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Suivre son instinct de parent lorsque l’on croit que tout bascule

Cette histoire, je l’ai vécue. Je n’en garde, toutefois, aucun

Cette histoire, je l’ai vécue. Je n’en garde, toutefois, aucun souvenir. Aucun souvenir dans ma tête. Seule une cicatrice fait foi de son passage sur mon corps.

J’ai reçu le sacrement des malades. Celui que l’on donne lorsque l’on ignore si la personne devant nous va parvenir à passer au travers d’une grave situation. J’ai reçu ce sacrement, celui qui donne la force et le courage de supporter l’épreuve. Celui qui m’a soutenue pour poursuivre ma vie et guider les chirurgiens qui ignoraient ce qui se tramait sous leurs doigts, dans mon tout petit corps de nourrisson.

Cinq semaines auparavant, je suis née, un matin de début de printemps. Quelques jours avant le long congé de Pâques. Un matin ensoleillé de l’an 1974. Deuxième dans le rang de la fratrie, j’étais attendue par mon papa, ma maman et mon grand frère. J’avais tardé à me pointer le bout du nez. Profitant du confort utérin que ma maman m’avait offert.

Les premiers jours, j’étais un bon bébé. Une bonne toute petite. Je suivais ma courbe de croissance à la lettre. Puis… la dégringolade à la vitesse grand VV pour vomissements. V pour veiller un bébé et finir par le nourrir à la cuillère. Et finalement, V pour visites répétitives.

Mon mal s’était installé tout doucement. Petits rejets de lait. Toujours affamée, mais de moins en moins capable de garder en moi ce que ma mère m’offrait pour me nourrir. Puis des vomissements en jets. Propulsés sans aucun effort de mon petit être qui désirait pourtant boire. Plus les jours avançaient, moins j’avais de force pour combattre ce qui m’empêchait de boire.

Malgré ces instances répétitives chez les médecins, ma mère retournait toujours bredouille à la maison, avec moi comme petit poupon sous le bras. Les intolérances et les erreurs métaboliques avaient été soulevées. Les vomissements auraient pu être d’origine infectieuse ou d’ordre neurologique… Rien de précis, rien de concluant. Les médecins ne trouvant rien retournaient ma mère en la sommant de me nourrir de façon plus régulière, de ne pas se plier à mes « caprices », de changer de sorte de lait… et cela a été de mal en pis. Plus je buvais, plus je vomissais. Plus je vomissais, plus je me déshydratais. Plus je m’enfonçais et plus ma mère était à bout de ressources, plus le sentiment d’abandon s’emparait de nous deux.

Retour à la case départ… Ma mère accompagnée de ma marraine m’a amenée à l’hôpital où j’avais vu le jour. Les médecins, pour calmer la peur de ma mère, lui ont proposé de me prendre en observation et de me refaire une alimentation. J’étais totalement déshydratée et ma mère épuisée. Il ne fallut que peu de temps aux médecins pour constater qu’il y avait quelque chose qui clochait. Ma mère avait eu raison de s’inquiéter et tellement bien fait de m’y amener. J’ai donc été transférée en urgence à l’Hôpital Ste-Justine. L’endroit même où j’ai reçu le sacrement des malades me donnant du coup les forces nécessaires pour passer devant ce qui arrivait.

Mais qu’est-ce qui arrivait? Tous l’ignoraient. On devait m’ouvrir pour voir le problème. Ne sachant ce qui les attendait, les médecins ont procédé à ma libération. Mon pylore* était fermé. Ne permettant pas aux aliments de passer. D’où les vomissements explosifs.

À cette époque, la fréquence de cette malformation chez les garçons, premiers de familles étaient, était mieux connue (trois à quatre fois plus chez les garçons que chez les filles). J’étais une fille, seconde de famille. Je déjouais en quelque sorte les diagnostics de l’époque.

Le lendemain de l’intervention, ma mère a retrouvé un bébé bien joufflu. Cachant du coup les inquiétudes, l’amaigrissement, la malformation. Je suis revenue à la maison et la vie a repris son cours normal. J’ai eu une chance incroyable. Le temps qui avait passé entre les débuts des symptômes et le moment de l’intervention me laissait le moins de chances possible. J’étais à moins de vingt-quatre heures de trépasser. Trop déshydratée.

