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La réouverture des écoles

Comme beaucoup de parents, nous attendons tous avec impatience les mesures

Comme beaucoup de parents, nous attendons tous avec impatience les mesures annonçant le déconfinement. Nous scrutons les paroles de notre premier ministre et on voit les foules se soulever dès qu’il est question de rouvrir nos écoles…

Le 22 avril, François Legault a annoncé qu’il présenterait sous peu un plan de réouverture des écoles et des entreprises par région. L’idée principale est de relancer d’abord les régions les moins touchées par la maladie et celles où la situation est stable actuellement. Il a spécifié que les parents qui ne souhaitent pas envoyer leurs enfants en classe n’y seront pas obligés.

Et déjà, face à la possibilité de laisser ce choix aux parents, j’espère sincèrement que ce choix sera éclairé, assumé et surtout, respecté. Je voudrais penser que tous les parents, peu importe le choix qu’ils feront, sauront respecter le choix des autres parents. Et disons qu’en temps normal, la parentalité de nos jours ne se fait pas toujours dans le respect de la différence… J’espère vraiment que cette pandémie aura appris aux parents à ne pas juger le choix des autres.

Alors voilà : peut-être que tu feras le choix d’envoyer tes enfants à l’école. Parce que tu dois aller travailler. Parce que tu as envie que tes enfants retournent à l’école pour apprendre et socialiser. Parce qu’il n’y a personne qui a une santé à risque chez vous. Parce que tu te sens à bout et que tu as besoin d’un break. Parce que tu ne te sens pas à l’aise d’enseigner à la maison. Parce que tes enfants ont envie d’y retourner. Je te dis : Let’s go! Envoie-les à l’école. C’est juste bien correct.

Alors voilà : peut-être que tu feras le choix de garder tes enfants chez toi. Parce que tu peux travailler de la maison ou que tu es déjà en congé. Parce que des gens ont une santé fragile chez toi. Parce que tu aimes ça rester en famille en confinement. Parce que tes enfants trippent à faire l’école à la maison. Parce que tu as peur des risques du déconfinement. Je te dis : Let’s go! Garde-les chez toi. C’est juste bien correct.

Alors voilà : peut-être que tu te sens bien perdu là-dedans. Peut-être que tu trouves que c’est une très grande responsabilité de devoir faire ce choix. Peut-être que tu as besoin d’y réfléchir encore. Peut-être que tu attends de voir ce que les autres vont faire autour de toi. Peut-être que tu as envie de tirer à pile ou face. Peut-être que tu vas laisser tes enfants prendre cette décision. Je te dis : Let’s go! Tu as le droit de te sentir perdu aussi, c’est juste bien correct.

Mon seul souhait, c’est que les parents prendront leur propre décision, sans juger celle des autres. Chaque parent fait de son mieux en ce moment. Et chaque parent prendra la bonne décision pour lui, pour sa famille, peu importe ce qu’il choisit de faire. Respect. Le but, ce n’est pas de se juger entre nous et encore moins de se sentir coupables de faire ce choix.

De plus, ça prend des parents qui feront les deux choix ! On a besoin de parents qui enverront leurs enfants à l’école. Parce que grâce à eux, l’économie pourra reprendre et cela permettra d’augmenter notre immunité collective. On a aussi besoin de parents qui garderont leurs enfants à la maison jusqu’en septembre. Parce que grâce à eux, nous pourrons échelonner les cas plus graves et éviter d’engorger les hôpitaux. Grâce aux choix de ces parents, nous pourrons échelonner la contamination et du coup, permettre à la société entière de mieux combattre cette cochonnerie.

Alors, encore une fois, peu importe ton choix, rappelle-toi que celui du voisin est tout aussi valable que le tien, malgré sa différence.

Joanie Fournier


Bienvenue dans mon monde

Le début de cette pandémie nous a causé bien des soucis à tous. Certain

Le début de cette pandémie nous a causé bien des soucis à tous. Certains ont même développé de l’anxiété. Beaucoup de gens vivent du stress face au côté financier. Des séparations s’ensuivent, car ce mode de vie exige une adaptation et un contrôle de ses émotions. Les situations problématiques vécues par les gens sont nombreuses.

