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Je suis une maman et je fais de mon mieux.

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Malgré toutes les lectures prénatales et même postnatales, je n’ai pas la vérité infuse. J’ai compris avec le temps que devenir maman, ça ne s’apprend pas dans les livres. Il n’y a pas de grimoire avec les potions magiques qui donnent réponse à tout. Mon dieu, tout serait tellement plus facile si un tel livre existait! Je ne commettrais pas d’erreurs, mes filles seraient plus que parfaites. Des petites filles modèles qui répondent immédiatement à chaque consigne avec le sourire, qui se tolèrent sans la moindre chicane… Une belle utopie.

 

Mais la réalité est tout autre. J’ai trois filles. Trois filles différentes. Ce qui fonctionne avec une ne fonctionne pas nécessairement avec l’autre. Trois filles qui me poussent à me remettre en question chaque jour. Mais jamais je n’aurais cru que je douterais de moi à ce point-là. Je me suis demandé si j’étais une bonne maman. Peut-être qu’avoir des enfants n’était pas fait pour moi.

 

Je ne sais pas, je ne sais plus.

 

Non, ce n’est pas vrai! Je sais. Je sais que j’aime mes filles. Je les aime de cet amour inconditionnel. Je crois sincèrement que c’est le plus important.

 

Je les aime assez pour me questionner, lire, chercher, essayer. Je les aime assez pour échouer, pour me relever et essayer de nouveau. Je les aime assez pour reconnaître que j’ai besoin d’aide et pour aller la chercher.

 

Je les aime assez pour les faire rire à en attraper le hoquet, pour les consoler lorsqu’elles ont un gros bobo. Je les aime assez pour les laisser se tromper et pour célébrer leur réussite. Je les aime assez pour jouer, danser, chanter à tue-tête avec elles. Je les regarde évoluer et j’ai ce sentiment de fierté immense qui m’envahit. Je les aime assez pour reconnaître que j’y suis pour quelque chose. Parce que oui, je fais aussi des bons coups.

 

Je les aime assez pour accepter que je vais me tromper. Que je les décevrai probablement. Que je ne serai jamais parfaite. Que parfois, je les ferai pleurer. Que parfois, je ne réussirai pas à les comprendre. Que je ne réussirai pas à les rassurer. Que j’essaierai toujours de faire de mon mieux. Ce mieux ne sera peut-être pas toujours ce qu’il leur faudra…

 

Je les aime assez pour ne jamais arrêter d’essayer d’être la meilleure maman possible.

 

Je les aime tellement que j’ose espérer qu’elles comprendront que j’ai toujours voulu le meilleur pour elles, et que, même si je me suis trompée… j’ai fait de mon mieux.

 

Je les aime assez pour avouer que je ne suis pas parfaite, mais mon amour pour elles est plus que parfait.

 

Mélanie Paradis

À toi, mon enfant unique

Dans la vie, on a tous des regrets. Des regrets qui font mal et d’

Dans la vie, on a tous des regrets. Des regrets qui font mal et d’autres moins. Les regrets qui font mal sont souvent ceux avec lesquels il est plus difficile de vivre. Ceux qui reviennent nous hanter à certaines périodes spécifiques de notre vie… Ou pas. « Pas » dans le sens où ils peuvent être là, dans notre tête, sans arrêt, et qu’ils ne nous lâchent jamais.

Ça peut paraître banal pour certains ou frustrant pour ceux et celles qui ne peuvent pas en avoir, mais moi, je n’aurai jamais deux enfants. Oh oui, je t’ai toi, ma magnifique fille qui grandit à une vitesse fulgurante. Tu as déjà douze ans, tu es belle, gentille et intelligente, mais je n’aurai jamais un deuxième enfant. Tu sais, un autre bébé dont je pourrais prendre soin comme j’ai pris soin de toi. Un complément. Un p’tit bout d’humain avec qui tu aurais développé une belle complicité. Vous voir rire ensemble, grandir, vous amuser, vous chicaner. Je ne devrai jamais faire la police entre vous deux, vous séparer et m’exaspérer devant vos chicanes inutiles. J’aurais voulu vivre une vie de famille complète. Je sens qu’il me manque quelque chose et qu’il te manque quelque chose aussi… Mais dans le fond, qu’est-ce qu’une famille complète? On se complète bien, nous! Elle peut être complète avec un seul enfant, mais j’ai toujours ce sentiment qu’il me manque quelque chose… Peut-être que je ne cherche pas à la bonne place non plus, je ne sais pas.

