Tag Témoignage

Ce matin-là

Il est tôt. Le soleil emplit la chambre et j’y suis bien. Mes bra

Il est tôt. Le soleil emplit la chambre et j’y suis bien. Mes bras entourent mon amoureux et je me réveille doucement. Une autre belle journée de printemps qui s’annonce. Jusqu’à ce que j’entende quelque chose. Mon amoureux, dos à moi, vient de parler. Je ne comprends pas bien ce qu’il dit. Je saute par-dessus lui et à deux pouces de son nez lui dis :

-Tu as dit quoi ?

Nouveau grommellement de sa part. Je ris. Des fois mon chum est trop con.

– Je ne sens plus ma jambe Isabelle.

Je ne ris plus. Qu’est ce qu’il raconte le chum ce matin.

-De quoi tu ne sens plus ta jambe ?

-Je ne sens plus mon côté gauche Isabelle.

J’ai de la difficulté à l’entendre, à comprendre. Le mode “panique” embarque. Sa voix est faible, à peine audible. Ses mots manquent de clarté. Ses yeux ne brillent pas. Il ne va pas bien. Ce ne sera pas une belle journée de printemps.

Il y a soudain urgence d’agir, de déplacer l’air rapidement et d’arrêter le temps contre je ne sais pas quoi. Être dans l’action m’a toujours donné le sentiment illusoire de reprendre le contrôle. Je l’ai mis sur mon dos, l’ai aidé à se déplacer jusqu’à l’entrée de la maison, j’ai mis la voiture dans la plate bande d’en avant et j’ai foncé jusqu’à l’hôpital.

Et là, encore le film. Les agents de sécurité, la civière, les médecins et les infirmières qui s’affolent. J’ai l’impression d’être dans le jour de la marmotte. On me dit de laisser passer, de les suivre, d’attendre. Et c’est ce que je fais n’ayant pas d’autres choix. J’attends. Le temps, ça n’avance pas pour vrai des fois.

Accident vasculaire cérébral (AVC). « Heureusement, vous êtes arrivés à temps » qu’ils me disent. J’entends à peine leurs mots, leurs phrases qui ne font aucun sens pour moi. Je me sens sous l’eau et eux me parlent de la surface de la Terre ou d’ailleurs. Rush d’adrénaline, je suppose. Je cherche du regard mon amoureux, mon chum, mon ami. Je le retrouve; il est conscient, branché de partout. Je me glisse contre lui et je lui prends la main. Pour cette fois-ci; on est sauvés.

Il en fera deux autres dans les mois qui suivront. Deux autres AVC. Mes cheveux blanchiront, je n’aurai plus faim et je serai aux aguets nuit et jour. J’aurai tout lu ce qui fait peur sur le web et j’aurai peur longtemps que quelque chose de bien plus grand que moi m’enlève celui que j’aime. Je recommencerai même à prier. Il détestera que je m’inquiète tant. Il me dira : « profitons de la journée d’aujourd’hui et qu’importe ce qui arrive, sois heureuse Isabelle ».

Heu non champion. Pas « peu importe ce qui arrive, sois heureuse ». Parce que je t’aime. Parce que j’ai besoin de toi, parce que j’ai des rêves à accomplir avec toi et des projets pleins la tête et le cœur. Parce que quarante ans, c’est bien trop jeune pour mourir. Parce que c’est toujours trop jeune de toute façon. Parce que je te veux là, avec moi de manière bien égoïste. Parce qu’il y aura un autre printemps à vivre tous les deux.

 

 

 

 

 

 

 

Tu étais ma fille, maintenant tu es mon garçon

<a href="http://www.mafamillemonchaos.ca/on-jase/ma-fille-est-mainte

Vous trouverez la deuxième partie içi : Ma fille est maintenant mon fils

Lors de ma deuxième grossesse, je souhaitais avoir un autre garçon. J’avais tout ce dont j’avais besoin pour en prendre soin. Des vêtements, de la literie, des jouets… Je trouvais cela beaucoup plus facile de prendre soin d’un p’tit homme en devenir et moins compliqué qu’avec une fille ! Je l’sais ! J’en suis une !

 

J’avais aussi acquis de l’expérience avec fiston. Mais ce que j’avais encore en  grande quantité, c’était de l’amour à offrir à l’enfant qui allait se joindre à notre famille. Peu importe son sexe, peu importe la couleur de ses cheveux, peu importe la grandeur de ses doigts… j’allais l’aimer jusqu’au bout de ma vie.

 

Des jumelles PAS pareilles

 

Mes deux filles sont nées à trente-huit semaines de grossesse. Deux petites filles très différentes. Des jumelles pas pareilles! La seule ressemblance était leur poids: 7 lbs.2 et 7 lbs.6. L’une avec beaucoup de cheveux noirs, l’autre avec un petit duvet châtain. L’une calme, l’autre impatiente. Une dormeuse et une curieuse.  Une rigolote et une réservée. Elles ont grandi, chacune à leur rythme. L’une s’est mise a parler, pendant que l’autre se déplaçait partout dans la maison. Elles se complétaient bien dans leurs différences. Et ces différences se concrétisent encore davantage en vieillissant.

 

 

L’enfance de ma doudoune

 

À l’âge de quatre ans, ma doudoune m’a dit : « Maman, j’ai pu l’goût d’être une jumelle! »

Pourtant, elles étaient si différentes physiquement et rarement habillées de la même façon. Elle ne voulait plus mettre de robes ni de jolis souliers. Fini les lulus et le vernis bleu sur ses ongles. Elle me disait que les chandails de filles étaient trop serrés, qu’elle se sentait coincée. Que les chandails de filles avaient trop de fleurs, trop de papillons et beaucoup trop de brillants. Alors pour lui faire plaisir, je lui refilais les chandails trop petits de son grand frère!

 

Elle continuait de grandir, de vieillir et de s’affirmer de plus en plus!

Pendant que sa soeur jouait à la princesse, ma doudoune faisait le pirate. Pendant que sa soeur se déguisait en Blanche Neige, ma doudoune se déguisait en Spider Man. Pendant que sa soeur faisait des bracelets, ma doudoune jouait au hockey dans la rue avec son frère. Plusieurs personnes que l’on croisait la prenaient souvent pour un p’tit gars!

Elle disait aux personnes qui l’entouraient que lorsqu’elle serait grande, elle aurait un pénis et qu’elle pourrait faire pipi debout, comme son frère! Que lorsqu’elle serait grande, elle ferait partie d’une équipe de hockey, comme son frère! Que lorsqu’elle serait grande… Elle avait plein de projets!

 

Vers l’âge de 12 ans, elle s’affirmait plus fort que d’habitude!

Elle ne voulait plus choisir ses vêtements du côté des filles, elle voulait faire des choix du côté des garçons! J’avais peur qu’elle se fasse juger, j’avais peur du regard des autres envers elle. Alors, pour lui faire plaisir et pour éviter une méga crise, j’acceptais! Oui oui, une MÉGA crise! Ma doudoune a un TDAH (trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité) avec impulsivité.

 

14 ans.  Elle s’affirme avec encore plus de convictions!

Je vais la chercher chez une amie. Une nouvelle amie qu’elle connait depuis septembre. Une amie qui semble importante dans sa vie. Ses yeux pétillent lorsqu’elle en parle! Ce soir-là, elle est en retard. J’attends, j’attends !  Elle arrive enfin et s’excuse de son retard! Je sens qu’elle va m’annoncer une grande nouvelle.  Une grosse nouvelle! Une nouvelle dont je suis consciente depuis plusieurs années, mais que je cache au fond de mon coeur de maman. Je prends les devants et lui dis :

– Hé! doudoune, t’es amoureuse!

