaque jour, je vérifiais dans le miroir à quoi ressemblait mon corps. Ce corps portait la vie, deux vies et demie dans mon cas, si j’inclus leur sœur triplette rendue en étoile. Et je l’ai oh ! combien maltraité ce corps durant des dizaines d’années. Et pourtant, malgré tout le travail, ces remarques me mettaient encore un poignard dans le cœur. Un doute en tête. Des craintes de ne jamais retrouver un poids correct. De ne jamais réussir à courir à nouveau. De revenir au travail après un an et de ne pas avoir réussi à retrouver un poids d’équilibre. La peur que sur les photos du party de Noël, mon surplus de poids paraisse. Pourquoi ces peurs ? C’est insensé.

Alors, la prochaine fois que vous verrez une baleine qui marche un peu en clown, à la place de lui dire qu’elle est rendue énorme, tournez votre langue dans votre bouche. Ou mangez un beigne et encouragez-la. Parce que sincèrement, personne n’a besoin de se faire rappeler la circonférence de son corps, peu importe le poids ou la situation.

Kim Boisvert

L’étiquette s’est décollée…

Si vous avez déjà lu mes derniers textes, vous avez compris l’en

Si vous avez déjà lu mes derniers textes, vous avez compris l’enjeu de vivre avec un enfant présentant des retards de développement. Aujourd’hui est un grand jour pour notre famille. Parce qu’aujourd’hui, je vous raconte comment une si petite vie peut changer.

Quand on colle à notre enfant l’étiquette rouge de l’enfant handicapé, on a l’impression qu’elle le suivra toute sa vie, comme une ombre menaçant sa réussite ou son bonheur. On s’inquiète, des jours durant. Puis des mois. Puis des années. Puis, on se fait à l’idée que ce handicap fait partie de lui, et qu’il fait aussi partie de nous.

Après l’opération aux oreilles de notre fille, nous devions attendre cinq longues semaines avant de savoir si l’intervention avait fonctionné. Cinq longues semaines avant de savoir si toute cette épreuve ferait une différence, aussi minime soit ‑elle. Le chirurgien nous avait répété que ça changerait sa vie. On voyait déjà, au quotidien, de grandes différences dans son développement.

On a appris à connaître une petite fille enjouée, prête à découvrir le monde. Une petite fille qui pose maintenant des questions et qui chante sans arrêt. Vraiment sans arrêt. Une petite fille qui court, qui saute, qui tourne, et tout ça sans tomber.

Cinq semaines plus tard, le jour J arrive. On rencontre le chirurgien. Les tympans ont bien cicatrisé, tout semble parfait. On nous réfère en audiologie, pour voir si l’audition de notre fille a changé. Avant l’opération, elle ne pouvait entendre ni chuchotement, ni discussion sereine, ni paroles à travers une foule. Sa surdité était sévère, selon eux. On repasse donc le test… Audition à 100 %. Dans les deux oreilles. Plus de surdité. Du tout. Évaporée, la surdité!

On rencontre ensuite la physiothérapeute qui suit notre fille depuis des années. Parce qu’à neuf mois, on lui avait déjà diagnostiqué un retard moteur. On a vu la physio, et l’ergo, pendant des semaines, des mois et des années. Avant l’opération, notre fille de trois ans n’avait pas les acquis moteurs d’un enfant de 18-24 mois. Plus d’un an de retard. Cinq semaines plus tard, on la réévalue. La physio n’en croit pas ses yeux. Notre fille défie tous les pronostics. Aujourd’hui, on nous annonce qu’elle a les acquis d’un enfant de son âge, et même plus. Son évolution tient du miracle. Fini le retard moteur aussi.

J’ai pleuré. De joie. « Quand on colle à notre enfant l’étiquette rouge de l’enfant handicapé, on a l’impression qu’elle le suivra toute sa vie, comme une ombre menaçant sa réussite ou son bonheur. » Décoller cette étiquette, ça relève du miracle. Et croyez‑moi, quand ce jour arrive enfin, on se sent rempli d’une gratitude infinie.

Aujourd’hui, sa petite vie a changé. Et la nôtre aussi. Je peux rayer de notre calendrier tous les rendez‑vous en physio, en ergo, en audio et alouette! Il reste l’orthophonie. Parce que réapprendre à parler, après trois ans sans entendre totalement, ça prend du temps. Du temps, de l’amour et de la volonté. Et on n’en manque pas!

Mais aujourd’hui, des spécialistes ont retiré l’étiquette « enfant handicapé » qu’ils avaient collée sur le front de mon bébé, il y a des années. Et je pleure. De joie. C’est le premier jour de sa nouvelle vie.

Joanie Fournier

 

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