Tag anxiété généralisée

Cette nuit-là

D’aussi loin que je me rappelle, le mois d’octobre n’a jamais

D’aussi loin que je me rappelle, le mois d’octobre n’a jamais été pour moi un mois plaisant. L’Halloween, la température plus froide et la noirceur rimaient souvent avec ma petite déprime passagère. Quelques jours de grisaille dans mon cœur qui finissaient toujours par passer, parce que je savais comment les surmonter. Cependant, depuis cette nuit-là, ma vie fut bouleversée.

Je me souviens de t’avoir pris dans mes bras. Tu étais si petit et si beau. Devenir ta maman dans ce mois de déprime me faisait voir la vie autrement. Savoir que le mot octobre allait rimer avec un nouveau bonheur me donnait espoir de jours meilleurs. Mon garçon, tu étais parfait. De la pointe de tes orteils à ton visage angélique, je suis tombée amoureuse de toi. Je sentais ton cœur battre contre le mien et ta respiration au creux de mes mains, je réalisais à quel point la vie venait de m’offrir l’un des plus beaux cadeaux. Cette nuit‑là, j’ai compris que plus rien ne serait comme avant. Cette nuit‑là, j’ai réalisé que ma vie prenait un nouveau tournant.

Les jours ont passé et la petite routine familiale s’est installée. Papa était merveilleux et présent. Les membres de nos familles venaient nous visiter et tous étaient ravis d’enfin pouvoir te rencontrer. Sur mon visage, nous pouvions lire la fierté d’être ta maman, mais dans mes yeux et mon cœur, la peur de ne jamais être à la hauteur grandissait sans perdre de temps. La maternité est une merveilleuse aventure, elle nous permet de comprendre que la vie est belle et que l’humain est stupéfiant. Mon fils, j’aurais voulu être la meilleure et la plus forte, mais la vie en avait décidé autrement. Savoir que tu dépendais de moi, que ma vie était maintenant en symbiose avec la tienne et que je devais te protéger de tout, maman n’a pas su.

Mon fils, maman a tout essayé. J’ai repoussé ces émotions qui m’envahissaient jour et nuit, j’ai respiré à grandes bouffées d’air pour balayer ces pensées qui me hantaient quand tu dormais près de moi. J’ai continué, j’ai tout tenté, mais cette nuit-là j’ai dû abandonner.

Dans cette froideur de novembre, après quelques journées plus mouvementées, j’ai décidé que j’en avais assez. Assez d’avoir peur de mourir et de te laisser, assez de te surprotéger à m’en étouffer, mais surtout assez de ne pas me sentir à la hauteur de t’aimer.

Aujourd’hui avec du recul, je peux affirmer que tu peux être fière de ta maman. Celle qui t’aime autant et qui te protège encore comme avant, et ce, même si tu es plus grand. Aujourd’hui, maman peut enfin te parler de cette peur qui ne l’a jamais quittée. Je peux maintenant te dire que tu as une maman incroyable qui, chaque jour, doit se remémorer qu’être une mère anxieuse généralisée n’est pas la fin du monde. Parce que mon monde est et sera toujours toi à mes côtés.

Véronique Daigle

Pas facile de vivre avec de l’anxiété !

Ma fille de 20 ans vit tout comme moi de l’anxiété. Nous avons le

Ma fille de 20 ans vit tout comme moi de l’anxiété. Nous avons le même diagnostic : anxiété généralisée.

Je la regarde, je l’observe et je me revois à son âge. Il y a tellement de similitudes entre nous deux que ça me fait parfois peur.

Pourtant, nos vies ont été si différentes sur tous les plans.

Pendant sa petite enfance, ma cocotte était une petite fille enjouée, joyeuse, sociable. Elle avait plein d’amis, elle était bien entourée et toujours occupée. Spectacles de danse et de chant auxquels elle invitait ses amis à participer. Vélo, patin, soccer, baignade. Elle était très active, tout comme ses frères.

Elle était rarement à la maison, trop occupée à vivre sa vie de petite fille. Sa vie sociale se déroulait très bien.

Par contre, sur le plan académique, c’était plus difficile. Orthophoniste, orthopédagogue, psychologue scolaire ont fait partie de son parcours. Elle devait toujours travailler plus fort que les autres pour y arriver. Plusieurs démarches ont été faites pour l’accompagner et la soutenir afin qu’elle puisse vivre des réussites. Malgré toutes les rencontres avec les spécialistes, jamais ils n’ont été capables de prononcer un diagnostic pour qu’elle puisse recevoir l’aide nécessaire. Et le secondaire est arrivé avec son lot de défis.