– Qui te l’a dit, maman?

-Une maman, ça sait tout!

Plus jeune, elle n’arrivait pas à mettre des mots sur son tourbillon interne, autant dans sa tête que dans son coeur. Elle était de plus en plus impulsive, bougonne, impolie, colérique. Je ne pouvais plus l’embrasser, la coller, discuter avec elle. Je sentais qu’il y avait quelque chose de plus! Je la perdais de jour en jour!!! Elle ne semblait pas bien! C’était plus que la période de l’adolescence. Elle se faisait du mal et se cachait sous de grands chandails, ceux de son grand frère! Elle se faisait du mal. Elle portait des pantalons, même en été!

 

Ce n’était pas le fait d’être gaie qui la bouleversait…

C’était plus que ça!

 

 

Elle me confrontait, m’accusait de tout et de rien! Puis, vers la mi-septembre, elle m’a envoyé un message texte :

« Maman j’veux pu être pognée dans un corps qui n’est pas à moi! J’veux être bien dans mon corps. J’veux pouvoir me sentir moi-même. C’est que j’suis pas bien dans mon corps! J’suis pas dans le bon corps! J’veux être moi.  J’veux être bien et pas me sentir pognée! »

J’ai compris que ma doudoune cherchait tout simplement à savoir si je l’aimerais toujours jusqu’au bout de ma vie…

 

Ma doudoune est, en fait, un garçon nommé Mathis!

 

Si je me concentre pour me rappeler, fouiller mes souvenirs et sonder mon coeur, les yeux de ma doudoune brillaient lorsque quelqu’un la prenait pour un garçon!

 

 

 

Je t’aime Mathis!

Et je t’aimerai jusqu’au bout de ma vie!

 

 

** Crédit photo lespetitinclassables.com **

Quand ta fille passe… pour ta soeur !

 

 Oui, je suis cette f

 

 Oui, je suis cette fille-là!

 

Celle qui a subi les regards désapprobateurs parce qu’elle était enceinte à dix-neuf ans.

Celle qui s’est fait dire :

-Oui, mais ta carrière ?

-Ma quoi ? J’en ai pas… Elle n’est même pas commencée! Ça règle le problème!

T’sais quand tu n’as pas la même vision que les autres…

Celle qui se fait regarder drôlement quand je leur dis que ce n’était pas un accident.

Celle qui a été accueillie, lors de la première rencontre de parents, par des regards étonnés qu’elle traduisait par « ce n’est pas une rencontre de famille, c’est une rencontre de PARENTS. ».

Je suis la petite fille qui a toujours voulu un enfant à vingt ans. Je suis celle qui voulait grandir avec son enfant. Celle qui se disait que la vie serait plus facile en ayant un enfant jeune. Celle qui était naïve, certes, mais qui n’a pas eu peur de s’affirmer. Je suis celle qui vivait en appartement depuis un bout déjà, celle qui était autonome, qui allait au Cégep et qui travaillait en même temps.

 

 

Ma fille, elle était voulue. Point.

Je suis celle qui n’a PAS mis sa vie sur pause car je suis celle qui a décidé d’ajouter un complément à sa vie. Je ne suis pas celle qui s’est privée de faire des activités et je ne suis pas celle qui s’est privée de faire des soupers entres amis. Mon bébé, je l’amenais partout avec moi. Ma fille dormait partout, elle était habituée de voir des gens, d’aller au restaurant et chez des amis. J’amenais son parc et hop, à l’heure du dodo, le tour était joué! J’étais une maman jeune mais qui savait s’occuper de son bébé, malgré tout.

 

Onze ans plus tard…

 

Je suis ENCORE celle qui se fait regarder drôlement, parce que ma fille fait presque ma grandeur.

Je me fais parfois dire :

-Hein! C’est ta fille ? Wow, je pensais qu’elle était ta sœur!

Ça me fait sourire. Sourire parce que ma fille est magnifique; elle grandit bien et elle est bien élevée. Et, OUI, les gens sont surpris. Et ça aussi, ça me fait sourire.  Ils s’attendaient à quoi ?

 

Ce n’est pas toujours facile, je l’avoue…

 

Élever une ado, quand on a encore notre cœur d’enfant, ça fait en sorte que les flammèches arrivent vite. Parfois TROP vite.  Mais je suis celle qui est capable de prouver aux autres que ma fille n’était pas une erreur de parcours et qu’elle ne le sera jamais. Je suis celle qui est capable d’être fière du chemin parcouru, celle qui a surmonté des montagnes et celle qui les déplacera pour elle. Je suis celle qui combat à tous les jours les jugements, les critiques et les opinions des autres. Je sais ce que je vaux et je sais ce que je fais pour ma fille.

On a chacun son parcours de vie. Moi, j’ai choisi le mien, j’ai trente et un an, je suis maman d’une préado de 11 ans et je suis fière d’entendre ma fille dire à ses amies :

« Moi, ma mère est cool! »

 

Chroniques d’une violence ordinaire

Si je vous demandais ce que signifie le 25 novembre, nul doute que c

Si je vous demandais ce que signifie le 25 novembre, nul doute que cela ne vous évoquerait pas grand-chose… sauf peut-être la Sainte-Catherine, pour ceux qui ont gardé en mémoire de vieilles traditions ! Et encore, pas sure que vous seriez nombreux à en connaitre le sens… Et bien, aujourd’hui, c’est…

 

La journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes

 

Ce sont les Nations-Unies qui en ont décidé ainsi, à la suite de l’assassinat des sœurs Mirabal en République dominicaine, en 1960, parce qu’elles militaient pour leurs droits. Les deux sœurs sont dès lors devenues les symboles du combat pour éradiquer les violences faites aux femmes partout dans le monde.

Cela fait donc presque 60 ans que tous les 25 novembre, partout dans le monde, la parole est donnée à toutes ces femmes qui subissent, au quotidien, des sévices, des tortures et de la violence sous toutes ses formes.

Et pourtant, encore, de nos jours, une femme est violée toutes les 23 secondes en Afrique ; et aux États-Unis, une femme est battue par son partenaire toutes les 15 secondes.

Mais aujourd’hui, je ne prends pas la tribune pour me faire l’écho de toutes ces histoires aussi violentes les unes que les autres.

En cette journée internationale pour l’élimination de la violence contre les femmes, je veux simplement rompre le silence sur les réalités des femmes victimes de violence conjugale, ici, au Québec.

Aujourd’hui, je veux vous raconter une histoire d’une violence ordinaire. Cette violence, qui s’exerce au sein d’une relation amoureuse actuelle ou passée, et qui se manifeste par des comportements quotidiens, depuis les menaces verbales, l’intimidation, le harcèlement, les coups superficiels jusqu’aux blessures graves, en passant par l’agression sexuelle et la violence psychologique.

Ici, en cette journée du 25 novembre, je prends la parole pour dénoncer cette violence d’une dramatique banalité, et surtout impunément banalisée.

Aujourd’hui, je veux vous raconter une histoire d’amour qui n’en est pas. Une histoire sans « happy ending ». Une histoire qui ne fait pas rêver, mais plutôt réfléchir. Une histoire silencieuse que l’on voudrait continuer à taire.

Une histoire où les mots laissent des bleus. Autant que les coups. Car contrairement à ce que vous pourriez croire, l’homme n’a pas toujours besoin de frapper pour être violent. Et que la violence verbale et psychologique, même et surtout dans l’intimité du couple, reste de la violence.