J’ai dû m’adapter moi aussi. Étant habitué de rester seul à la maison la semaine et de prendre soin de moi tout seul, je devais m’oublier un peu. Mes enfants étaient là et ils ne pouvaient pas passer leur journée devant les écrans. Ma femme fait du télétravail et elle fait sa part aussi. Entendre du bruit et des cris tous les jours est une grosse adaptation aussi pour mon TSPT. Cela a été très dur pour ma femme et moi, et j’ai dû faire d’énormes sacrifices. Mais c’est un combat de tous les jours et j’essaie de m’améliorer.

Quand je devais sortir, j’étais anxieux d’attraper ce virus à cause de tout ce que je voyais à la télévision. J’avais des symptômes physiques graves pendant les trois premières semaines… Normalement, je regarde très rarement les nouvelles car il y a beaucoup de négatif. Souffrant d’un TSPT sévère et de beaucoup d’anxiété, j’ai grandement diminué le nombre de fois où je consultais les nouvelles. Et cela m’aide beaucoup maintenant.

Un autre facteur de stress était que je me demandais qui allait s’occuper de ma petite famille si je tombais malade. Ma femme est immunosupprimée, ce qui veut dire que présentement, je suis le seul qui fait les courses. Aussi, ma chienne d’assistance Théra n’a pas eu de rendez-vous depuis deux mois maintenant. Normalement, elle se fait belle toutes les quatre semaines. Je ne peux pas lui couper ses griffes moi‑même, car je ne vois pas la petite veine à travers ses griffes noires. N’oubliez pas qu’elle est très importante pour moi. Ce n’est pas seulement un animal de compagnie.

Malgré tout, je me suis adapté quand même assez vite. Comme un militaire qui va à l’étranger pendant six mois dans un pays souvent apocalyptique. Sorties au restaurant, cinéma, magasinage, journée à la plage, etc. : ça n’existe pas. Sur un camp, on mange, on dort, on travaille, on s’entraîne et on patrouille. On ne sait jamais si on va revenir vivant dans notre beau pays. Quelques minutes de téléphones sont permises par semaine pour communiquer avec nos proches. Quand même, notre situation de confinement présentement n’est pas si pire !

Est‑ce que j’ai acheté beaucoup d’épicerie ? Non, seulement un petit peu plus que d’habitude, graduellement, pour éviter d’y aller trop souvent. Nous, les militaires, sommes habitués à avoir une liste d’équipement pour nos bagages afin d’avoir un peu de tout. Donc je me suis assuré que ma famille puisse avoir un peu de tout, sans exagérer. Mon expérience militaire me disait que les supermarchés ne pourraient pas fermer.

Pour moi, sortir pour l’essentiel est déjà une réalité depuis un bon bout de temps. Normalement, je sors de la maison seulement pour faire mes courses. La plupart des activités avec les enfants sont effectuées avec ma femme. Donc pour mon mode de vie, rien n’a changé. C’est pour cela que je vous dis : Bienvenue dans mon monde.

Oui, j’aimerais bien souvent aller voir des groupes rock que j’ai aimés pendant ma jeunesse. J’aimerais faire beaucoup de choses, mais les foules et le bruit, pour moi, c’est impossible.

Étrange à dire mais maintenant, je me sens mieux dans cette situation. Les supermarchés sont presque déserts. Une discipline rigoureuse est établie, ce qui vient me rejoindre face à mon expérience militaire. Les gens ont peur et ont probablement plus peur que moi. Donc ils gardent leurs distances. Bien sûr, je choisis les endroits où la plus grande discipline est respectée, peu importe le prix des aliments qui y sont vendus. Je me sens bien dans un supermarché presque désert. Je n’ai pas de flash-back. Je commence à me sentir plus en sécurité alors que d’autres vivent de l’insécurité. Je dois vous avouer que je privilégie la livraison à domicile autant que possible et l’achat local.

Je vois l’anxiété sur le visage des gens. Après tout, je suis devenu un expert dans ce domaine. Depuis deux ans que je consulte et que j’observe mes signes afin d’avoir des outils pour ma blessure. Quand quelqu’un est anxieux, ça devient plus facile pour moi de le découvrir.

