Je suis le Grinch qui a scrapé Noël

Quand j’étais petite, le temps des fêtes était tout simplement magique : les décorations, les soupers, les cadeaux, les partys, se coucher tard, Ciné-Cadeau à la télé. En tant qu’enfant, les seuls points négatifs que je voyais étaient les chandails en laine qui pique, les bas collants et les becs des matantes qui sentent beaucoup trop le parfum ! J’aurais voulu que mes enfants connaissent la magie du temps des fêtes eux aussi. Malheureusement pour eux, Noël, c’est devenu autre chose.

Un 24 décembre, je me suis levée et j’ai annoncé au père de mes enfants que je mettais un terme à notre relation. Ça faisait des mois, voire des années que je n’étais plus bien dans mon couple. Mes enfants, la veille de Noël, se sont fait réveiller au son de deux parents qui se chicanent, encore. Ils se sont fait annoncer que la famille, telle qu’ils la connaissaient, se brisait. Nous avons dû leur expliquer que dorénavant, papa et maman ne vivraient plus ensemble et qu’ils passeraient une semaine chez un et une semaine chez l’autre.

Sur le coup, aucune réaction de leur part. Ils étaient habitués à nous entendre nous disputer. Pour eux, ce n’était qu’une chicane de plus. Peut-être que les choses allaient changer. Malheureusement, ce ne fut pas le cas. Nous avons « fêté » Noël comme nous avons pu, tous ensemble, pour une dernière fois. Nous avons passé le temps des fêtes comme nous l’avons toujours fait, sauf que nous passions du temps sur nos cellulaires pour magasiner des meubles et des appartements. Nous n’avions pas le cœur à la fête, nous avions la tête dans nos problèmes d’adultes. Malgré que nous voulions faire un effort pour les enfants pour ne pas trop affecter leur temps des fêtes, nous l’avons gâché. En fait, je l’ai gâché avec ma décision.

Est-ce que je regrette ma décision ? Non. Lorsque nous ne sommes plus bien dans un couple et que malgré toutes les tentatives et séances de thérapies de couple, rien ne change, il faut savoir choisir de se donner la chance d’être heureux même si cela implique de briser la cellule familiale. Les enfants, à moyen ou long terme, seront plus heureux de voir les deux parents sourire et être heureux chacun de son côté que de les entendre se disputer et se critiquer du matin au soir.

Est‑ce que j’aurais pu faire part de ma décision à un autre moment ? Certainement. Je m’en veux d’avoir gâché l’image de Noël pour mes enfants. D’avoir souillé dans leur esprit ce moment magique qu’est Noël. Je l’avoue, j’ai pensé à moi uniquement lorsque j’ai pris ma décision. Je voulais que la nouvelle année soit un réel renouveau pour moi. Est‑ce que j’aurais pu attendre et faire l’annonce après Noël pour laisser un souvenir intact de cette fête à mes enfants ? Sûrement. Est‑ce que le fait de faire l’annonce plus tard aurait réellement changé leur perception du temps des fêtes ? Je ne crois pas. Des parents qui se séparent, ça marque l’esprit et affecte les enfants, peu importe le moment où on se le fait annoncer.

Je me mets une énorme pression sur les épaules pour que ce Noël‑ci puisse faire renaître la magie que j’ai brisée. Je veux que mes enfants aient un beau Noël. Je veux qu’ils ne sentent pas la pression qu’ont les adultes de planifier les horaires de « qui a les enfants quand » pour s’assurer que les enfants voient leurs deux parents et la famille aux deux fêtes. Les horaires de garde, on s’en fout, c’est le temps des fêtes. Il n’y a rien de normal durant ces deux semaines‑là. Je veux qu’en grandissant, mes enfants ne gardent pas cette image triste de Noël. Je veux que la magie revienne, pour eux et pour moi. Je veux, pour un instant, oublier que j’ai été le Grinch qui a volé Noël il n’y a pas si longtemps.

Eva Staire

 



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