 

Aujourd’hui, je vais donc vous raconter MON HISTOIRE

 

Tout a commencé par un coup de foudre, que j’ai pris pour de l’amour, à force de numéros de charmes, de poudre aux yeux, et de mots enrobés de chocolat amer… Un coup de foudre qui a consumé ma joie de vivre. Un coup d’amour qui a fait fondre mon estime de soi et ma confiance en moi.

Tout a commencé par une rencontre avec l’illusion de l’Idéal que je me faisais d’un homme. Un homme qui n’en avait que les habits d’apparat pour mieux me faire croire que j’étais SA femme idéale. Un homme qui de la définition n’en a que l’instinct reproducteur.

Tout a commencé par des promesses de conte de fées, une bague en diamant, une maison, des enfants… Des promesses d’engagement et d’amour toujours, pour le meilleur et pour le pire, que l’on ne s’imagine jamais… Parce qu’il est facile de croire et d’être séduite par la magie d’un monde quand on a grandi dans un monde sans magie.

Tout a continué par des promesses échues, de la manipulation au maquillage délavé, des tromperies déguisées avec des costumes usagés, mais surtout des tours de passepasse habilement maitrisés pour ne donner à voir en public qu’une pantomime amoureuse. Afin que personne ne devine le drame qui se jouait en représentation privée, une fois le rideau tombé.

Tout a continué par des paroles, arrosées de mots aussi tranchants qu’une guillotine, mais que j’ai bues chaque fois qu’il levait un toast au nom de notre amour. Puis, sont venues les remarques dénigrantes, brodées de sarcasme, servies avec des gants tellement blancs, que la préséance me contraignait à dire « Merci ». Ensuite, de tendres menaces ont commencé à s’inviter sous la couette du lit conjugale, le soir venu, pour que mon beau chevalier, toujours prêt à sortir son glaive, puisse me protéger, à corps défendant, dans une étreinte d’une pénétrante violence. C’est ainsi qu’au fil de la culpabilisation, je me suis tricoté une dépendance affective, qui, sans que je m’en rende compte, resserrait le nœud de cette relation suffocante.

Tout a continué par des bouquets de fleurs offerts d’une main, après que l’autre m’ait offert le pot. Parfois, le pot venait après les fleurs, avant même qu’elles aient le temps de se faner. Parfois, le pot venait sans fleurs. Mais sa meilleure arme restait le « Make up sexe » pour aiguiser les tensions laissées par le malaise de ses silences, pour combler le vide entre nous et surtout pour étreindre notre amour. Du sexe, comme dans un buffet libre-service, dont le mâle peut disposer à sa volonté, sans se préoccuper du consentement de sa proie. Ce sexe cinglant me prenait par devant, par-derrière, par-dessous, mais par-dessus tout, il prenait possession de mon corps, de ma tête, de mon être. Toujours sous couvert d’amour. Au point de me faire un enfant. Un bel enfant qui, au regard des autres, était une preuve d’amour. Cet enfant qui devait être le gage de sa volonté de cesser de me faire violence. Cet enfant qui finalement est la preuve de l’échec de cette épreuve d’amour.

 

Tout s’est terminé comme tout a commencé, par une illusion bien ficelée

 

Tout s’est terminé quand j’ai commencé à voir les ficelles de son jeu de dupes et à essayer de le démasquer.

Tout s’est terminé quand un coup du sort m’a présenté la mort. C’est alors que j’ai compris qu’il ne m’aimait pas et ne m’avait jamais aimé. C’est alors que j’ai appris à m’aimer et à me respecter. Parce que je veux l’amour sans la violence. Parce que la violence n’est pas de l’amour.

 

Tout s’est terminé quand je suis entrée dans le cycle de ma vie pour sortir du cycle de cette violence.

 

La naissance d’Isaac

Je te porte au creux de mon être depuis maintenant 39 semaines et 5

Je te porte au creux de mon être depuis maintenant 39 semaines et 5 jours. Quel bonheur cette grossesse. Je me sens bien avec toi et j’ai la chance de la vivre comme je la sens.

 

Ton père et moi attendons ta venue

 

Ton père est extraordinaire avec nous. Il est attentionné et protecteur. Il te parle et te chante des chansons tous les jours. Notre suivi avec la sage-femme est au-delà de nos attentes. On se trouve chanceux d’y avoir droit; de pouvoir échanger, questionner et en apprendre sur ton développement dans le respect de nos choix et de nos envies.

39 semaines et 5 jours à t’attendre, à t’imaginer, à préparer ton arrivée dans notre maison et dans notre coeur. C’est long, mais pourtant, je ne m’attendais pas à te rencontrer tout de suite. Va savoir pourquoi, mais je croyais qu’avant d’accoucher, il fallait arriver au stade « à-boutte-pu-capable-ben-tanné » et moi, je ne l’étais pas. Bien sûr, il y a eu des moments plus difficiles! Il y a eu des maux de coeur, de la fatigue, des maux d’estomac… Et on va se le dire, présentement, je suis de moins en moins mobile. Ton père m’appelle d’ailleurs affectueusement Moby, en référence à Moby Dick. Par contre, je ne me suis jamais sentie aussi calme, aussi confiante et aussi privilégiée. De toute façon, c’est bien vrai que tu arrives, car je viens de perdre mes eaux!

 

Tu es en route

 


Il est minuit, ton père n’est pas encore couché. Je viens de me réveiller en sursaut et bien trempée. J’ai comme un vertige, ça y est, le moment est venu. Je me suis tellement préparée pour ce jour-ci et je suis restée ancrée à mon coeur, malgré les commentaires empreints de peur que l’on m’ait fait :

– Tu accouches à la maison? Mais si ça ne va pas? Si le bébé est trop gros?

– Pourquoi ne pas te faire de plan b avec un gynécologue juste au cas où?

Des fois je n’arrivais pas à croire ce que j’entendais, comme si on était dans un film, une caricature. Heureusement j’avais le soutien de notre entourage et surtout, celui de ton père. Nous avions le désir commun de te voir naître le plus naturellement possible pour que ton arrivée sur cette terre soit douce. Je me suis réfugiée dans notre bulle d’amour et de convictions, bien loin de la peur et des idées qu’elle nous laisse en tête, mais là, ça y est, on va découvrir si j’ai été sereine ou simplement naïve.

Les contractions commencent rapidement. Ton père appelle la sage femme, puis j’appelle ta grand-mère puisqu’elle assistera à l’accouchement. On allume des petites lumières en papier de riz et la lampe de sel; l’éclairage est doux. Je me sens bien, couchée en cuillère avec ton père. Puis le rythme et l’intensité augmentent. Ton père va préparer la piscine d’accouchement et je m’installe sur mon ballon d’exercice en écoutant un mantra, l’« Om shanti », paraît que ça aide à ouvrir le coeur… En tout cas, ça me calme et m’aide à entrer dans cet espace avec toi, loin de tous mes repères, dans une sorte de trans, de monde parallèle. Il n’y a plus de temps, plus rien qui existe autour. Je suis entièrement absorbée par toi et par les vagues de contractions qui nous rapprochent de plus en plus.

À chaque contraction, je fais un son grave en soufflant sur mon ventre comme pour t’aider à descendre. J’imagine des vagues; j’apprivoise la douleur. Ton père est présent et nous accompagne à chaque contraction. Il me tient la main, me caresse, m’aide à me déplacer. Ta grand-mère prépare des compresses d’eau froide, elle me serre dans ses bras et m’encourage. La sage femme vient nous voir régulièrement pour écouter ton coeur, tout va bien.