Maintenant, je mords dans la vie. J’ai toujours mené une vie normale. La seule trace, je la vois sur mon ventre, près de celle qui signifie que j’ai donné la vie par césarienne. Deux petites cicatrices qui symbolisent que la vie se côtoie sur mon bedon.

Votre nouveau-né de quelques petites semaines vous manifeste des inquiétudes de l’ordre de vomissements qui surviennent après chaque repas avec un délai plus ou moins long? Ils sont faits facilement, brusquement, en jets? Ils sont abondants, parfois plus importants que la quantité d’aliments ingérés? S’ensuivent une déshydratation et une constipation synonymes de la sous-alimentation? Malgré la perte de poids et les vomissements, le nourrisson reste affamé et vorace? Il importe de consulter. Nous ne sommes plus en 1974; les ressources sont devenues innombrables en matière de santé. L’intervention est somme toute facile et la récupération totale.

Mille mercis à toi, maman, d’avoir écouté ton instinct et d’avoir poursuivi ta quête pour me garder. Je sais que ces moments ont dû être fort inquiétants. Merci pour tout.

Mylène Groleau

*Le pylore fait partie du système digestif. Ce muscle a pour fonction de faire passer les aliments digérés par l’estomac vers le duodénum. Dans le cas présent, il y avait rétrécissement du sphincter empêchant les aliments de passer.

La fièvre

D’un coup, sans prévenir, tu ne files pas, tu respires rapidement, tes yeux sont vitreux, tu devi

D’un coup, sans prévenir, tu ne files pas, tu respires rapidement, tes yeux sont vitreux, tu deviens mou, tu ne manges plus, tu es chialeux, ta peau est si chaude… Je n’ai même pas besoin de prendre ta température, car je sais qu’elle est de retour… la fièvre…

Chaque fois, ce même moment de panique dans mon cœur de maman : mon bébé chauffe ! Son petit corps lutte contre une infection ! Qu’est-ce qu’il a ? Va‑t‑il se déshydrater, convulser ou mourir ? Mes battements cardiaques accélèrent, j’ai la nausée, je me garroche sur un médicament qui va faire tomber sa température. Je cours vers le téléphone : vite, il faut appeler la clinique !

Je sais pertinemment que ça peut ne pas être grave ! Les dents, un rhume, un virus quelconque… MAIS MON BÉBÉ EST MALADE ET MOI J’AI PEUR !

Parce que t’sais, ça se peut que ce soit dramatique ! Sur Internet, je découvre avec angoisse plein de maladies terrifiantes que mon enfant pourrait avoir !

Quand il finit par s’endormir, le souffle court et les joues si rouges, je n’ose pas fermer l’œil… je veille… je tourne en rond et je suis alerte…

Est-ce ça, l’instinct maternel ? Paniquer complètement quand mon petit chauffe ? Si c’est le cas, ce sentiment n’est-il pas primordial pour la survie de l’espèce ? Ça nous oblige à être à l’écoute de chaque alerte !

Pour mon cœur de maman, la fièvre, c’est une alerte ! Alors toi, médecin, infirmière, amie, conjoint, grand-mère… je n’ai pas besoin que tu me dises que ce n’est pas grave, qu’il faut attendre 48 heures, que je ne dois pas m’en faire… J’ai seulement besoin de ta main sur mon épaule, de ton écoute, de ta présence bienveillante. J’ai besoin de tu me croies…

Car quand une maman dit que son bébé ne va pas bien : elle ne se trompe pas…

 

Gwendoline Duchaine

 

L’instinct maternel qui avait oublié de se pointer le jour de ta naissance

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42 semaines… 42 semaines à cohabiter. 42 semaines à connecter. 40 semaines, c’est une moyenne, paraît-il. J’avais si hâte de te voir! Te découvrir. Te prendre. Être ta maman. 42 semaines à te bercer au sein de mon ventre. À te chanter une berceuse. Toujours la même. Comme si j’instaurais une routine. En tout cas, cette berceuse me calmait. Alors, je la fredonnais souvent. Tout le temps même.