En plus du fait que je n’aurai jamais deux enfants, je ne serai jamais « ma tante ». Je ne connaîtrai jamais la joie de prendre un enfant un week-end, de l’amener en vacances avec toi et ensuite, de le retourner chez ses parents! Évidemment, je le fais avec tes amies, mais ce n’est pas la même chose, non?

Il y a des choses dans la vie qui ont fait en sorte que je n’aurai pas d’autre enfant.

J’entends dire :

–          Apprécie ce que tu as. Tu as une belle grande fille en santé!

Absolument! Et je savoure chaque étape! Je t’aime, je t’adore. Tu es ma moitié, ma vie, mon inspiration. Tu es une partie de moi. C’est peut-être aussi le fait que tu es un enfant unique, que tu es si près de moi. Je t’aime encore plus fort et je ferais tout pour toi. Je te donne ma vie, mon temps et mon énergie. Tu représentes tout pour moi. Tu me complètes! On rit ensemble, on boude ensemble, on se chicane, on crie, on pleure de rire, on pleure de joie et on pleure de peine ensemble. Pour rien au monde, je ne changerais notre si belle complicité!

Mais j’ai peur, peur pour ton futur. Peur de te voir vieillir seule. Peur du jour où je ne serai plus là pour toi. J’ai peur que tu m’en veuilles un jour de ne pas t’avoir donné un petit frère ou une petite sœur. Tu m’en parles tellement souvent!

Mais tu sais, c’est à moi d’apprivoiser ces peurs, c’est à moi de me déculpabiliser et d’apprendre à vivre avec ce regret. Quand même les publicités à la télévision me font pleurer, quand même voir des enfants jouer ensemble me rend coupable… Je veux que tu saches, ma fille, que toi tu es là à mes côtés. Tu es ma fierté et on forme une super équipe!

La vie est tout simplement différente pour nous, mais elle n’est pas moins belle!

Je t’aime!

Ta mamounette,

Tania Di Sei

 

Je voudrais être une meilleure maman pour toi

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Je dois l’avouer. Ce supposé diagnostic de TDA/TOP (trouble de l’attention et trouble oppositionnel avec provocation) m’a soulagée, m’a rassurée. Je ne sais pas si j’espérais que mettre des mots (ou des lettres) sur ce que nous vivions avec toi allait tout remettre en place. Que mettre le doigt sur le bobo allait le faire disparaître. Qu’il n’y aurait plus de colère, d’impulsivité de provocation. Je ne sais pas ce que je m’imaginais…

 

Aujourd’hui, c’est une mauvaise journée. Tu es plus sensible, tu nous provoques sur tout, tu t’opposes à propos de tout et moi, je suis fatiguée. Ça a été une dure journée au travail. Ma patience avait déjà atteint la limite avant même que je ne mette les pieds dans la maison. Ta journée à l’école a dû ressembler à la mienne parce que toi aussi, tu as tout donné à l’école. Ta petite coupe était déjà pleine et chaque petite goutte supplémentaire, si minime fût-elle, la faisait déborder. Tu as explosé, j’ai explosé et j’ai crié… Toi, tu as pleuré.

 

Aujourd’hui, toutes mes habiletés d’éducatrice à l’enfance et d’éducatrice spécialisée ont pris le bord. Je me suis retrouvée seulement avec la maman fatiguée. La maman qui en avait aussi plein la coupe. La maman dépourvue qui ne sait plus comment réagir aux comportements de sa fille. La maman qui a craqué sous la puissance de tes mots : « Si j’avais pu choisir ma maman, ce n’est pas toi que j’aurais choisie! »

 

Cette maman fatiguée n’a pas compris que c’est la colère et l’impulsivité qui te faisaient parler. Cette maman fatiguée a réagi à la peine. Je t’ai punie. Tu as dû mettre ton pyjama et aller au lit. Tu t’es endormie en pleurant. Je me suis assise sur mon lit pour pleurer.

 

Malgré ma formation, malgré le fait que je suis équipée pour savoir comment réagir, ce soir, je n’ai pas été la meilleure maman pour toi. Je m’excuse, ma puce.