Je me sens bien chez moi et je préfère ne pas sortir depuis presque deux ans maintenant. Il faut seulement du temps d’adaptation avec ceux qui ne peuvent pas vivre ainsi. Mais pour moi, c’était déjà ma façon de survivre.

Alors je vous souhaite la meilleure des chances, soyez disciplinés et restez chez vous autant que possible.

Carl Audet

L’ampleur de la crise

Maintenant, je comprends pourq

Maintenant, je comprends pourquoi tout le monde parle de gestion de crise. Cette crise, selon moi, a commencé le 13 mars dernier à l’annonce de la fermeture de toutes les écoles du Québec. Sauf que notre famille n’avait pas encore eu l’occasion d’en mesurer l’ampleur. Parce que moi, le 13 mars dernier, j’entrais à l’hôpital pour donner naissance à mon quatrième et dernier bébé. Je ressortais de l’hôpital durant le week-end… ce qui fait que depuis ce jour, je n’étais pas encore sortie de la maison !

Bien sûr, j’étais consciente que mon congé de maternité n’allait pas se passer comme je l’avais imaginé. Je n’aurais jamais pu planifier faire l’école à la maison à mes trois grandes filles, entre deux allaitements, alors que je souffrais déjà d’un cruel déficit de sommeil… Disons que j’avais imaginé un congé de maternité avec beaucoup plus de moments calmes à la maison… Mais bon, on s’est vite retroussé les manches (pas le choix !). On a fait un horaire aux grandes, pour tenter d’équilibrer les matières scolaires et les temps libres. Et j’ai vite appris à jongler dans ce quotidien.

Jusqu’ici, même après un mois, j’avais tout bonnement l’impression d’être en vacances, en famille. Même que je nous trouvais choyés d’avoir eu la chance de vivre les premières semaines de bébé tous ensemble. Mais voilà, je n’avais pas réalisé l’ampleur de la crise…

Oui… Je trouvais ça triste que nos familles ne puissent pas voir mon bébé. Je trouvais ça rushant d’avoir les enfants qui débordent d’énergie dans la maison. Je trouvais ça dur de n’avoir aucune aide de personne. Mais sans plus. Je ne réalisais tout simplement pas ce qui se passait dehors.

Je regardais les points de presse, j’écoutais les nouvelles et je voyais les points de vue défiler sur les réseaux sociaux. J’étais consciente que nous vivions quelque chose d’historique. Mais je n’avais pas réalisé à quel point…

Puis, après un mois passé sans sortir de la maison, j’ai dû me rendre à la clinique pour le premier rendez‑vous médical de bébé. Pis là, j’ai pogné de quoi ! J’ai réalisé l’ampleur de la crise… Un gros coup de poing au visage… Du plastique qui recouvre les murs, des salles d’attente complètement désertes et du personnel qui dévisage chaque personne qui entre… On m’a accueilli avec la porte barrée, avec une grosse pancarte indiquant d’attendre SANS TOUCHER À RIEN. Une infirmière est venue m’ouvrir la porte, elle m’a enfilé un masque avant que j’aie eu le temps de lui dire bonjour. Elle m’a enduit les mains de désinfectant et m’a demandé d’attendre dans l’entrée, debout. Elle m’a remis un formulaire à remplir, en me spécifiant que je devais utiliser mon propre crayon pour le faire.

Bon, j’avoue que je suis impressionnée par toutes les mesures préventives et l’assiduité du personnel médical. Mais comme il s’agissait du premier adulte que je voyais depuis un long mois, j’ai reçu ça comme une claque dans’ face ! J’ai réalisé l’ampleur de la crise…

En sortant de la clinique (ne vous en faites pas, je n’ai pas touché à la porte…), j’ai passé le trajet du retour avec un œil différent sur ce qui m’entourait… J’ai vu la distance entre les gens, les masques et les combinaisons de plastique en pleine rue. J’ai remarqué que chaque personne avec les cheveux blancs se faisait dévisager dehors. J’ai vu les magasins fermés, les rues désertes et les stationnements vides. Une ville fantôme… Et j’ai réalisé l’ampleur de la crise…

J’ai une énorme pensée pour les gens qui vivent seuls et plus encore pour les parents qui vivent confinés en appartement avec des enfants qui débordent d’énergie… J’ai une reconnaissance infinie envers tous ceux qui ont dû sortir pour aller travailler depuis un mois, peu importe leurs fonctions.