Puis vers l’âge de 15 ans, tout a basculé. Elle a fait une crise d’épilepsie à la maison. En réalité, elle en a fait deux en moins de 15 minutes. On ne savait pas ce qui se passait. J’ai eu la peur de ma vie. Diagnostic : épilepsie juvénile. 

Le neurologue lui a prescrit une médication adaptée à sa nouvelle condition. Mais plus le temps passait, plus je voyais ma fille s’engouffrer dans un tourbillon de peur, d’anxiété et de souffrance émotionnelle. 

Elle ne voulait plus prendre l’autobus scolaire le matin, car les autres jeunes la regardaient défiler dans l’allée pour se trouver une place. Elle craignait le jugement des autres. Elle avait peur de leur regard posé sur elle. Elle voulait passer inaperçue. 

Elle se plaignait de toutes sortes de maux pour éviter d’aller à l’école. 

Elle avait peur de faire une crise d’épilepsie et que tout le monde la voie dans cet état. 

Elle a arrêté de jouer au soccer, car elle avait perdu confiance en elle. Et elle s’imaginait que ses coéquipières la trouvaient poche.

Elle s’isolait de plus en plus et refusait les invitations de ses amis. Elle restait dans sa chambre, seule, à vivre toutes ces émotions qui bouleversaient son quotidien, qui chamboulaient sa vie d’adolescente.

Je ne la reconnaissais plus. Ni son père ni les autres membres de la famille.

Nous avons pris rendez-vous avec son médecin de famille, nous avons aussi consulté de nouveau le neurologue et il nous a appris que 5 % des gens qui prenaient ce médicament avaient développé des symptômes de dépression…

Alors, changez sa médication au PC, monsieur le docteur ! Je veux que ma fille retrouve sa joie de vivre.

Mais l’autre médicament avait aussi des effets secondaires. Prise de poids, perte de cheveux, peau sèche, sueurs nocturnes… rien pour aider une jeune fille.

Elle a décidé de lâcher l’école en quatrième secondaire. Ma cocotte n’arrivait plus à gérer son anxiété et ses difficultés scolaires.

L’anxiété s’est de plus en plus infiltrée dans son quotidien. Elle avait des idées noires. Elle a commencé à prendre des antidépresseurs. J’avais inscrit des numéros de téléphone, des sites Internet sur le frigo, juste au cas où. J’ai aussi appelé au CLSC. Ils lui proposaient une thérapie pour les 18 à 25 ans. Elle n’a pas voulu y participer.

Le retour à l’école ne s’est jamais fait, du moins jusqu’à maintenant. Elle a eu un emploi pendant près d’un an. Elle travaillait avec son frère jumeau. Mais quand celui‑ci a quitté cet emploi pour entreprendre une formation, son anxiété a augmenté et elle a quitté son travail.

Elle a 20 ans. Elle ne réussit pas à trouver ce qui la passionne. Pourtant, elle a plein de potentiel dans plusieurs domaines.

Elle adore la mode, la décoration, elle est très créative. Elle fait le toilettage de notre chien et elle est très habile. Elle est capable d’apprendre d’autres langues assez facilement. Elle aime l’histoire, l’architecture… Elle a une très bonne écoute, une belle empathie et plein de bienveillance. Elle est une jeune femme autonome, organisée, mature et responsable. Mais quand je lui nomme toutes ses qualités, elle ne me croit pas. 

Depuis quelques mois, elle va bien. Elle va mieux. Elle se questionne, réfléchit à son avenir. Son anxiété est toujours présente, mais elle la gère mieux. Parfois, elle vient encore me réveiller la nuit, car son anxiété l’empêche de trouver le sommeil. Son hamster lui raconte des histoires qui n’arriveront sûrement jamais. Je les connais ces petites bêtes, alors je peux l’aider. Mais pas toujours ! 

Je lui souhaite de trouver son chemin, celui qui la guidera vers le monde des adultes. Sa route sera différente des autres, mais elle va y arriver, j’en suis certaine.

Aie confiance en toi ma grande !

Line Ferraro 

Mon anxiété, merci de m’avoir rendue au bout !

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C’était un lundi, le 21 août 2017. Une autre journée à me lever avec le sentiment que l’on m’étrangle, le sentiment de manquer d’air, le cœur qui veut sortir de mon corps ! T’sais ce genre de matins que j’endure tant bien que mal depuis maintenant six ans. L’âge de ma fille !