 

Demain, on en reparlera. Je m’excuserai de ne pas avoir su te comprendre, d’avoir laissé cette maman fatiguée prendre le contrôle de mes actes, de l’avoir laissé crier. Je te dirai que je t’aime plus que tous les univers réunis. J’irai encore pousser les portes de notre système de santé, de notre système d’éducation pour qu’il m’outille encore mieux pour t’aider.

 

Demain soir, tu t’endormiras après avoir reçu une tonne de câlins et de bisous. Je redeviendrai la Super Maman qui a parfois la cape trouée…

 

Mélanie Paradis

 

 

 

 

Ma fille, mon miroir

Ma belle grande fille,

Déjà,

Ma belle grande fille,

Déjà, quand tu étais si petite, tu avais ces traits de caractère bien à toi. Certains diront que tu as toujours été dure d’approche, difficile à comprendre, super réservée, une vieille âme, une enfant plus capricieuse, etc. Mais tu as toujours choisi les personnes avec qui tu voulais être, celles avec qui tu te sentais rassurée. Si mini, avant même de parler et de marcher, tu étais habitée par plusieurs insécurités. «Bah, ça va passer, ce sont des phases», que j’entendais et que j’entends encore souvent. Mais non.

Il y a toutes ces petites choses en toi, qui font que tu es toi. Mais tu as aussi cette volonté de fer qui t’habite et cette conscience particulière.

À peine à quatre ans, tu me disais: «Moi j’aimerais ça être comme mon frère et ne plus être gênée. Je n’aime pas ça, moi, être gênée. Ça me fait de la peine.»

Tu évites trop souvent de demander de l’aide aux autres tant c’est angoissant pour toi. Alors tu as vite compris que c’était plus facile de tout faire toi-même. Maman le sait que depuis que tu es toute petite, tu as de grandes peurs. Et maman le sait qu’elles sont réelles ces peurs.

Mon amour, après avoir tellement lu sur le sujet, après avoir essayé par tant de moyens, j’ai dû demander de l’aide. Ouf… ça, ça a été dur pour la maman-Germaine-habituée de tout régler elle-même que je suis. J’ai pleuré, mais je l’ai fait. Je voyais bien que tes peurs grandissaient toujours et que tout devenait plus difficile. Même pour toute la famille, ça devenait compliqué. Cette année, tu as commencé l’école et en dedans de moi, il y avait une petite voix qui me criait que je devais t’aider à affronter tout ça, à affronter cette vie sans maman toujours à tes côtés.

Des changements, tu en as vécu plus qu’à ton tour. Notre vie folle des dernières années  ne t’a pas aidée, ma pauvre poulette. Mais c’est aussi ça la vie, parfois : c’est fou. Je te l’explique avec des mots différents quand on se parle toi et moi, mais ton petit corps et ta tête sont envahis par ce qui s’appelle « l’anxiété ». Mélangée à tout ça, il y a aussi l’hypersensibilité, mais ça, on s’en reparlera. C’est inscrit en toi, ça fait partie de toi. Et il paraît que ce n’est pas le voisin qui t’a transmis ça. Plus je travaille fort pour t’aider, plus ça me pète en pleine face. Maman est si désolée, ma cocotte.

Je sais ce que c’est que d’avoir peur, et surtout, de ne pas les aimer, ces peurs-là. Qu’à la place, on essaie de tout contrôler pour les éviter.

Je le sais qu’on est faites fortes, tout le monde nous le dit, mais qu’en dedans, on se sent souvent tellement petites et faibles. Je n’avais jamais réalisé, avant, à quel point je portais ça en moi.   Plus je te vois grandir, plus je sais dans quel monde je t’envoie.

Plus je comprends, aussi, certains de mes comportements. Et surtout, quand je te vois, je le sais tellement comment ça peut faire mal en dedans. Pour devoir t’aider convenablement, mon amour, j’ai dû et je dois encore me faire face à moi-même. Être maman, c’est aussi ça : voir notre reflet à travers notre enfant.

C’est admettre qu’on est imparfaites et nos enfants aussi. Parfaitement imparfaits.

Mais aussi, je suis tellement reconnaissante. Me faire face à moi-même, c’est un cadeau difficile, mais un cadeau précieux.

Être maman, c’est avoir la chance d’essayer de devenir une meilleure personne de jour en jour, pour toi, pour tes frères, pour papa, mais aussi, pour moi.

Merci d’être toi.

Merci de m’avoir choisie comme maman.

Merci d’être aussi merveilleuse.

Ensemble, on va continuer à travailler fort.