Je réalise la chance que j’ai en fait d’être en congé de maternité. Je ne pense pas à ce qui se passe dehors. Je ne pense pas à l’argent. Je ne pense pas à l’école ni à la garderie. Je vis avec mes enfants une période historique, dont ils parleront toute leur vie… On vit ce confinement en famille, comme des vacances. Et je savoure d’autant plus chaque jour, maintenant que je réalise l’ampleur de la crise.

Et vous ? Comment ça se passe ?

Joanie Fournier



Plus près que jamais!

On a mis quelques semaines à s’organiser et on s’est enfin retr

On a mis quelques semaines à s’organiser et on s’est enfin retrouvés! Te voir sourire, pouvoir te taquiner, discuter avec toi, te guider : tout cela me manquait terriblement.

Et voilà que la technologie, qu’il m’arrive de bouder, devient soudainement ma principale alliée! Je peux enfin recréer ma classe dans ma cuisine ; tout tient sur mon écran de portable. C’est magique! Tu es là!

Mon cœur s’accélère quand je vois le nombre de participants augmenter…

Parfois, c’est amical. On se retrouve pour bavarder, pour se raconter nos vies du moment, se partager nos bonnes idées pour passer le temps.

Parfois, c’est purement didactique! Même si je sais que c’est maman ou papa qui t’a un peu forcé la main cette fois, je parviens tout de même à ressentir un brin de bonheur chez toi ; ça crève l’écran! Ce n’est pas tant les mots que je te dicte qui te procurent cette satisfaction, je le sais. Soyons honnêtes, c’est de retrouver tes copains, un morceau de ton quotidien qui fait briller tes yeux.

Te voir chez toi, dans ta chambre, dans ton salon, dans le bureau de tes parents, me fait sentir plus près de toi que jamais! On prend le temps ; le temps de rencontrer ton chien, ton oiseau, ton chat.

À l’occasion, c’est un frère, parfois deux, qu’on entend, qu’on voit se chamailler. J’ai même eu besoin d’intervenir quand deux d’entre vous ont retrouvé leur complicité d’avant, vous échangeant des regards sur l’écran, la rigolade reprenant ses droits. Tu sais quoi? Ce fut mon moment préféré!

Mon élève, tu me manques, mais étonnamment, je me rapproche de toi plus que jamais… Merci de t’engager autant dans tes apprentissages et d’être au rendez‑vous!

*** Cher parent, merci d’être mon complice plus que jamais…

Karine Lamarche

Je ne veux pas que ça finisse!

Ne me lancez pas des roches (de toute façon, je suis à plus de deu

Ne me lancez pas des roches (de toute façon, je suis à plus de deux mètres). Pas tout de suite, en tout cas. Attendez au moins d’avoir lu jusqu’au bout.

Le confinement, je ne veux pas que ça finisse (à quelques détails près).

Le coronavirus, oust. DÉGAGE! Tu nous fais mal, tu déjoues nos efforts et nos lavages de mains.

Les questionnements angoissants : Jusqu’à quand le compte en banque résistera‑t­‑il à la perte d’emploi? Le test, il est positif ou négatif? Qui nous appelle au milieu de la nuit?… Tout ça, on le jette aux poubelles, que dis-je, au déchiqueteur.

Les humains qui tombent comme des mouches, comme dans la chanson « Plus rien » des Cowboys fringants : on fait un reset, on arrête le carnage!

Les mourants que personne ne veille parce qu’ils ne peuvent pas être les bienvenus, les funérailles où seul le mort est invité, c’est trop. C’est inhumain, insupportable.

Les statistiques qui roulent en boucle aux nouvelles : la courbe, on ne veut pas l’aplatir, on veut l’écrapoutir.

