Avoir le cancer, ça coûte cher!

On nous parle régulièrement du coût de la vie. Que ce soit du coût du panier d’épicerie, du coût d’élever des enfants, du coût d’accès à l’éducation et à la culture, du coût d’accès au logement, du coût d’accès aux soins médicaux, des impacts de l’inflation, des problèmes de stagnation des salaires… Bref, dans nos vies, tout semble avoir un coût. Et il y a un prix à payer pour tout!!!

Mais cette notion économique de nos sociétés capitalistes prend un sens plus profond lorsque la maladie entre dans notre quotidien. Parce que oui, la vie a un coût quand on a le cancer. Parce que oui, le cancer implique DES coûts au quotidien.

Tout d’abord, sur le revenu.

Je suis travailleuse autonome et avec mes responsabilités parentales, je n’ai pas assez cotisé dans les trois dernières années pour avoir une indemnité qui me permette de vivre pendant mon arrêt maladie. Oh, je ne regrette pas mon choix d’avoir priorisé mes enfants et mon rôle de mère. Ni d’avoir cru aux promesses, non scellées sur contrat, de l’entraide au sein du couple : « Pour le meilleur et pour le pire. Dans la richesse et la pauvreté. Dans la santé et la maladie… ». Non, je ne regrette pas. J’étais en accord avec mes choix. Car je pense que j’avais trouvé un certain équilibre entre mes besoins de réalisations professionnelles et mes besoins d’épanouissement maternel. Et cet équilibre me convenait.

Peut-être que si j’avais su de quoi demain sera fait…. Peut-être que si on m’avait prévenu que les promesses d’engagement ne valent rien, même face à la maladie. Peut-être que…

Dois-je me reprocher de ne pas avoir imaginé le pire? Dois-je me reprocher d’avoir été trop insouciante de penser que j’étais jeune, que j’avais la vie devant moi, et que l’amour et mon dévouement pour mes enfants était mon assurance-vie? Dois-je me reprocher d’avoir cru à des notions d’humanité au sein du couple?   Le « J’aurais donc dû !» ou le « Avoir su ! » me martèle souvent la tête et le cœur ces dernières semaines…surtout quand je reçois les factures du quotidien. 

Et puis, je me tourne vers vous et je vous renvoie la question : combien d’entre vous avez des économies pour pouvoir, sans préavis, tomber en arrêt maladie pour un minium d’un an ?!  Combien? 

Pas moi…. Et pourtant les gens qui me connaissent vous diraient que je suis à mon affaire côté gestion du budget familial. Mais quand celui-ci dépend entièrement de vous, la perte de ce revenu d’emploi a un impact considérable!

Le cancer a également un coût médical.

Oh, je m’estime très, très chanceuse de cotiser à la RAMQ chaque année et d’avoir accès à des soins de qualité dans le cadre de ma maladie! Mais reste que tous les médicaments ne sont pas pris en charge à 100%. Et que l’on n’a pas tous la chance d’avoir des assurances collectives privées qui pallient à cette différence.  Mais comme je compte bien guérir, j’assume ces dépenses, sans compter!

Il y a aussi les coûts associés pour pallier aux dommages collatéraux de la maladie comme l’achat d’une perruque, l’achat d’accessoires (chapeaux, foulards, etc). Quelques ajustements vestimentaires sont aussi nécessaires car le corps change d’allure entre la perte et/ou la prise de poids causée par la médication et les changements hormonaux.

Bon, je vous l’accorde, il y a aussi des économies associées à ces mêmes dommages collatéraux. Plus besoin de brosse à cheveux, plus besoin de serviettes sanitaires, plus besoins d’épilation, etc. Faut bien y trouver quelques avantages quand même!

Mais reste que ces coûts s’ajoutent aux coûts du quotidien car je ne le répèterai jamais assez : la vie continue, malgré tout.  Que ce soit le loyer ou l’hypothèque. Que ce soit l’épicerie car j’ai, certes, adapté mon alimentation pendant mes traitements de chimiothérapie, mais mes enfants, eux n’ont pas à changer leurs habitudes alimentaires. Il y a les comptes divers comme Hydro-Québec, le téléphone, l’internet, les assurances, les transports, les frais des activités des enfants, les habiller car ça grandit vite ces petites bêtes là…

C’est certain que face à la nécessité, on repense son budget. Et on devient plus inventif pour faire des économies. Par exemple, pour habiller mes enfants, je priorise le seconde main et je pratique, encore plus qu’avant, les échanges entre mamans. Pour l’épicerie, je suis plus regardante sur les promotions et les rabais. Et je remercie grandement les mamans qui m’apportent des bons petits plats les semaines de mes traitements. Pour les activités en famille? On fait appel à l’imagination pour avoir du plaisir et du bon temps à moindre coût : pique-nique au parc, chasse aux insectes sur le Mont-Royal, session de bricolage-recyclage, etc. Il suffit souvent d’un brin de créativité, une poignée d’amis, et une bonne dose de bonne humeur pour que le plaisir soit au rendez-vous. Et encore une fois : on S’ADAPTE !

Mais ce qu’on oublie souvent, c’est que la maladie a aussi un coût émotionnel et social. Et bien que ces coûts ne soient pas chiffrables, c’est un lourd tribut à payer. Que cela soit la perte partielle et temporaire d’autonomie, l’isolement social, la détresse émotionnelle, le poids des doutes et de l’incertitude, l’impact du comportement de l’entourage dans notre quotidien ou l’impact de notre maladie sur notre entourage. Et c’est là, que l’on prend conscience du coût de la vie. C’est ici que se dessine la différence entre le prix des choses et leur valeur. Cette notion spirituelle que l’on oublie souvent au profit des notions économiques…

Encore une fois, mon cancer m’offre une occasion de donner une belle leçon de vie à mes enfants. Et de leur inculquer qu’en fin de compte, ce qui compte le plus, ce n’est pas le coût de la vie mais la valeur que l’on accorde à toutes choses!

Pour en lire plus sur mon quotidien avec le cancer, visitez www.laviecontinuemalgretout.com



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