Non déterminé

C’était partout dans les médias il y a quelques jours, vous avez sans doute vu cette nouvelle passer : un parent canadien a obtenu de pouvoir apposer la mention « non déterminé » sur la carte d’assurance maladie de son bébé, à l’endroit où il devait indiquer le sexe de l’enfant.

J’ai lu la nouvelle, moi aussi. J’ai posé mon café (froid) et je me suis sérieusement demandé : « Est-ce que c’est quelque chose que j’aurais fait, moi, comme parent ? » À froid, comme ça… Non. Mes enfants sont nés mâles ou femelles, tout comme ils sont nés blancs et canadiens, en janvier ou en août. C’est un fait, c’est tout.

Mais en y réfléchissant plus longtemps, même si, a priori, je ne vois pas trop pourquoi j’aurais choisi de ne pas associer de sexe à l’identité légale de mes petits, et que ça me semble une façon compliquée de transmettre nos valeurs (notamment parce que le pronom neutre désignant une personne sans utiliser de genre en français est encore au stade de suggestion et donc encore bien trop loin de passer dans le langage usuel. Faudrait y penser avant longtemps, d’ailleurs. Maintenant serait un bon moment, je dis ça de même), je dois admettre que… je comprends un peu le fondement de la démarche.

Je veux dire, si on avait été classés biologiquement selon la couleur de nos yeux ou notre groupe sanguin, est-ce que ces choses seraient, justement, le fondement de notre identité sociale? Est-ce que la société aurait des attentes différentes entre un B+ et un A–? Est-ce que le 0– serait moins bien payé ? Est-ce qu’on aurait attendu d’un A+ qu’il ne joue pas avec quoi que ce soit de jaune, couleur réservée aux AB– ? Aurait-on attendu jusqu’au milieu du vingtième siècle pour accorder le droit de vote à tous ceux portant un rhésus négatif, alors que ceux nés avec un facteur rhésus positif l’auraient eu depuis toujours ?

Sauf qu’en même temps, la couleur de nos yeux, c’est sur notre permis de conduire. Notre groupe sanguin est dans notre dossier médical. La nature nous a faits biologiquement différents, à plusieurs niveaux. Il peut être utile que ce soit au moins noté, ne serait-ce qu’à des fins d’identification. Et il serait un peu hypocrite de faire comme si la différence physique n’existait pas. Mais reste que le problème est là. À mon très humble avis, le problème se trouve bien plus dans le carcan encore trop rigide dans lequel on fait évoluer nos enfants, souvent sans même s’en rendre compte, selon leur genre. Le problème se trouve dans le fait que l’avancée de la neutralité est encore loin d’avoir fini son chemin.

Le problème c’est qu’encore en 2017, un garçon et une fille n’auront pas les mêmes regards portés sur eux, les mêmes attentes de la part de leur entourage, parfois carrément pas les mêmes droits, selon l’endroit où ils sont nés.

Abolissons les inégalités, laissons les enfants être qui ils veulent, peu importe ce qu’ils ont entre les jambes au moment de la naissance. Peu importe ce que ça peut vouloir dire et ce que ça peut impliquer par rapport à leur entité personnelle, sociale et sexuelle tout au long de leur vie : laissons-les être totalement EUX. C’est ça, le véritable combat à mener.

Zabethe Boucher



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