Ensemble, on va continuer à apprendre.

Caroline Gauthier

Petit papillon

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Pour la première fois, j’ai pleuré devant ma fille.

Avant, je jugeais. Je jugeais pour ne pas essayer de comprendre, c’était plus facile. Je me faisais une carapace en pensant que rien ne m’atteindrait. Dans le silence, dans le noir, je pleurais.

Un jour, ma vie s’est transformée en cauchemar. On t’a fait mal, on t’a enlevée à moi. Toi, si petite, tu n’avais que dix semaines. Dix semaines de vie et tu connaissais maintenant l’enfer. Quelqu’un de proche s’en est pris à toi. Malgré la rage qui m’habitait, je me montrais forte. Dans le silence, dans le noir, je pleurais.

Un jour, on m’a emmenée dans une pièce froide avec un inconnu. Un inconnu qui ne cessait de me répéter les mêmes questions. Me rongeant le peu d’ongles qu’il me restait, je ne comprenais pas ce qui arrivait. Après plusieurs heures à me poser mille et une questions, j’ai lu par-dessus son épaule cette phrase qu’aucune mère, aucune blonde ne veut lire : «*** avoue avoir commis v-faits contre ****** (ma fille).»

Ce policier m’a laissée dans le silence. J’ai fermé les yeux. Encore une fois dans le noir, je pleurais. J’étais confrontée à une réalité, pire que tous les scénarios du monde.
Ma fille avait été violentée et moi, je n’avais pas vu, je n’avais pas su entendre sa douleur.

Maintenant grande fille, tu as presque six ans. Depuis plus de cinq ans et demi, je rage dans mon coin. J’essaie de voir le positif de cette histoire d’horreur, même si honnêtement, j’ai beaucoup de difficulté à y arriver.

Grâce à certaines personnes si importantes à mes yeux, je réussis à garder la tête hors de l’eau. Chaque jour, vivre sans ta présence à mes côtés est l’équivalent d’un coup de couteau au cœur. J’ai beau te serrer dans mes bras quand je te vois, j’ai toujours la sensation que tu m’en veux. De ne pas t’avoir entendue pleurer pendant ces moments de calvaires que tu as vécus.

Je ne suis pas la mère que tu voudrais, mais je sais qu’un jour tu comprendras.
Je t’aime, mon bébé.

 

Mes souliers empruntés

Ma grande entame ses premiers pas dans l’adolescence. Ses pieds on

Ma grande entame ses premiers pas dans l’adolescence. Ses pieds ont atteint ma pointure. Ouf… Quel choc! Mon mini-bébé qui a tant grandi. Bien sûr, je vous passe tout le lot de fiertés qu’elle a ressenties et combien mes super chaussures sont devenues des aimants pour ma fille chérie!

Je trouve ça bien cute. Cela m’émeut même. Mais au fil des jours, un autre sentiment m’a envahie. L’exaspération m’a happée comme une wrecking ball en pleine face!

Comme mes chaussures lui allaient, elle a utilisé l’adage « qui ne dit mot consent. »

Un bel exemple, un matin, après avoir choisi mon kit du jour, vous savez, le moment d’enfiler les chaussures qui vont tellement bien avec ce que tu portes? Pas moyen de trouver ces fichues chaussures. Grande fille, elle, n’a vraiment aucune idée où ces perles se trouvent (vraiment?). Finalement, je capitule (parce qu’on va être en retard) et c’est bien juste des souliers.

Retour de grande fille de l’école… avec aux pieds… mes chaussures! Et ma chérie de dire : « Maman, j’ai trouvé tes shoes! », huit heures trop tard….

Sans compter la fois où j’ai retrouvé mes ballerines préférées dans les objets perdus à l’école!

Ou encore mes runnings qui ont subi le cross-country de l’école… sans moi qui courais avec…

Mais la meilleure, c’est la paire de bottes hyper chaudes, pour moi qui gèle des pieds en tout temps. Cette paire de bottes qui vaut bien trop cher, mais que je me suis permis, car je MÉRITAIS tellement de ne pas avoir froid, enfin!

Vers la fin de l’hiver dernier, grande fille m’a demandé de me les emprunter… pourquoi pas, quelques fois.

Cette année, première neige, je mets mes bottes et… ma fille a continué à grandir et s’est creusé une cave dans mes bottes… elles sont fichues!