À tous ceux qui vivent les contrecoups de la pandémie (bref, tout le monde, genre, tout humain qui habite sur la planète Terre en ce moment), sachez que je suis de tout cœur avec vous en pensées, en ondes et en tout ce que vous voudrez.

 

Mais pour le reste? J’ose dire que j’en prendrais encore longtemps :

Des tonnes de câlins matin, midi et soir avec mes cocos, n’importe quand!

Des journées en famille, en pyjama ou pas, go! User mes pantoufles, j’adore ça!

Aucune obligation sociale, même pas celle de se maquiller…

Pas de centres commerciaux pour aller dépenser (désolée pour l’économie mise à mal ; ce n’est rien contre les entrepreneurs ni les employés… c’est juste que je suis mieux dans mon cocon que coincée dans le capitalisme)…

Pas de parades de conducteurs stressés deux fois par jour, pas de nervosité à l’idée d’arriver en retard à un rendez-vous ou à l’école, pas de « dépêche‑toi », pas de « tabarouette, l’essence a encore monté »…

La chance de télétravailler aux côtés de mon amoureux (et de créer des stratégies pour rester concentrés)…

Pas de taxi-mom, pas de papou-taxi…

Des repas partagés, des recettes inventées, mille occasions de s’entraider…

La permission de vivre et d’apprendre au rythme de chacun, pas de pression, pas d’évaluations…

Pas d’appels de l’école pour discuter d’un comportent dérangeant ou d’un devoir non remis (un soulagement, je vous dis!)…

Mon rêve d’enseigner à mes enfants, même si dans ma tête, ça ne se passait pas comme ça…

Du temps en quantité pour écouter mes enfants, les entendre rire, accueillir leurs plaintes (« C’est long, maman! Quand est-ce qu’on retourne à l’école? ») et trouver des solutions, pour observer leurs défis, leurs progrès, pour combler leurs besoins et les convaincre que les autres aussi en ont…

Des semaines intensives de maternage pour analyser l’impact de mes interventions parentales, pour admirer les fleurs qui poussent et ajouter un tuteur là où la tige a poussé croche…

Du soleil pour jouer, de la pluie pour danser, de la neige pour se blottir au chaud avec un bon roman…

Le ciel qui se dégage, les rivières qui retrouvent leur transparence, la planète qui arrête de trembler de peur…

Le temps de prendre le temps…

Tout ça, j’en prendrais encore longtemps. Plus la permission d’aller voir ma maman.

Nathalie Courcy

On ne se lâche pas!

Mon message du jour, entre deux journées de gros travail…

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Mon message du jour, entre deux journées de gros travail…

Je le sais que c’est pas facile.

Chaque jour, on annonce les nouveaux chiffres, les nouveaux décès, les nouvelles mesures.

On est dans la quatrième semaine de confinement et de distanciation sociale.

Chaque jour, nous vivons des émotions complètement contradictoires et intenses.

La nuit, on ne dort pas. On dort mal.

Que tu sois seul chez toi, que tu sois confiné avec ta famille, que tu te lèves chaque jour pour aller travailler parce que tu travailles pour un service essentiel… tu vis des moments terriblement difficiles.

C’est normal que tu te sentes mal. C’est normal que tu pleures. C’est normal que tu paniques, car cette pandémie est très sérieuse et l’avenir est complètement incertain. C’est normal que tu manques d’appétit et de sommeil. On est tous dans ce même bateau… ruinés, isolés et apeurés.

Mais tu sais, je crois qu’on va se tenir, on ne va pas se lâcher.

Appelle tes proches, ta famille, tes collègues, tes amis. Tous les jours.

Demande‑toi chaque jour : qu’est‑ce que je pourrais faire de bien ou de drôle aujourd’hui pour une personne ?

On a besoin plus que jamais les uns des autres.

Essaie d’apporter des petits morceaux d’espoir dans le cœur de tes proches.

Mange bien, fais du sport, chaque jour. Fais‑toi une routine, essaie de lâcher prise… On ne peut rien changer à cette situation, mais on peut décider de vivre pareil chaque jour et d’être heureux quand même.

Parce que la vie, c’est aujourd’hui.