Après quelques heures de travail à passer de la piscine au lit, du lit à la toilette et de la toilette à la piscine, je me sens épuisée. Les vagues que j’imagine sont plutôt devenues un tsunami. Ton père et moi, on dort entre les contractions; nous sommes épuisés. La sage femme vient me voir et je lui en parle, elle me prend dans ses bras avec toute la douceur du monde. Elle me rappelle le sens de cette douleur. Elle a raison, cette douleur elle n’est pas veine! Elle provoque un flot d’hormones pour moi, et duquel tu profites par la bande. Cette douleur me permet de t’accompagner physiologiquement vers notre rencontre. Je tente de m’accrocher à cette pensée. Je ne souffre pas : je t’accompagne!

Le temps passe et je sens que les contractions sont différentes. Après vérification, ça y est : la poussée peut commencer. Cette nouvelle m’apaise, j’ai enfin l’impression que notre rencontre approche. Je suis si bien dans le lit, entourée de tout mon monde, que je refuse de retourner à l’eau. Tu vas naître ici, dans notre lit. Ton père me dit souvent que je prends beaucoup de place quand je dors, que j’empiète sur sa moitié de lit. Et bien, imagine-toi donc qu’instinctivement, c’est de son côté que je me suis placée. Tu vas naitre dans son espace! On m’apprend qu’on voit ta tête. Je la touche, je n’y crois pas.

 

Tu es maintenant avec nous

 

Puis, quelques instants plus tard, c’est tout ton corps qui est posé sur le mien. Jamais je n’ai été si heureuse de voir apparaître quelqu’un! Tu pousses un petit cri, puis tu nous observes, l’air de dire : «Mais veux-tu bien me dire ce qui vient de se passer ? ». Je ferme les yeux et respire longuement. Toutes les personnes présentes pleurent de joie. Après un court moment, je demande : « Est-ce une fille ou un garçon ? » La sage femme m’invite à le découvrir par moi-même. Pas question que je te bouge, je préfère aller toucher avec mes mains.

 

Tu es un garçon; mon fils

 

On se colle en « peau à peau », puis ton père coupe le cordon qui a cessé de battre. C’est à son tour de te prendre en « peau à peau », quoiqu’avec lui, le terme « peau à poil » est plus juste. Pendant ce temps, je pousse le placenta qui t’a nourri.

Après, nous sommes réunis de nouveau et on s’installe pour te nourrir. On dirait que tu as fait ça toute ta vie! ? Tu têtes comme un champion et le colostrum coule bien. C’est le début d’une belle histoire d’allaitement, sans douleur, rien que du bonheur!

Quelques heures plus tard, on te pèse et te mesure. Et un peu plus tard encore, tout le monde quitte la maison. Nous sommes seuls : toi, ton père et moi. Seul au monde, dans notre belle bulle d’amour, submergés par nos émotions. Nous sommes maintenant une famille, grâce à toi, bébé d’amour! Je vous regarde dormir ton père et toi, et je me sens fière d’avoir cru en notre projet d’accouchement.

 

Huit mois plus tard, je ne retiens ni la douleur ni les heures de travail de cet accouchement. Je garde plutôt la force de mon corps, cette puissance extrême qui s’est mobilisée en moi comme en des milliers de femmes, avant et après moi. Ce moment si intense partagé avec des gens que j’aime, chez moi, dans ce lit qui ta vu naître.

 

Ce travail d’équipe : cette connexion qui nous lie à jamais, toi et moi, mon beau Isaac.


Je t’aime,

Merci.

La prématurité : Deux mères nous en parlent

 

Dès le premier petit

 

Dès le premier petit + sur le test de grossesse, on s’imagine tenir son bébé dans ses bras. Un beau bébé, né à terme, avec tous ses petits membres et sans aucun souci de santé. C’est le désir le plus cher de toutes les futures mamans, on ne se le cachera pas.


En attendant le grand jour, on se berce tout doucement en flattant notre ventre rond rempli de vie. Et on rêvasse…

Néanmoins, pour certaines futures mamans, le rêve se transforme en cauchemar. Ce fut le cas pour Kim et Mélanie dont le souhait le plus cher fut interrompu par une naissance prématurée.

 

La prématurité c’est quoi ?

 

La prématurité, c’est lorsque la naissance de l’enfant se situe avant la 37e semaine de grossesse.

Selon Préma-Québec, il y aurait au Québec plus de 6000 enfants nés avant terme. De ce lot, 1200 bébés verraient le jour avant la 32e semaine de grossesse.

Bien souvent, la prématurité engendre quelques petites problématiques pouvant amener l’enfant à être hospitalisé quelques semaines, parfois quelques mois.

Le 17 novembre est la journée mondiale de la prématurité. Afin de sensibiliser les gens et les aider à mieux comprendre ce que vivent les mères d’enfants nés prématurément, Mélanie et Kim ont accepté de nous partager une partie de leur histoire.

 

Le témoignage de Mélanie

 

La prématurité est entrée dans ma vie par la porte d’en avant, sans enlever ses souliers comme de la visite impolie. De la visite que j’étais contente de voir parce qu’au fond, j’avais hâte de les serrer contre moi mes jumeaux! Mais ce que je ne savais pas, c’est que je ne pourrais pas les prendre, en tout cas, pas tout de suite. À quelques jours de la 31e semaine de gestation, et pesant un minuscule poids record de moins de deux livres, Félix et Oscar ont commencé à se battre, dès la première seconde de leur vie… Et pour se battre, ils se battaient!

Il y a tellement de choses qu’on lit, qu’on entend, à propos de la prématurité… mais il y a tant de choses qu’on ignore et auxquelles nous ne sommes pas préparées du tout! On ne s’habitue jamais à voir son enfant, minuscule, prisonnier d’un incubateur, des fils par dizaines lui perçant les veines et l’empêchant d’être bien. Un prématuré, tu ne peux pas le toucher comme on touche un bébé né à terme…  parce que tu lui ferais mal. Sa peau n’ayant pas fini de se former, il préfère une pression ferme à une caresse légère. Il a besoin d’aide, et ça dure longtemps! Même après la sortie de l’hôpital, la bataille se poursuit, et pour la plupart, c’est un combat qu’ils devront livrer toute leur vie!

Tout ce que tu connais d’un bébé, tout ce que tu avais préparé pour lui, tu dois le revisiter! Est-ce que vous en connaissez beaucoup des gens qui possèdent une panoplie de pyjamas et de vêtements pour les bébés prématurés? Moi, non en tout cas! Et en plus, ça ne se trouve malheureusement pas dans toutes les boutiques! En sortant de l’hôpital, Félix ne pesait pas encore cinq livres et il avait deux mois… Je côtoyais des parents qui, comme moi, vivaient dans le doute, la peur et l’insécurité. Mais surtout, ils étaient habités d’un espoir indescriptible et d’un amour inébranlable pour leur bébé miracle, leur bébé guerrier!

 

Le témoignage de Kim 

 

Il m’arrive de penser que la prématurité m’a empêchée de vivre mon accouchement comme je l’avais imaginé. Elle m’a empêchée de vivre mon désir d’aller chercher mon enfant, lors de l’accouchement, et de la déposer sur ma poitrine. Elle m’a aussi empêchée de vivre la première tétée, celle qui vient instinctivement et qui crée ce lien tant attendu. Malgré tout, la prématurité, je ne la déteste pas. Elle m’a obligée à devenir plus forte dans l’adversité, elle m’a appris à surmonter les obstacles et m’a fait comprendre que dans la vie, on devait s’adapter.