Paraît que c’est ça, la vie. L’évolution continue… Je me console par le fait que j’ai pu me refaire une garde-robe de chaussures (ça se dit-tu?). Que pour quelques années encore, mes souliers ne seront qu’à moi (oui, ma mini-moi grandit). Ma fille est remplie de fierté d’avoir les pieds plus grands que ceux de sa mère. Et moi, je savoure le fait que moi et ma grande ne portons pas la même taille de vêtements… Je n’ose pas imaginer où serait ma garde-robe sinon… Oh! ouin, elle vient de me dire que c’est bien à la mode, le « lousse », et que demain, elle aimerait que je lui prête mon nouveau chandail avec ma poche de chats…

 

Pour toi ma fille

Chère fille,

Les vacances de N

Chère fille,

Les vacances de Noël viennent tout juste de se terminer. Elles t’ont fait un grand bien comme à tous tes amis à l’école, j’en suis certaine. Avant Noël, tu étais vidée, cernée, bref pour être franche, j’avais de la difficulté à te reconnaître.  Puis, la magie des vacances a opéré. Même si j’ai travaillé, j’ai quand même passé du bon temps avec toi et j’ai pu constater à quel point tu étais en train de devenir une jolie jeune fille.

Maman est très fière de toi. Nous avons pu passer du temps à dessiner des mandalas, jouer au Monopoly, faire des jeux de mémoires, se coller, se dire qu’on s’aime. Tu as aussi démontré une grande générosité. Le 24 décembre, avant d’aller chez tes grands-parents pour fêter Noël, tu leur as préparé à chacun un petit cadeau dans lequel on trouvait ta photo d’école, des mots doux de ta part (car tu sais lire et écrire !) ainsi que des sous. Je te confirme, ta maman n’avait pas ce réflexe à ton âge. Aussi, ton plaisir lors de la distribution des cadeaux, ce n’était pas d’être la première pour déballer, non! Ce que tu voulais, c’était être la fée des étoiles et donner les cadeaux.

D’ailleurs, concernant la magie de Noël, je crois que ta tête a compris cette année que le Père-Noël n’existe pas, mais ton cœur lui, non. Garde cette magie, ma fille. Elle te sera un plus dans le monde dans lequel nous vivons.

Aussi, cette année, tu as eu la chance de passer des journées seule avec ton père pendant que maman travaillait et également seule avec moi, ton parrain, tes grands-parents. Après chacune de ces journées, je pouvais sentir ce qu’elles t’avaient apporté. Ton cœur était en paix et tu avais su apprécier chacun de ces moments. Dans le monde où nous évoluons, la gratitude aide à se centrer sur l’essentiel et toi, d’instinct, tu l’as.

Un autre beau  moment que nous avons vécu ensemble, ce sont tes débuts en patin. Je dois dire que pour moi, c’est sûrement le meilleur moment que j’ai passé avec toi. Tu l’as pigé assez vite, tu n’as pas pleuré et je ne t’ai pas entendue chialer sur les bleus que tu t’es faits. Parce que tu es un enfant équilibré et que les sports que tu as pratiqués avant t’ont fait développer des aptitudes importantes, tu as su toutes les mettre ensemble et en l’espace d’un après-midi, c’était fait. Maman avait sa fierté accotée au ciel en te voyant.

C’est ce que je voulais te dire ma fille: je suis fière de qui tu es. Oui, je pourrais vivre dans la nostalgie de lorsque tu étais plus jeune et que tu avais besoin de nous pour tout, mais je dois te laisser déployer tes ailes et être tout près pour t’aider à grandir dans ce monde pas toujours facile.

Ma chérie, sois fière de qui tu es et j’ai bien hâte au prochain moment d’arrêt pour constater toute ta richesse et ton évolution.

Avec tendresse,

Maman

Non, je ne te sauverai pas!

8 : 39 ─ Maman, je suis dans le trouble. J’ai manqué mon arrê

8 : 39
─ Maman, je suis dans le trouble. J’ai manqué mon arrêt de bus. Je suis rendue du côté d’Ottawa. Je fais quoi pour retourner vers l’école?
─ Oups! Reste dans l’autobus, il va retraverser le pont vers Gatineau.
─ Ah! non… je suis déjà débarquée. Aide-moi!

Le genre de message texte qui démarre un lundi matin sur les chapeaux de mère sauveuse.
Je suis là, ma cocotte! Je tiens ta main, par cellulaires interposés. Mais je ne te sauverai pas.