 

Y a-t-il un lien entre cette anxiété qui s’est ancrée en moi et la naissance de l’amour de ma vie ?! Bien évidemment. J’étais une personne somme toute très calme avant sa naissance ! Je gérais mes émotions de façon autonome et je chassais les petites bibittes de mon esprit assez rapidement. Et BOOM, tu es arrivée dans ma vie après trente‑six heures de contractions, une césarienne d’urgence et plus de petit pouls. Non mais t’sais, t’as fait ça en grand !

 

Heureusement, tu es bien vivante, sans séquelles et magnifique.

 

Il y a donc six ans, j’ai expérimenté ma première crise de panique. La sensation que j’allais tout simplement mourir, que je perdais le contrôle, que je ne respirais plus, la sensation de perdre conscience ! Et depuis six ans, j’expérimente de façon plus ou moins intense, mais ce de façon quotidienne, l’anxiété généralisée. Le fameux TAG !

 

Pendant ces six dernières années, j’ai essayé de gérer cet état de mal-être et de sensation constante de ne pas avoir le contrôle de mon corps et esprit, comme une superwoman ! T’sais, celle que la société nous impose d’être, celle que les revues, les blogues et les pages Facebook de mamans extraordinaires, jamais brûlées et toujours souriantes nous montrent.

 

J’ai essayé, mais derrière tous ces efforts, une petite voix appelée « anxiété généralisée » nuisait à ma vie. Avez-vous déjà amené votre enfant à la garderie en pensant : « Est-ce que la gardienne va bien clôturer ses escaliers, est-ce qu’elle va couper ses raisins en quatre comme je le fais pour éviter les étouffements, est-ce qu’elle sait quoi fait si elle s’étouffe ?! » Non mais, est-ce épuisant d’avoir ce genre de pensées quotidiennes, et ce depuis six ans ?!

 

Alors voilà, le 21 août 2017, mon anxiété, celle que je pensais être en mesure de finalement affronter seule, m’a mise au sol. BANG ! K.O. !

 

Je me suis rendue par moi-même dans le centre hospitalier où je travaille, à l’urgence…

 

Je me suis assise devant une collègue au triage et je lui ai lancé en pleurs : « Je suis ici parce que je suis plus capable de me sentir comme je me sens présentement, en panique constante. Je suis malade et si je ne me présentais pas ici, j’ai aucune idée où j’allais me retrouver ! Je suis à bout, aide-moi ! »

 

J’ai été hospitalisée un mois en psychiatrie ! Ohhhhh la psychiatrie ! L’étage de mon hôpital que j’avais un vilain plaisir à regarder à travers ces portes barrées et en me demandant quel genre de fous il y avait là (quel jugement merdique au final !)

 

Eh bien moi, Isabelle, trente-quatre ans, maman infaillible d’une magnifique petite fille de six ans et travaillant dans le domaine de la santé… je me suis retrouvée derrière ces portes et vous savez quoi ?! C’est ce qu’il me fallait pour maintenant me sentir libre… libre de cette maladie mentale qui s’appelle « anxiété généralisée » !

 

On m’a écoutée, on m’a soignée, on m’a confrontée et voilà ! Ce mois d’hospitalisation m’a fait comprendre quelque chose d’important : personne n’est à l’abri ! Surtout pas toi, super maman forte et inépuisable, travaillant à temps plein et veillant à ce que la famille se porte bien !

 

Oui, la maladie mentale est encore taboue ; oui, nous sommes quelques-uns à avoir honte de nous sentir ainsi mais, vous savez quoi ? J’aime maintenant l’idée de savoir qu’il y a une sortie de secours, qu’il y a des gens pour nous aider et que même si on a honte de ne pas se sentir assez « fort », il n’y a pas plus grande force que de demander de l’aide !

 

Mon anxiété, mon mal-être m’a sauvé la vie ! On peut s’en sortir !

 

Merci à toi, mon anxiété, de m’avoir rendue au bout… Sans toi, je ne serais pas la maman pleine d’espoir et de vie que je suis aujourd’hui !

 

Isabelle Nadeau

 

 

Quand monsieur Zen rencontre miss Peur

8 h 20, jeudi matin. Mon grand bonhomme de cinq ans est installé da

8 h 20, jeudi matin. Mon grand bonhomme de cinq ans est installé dans la chaise du dentiste, comme un roi sur la plage avec ses lunettes fumées et ses espadrilles de Skylanders. Zéro troublé par l’arrachage de dent qui s’en vient. Sa première dent d’adulte est complètement poussée et la dent de bébé ne fait même pas semblant de branler.