Mon fils voulait voir la neige. Né en février plutôt qu’en juin, il voulait faire son entrée comme les premiers flocons : par surprise!  Malgré ses 920 grammes d’amour, je n’ai pas eu de coup de foudre instantané pour lui. Parce que la prématurité, c’est aussi ça… Le bébé que je voyais, rouge et intubé, je le sentais comme un petit être inconnu. Comme s’il n’était pas vraiment à moi… Mon corps et ma tête m’envoyaient encore comme message que j’avais un bébé dans mon ventre, et pourtant… Mais les semaines ont passé et j’ai enfin eu droit à ma première tentative de peau à peau. C’est là, en vibrant au rythme cardiaque de mon enfant, que j’ai pris conscience qu’il était bel et bien né. Et c’est à ce moment bien précis que je lui ai murmuré à l’oreille :

 

« Je t’aime mon petit chéri. Ça va bien aller… Maman est avec toi! On va se battre ensemble. »

 

En tant que mères d’enfants nées prématurément, nous avons vécu quelques situations frustrantes, exaspérantes ou ridicules…

 

Voici 6 phrases À NE PAS DIRE à la maman d’un enfant prématuré

 

1- Vous êtes tellement petite et menue, il ne devait pas avoir assez de place dans votre ventre. Venez-vous de me traiter de maigrichonne vous là?!

2- Ils ont quel âge? Je lui réponds gentiment. Ah, mon doux, ils sont donc bien petits (soupir et roulement des yeux) !!!

3- Les prématurés grandissent moins vite, ça va coûter moins cher de linge!

4– Vous êtes chanceuses de l’avoir rescapé! Dans le sens où… j’ai de la chance qu’il soit en vie?!? Ouin…

5- Moi aussi il est né prématuré! Il est né deux semaines avant terme…

6- Dans le fond, t’es chanceuse! Tu n’auras pas eu à vivre les bouts difficiles de fin de trimestre. Non, c’est sur… À la place j’ai vécu des semaines dans l’angoisse, à visiter mon bébé à l’hôpital, en me posant mille questions sur santé, son développement et son futur!

 

Si nous avions qu’un seul conseil à transmettre aux femmes enceintes, ce serait celui-ci :

En cas de doute, il faut consulter. Si vous sentez que quelque chose cloche, n’hésitez pas à aller chercher des réponses. Parfois, notre corps nous envoie des petits signes : saignements, maux de ventre, étourdissements, enflure, contractions et autres. Il se peut que ce ne soit rien d’alarmant, que des maux normaux entourant la grossesse, mais vaut mieux ne rien prendre à la légère et vérifier.

 

Envie de donner au suivant ? Voici comment :

Bien souvent, il arrive que les hôpitaux offrant des soins néonatals recherchent des vêtements pour les bébés nés prématurément. Informez-vous auprès des hôpitaux de votre région pour vérifier si c’est le cas pour eux. Si ce n’est pas le cas, offrez-les à un organisme ou à une famille dans le besoin!

Sur ses genoux à lui…

J'ai peut-être huit ou dix ans. Le temps est flou. Il y a cette per

J’ai peut-être huit ou dix ans. Le temps est flou. Il y a cette personne dans mon entourage. Cet homme qui n’est pas comme les autres. Parfois, je m’assois sur les genoux des hommes de mon entourage, mais ses genoux à lui, ce n’est pas pareil. Il y a une boule qui se forme dans ma gorge chaque fois que je dois m’asseoir sur lui.

Cet homme, il boit beaucoup d’alcool. Sa peau sent la robine en tout temps. Parfois quand on va au lac, il nous fait passer sous l’eau, entre ses jambes. On fait le pont. Ce que les adultes ne voient pas, c’est que sous l’eau, il sort ses parties intimes de son maillot. Et souvent, quand on passe entre ses jambes, il plie les siennes pour qu’on le touche. Qu’on le touche… là.

Je ne sais pas pourquoi, mais je me sens mal. Je sens bien que ce n’est pas normal. En même temps, les adultes ne disent rien, ne font rien, donc tout doit être correct. Le questionnement me ronge. Je ne veux jamais me lever de bonne heure, car lui, il se lève très tôt et à cette heure,  personne d’autre n’est réveillé. Je n’aime pas être seule avec lui, car il me demande toujours de m’asseoir sur lui. Je préfère faire semblant de dormir. Quand tout le monde est réveillé, il ne se passe rien. Quand il boit, je sais qu’il ne faut pas trainer trop près de lui. Il a la main baladeuse (j’ai su plus tard ce que cette expression voulait dire). Quand je descends au sous-sol, je longe le frigo pour être hors d’atteinte. Il n’est pas trop vite quand il a bu. Un jour, j’ai été assez grande pour y aller moins souvent. Le temps a effacé altéré ou plutôt occulté ses évènements. En vieillissant, j’ai acheté, dans ma tête, que puisque je n’avais pas été violée, ces évènements étaient sans importance.

Le temps a passé.

À l’âge adulte, jeune vingtaine, j’ai eu un chum violent. Parfois, il ne me demandait pas pour faire l’amour. Il prenait le droit sur moi. Les sentiments de ma jeunesse refaisaient surface. Ce sentiment que ce n’est pas correct, mais en même temps, mon estime était tellement basse que j’ai cru à certains moments que je le méritais. Un jour, après un viol d’une violence immense, le bras fêlé, je me suis sauvée. Ma mère m’a aidée à m’en sortir, m’a épaulée dans ce processus. J’ai pris ma vie en main et il a dû faire face à la justice (mais sa sentence fût plus légère que la mienne, vous comprenez). Le temps a passé, je me croyais guérie de toutes ces choses dégueulasses qui m’étaient arrivées. J’ai finalement compris plus tard que mes démons n’avaient pas complètement quitté mon être. J’ai eu des enfants. Le souvenir de ces moments était tellement flou.

Lorsque mes filles ont atteint l’âge que j’avais lors de ces abus, j’ai commencé à avoir des comportements suspicieux. Je ne faisais confiance à aucun homme se trouvant près de mes filles. Je voyais le mal dans tous les hommes de leur vie. Toujours sournoisement et rapidement, jamais très flagrant, mais toujours le nez et surtout l’œil pas loin. Je scrutais chaque geste, chaque baiser, chaque câlin.

Une journée, après avoir passé une soirée d’angoisse lors d’un souper familial, j’ai décidé que j’en avais assez. Je devais retourner en moi pour guérir cette blessure qui me transperçait encore après tout ce temps. Merci au beau Denis qui m’a permis de voir en moi. Merci à Ninon, qui, grâce à l’hypnose, m’a obligée à transcender et éliminer toute trace de ces mémoires cellulaires.

Je sais aujourd’hui, hors de tout doute, que je m’en suis sortie. Que ces gestes ne me définissent pas. J’aurai bien sûr l’œil ouvert pour mes enfants, mais je ne leur ferai plus porter le poids de mes expériences à moi. Une chose que je fais depuis longtemps avec mes filles, je ne les oblige pas à embrasser la visite, la famille ou les amis. Elles doivent, par contre, signifier leur respect, donner la main ou un bec soufflé. Pourquoi faire comme cela? Pour ne pas qu’elles se sentent obligées. Être obligé d’embrasser un peu tout le monde, nous enlève notre pouvoir, nous culpabilise quand cela ne nous tente pas et « distorsionne » la place que notre intuition doit prendre. Parce que de cette façon, je leur permets de dire « NON »!