8 : 42
J’appelle ma grande de douze ans pour la rassurer et l’aider à trouver ses solutions.
─ Où es-tu? Vois-tu un arrêt d’autobus de l’autre côté de la rue?
─ Non, maman! Je ne vois rien! Je suis perdue! Viens me chercher!
─ Écoute-moi. On va respirer ensemble.
─ Non, maman! Je ne suis pas capable! En plus, je vais avoir une retenue! Je vais être super en retard…
─ Peanut, une chose à la fois, ok? On va commencer par trouver un autobus pour te ramener de ce côté-ci de la rivière. Le prochain autobus qui passe, monte dedans et demande de l’aide au conducteur.
─ Je ne peux pas! Il ne va pas m’écouter! Il n’a pas le temps! Il a un horaire à respecter!
─ C’est son travail de t’aider.
─ Non, maman! Je ne serai pas capable! Il va rire de moi! Puis ici, il n’y a personne qui parle français! Il y a juste toi qui peux m’aider. Viens me chercher!

Mes oreilles entendaient son hyperventilation, les sanglots étouffés d’une détresse honteuse. Ma fille ne voyait plus que l’inconnu, n’entendait plus rien sauf les bruits terrorisants du centre-ville. Elle ne sentait que l’angoisse monter et dévorer toute sa logique.

J’ai déjà été cette fille-là. Je n’avais pas encore mon diagnostic d’anxiété ni la prescription qui va avec. En réalité, je n’aurais jamais pensé souffrir d’anxiété. Jusqu’à cette escapade en solitaire au haut d’une des tours de La Rochelle, en France. Ma tête savait que j’aurais le vertige, mais ma tête de cochon avait choisi d’être brave. Une fois en haut, mon corps s’est figé. La profondeur de l’océan et le vide du vent camouflaient l’escalier qui aurait pu me ramener au bas de la tour. Un fœtus emprisonné sur une passerelle, recroquevillé, étampé contre le muret. Ma panique engluait mon cerveau, ramollissait mes jambes, crispait tous mes muscles. Freeze! J’allais mourir de froid au sommet de cette tour maléfique et mon cadavre serait découvert mangé par les oiseaux…

J’aurais pu crier à l’aide, j’aurais pu… non, je n’aurais pas pu. L’image d’être secourue s’affaiblissait au fur et à mesure que l’idée qu’on se moque de moi prenait de l’ampleur. C’est ce qui arrive quand on a l’imagination hyperactive.

8 : 47
Ma belle, je comprends que tu te sens paniquée. Mais je sais aussi que tu es capable de retourner vers le collège. Je vais rester au téléphone avec toi jusqu’à ce que tu sois assise dans le bon autobus. Ok?
─ Non, maman… C’est impossible…
Déjà, la panique faiblissait et la force de ma fille reprenait ses droits. Mon calme de maman faisait le reste, le temps que ma grande cocotte refasse surface complètement.
─ Qu’est-ce que tu vois? Un nom de rue? Un bâtiment?
─ La Cour suprême. De l’autre côté de la rue. Mais il n’y a pas d’arrêt d’autobus. Maman…
─ Je sais où tu te trouves. Marche jusqu’à l’intersection. Tu vas traverser la rue. À ta droite, tu vas voir un arrêt.
La communication a coupé. J’ai essayé de la rappeler, pas de réponse. Je l’ai textée, pas de réponse. Je lui ai envoyé les numéros d’autobus par message texte et j’ai croisé mes doigts.
─ Je t’aime, ma grande. Fais-toi confiance.

L’école m’a confirmé un peu plus tard que ma fille était arrivée à l’école et qu’elle était calme. Elle n’était même pas en retard.

Ai-je été cruelle de ne pas sauter dans ma voiture pour secourir ma fille? Non. J’ai été aimante et encadrante. C’est ce que m’avait enseigné une travailleuse sociale. Plus jeune, ma fille manquait de l’école chaque semaine pour des maux de ventre, des nausées, des insomnies. Sa douleur était réelle, mais en la ramenant toujours à la maison, je renforçais sa certitude d’être en danger partout, sauf près de moi. Il avait fallu lui prouver qu’elle était en sécurité à l’école, qu’elle y avait des moyens de s’y sentir bien et des personnes qui pouvaient l’aider.

17 : 18
─ Ma peanut, sais-tu pourquoi je ne suis pas allée te chercher ce matin?
─ Hum… Je devais me pratiquer à me faire confiance?
─ Viens me donner un câlin. Tu as tout compris.