Je le regarde et je l’admire. Pour lui, la vie est juste belle. Il ne voit aucune raison pourquoi ce serait différent, arrachage de dent ou pas. Quand j’étais enceinte de lui, j’ai traversé des périodes extrêmement stressantes, comme la perte de son jumeau.

J’avais lu qu’un bébé qui a vécu un stress important in utero peut réagir de deux façons : être de nature anxieuse ou être immunisé contre le stress. Vous n’avez pas idée à quel point je lui ai parlé pour le réconforter. Dès ses premiers jours, je disais que mon Tiloup était un mélange de Gandhi et de Bouddha. Et pourtant, il avait dû être réanimé à la naissance et j’avais passé les deux premières journées de sa vie à l’urgence (bon… c’est peut-être le soluté de Gravol et de morphine qu’il a ingéré par le lait maternel qui a eu un impact!). Du stress à la pelle pour commencer dans la vie.

Combien de fois me suis-je fait dire par des étrangers : «Madame, votre bébé a une vieille âme! Dès qu’on le voit, on se sent calme…» Il lui arrive de s’énerver, mais habituellement, c’est parce qu’il a faim ou qu’il s’ennuie. Le reste du temps, il avance dans la vie comme un voilier vogue sur une mer sans rides. Alors, quand c’est le temps de se faire enlever une dent, c’est comme s’il devait boire un verre de lait. «Maman, est-ce que je peux retourner à l’école maintenant?» Pas plus compliqué que ça.

Quand on sait que j’ai déjà dû appeler l’ambulance pour ma fille aînée (elle avait sept ans) qui paniquait pour un plombage, on comprend que la zénitude de mon garçon me soulage. Vers l’âge de deux ans, ma Peanut a pris un abonnement aux phobies : dentiste, médecin, animaux, insectes, piqûres, seringues, bruits… Lorsque j’osais sortir avec elle, elle essayait de rentrer dans mon utérus parce que les corneilles sur les fils électriques l’angoissaient ou qu’une personne s’approchait. Pauvre Peanut. Elle souffrait! Et nous, nous n’avions plus de vie.

On a travaillé fort pour la libérer. Un pas après l’autre. «Peanut, de l’autre côté de la rue, il y a un chien. Il est en laisse. Tu peux rester derrière moi si tu veux. Il a l’air gentil». «Peanut, devant nous, il y a un petit chien dans les bras de son maître. On va passer à côté sans le regarder. Tu es capable. Respire avec moi». «Peanut, aimerais-tu dire bonjour au chien de notre voisin? Regarde, il fait dodo». Même principe avec les humains, les chats, les oiseaux, les maringouins, les brocolis.

Maintenant, ma grande Peanut a du plaisir à aller chez le dentiste. Elle cohabite avec notre chaton avec plaisir (elle sait qu’il est dégriffé). Elle va vers les autres avec une aisance admirable. Elle qui était maladivement timide m’a déjà dit que l’endroit où elle se sentait le mieux était sur une scène de théâtre. Vous imaginez le chemin parcouru?

Pourtant, elle se relève chaque soir pour vérifier que toutes les portes de la maison sont verrouillées. Si elle doit se faire piquer, c’est l’hyperventilation garantie. Au calme, elle comprend que la seringue n’est pas là pour lui faire mal et que l’araignée peut être aussi répugnante qu’elle le veut, elle n’est pas dangereuse. Sa tête le comprend. Son instinct de survie, non. Ma fille ne sera peut-être jamais «phobie-free» et elle aura longtemps besoin de ses anxiolytiques, mais elle peut maintenant profiter de la vie et nous aussi.

Quand je vois mon champion se faire enlever une dent sans broncher, je ressens tout le bien qu’il me fait. Grâce à lui, j’ai compris que je ne dois pas me culpabiliser à cause des angoisses de ma fille. Mon autre fille a déjà donné un bisou à un scorpion et trouve que les araignées sont dégueulasses, à l’exception des tarentules… C’est à se demander si ces deux enfants ont été élevés par les mêmes parents. Mon garçon le plus jeune, eh! bien, tant qu’il a quelque chose à manger et quelqu’un à bécoter, il est heureux. Bien loin de l’anxiété généralisée diagnostiquée de ma grande Peanut.

J’observe mon garçon, si minuscule sur l’immense chaise du dentiste et au milieu des instruments intimidants. Je m’émeus devant son sourire rempli de cotons absorbants. Sa sœur et lui parcourent une route différente, mais leur cheminement mérite mon admiration. Je les accompagne sur le chemin, et j’apprends à chaque pas que nous faisons ensemble.