« Maman, je pense que je suis dépressif » – Texte : Eva Staire
« Maman, je pense que je suis dépressif. »
Il m’a sorti ça, comme ça, à 9 h le matin, devant ma tasse de café, en mangeant ses céréales.
J’ai senti mon cœur bondir dans ma poitrine, j’avais peur, j’avais envie de crier, de courir.
– Comment ça, dépressif ?
– Tout est « dark »
– Depuis quand ? À cause de la pandémie. tu penses ?
– Je suis comme ça. Depuis toujours, je crois. Je ne suis pas heureux, je ne le serai jamais. Je suis dépressif.
– As-tu des idées noires ?
– Tout est noir.
(Ne pas paniquer, ne pas paniquer…)
– As-tu envisagé de mettre fin à tes jours ?
(Je ne peux pas croire que je pose cette question à mon enfant !!!!)
– Je sais pas trop, mais mourir n’est pas quelque chose qui me dérange parce que je ne suis pas heureux.
– Merci de m’en parler, mon fils. Veux-tu de l’aide ?
– Je crois que j’aimerais bien de l’aide. Comme toi.
Je ne sais pas où j’ai trouvé en moi la force de ne pas hurler. Il m’a tendu la main et je l’ai prise.
Quelques mois plus tôt, j’ai frappé le mur pandémique et j’ai perdu mon étincelle. J’ai eu la chance d’être très bien entourée et accompagnée par des gens incroyables. J’ai investi dans ma santé mentale. Je me suis arrêtée, et je suis allée chercher de l’aide. Petit à petit j’ai rallumé mon étincelle et elle brille encore plus fort qu’avant.
Je suis devenue un exemple pour mon enfant.
« Maman n’allait pas bien, elle a reçu de l’aide, elle va mieux. Ça peut m’arriver à moi aussi. »
Je suis devenue de l’espoir pour mon enfant.
En quelques heures, avec des professionnels de santé très réactifs, nous avons tissé un filet d’urgence et de sécurité autour de mon gars.
Oui j’ai eu peur. Nous avons eu peur.
On peut mourir de ce mal-là. Je le sais.
Mais crois-moi, autour de toi, il y a des humains, qui sont là pour toi, et qui vont te redonner ce souffle, cet espoir et cette joie de vivre.
Même si tu trouves tout ça trop… trop noir… crois-moi, c’est beau après.
Parles-en. Tu n’es pas seul. Je suis là. On est là.
Eva Staire