Un accouchement que je n’avais jamais imaginé. Toute ma grossesse avait été de rêve. Tu valsais en moi. Tes mouvements étaient légers et délicats. C’était si agréable de te porter que t’accoucher serait un véritable conte de fées. Ben non! Rien de tout ça. Un accouchement pour m’ébranler un peu et me montrer que la maternité, c’est parfois autre chose que du bonbon.

On devait me provoquer, car tu semblais trop bien en moi et que tu ne faisais aucun effort pour que le travail débute. Finalement, le travail a commencé son œuvre au lever du jour. Un soleil entrait par la fenêtre de chambre pour créer une ambiance féérique. Et puis… pendant des heures, l’obstétricienne qui n’arrivait pas à crever la poche des eaux. Mal placée, semblait-il. Le col qui ne dilatait pas. Le col qui ne s’effaçait pas. Huit heures d’essais atroces et interminables pour percer cette poche. On provoquait ton arrivée. Mais comme tu as toujours été calme, pourquoi t’en faire? Tu restais là. Attendre que l’on vienne te chercher. On m’annonce finalement que ce sera une venue par césarienne. Il y en a pu de problèmes, rendu là! Je veux te voir et te sentir dans mes bras! Et que cette douleur prenne fin. Je suis légèrement confuse. Je m’abandonne aux décisions de la médecine.

J’étais à la merci d’une équipe de travail qui était bien compréhensive envers mes inquiétudes. Je n’étais plus moi-même. Pleine de médicaments pour amoindrir ma conscience de ce qui se tramait autour de ta venue. J’ai perdu le fil de ce qui se passait. J’ai vu tes pieds passer au-dessus de ma tête. Ton père est parti avec toi. On m’a refait une beauté du bas ventre et je suis montée en salle de réveil. Puis à ma chambre, papa t’a amenée contre moi. J’étais encore sous médication. J’avais mal au cœur. J’ai grommelé un : « Enlève-la de là… je vais lui vomir dessus. » L’infirmière est venue te chercher pour me laisser reprendre mes sens qui avaient assurément pris la fuite dans la salle d’opération. Ta première nuit lui a appartenu. À elle, cette inconnue pour nous deux. Cette infirmière qui t’avait toute à elle et rien pour moi. J’ai passé, tout comme toi, ma nuit sous surveillance.

À mon vrai réveil, un interne t’avait amenée dans ma chambre froide de toutes décorations. Aux murs aussi pâles que mon teint. Je n’arrivais pas à m’asseoir pour mieux te regarder dans ton petit lit de verre. Tu bougeais aussi calmement que dans mon ventre. Je t’ai reconnue, aussitôt. Tes pas de danse, nous les avions chorégraphiés ensemble, au fil des mois.

Nous avons eu quatre jours pour nous apprivoiser à l’hôpital. C’était toi. Rien pour en douter. Mais je ne connaissais rien de toi. C’était rassurant d’avoir quelqu’un à mes côtés pour prendre la relève le cas échéant. Ton papa avait le tour avec toi. Bien lovée dans ses bras, tu y trouvais la sécurité, la chaleur. Moi, frêle d’une forte anémie, je peinais à t’offrir ce dont tu avais besoin.

Nous avons quitté l’hôpital en nouvelle petite famille que nous étions devenus. Papa a dû partir dès notre arrivée à la maison. Une équipe de jeunes athlètes l’attendait sur le terrain de foot. La vie ne pouvait cesser parce que princesse Lauriane était là. Il a quitté, malgré ta peine du moment. Une peine de quoi? Je l’ignorais! J’allais rester là, plantée au beau milieu du salon un bon moment. Toi dans mes bras avec ta peine. Moi, avec mon immense peine de ne pas savoir quoi faire. Anéantie par mon incompétence! Et si je n’y arrivais pas? Et si je n’y arrivais pas? Jamais! Ce ne serait certainement pas ton seul chagrin à vie! Tu avais une couche toute propre, tu venais de boire. J’ignorais ce qui pouvait bien provoquer cette peine. Et puis…

… Alors, je ne sais pour quelle raison, je me suis mise à fredonner cet air que nous connaissions par cœur, toutes les deux. Cette chanson, fredonnée lorsque tu étais au creux de mon moi tout entier, tu l’as reconnue. Comme dans un moment de pure magie, nous nous sommes regardées dans la plus grande profondeur de nos âmes et c’est à ce moment précis que j’ai compris que j’avais en moi tous ces répertoires pour te protéger, t’accompagner au gré de ta vie, de tes embûches, de tes peines et de tes bonheurs. J’avais en moi cet instinct qui me connectait à toi.

