Une fille à tout prix
Je suis une fille. Le summum de la fifille. Celle qui est dédaigneuse, qui ne sort pas sans maquillage et qui chiale que ses cheveux vont friser parce que c’est humide dans le sud.
Quand j’ai voulu des enfants, j’ai joué au jeu de la roulette-de-ne-pas-demander-le-sexe-parce-que-c’est-trippant à mes deux premiers enfants! Cela m’importait peu!
J’ai eu mon premier bébé garçon. Un grand prématuré qui m’a confirmé que, peu importe le sexe, tout ce qu’on souhaite au fond, c’est un bébé bien rigoureux qu’on peut prendre dans nos bras avant qu’il ait un mois. Un jour, je vous raconterai…
Ensuite, j’ai eu mon beau Elliot. J’ai repris avec lui tout le manque de ne pas avoir mon premier bébé collé sur moi dès les premiers instants. J’étais heureuse et mes boys me faisaient sentir encore plus femme. La louve de la meute, ça me plaisait!
Puis, le temps a passé et le manque de ne pas avoir ma fille s’est fait sentir. Cette fille que je désirais depuis toujours et ce, même si les boys me comblaient comme ce n’est pas possible. Je n’arrivais pas à me résigner à cette réalité de pas-de-poupées, pas-de-couettes, pas-de-mini-moi-qui-se-fait-les-ongles….
Puis, le grand saut! Un troisième bébé… Doigts croisés!
À cette grossesse-là, je n’ai évidemment pas été capable d’attendre pour connaitre le sexe. Échographie. C’EST UNE FILLE! J’ai pratiquement fait passer le détecteur de mensonges à l’infirmière pour confirmer ses dires tellement j’avais peine à y croire!
Et elle est arrivée, cette fabuleuse fille. Rose comme tout ce que j’avais acheté pour elle. Un cadeau enrubanné de rose 24/24. Mon bonbon! Elle complétait à merveille notre famille. En plus, j’adorais l’idée des grands frères protecteurs de leur petite sœur. Elle était à peine arrivée à la maison que les boys l’appelaient « la petite cocotte » et l’embrassaient à qui mieux mieux.
Mais qu’elle m’en a fait baver comparativement à ses frères! Mes deux boys d’amour si tranquilles avaient fait leurs nuits à un mois, douze heures consécutives. Je me retrouvais avec un petit monstre qui ne dormait jamais. Hurlait à la moindre contrariété. Me réclamait constamment. Avait toujours besoin de réconfort et d’affection. Je devais me réinventer en tant que mère parce que ma fille n’était rien de ce que j’avais connu. Déstabilisée, je l’étais.
Elle me ressemblait tellement! Je reconnaissais mon caractère dans plusieurs de ses traits et je doutais à savoir si j’aimais le concept.
Puis elle a grandi et j’ai eu envie de faire d’elle une version améliorée de moi-même. Question de me déculpabiliser de mon leg peut-être. Tant qu’à me ressembler, aussi bien ne garder que le meilleur! J’ai eu envie de parler à celle qui pensera un jour que je ne veux pas son bonheur parce que je lui dis non. J’ai voulu qu’elle sache qu’il y a un sens profond à mes actes. Mon amour pour elle.
Je crois sincèrement qu’elle saura et comprendra un jour. En attendant, je ne peux qu’être moi-même un bon exemple pour celle qui sera le moi 2.0 de demain. Je ne peux que lui souhaiter le meilleur en la regardant faire son chemin.
Je lui souhaite d’être elle-même et fière de ce qu’elle est. Je lui souhaite de se dépasser et d’atteindre ses propres sommets. Je lui souhaite d’avoir confiance en elle-même, mais aussi de faire confiance aux autres et à la vie. Je lui souhaite des projets, des rêves, de l’amour, de l’amitié sincère, des voyages, du beau et du bon. Je lui souhaite par-dessus tout une grande force pour affronter ce que la vie lui présentera comme visage et un grand amour de la vie pour toujours garder confiance en demain. Parce que demain arrive chaque fois avec son lot de possibilités infinies… Mais pour le moment, elle dort paisiblement lovée contre ses toutous et ses poupées. Demain saura bien l’attendre… Et Dieu sait qu’elle saura lui en mettre plein la vue!
Isabelle Rheault