Adieu petit ange…

On dit souvent que la vie est fragile, mais on ne comprend la signification qu'une fois qu'on est to

On dit souvent que la vie est fragile, mais on ne comprend la signification qu’une fois qu’on est touché par un drame. On prend pour acquis les êtres qui nous sont les plus chers. On embrasse nos enfants avant de les endormir avec la certitude qu’ils nous réveilleront avec leurs petites voix stridente afin que nous allions écouter pour la millième fois La reine des neiges. Pourtant, la vie fait ce qu’elle veut et elle peut parfois être si cruelle. Aujourd’hui, nous avons décidé de vous raconter l’histoire de Léane, la maman de Clara qui est maintenant un petit ange qui veille sur les siens … C’est après avoir discuté avec Léane qu’elle a accepté de raconter le drame qu’elle a vécu en espérant pouvoir aider d’autres personnes qui vivent la même chose.  Son message est simple et clair; prenez le temps de vivre tous les petits moments avec vos enfants. Aimez -les, chérissez-les et profitez au maximum des bons et des mauvais jours, parce qu’on ne vit tout ça qu’une seule fois.
C’est le soir du 6 octobre 2016 que je suis tombée sur une publication d’une amie Facebook qui m’a mise à l’envers pour le restant de la journée. Léane Rhéaume venait de perdre sa fille unique, son rayon de soleil..

 

Léane et Clara

Cette photo, fut notre dernière prise ensemble … Hier soir, avant ton dodo, tu voulais coller maman … Tu avais mal à ton bedon alors on s’est fait des câlins.
Je t’ai chanté des chansons et tu m’as dit de te placer ta couverture … 
Je t’ai embrassée et dit : À demain.

 
Ce fut notre dernier moment ensemble.  La vie de ma Clara s’est terminée. Ce matin, elle était sans vie pour une raison médicale encore inexpliquée.
Nous aimerions garder notre intimité durant cette dure épreuve, merci de respecter cela .
❤️ Pour ma petite Clara qui a écrit les plus belles pages de ma vie. Je souhaite remplir notre livre des plus belles histoires de bonheur et d’amour pour elle surtout de blagues; elle aimait tellement faire sa coquine ! Clara je t’aime tant !! J’aimerais que ceci ne soit qu’un mauvais rêve ….. reviens moi!
Au revoir ma puce

 

Clara n’était pas malade. C’était une petite fille espiègle et heureuse. Elle avait la vie devant elle! J’ai tellement été ébranlée par cette publication… Aucun parent ne devrait avoir à porter le deuil de son enfant! Léane a dit un dernier aurevoir à son amour et à tenu à partager le texte qu’elle a lu lors des funérailles.

 

” J’aimerais que tout ça ne soit seulement qu’un cauchemar… J’ai tellement le cœur gros ces temps-ci, mais recevoir autant de témoignages me fais me rendre compte que malheureusement c’est fréquent de perdre son enfant. Les autres mamans me répètent de ne pas avoir honte de sourire à nouveau, d’être bien! Je crois que mon texte pourrait peut-être en aider d’autres aussi à traverser cette épreuve ou juste ralentir comme moi j’ai su le faire avec ma Clara. Elle avait 19 mois, un vrai rayon de soleil rempli de caractère! J’espère l’instant d’un moment aider les gens à ralentir.La vie peut tellement changer d’un jour à l’autre et je suis fière de pouvoir me dire qu’avec elle on prenait notre temps. Si avec mon texte je peux aider des cœurs tristes ou d’autres à profiter 100x plus des moments avec leur enfants tant mieux,  j’aurai réussi à accomplir quelque chose de bien” – Léane Rhéaume

Adieu petit ange - Clara

Crédit photo : Bianca Gaudreault

Clara,
J’ai découvert que tu étais dans mon bedon un matin.
J’ai d’abord fait un test de grossesse…puis, un second, pour finalement me rendre à 5, pour être bien certaine que les 4 autres ne se trompaient pas.
J’ai ensuite envoyé les photos de tous mes tests à ta marraine, à Katherine, Élyse, Annie et Vanessa; pour qu’elles aussi me confirment que les 5 tests étaient bel et bien positifs.
Je n’ai pas été capable d’attendre pour l’annoncer à ton papa.
J’ai pris le téléphone et je lui ai dit durant son travail.

À l’échographie, ils nous ont appris que tu étais une petite fille. J’étais tellement ravie de peut-être avoir une mini- moi. Déjà, dans mon ventre, je t’appelais Clara et j’espérais que tu sois identique à moi. Je t’imaginais drôle, surtout tannante et avec un bon caractère, chose que tu as.
Tu faisais des tours de magie en cachant ta suce et te trouvais tellement bonne de le réussir, même si je voyais toujours où elle était cachée.
Avec toi, j’attendais… Je me disais que dire : « Vite, vite! Nous allons être en retard » allait nous faire perdre plusieurs petits instants précieux.
Tu prenais ton temps pour mettre tes souliers et te fâchais contre moi si je voulais t’aider…. Alors je me plaçais devant toi… assise… et j’attendais…puis, tu insistais pour me mettre mes souliers et surtout que je ne t’aide pas.
À chaque matin, j’essayais de t’attraper à travers les barreaux du balcon. Je te laissais descendre les marches à ton rythme et surtout…nous recommencions.
Dans la voiture, je t’installais dans ton petit banc, puis tu avançais ton visage près du miroir placé devant et disais « Mamaaaan ».
Alors je collais mon visage au tien et disais : « Maman et Clara ».
Puis tu répétais : « Mamannnn » et je t’attachais.
Ma mini-moi je l’ai eu et dans la manière que tu avais de me dire maman, il y avait tout l’amour que tu éprouvais pour moi. Nous étions fusionnelles. Cuisiner sans t’avoir dans mes bras ou coller à mes jambes même à 18 mois était tout simplement impossible.

Au début, j’ai trouvé difficile de m’adapter au rôle de maman toute seule avec toi. Au fil du temps, mes moments d’épuisements sans beaucoup de répit ou, lorsque la fin de semaine tu quittais pour pleins d’aventures chez ton papa, se sont transformés en magnifiques moments, toujours de plus en plus faciles à vivre pour moi. La fin de semaine où tu quittais, je travaillais… puis, je revenais tout préparer et faire les courses pour qu’à ton retour tu ne manques de rien.
Ta manière de te fâcher en auto pour juste 1km.
Ta manière d’aller voler des Cheerios dans l’armoire à chaque matin.
Ta manière de toujours vouloir être avec moi.
Ta manière de toujours vouloir nous montrer avec tant de fierté que tu portes un chandail avec un chat dessus.
Ta manière de toujours vouloir aider Jason dans la maison et de t’endormir collé à lui au salon.
Ta manière de toujours suivre Charles partout.
Ta manière de toujours vouloir Lily près de toi durant tes repas.
Ta manière de jouer dans la cuisine pendant que Magali te prépare de bonnes choses.
Ta manière de toujours vouloir coller Romy.
Le 6 octobre j’ai perdu ma fille. Je me suis réveillée pour aller te chatouiller et je t’ai trouvée. J’ai tenté de te sauver. J’ai perdu la chose la plus importante à mes yeux, celle grâce à qui je me définissais.
J’étais ta maman, ta maman à toi.
Une partie de moi s’est envolée mais je sais que tu es partie avec en tête tout l’amour que j’avais pour toi et notre lien si spécial.
Au nom de Jérôme et moi, je vous remercie d’avoir été présents dans sa vie et d’avoir embelli la sienne autant qu’elle a embelli la nôtre, la mienne.
Promis Clara je vais sourire à nouveau.
Clara je t’aime, t’aime, t’aime…

Le test

Le 11 mars 2007, après trois ans d'efforts, nous achetons un test d

Le 11 mars 2007, après trois ans d’efforts, nous achetons un test de grossesse à la pharmacie. La tension est palpable. C’est avec appréhension, inquiétude et espoir que je m’installe donc à la salle de bain, le test entre mes mains.

