Vivre dans un manège — Texte : Geneviève Toueg

Cette première grossesse était bien voulue, mais cette maladie est arrivée dans ma vie sans que je l’aie demandé. Elle s’est invitée chez nous et s’y est trouvé une place particulière. Avec la grossesse, la femme enceinte est plus sujette à développer une maladie mentale, et ce, surtout si elle est prédisposée. Cette maladie s’installait de plus en plus en moi et moi, je me perdais davantage.

Puis, je suis tombée sur la psychiatre, celle qu’on appelle « la crème de la crème », celle en qui on pourrait faire confiance les yeux fermés, le diagnostic est tombé, bipolarité ! Pourquoi moi, pourquoi m’a-t-elle choisie ? Tant de pourquoi !

Dans mon cas, je suis tombée sur le tout inclus de la bipolarité. J’étais dans une montagne russe d’émotions, passant de la dépression à l’hospitalisation et de la manie aux achats compulsifs, à une énergie plus débordante qu’à l’habitude. Le jugement n’y était plus. Les dettes s’accumulaient et mon état mental n’était toujours pas stable. Puis vient la médication, les remises en question et tenter de trouver un équilibre.

Ensuite, cette deuxième grossesse surprise est arrivée ! Cette nouvelle, vous savez celle qu’on attend le moins, celle qui fait rimer le mot bonheur avec le mot angoisse. L’angoisse que bébé se forme anormalement à cause de la médication, l’inquiétude que la maladie se détériore parce que oui, c’est une grossesse plus à risque. À la fin de la grossesse, cette montagne russe refait surface, vous savez ce genre de manège qui nous étourdit, celui qui fait en sorte que nous perdons nos points de repère. Ces symptômes que je tentais de retenir mais qui étaient plus forts que moi, qui étaient au-devant de moi.

J’aurais envie de te dire à toi, ma bipolarité, que j’apprends à vivre avec toi avec tes hauts et tes bas ; je t’apprivoise peu à peu et je commence à te connaître un peu mieux. La vie n’est pas un long fleuve tranquille, elle nous a mis sur le même chemin. Pourquoi ne pas cohabiter ensemble afin d’avoir ce respect mutuel ? Pourquoi ne pas trouver cet équilibre entre nous ? Puis arrive l’acceptation. Cette volonté d’accueillir la réalité telle qu’elle est et de faire le deuil de la réalité qui a changé.

L’acceptation libère, allège et nous remet en contact avec nos ressources, notre pouvoir d’action, elle nous permet de faire avec la réalité, de lâcher prise et de nous créer. Parce que tu es entrée dans ma vie, je suis maintenant plus consciente de ce qu’est la résilience, le lâcher-prise et surtout de reprendre le pouvoir de ma propre vie, d’être la femme que je suis !

Le 30 mars est la journée de la bipolarité. Cette maladie qui s’exprime différemment d’une personne à l’autre est encore très peu connue et stigmatisée. Profitons de cette journée pour s’ouvrir aux problèmes de santé mentale qui peuvent toucher chacun de nous à un moment de nos vies.

 

Geneviève Toueg

 



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