Depuis, j’ai encore parfois douté, je douterai encore, mais jamais je ne cesserai de fredonner nos airs à nous. Ceux qui font que nous nous faisons confiance mutuellement.

 

Mylène Groleau

La femme sur l’image

J’ai 37 ans, trois enfants. Ma grande a 6 ans, mon garçon 3 ans e

J’ai 37 ans, trois enfants. Ma grande a 6 ans, mon garçon 3 ans et mon bébé 6 mois. Plus jeune, je ne savais pas si je voulais des enfants. Puis j’ai porté ma fille, elle est née. Un tremblement de terre dans ma vie; un bonheur et un amour innommables, des changements, des responsabilités et des tâches interminables mais surtout, un instinct maternel que j’ignorais porter en moi. Cet instinct m’a tout de suite fasciné. J’avais tellement lu, écouté des conseils de toutes sortes, pour finalement constater que toutes ces réponses arriveraient en même temps que mon bébé. Puisque j’ai trois enfants, il m’est arrivé que des mamans en attente de l’arrivée de leur premier enfant me demandent des conseils. Je réponds alors : “ Lorsque ton bébé sera là, tu sauras.”

Mais l’instinct maternel, s’il me donne plusieurs réponses, est tout de même lourd à porter. Je ne crois pas qu’une mère <aime>  son enfant. J’aime mon chum, j’aime mes parents, j’aime mes sœurs. Mes enfants, je les porte. Mais ils sont parfois lourds, un troupeau de mammouths! J’en ai parfois mal aux reins.

Avant d’avoir des enfants, surtout lorsque l’on porte notre premier, on voit ces images de mères jouant avec leur progéniture, riant à pleine bouche, coiffure parfaite, bonheur parfait. Maintenant, je sais ce que cette mère porte en elle et ce qui la pousse à donner le meilleur d’elle-même, mais parfois le pire également.

Le matin, cette maman sur l’image avait surement, comme moi, ragé après son garçon de 3 ans qui faisait les pires niaiseries incongrues et inimaginables, repoussé sa grande fille qui, en même temps, insistait tel un vendeur d’assurances pour lui montrer, tout de suite et sans attendre, les mots qu’elle avait si bien réussi à écrire, et fait attendre trop longtemps son bébé qui en même temps, pleurait et s’impatientait. Le tout avait dû se terminer en matin raté, en enfants furieux, en maman hystérique et en bébé inconsolable. Puis, elle avait réussi à calmer bébé, à se ressaisir elle-même, à expliquer à sa grande qu’elle mourrait d’envie de lire ses mots mais qu’il lui fallait attendre un peu. Elle était ensuite allée voir son garçon en colère noire parce qu’il s’était fait chicané fort, était fatigué et se comprenait plus. Une fois son fils calmé, elle lui avait tendu la main en lui disant : “ Tu viens sur le pont avec moi? On traverse vers l’île de la bonne humeur. ” Il avait surement préféré passer par le tunnel. Puis le bonheur et la paix étaient revenus. Ce que l’image ne montre pas non plus, c’est que cette maman d’un poupon ne dort pas la nuit, ou si peu. Elle crève de fatigue. Ce calme qu’elle a réussi à retrouver, les bons mots qu’elle a su utiliser, lui ont demandé un effort surhumain. Elle les a trouvés en creusant dans son énergie de secours, dans son instinct maternel de survie. Mais où sont donc planqués les “décerneurs” du prix Nobel de la paix lorsqu’une maman réussit ce genre d’exploit?

C’est aussi ça, l’instinct maternel.