Mon homme d’amour est dans le salon, il me laisse mon espace. Il sait ce qui risque d’arriver, une nouvelle déception. Il se prépare mentalement, à mettre au fond de lui sa propre déception, pour être en mesure de m’encourager et de me supporter dans cette épreuve mensuelle qu’est la nôtre.

Au fil du temps, même si on essaie de ne pas y penser, c’est plus facile à dire qu’à faire! Les relations intimes en souffrent. Les rapprochements sont empreints d’une pression et d’un stress toujours grandissants, à mesure que les cycles se succèdent.

Il écoute la télévision. Du moins, c’est ce qu’il essaie de me faire croire. Il attend patiemment. Il fait son fier, il dit de ne pas s’en faire.

Tout comme moi, il commence à se questionner, à s’inquiéter, à s’autoausculter et à se juger sur toutes ses actions. Il se demande si son alimentation pourrait influencer la réussite de notre projet de vie. Il a même arrêté de fumer.

C’est moi, c’est certain. Pourquoi ça serait lui?  Lui, mon homme si fort.

Je dois avoir un dérèglement, «quelque chose », mais quoi ?

Nous avons rendez-vous, dans quelques jours, en clinique de fertilité.

J’ai peur…

Peur de ne pas être à la hauteur.

Peur qu’on me dise que rien ne va.

J’ai peur, comme à l’instant, comme à chaque fois que j’ai ce diable de petit pot tout chaud entre mes doigts. Je m’apprête à me ronger les sangs, encore une fois, sur un résultat improbable.

Je suis de nature optimiste, mais malgré tout, je me répète pour une millième fois «ça va être négatif», histoire de pas être déçue et être agréablement, potentiellement surprise si c’est le contraire.

«Zéro attente» que j’essaie de me convaincre, oui, j’essaie.

Je respire profondément et j’ajoute au test l’urine nécessaire. Je ferme les yeux une seconde. Puis, même en sachant que cela peut prendre plusieurs minutes pour avoir un résultat, je ne peux me retenir davantage. Malgré les maigres 10 ou 15 secondes qui sont à peine passées, je regarde tout de même mon test.

Mon cœur s’arrête, du moins c’est mon impression. J’ai chaud, j’ai froid. Je transpire et frissonne en même temps.  J’ai la lèvre inférieure qui tremble et la gorge si nouée qu’aucun son n’en sort. Je ne vois plus rien, les larmes coulent sur mes joues, mes lèvres et mon menton.

À tâtons, je prends le test, la main tremblante comme tout ce corps qui contient enfin un trésor. Puis, je marche vers le salon, voyant à peine mon amour se lever, s’attendant au pire, prêt à me prendre dans ses bras, pour me consoler encore une fois.

Je pleure, je n’arrive pas à parler. Je tends le test vers lui, mais ma main tremble tellement qu’il n’arrive pas à voir, alors je lui remonte encore. Je baragouine quelques mots inintelligibles, ce qui sort de ma bouche n’étant plus qu’un léger râlement.

Il regarde le test qu’il a dans la main, puis me regardant, il me dit: « c’est…? » 
Je me remets à pleurer de plus belle! Je ris, je pleure, j’ai peine à rester debout! Avec une certaine retenue, de peur de se tromper, il me répète : «ti-cœur, ça veut dire quoi? Tu es enceinte?» Incapable de dire oui, de sourire sans pleurer, j’hoche la tête et me retrouve aussitôt dans les bras de l’homme que j’aime tant! Le futur père de notre enfant, enfant que je porte enfin en moi! Il m’accompagne dans mes pleurs, me sert à m’étouffer, puis me repousse, inquiet de m’avoir tant serrée.

J’y repense aujourd’hui et les larmes me montent encore aux yeux.
 J’ai eu si peur! Voir un bébé était rendu un supplice. Voir une femme enceinte me faisait mourir d’envie et de honte face à ma jalousie.

Il m’aura fallu près de trois années pour enfin être enceinte.  Ensuite, il m’aura fallu entendre son cœur pour me persuader que ce n’était pas un rêve, que bébé était bien là. Je n’avais pas attrapé un virus quelconque, ce n’était que les changements normaux dus à une grossesse, oui une GROSSESSE!!!

Aujourd’hui, en ce début d’automne, mon petit trésor, mon précieux, mon bébé d’amour est là.  Il aura neuf ans dans quelques semaines. Par la suite, il a eu une sœur, puis un frère, tous aussi fantastiques.

Les trois me comblent de bonheur, à chaque instant, malgré les petits désagréments de la vie, que je vous partagerai dans d’autres textes éventuellement.

Deuil périnatal: Anthony aurait 10 ans

Selon des statistiques présentées récemment, une grossesse sur ci

Selon des statistiques présentées récemment, une grossesse sur cinq ne se rend pas à terme. Une sur cinq, c’est beaucoup! Ce qui me vient automatiquement en tête, en lisant cela, est le mot «fausse couche». C’est en effet, malheureusement, quelque chose de fréquent et le cauchemar de toute femme enceinte. Parfois, il arrive que le «1 sur 5» survienne plus tard, beaucoup plus tard et ce fut mon cas. À ce stade, on ne parle plus de fausse couche, mais de mort in utero.  Voici mon histoire, celle de mon conjoint et de notre petit ange, Anthony.

J’avais alors 32 ans et la grossesse s’était déroulée sans problèmes, pas même un diagnostic de diabète gestationnel. Un soir de juin, je me lève pour aller à la toilette et je sens quelque chose d’anormal: mes eaux viennent de crever. Je suis alors à 35 semaines de grossesse. Il n’y a pas beaucoup de liquide et il est foncé. Après un appel à Info Santé, on me dit de me rendre d’urgence à l’hôpital, ce que je fais. À mon arrivée, on cherche le battement du coeur de mon bébé, sans succès. L’infirmière me dit que c’est normal, selon la position il est possible qu’on ne l’entende pas, rien d’alarmant, une échographie sera faite pour vérifier que tout va bien.  Je suis seule avec ma mère dans la chambre, mon père est dans le corridor et mon conjoint est au travail croyant à un possible faux travail.

L’échographie est passée et quelques secondes avant l’annonce, mon cerveau comprend. Je vois mon fils sur l’écran et il a l’air de «flotter» dans mon ventre. Je ne vois pas le clignotement de son cœur sur le moniteur. «Mme St-Onge, nous sommes désolés…» et puis black-out total. Ma mère pleure et va chercher mon père. J’ai des larmes qui coulent, je suis dans un autre monde et je ne comprends pas ce qui se passe. Ma seule pensée est que je porte la mort en moi, alors que je devais donner la vie.

Mon conjoint appelle à la maternité pour avoir des nouvelles. C’est alors que je sors de mon état pour crier au téléphone : « Anthony est mort !!». Puis de nouveau, je retourne dans un état proche de celui de zombie pour plusieurs heures. Avant mon entrée à l’hôpital, je planifiais quand et comment le baptême se ferait et là, je devais planifier des funérailles.

Mon obstétricien m’annonce que je devrai accoucher normalement, ils vont aider le travail et j’aurai droit à tout ce que je veux pour soulager la douleur physique. Pour la douleur psychologique, il n’y a rien à faire.

