Iglou iglou, mais pas chez nous

Du monde saoul, j’en ai vu dans mon enfance! La matante pu capable de nourrir son enfant dans un party de parenté tellement elle a frenché le goulot… Le mononcle qui cale sa caisse de six pendant un trajet de quarante-cinq minutes, qui arrête trois fois en chemin pour se vider la vessie sur le bord de la 55. Heureusement, son épouse compréhensive avait depuis longtemps pris le relai derrière le volant. Et ce même mononcle de cinquante ans en train de vomir sa vie à odeur de Labatt 50… à peine une heure après le début du réveillon des Fêtes… bel exemple pour la jeunesse. Des cousins ruinés à cause des dettes d’alcool et de drogues, qui ne voient tellement plus clair qu’ils ne voient plus d’espoir, sauf au bout d’une corde… Sans compter ceux qui ont perdu leur emploi et leur famille à cause de la divine bouteille!

Et le grand frère alcoolo avant même de finir son secondaire… jusqu’au jour où le téléphone sonne à huit heures du matin : « Euh… je suis à l’hôpital… Je comprends pas trop ce que je fais ici… le doc m’a dit que j’ai passé la nuit en camisole de force… Il paraît que j’ai calé un 40 onces en trois heures… Je me suis pété la gueule en tombant… Je suis devenu violent… Perdu la carte… Faudrait que m’man vienne me chercher… » Ç’a été la fin de l’abus d’alcool pour lui.

Mais pour d’autres, la dépendance à l’alcool est encore et toujours omniprésente. T’sais, quand en quatre décennies, tu as vu une personne une seule fois à jeun… ça donne une idée qu’elle n’a pas passé beaucoup de journées lucide. Ça donne une idée du nombre de « premières fois » de ses enfants dont elle ne se souvient pas parce que les vapeurs d’alcool étaient trop épaisses. Ça explique aussi pourquoi j’ai longtemps eu peur des effets de l’alcool dans ma vie.

Adolescente, à l’époque des premières rencontres avec la bouteille, mon œsophage se fermait automatiquement après une bière. Comme si j’avais un détecteur de surplus d’alcool intégré. Alors, au lieu de caller l’orignal comme plusieurs expérimentateurs, je flattais le dos de ceux qui se vidaient l’estomac dans le bol de toilette (ou ailleurs). Je téléphonais aux parents des jeunes qui avaient dépassé les bornes, et je lavais les cheveux gluants des filles avant que leurs parents arrivent. Et je ramassais les corps morts et les botchs de cigarettes au petit matin.

Adulte, j’ai eu quelques excès. Une bouteille de Caribou un soir de Carnaval… un enterrement de vie de fille sur la Grande-Allée… mais tout ça de façon plutôt contrôlée. Quand j’ai rencontré mon futur époux, notre première soirée s’est déroulée autour d’un (deux-trois) pichets. Mais rapidement, on a compris qu’on n’était pas dans la gang des alcoolos. On aimait prendre un petit verre en soupant, lui aimait goûter des bières et collectionner les verres qui vont avec, c’est à peu près ça.

Mais ça m’inquiétait tout de même. Chaque verre rempli, chaque verre vidé sonnait une alarme en moi. « Fais attention : alcoolique potentiel! » J’en avais tellement vu… J’en avais trop vu. Quand j’en parlais, ça créait quelques frictions. Il avait l’impression que j’exagérais, que je voyais des bibittes partout. « Voyons donc, je suis loin d’être alcoolo, relaxe un peu! » Mais l’alarme sonnait encore la fois d’après.

À force de vivre ensemble, de discuter, d’analyser ma peur et mon passé, on a compris. J’avais toutes les raisons du monde de craindre l’alcoolisme, mais j’étais tombée sur un gars qui n’avait pas ce problème. Il aimait le goût de l’alcool, il aimait prendre un verre entre amis ou en amoureux, mais pas à n’importe quelle heure, pas dans n’importe quelle occasion, pas au point d’être tout le temps guerlot. Il était bien ancré dans la réalité. Bien loin d’une dépendance.

Il a respecté ma limite, ma crainte. Il m’a écoutée. Il m’a expliqué. Avec douceur. J’ai pris le temps d’observer. D’analyser notre réalité sous l’angle du présent et non du passé. Et j’ai compris que l’alcool pouvait être synonyme de plaisir partagé, de plaisir momentané, de plaisir contrôlé. Je ne regrette pas d’avoir exprimé mes craintes, ça m’a permis de les soigner.

Ce que nos enfants voient, c’est notre relation saine à l’alcool. Ils savent que ça existe, ils savent que ça peut être bon et agréable, ils savent aussi (parce qu’on leur en a parlé) que ça peut faire déraper quelqu’un pendant une soirée ou une vie. Et à mon plus grand bonheur, ils trouvent que ça a l’air dégueulasse!

Faites le test! Mesurez votre niveau de dépendance

http://aa-quebec.org/AA_Quebec/Templates/index.htm

Alcooliques Anonymes Québec

http://aa-quebec.org/AA_Quebec/Templates/index.htm

Dépendances: alcool, drogues, jeu (Portail Santé Mieux-Être du gouvernement du Québec)

http://www.sante.gouv.qc.ca/problemes-de-sante/dependances/

 

Jeunesse J’écoute: Alcool et drogues

http://aa-quebec.org/AA_Quebec/Templates/index.htm

Nathalie Courcy



Commentaires