Cette même femme sur l’image avait surement, un certain après-midi, frôlé péter les plombs, lorsque déjà en retard pour un rendez-vous, sa grande criait sa rage de ne pas trouver ses leggings roses, son garçon pleurait parce qu’elle lui avait mis sa tuque avant de lui mettre ses bottes et son bébé hurlait à en perdre le souffle, frustré d’être attaché dans son siège d’auto. Puis, en leur disant au revoir chez grand-maman qui allait les garder, elle avait réussi à ravaler sa rage, même s’ils avaient crié et chialé dans l’auto tout le long du parcours car derrière sa colère, une pensée plus forte que tout avait émergé; et s’il m’arrivait quelque chose en route. Si c’était le dernier souvenir qu’ils avaient de moi. Alors elle les avait enlacés en leur disant qu’elle les aimait puis était repartie, en retard vers son rendez-vous, avec sa colère dans la gorge.

C’est aussi ça, l’instinct maternel.

Cette mère sur la photo, avant de rire et de jouer avec ses enfants, avait surement aussi dû traîner sa grande chez le dentiste pour, une fois de plus et de trop, se faire enlever une dent. Sa fille qui parfois après ce genre d’intervention avait si peur qu’elle en avait des tremblements et des maux de cœur, était surement en pleurs et refusait de sortir de l’auto. La maman se mit à dire des niaiseries pour tenter de la faire rire. Il pleuvait, elle se mit à chanter du Mario Pelchat : “Et si je pleure dans la pluie, tu n’y verras que du feu…” Évidemment, sa fille ne connaissait pas. Elle l’avait d’ailleurs chanté probablement davantage pour se détendre elle-même. Sa grande s’était mouchée, elle lui avait conseillé en souriant de garder son mouchoir avec elle puisqu’il contenait des crottes de nez chanceuses, ignorant qu’elle était capable d’autant de ridicule. Elles avaient ri ensemble. La femme lui avait parlé de tout et de rien en sortant de l’auto pour la détendre. Une fois sa fille avec la dentiste, la maman s’était enfermée dans la salle de bain pour pleurer un coup. Puis, elle s’était ressaisie, tel un premier ministre devant affronter une foule. Lorsque sa fille l’avait rejointe, ses yeux étaient secs et son regard plein de confiance à nouveau.

C’est aussi ça, l’instinct maternel.

Cette femme tout sourire sur l’image, a dû également reconduire son jeune fils vers la salle d’opération pour une chirurgie. Les jours précédents, elle avait sans aucun doute souffert d’insomnie à l’idée de croiser le regard rempli d’incompréhension et de peur de son enfant lorsqu’il allait partir avec un inconnu vers cette salle, sans elle. Elle s’était promise de se montrer forte. Au moment venu, lorsqu’elle avait déposé son fils dans les bras de l’infirmière, je sais qu’elle a souri comme jamais. Certainement un sourire exagéré et faux, mais elle a souri. Puis, son fils disparu derrière les portes, elle s’était effondrée dans les bras de son conjoint.

C’est aussi ça, l’instinct maternel.

Je ne suis pas une maman calme, je ne suis pas une maman patiente, je n’ai pas toujours la bonne réaction au bon moment, mes conséquences sont très souvent des punitions et je ne réussis pas à maintenir les méthodes conseillées dans les livres. Je suis la femme sur l’image; à la fois fatiguée mais heureuse, dépassée puis en contrôle, hystérique puis calme, qui rit aux larmes, qui pleure en boule, “cool” et “drabe”, qui hurle sa colère puis chante quand ça va mal, humaine, qui réussit des exploits qu’elle n’aurait jamais cru réussir, et surtout forte de son instinct maternel. Cette femme qui a porté ses enfants et les portera toujours.

 

Cet instinct…

On l'appelle "l'instinct maternel". Plus jeune je le trouvais vide d

On l’appelle “l’instinct maternel”. Plus jeune je le trouvais vide de sens. Puis, j’ai eu des enfants…  J’ai alors réalisé que l’instinct maternel est fondamental : l’inquiétude d’une mère fait qu’elle est centrée sur son bébé. C’est, à mon sens, indispensable pour la survie de l’espèce.  Car, un jour, cet instinct là… t’as sauvé la vie.