Je passe donc de longues heures en salle d’accouchement, j’ai espoir jusqu’à la dernière minute que les médecins se soient trompés et qu’Anthony, contre toute attente, pousse un hurlement à sa sortie.

Ce fut le silence le plus complet et le plus total. On me demande si je veux voir mon bébé, pour moi ce n’est pas une question que l’on doit me poser. Je demande et j’exige de le voir, maintenant, tout de suite. «Mettez-le-moi dans les bras AVANT d’expulser le placenta et vérifier si j’ai déchiré, pas après comme vous me le proposez.»

anthony-lavigne1Il est là, dans mes bras, et il est parfait. Dix doigts, dix orteils, deux bras, deux jambes, deux belles grosses joues que je n’arrête pas d’embrasser. Il est beau, tellement beau. Un beau gros bébé, exactement comme celui dont j’avais tant rêvé. Je ne sais pas combien de temps je suis restée avec lui, dans mes bras, dans la salle d’accouchement, mais ce fut trop court.

On m’a ramenée à ma chambre, à un étage autre que celui des naissances pour ne pas que j’entende les bébés pleurer dans les chambres autour. On m’a dit que je pouvais demander qu’on m’apporte mon bébé à n’importe quel moment. Une fois seule dans ma chambre, tard en soirée, j’ai fait cette demande. On m’a apporté Anthony, il était froid et rougi. Je n’entendais plus les infirmières rire entre elles au poste de garde, c’était le silence le plus total. J’ai bercé Anthony, je lui ai chanté une berceuse, je lui ai demandé pourquoi il était parti et si j’avais fait quelque chose de mal pour qu’il ne veuille plus que je sois sa mère.

En juin dernier, Anthony aurait eu 10 ans. J’aimerais vous dire qu’avec le temps, la peine s’estompe, mais ce n’est pas vrai. On s’habitue à l’absence, mais on ne l’accepte pas. Le deuil périnatal, contrairement au deuil auquel nous sommes habitués, est un deuil d’avenir et d’espoir. Quand on perd un proche, nous nous accrochons aux souvenirs que nous avons avec cette personne et au temps passé avec elle. Un deuil périnatal, c’est le deuil de l’espoir que nous avions pour ce petit être en formation.

J’ai au total 12 photos de mon fils, car on m’a encouragée à le faire.  J’ai également la tuque qu’on lui a mise et la couverture qu’il avait à l’hôpital. Ce sont mes uniques souvenirs d’Anthony.

anthony-lavigne-2Je suis retournée travailler après les 18 semaines de congé de maternité auxquelles j’avais droit. Le papa a dû rentrer travailler le lundi suivant puisque le gouvernement ne reconnaît pas le congé de paternité dans ce genre de situation.

Le 15 octobre est la journée mondiale de la sensibilisation au deuil périnatal. Je vous invite à avoir une pensée pour toutes ces familles ayant eu un parcours similaire ou différent du mien et à leurs petits anges qui leur sourient là-haut sur leurs nuages.

Soyons conciliants

Récemment, une bombe éclate au Québec : Pierre-Karl Péladeau démissionne.

<span

Récemment, une bombe éclate au Québec : Pierre-Karl Péladeau démissionne.

La raison : une cohabitation entre la famille et le travail complètement impossible.

Qu’on adhère ou non à cette théorie, n’en demeure pas moins que pour moi ça relance une fois de plus la réflexion sur cette fameuse conciliation travail-famille; termes qu’à peu près tous les parents ont en bouche pour justifier maladroitement leurs cernes sous les yeux.

Mais est-ce possible de rapprocher ces deux univers? Avant de tenter une réponse, il faut d’abord se rappeler ce que veut dire « conciliation ». J’ai donc « antidoté » le tout et on m’explique que concilier signifie « trouver par des concessions l’approbation de personnes qui étaient divisées par leurs opinions, leurs intérêts. »… OK, j’ai rien appris de nouveau, mais ce que je sais par exemple, c’est que c’est probablement ce que je trouve le plus difficile dans le fait d’avoir des enfants. Oui, on dort moins qu’on aurait besoin; oui, on s’inquiète plus qu’on devrait…mais d’être capable de bien naviguer entre le rôle de papa et celui de travailleur, c’est ce qui me donne le plus de sueurs froides. J’me sens toujours à cheval entre la fierté et le doute; le désir d’accomplissement et la volonté d’être plus présent; entre la tête et le cœur.

Pourtant, je fais partie des chanceux qui, étant travailleur autonome, peut se libérer plus facilement quand arrive un pépin à la garderie. À moins d’une réunion avec le pape, je peux généralement m’arranger. Et comme ledit pape refuse toujours mes invitations, je n’ai pas ce problème-là. Toujours est-il que même si je suis capable de me libérer en cas de force majeure, même si mes employeurs sont très ouverts et compréhensifs…y’a toujours un imprévu qui débarque : la culpabilité. Sondage : levez la main ceux et celles qui ne se sentent absolument pas coupables d’aviser son patron que le plus p’tit a vomi ce matin et que vous allez devoir prendre un congé? Allez-y, levez la main… Je sais pas pour vous, mais moi je ne vois aucune main levée. J’ai prouvé mon point.

On se sent coupable de ne pas être là où on « devrait » être. Professionnellement, on s’entend. Comme quoi le travail, de façon sournoise, a pris une grande place dans nos vies. La plus grande, en fait. On parle de conciliation travail-famille, mais on devrait plutôt parler de conciliation travail-vie… On a tous déjà dit « Désolé(e), chéri(e), mais ce soir, je dois travailler un p’tit peu. » Eh bien si p’tit peu soit-il, ce p’tit peu-là a quand même tassé l’être aimé. Mais dans la vie, on a le temps. Toujours. Et on détermine à quoi on l’utilise. C’est tout. Quand quelqu’un dit « J’ai pas le temps », moi j’entends « J’ai préféré faire autre chose ».

C’est dur d’être en paix avec tout ça. Quand on est travailleur autonome, on est très conscient du travail qui n’avance pas pendant qu’on passe du temps avec nos enfants pendant les heures d’ouvrage. Alors, on pense bosser dès que les p’tits seront couchés pour compenser mais là, c’est le couple qui en prendra pour son rhume. Donc pour éviter ça, on travaille quand toute la maisonnée dort. Et j’récupère quand dans tout ça? Oh, j’dis pas ça pour me plaindre; c’est le job que j’ai choisi et c’est la famille que j’ai choisie aussi. Mais je suis convaincu que je ne suis pas le seul dans cette situation-là.

De nos jours, on travaille fort pour garder l’équilibre; on veut une relation amoureuse saine, des enfants de qui on est proche, une carrière qui brille… on souhaite aussi être en forme, bien manger, prendre du temps pour soi, pour ses amis. Après on va se surprendre de la quantité de couples qui éclatent, des connaissances qui s’éloignent et du nombre de chefs de parti qui démissionnent.

La solution? Faire de son mieux, probablement. Accepter qu’il n’y a rien de parfait et que pour un bout, y’aura une patte du tabouret qui va branler un peu. Mais dès qu’on aura trouvé le bon tournevis, on va l’ajuster. Pendant qu’on le cherche, on essaie de rester en équilibre. Mais l’équilibre ne peut pas exister sans le déséquilibre. Comment on fait pour vraiment apprécier une situation si on n’a pas vécu son contraire?

Pour moi, la conciliation travail-vie, c’est comme…oh, désolé, j’dois aller changer la couche de L’héritière.

Bonne semaine!

Crédit photo tech.co