La fois où j’ai retrouvé ma fille

Quand ma belle Cocotte est née, je m’attendais naïvement à revi

Quand ma belle Cocotte est née, je m’attendais naïvement à revivre la facilité expérimentée avec ma fille aînée : des sourires quotidiens, un bébé qui s’adapte à tout et à tous, des nuits de 13 heures dès l’âge de sept semaines. Mais non. Je me suis fait surprendre par un saut en bungee entre une dépendance intense et un refus total des contacts.

Au moment où Cocotte naissait, Papa préparait ses bagages pour plusieurs mois d’entraînement militaire et de mission afghane. Grande Peanut s’était fait mettre à la porte de sa garderie pour « conflit de personnalité » avec l’éducatrice. Je venais de terminer mes études et je n’avais rien devant moi.

Cocotte a absorbé tout ce qu’il y avait de négatif autour d’elle. Elle a passé quatre mois à pleurer (que dis-je ? À hurler!). C’est ce qu’on appelle un BABI, un bébé à besoins intenses. Son premier besoin s’appelait « Sécurité ».

Impossible pour moi de la promener ou de lui chanter des berceuses. Le mouvement et le bruit (ce qui incluait ma voix) l’irritaient. Même dans le porte-bébé, elle se trouvait trop loin de moi. Elle dormait dans mon pyjama, collée sur ma peau, épuisée. 24 heures par jour, je devais rester immobile et respirer le moins possible pour ne pas la réveiller. Pendant ce temps, sa grande sœur réclamait l’attention volée.

La première fois où j’ai vu ma Cocotte dormir ailleurs que dans mes bras, j’en ai presque pleuré. Je n’avais plus de larmes, alors j’ai simplement souri de soulagement. C’était la fin de l’été; elle était née au début du printemps. Je me disais qu’enfin, elle se sentait en sécurité. Mais non.

Pendant les années qui ont suivi, Cocotte a subi les agressions répétées de sa grande sœur. J’ai par la suite expérimenté les conflits fraternels « normaux » (mais oh! combien désagréables !). Je peux jurer que le traitement qu’elle réservait à ma Cocotte était hors norme. Heureusement, leur relation s’est adoucie. Merci aux psychologues et au temps!

Pendant des années, ma Cocotte traumatisée a refusé tout contact humain. Elle ne s’exprimait plus, elle grognait comme un lion enfermé dans une cage de gerboise. Elle griffait, mordait, se protégeait.

C’était pénible de donner le câlin du soir à mes trois autres enfants et de me faire fermer la porte au cœur par ma Cocotte. Je la savais si fragile… J’aurais voulu réparer son âme et son passé, mais dans ce domaine, la baguette magique n’existe pas.

J’ai dû me tenir loin, observer, à l’affût d’un signe d’ouverture. Un soir, ma sincérité de maman a parlé:

- Ma Cocotte, c’est pénible de ne pas te prendre dans mes bras. Tu me manques… J’aimerais te proposer quelque chose… On ne tolère pas que tu grognes sans arrêt. Tu n’es pas un animal.

– Mais oui, Maman, les humains sont des mammifères!

-Je te demande d’utiliser des mots. En échange, je vais faire d’énormes efforts pour ne pas entrer dans ta bulle. Je ne te toucherai pas et je ne te donnerai pas de bisous. Quand tu seras prête, tu reviendras vers moi. D’accord ?

Le contrat était scellé. Pas de poignée de main envahissante, seulement un silence qui contrastait avec les hurlements habituels.

Quelques mois plus tard, ma Cocotte a accepté que je m’assoie une minute au pied de son lit. Juste pour être près d’elle. Une autre journée, elle a « échappé » une caresse qui l’a prise par surprise. Un bisou, une sieste partagée, quelques confidences…

Petit à petit, elle s’est ouverte aux autres. J’ai maintenant droit à plusieurs « je t’aime » chaque jour, sans devoir la supplier.

Le plus bouleversant, c’est que Cocotte et Peanut se prennent au jeu de s’aimer et de se le montrer. Quand ça arrive, j’entends parfois le grognement d’un chaton qui voyage sur le dos d’un ronron. Quand ça arrive, je me dis que j’ai retrouvé mes filles. Et elles, ELLES se sont enfin trouvées.

 

Nathalie Courcy