Guillaume avait fait une entrée dans la vie fracassante : une césarienne en urgence un dimanche de Pâques… Le chirurgien m’a bien fait comprendre qu’on avait failli y rester tous les deux et que je ne pourrais plus avoir d’enfants.

Nous expliquions les pleurs incessants de bébé par cette venue au monde tumultueuse. Je me disais que lui et moi avions besoin de réconfort. Mon petit n’était apaisé que lorsqu’il était collé sur notre poitrine. Comme beaucoup de bébés non?

Quand Guillaume eut trois semaines il se mit à vomir. Chaque jour il vomissait en grande quantité. Tout le monde me disait:
– C’est normal, il fait du reflux.
– Il faut épaissir ton lait.
– C’est pas le premier bébé qui vomit, tu es trop stressée.

Le médecin me conseilla de tirer mon lait et de l’épaissir. Il me dit aussi de relaxer car il me trouvait trop angoissée et que ça pouvait entrainer des symptômes chez mon bébé!!!!

Tirer mon lait et l’épaissir?? VOYONS DONC! Le lait que mon corps fabrique est forcément adapté à mon enfant! Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas! Je le sens! Je le sais! Et je ne suis pas responsable des vomissement de mon fils! Qu’est-ce que c’est que cette phrase culpabilisante?!?!

J’ai appelé ma consultante en lactation et j’ai suivi ses conseils : donner des petites tétées, fréquentes, et garder Guillaume en position verticale après ses boires.
Les jours ont passé et la situation empirait. Guillaume vomissait en jet plusieurs fois par heure. Il ne dormait plus. Il gémissait tout le temps. Mon bébé souffrait…

J’étais incapable de m’occuper de mes deux autres enfants. Je dormais assise afin que mon bébé garde un peu de lait. Son estomac se vidait sans cesse. Mon mari était absent pour le travail. J’étais seule. Avec un sentiment de panique immense. J’avais peur.

J’ai recontacté ma consultante en lactation qui était aussi inquiète que moi. J’ai donc décidé de retourner voir mon médecin et son incompréhension. Ce jour-là, le docteur m’a disputé car je n’avais pas suivis ses conseils. Il m’a dit que Guillaume allait bien : pas de perte de poids, pas de signes de déshydratation. Je lui ai expliqué que je ne dormais plus pour garder mon bébé vertical tout le temps, que je l’allaitais chaque 15 minutes, que j’étais épuisée et inquiète.

Quelque chose ne tourne pas rond! Je le sais! Je le sens!

– Ok bon, pour rassurer la maman : voici une prescription pour aller faire une échographie, pas d’urgence hein! Vous allez en faire un enfant gâté de ce petit là! Détendez-vous un peu!

Je suis rentrée à la maison. J’ai pris un rendez-vous pour aller en écho le jour-même. J’ai déposé mes deux ainés chez la voisine. Guillaume a vomit deux fois dans l’auto. Arrivés dans la salle d’attente, Guillaume s’est vidé trois autres fois.

– Madame, vous devez rester calme. Je vais vous annoncer une nouvelle. Votre bébé à une malformation au niveau de son estomac. Il risque une occlusion dans les heures qui viennent. C’est une urgence. Vous allez à l’hôpital pédiatrique maintenant. Je les ai appelés, ils vous attendent. Guillaume va être opéré en urgence. C’est une sténose du Pylore. Ne vous inquiétez pas, mais ne traînez pas, ok? Madame? Vous m’entendez??? Avez-vous compris?

Je le savais! Je le sentais! Mon bébé n’allait pas bien!!!

Si j’avais écouté mon médecin, Guillaume serait décédé dans les heures suivantes, parce que, comme on me l’a expliqué à l’hôpital, il était un cas “atypique”. Mon bébé était en douleurs depuis sa naissance.  Son médecin n’avait rien vu, mais sa maman l’avait senti.

Je ne suis jamais retournée voir ce docteur.

Cette fusion, cet instinct… lui ont sauvé la vie.

Merci dame nature de faire les choses aussi bien!
Et vous les mamans, n’oubliez jamais ceci : écoutez votre cœur! Vous êtes la personne la mieux placée sur cette terre pour savoir de quoi votre bébé a besoin. Car vous êtes… sa maman!