Merci à tous ces artistes qui font des concerts ou des shows d’humour en live. Vous brisez cet isolement. Merci à tous ceux qui partagent des niaiseries sur les réseaux sociaux. Rire, ça fait tellement de bien.

Lâchez pas.

On va se tenir. On ne va pas se lâcher.

Gwendoline Duchaine

Mon éternel printemps

Bel enfant,

Toi, tu ne réalise

Bel enfant,

Toi, tu ne réalises pas combien la vie a changé. C’est ton premier printemps. Les oiseaux commencent à chanter, la neige fond, le soleil se pointe le bout du nez un peu plus souvent. Si seulement tu pouvais vivre ce premier printemps dans le calme, la douceur et l’éveil de l’âme qu’amène la venue de cette saison tant attendue.

Malheureusement, mon amour, tu dois sentir que quelque chose ne va pas comme à l’habitude. Je voudrais bien pouvoir t’expliquer tout ça, mais je n’arrive même pas moi‑même à réaliser que la terre tourne au ralenti en ce moment. Je ne me souviens plus tout à fait quel jour le chaos s’est installé autour de nous. Il me semble que c’est loin derrière. Pourtant, c’est tout récent.

Toi tu ne le vois pas, nous non plus d’ailleurs, parce que l’ennemi est invisible. Depuis qu’il est là, les gens ont changé. L’incertitude, la méfiance, l’anxiété se sont installées dans nos têtes, nos cœurs et nos maisons. C’est de plus en plus chacun pour soi. Pourtant, j’aimerais t’apprendre mon bébé que c’est dans ces moments qu’on a le plus besoin les uns des autres. Qu’ensemble, on réussit souvent à mieux ramer dans la tempête. Tu sais, il y a heureusement toujours de belles personnes qui parsèment le monde de leur bonté et de leur espoir. Parce qu’il y a toujours des gens qui réussissent à faire du beau avec le laid qui les entoure. C’est sur ces personnes que je tente de me concentrer ces jours‑ci.

Malgré tout, je dois te dire qu’il y a des jours où l’avenir me fait peur à moi aussi. Depuis ta naissance, quand je pense à l’avenir, je pense surtout à toi. J’imagine ton futur : tes saisons qui reviendront et j’espère qu’elles seront plus belles que ton premier printemps. Je veux pour toi un monde qui te permettra de grandir, de t’épanouir, de rire, mais surtout de rêver. Je veux pour toi un avenir où tout sera à ta portée, mais il y a des jours où je me demande vers où notre bateau collectif s’en va. C’est comme si on ne ramait pas tous dans la même direction et je le réalise particulièrement pendant qu’on est au cœur de cette crise.

Mais tu sais, je me dis qu’il faut parfois une grande crise pour atteindre le fond et se relever. C’est ça aussi le printemps : renaître après le vent glacial qui a refroidi nos cœurs. C’est peut‑être ce qui arrivera pour nous quand tout ça sera terminé ? Je me dis qu’on aura sûrement appris que rien n’est acquis et que notre vie qui tourne à trois cents miles à l’heure n’est peut‑être pas si importante finalement quand on n’a pas le temps de la vivre. On le réalise, tu sais, quand on est obligé de s’arrêter et de revenir à l’essentiel. Et l’essentiel j’espère qu’on ne l’oubliera pas de sitôt.

Je le sais, tu dois ressentir que ces temps‑ci, le cœur de ta maman bat un peu plus vite, ses yeux semblent plus préoccupés et parfois, ils se remplissent de larmes. J’arrive à peine à voir la fin de ce malheur qui tombe sur nos têtes. Surtout, ça me chavire le cœur de voir tous ces gens autour du globe qui vivent des épreuves inhumaines loin des leurs.

Malgré tout, j’essaie de t’offrir le plus beau des printemps. Celui qui rafraîchit le cœur, celui qui nous fait redécouvrir le monde. J’ai envie que tu saches que c’est grâce à toi que je réussis à rester dans le moment présent. Parce que toi, tu ne connais que le moment présent. Merci, mon enfant, d’être là, à ce moment précis dans ma vie ; tu me fais fleurir moi aussi.

Puisque je réalise que ce qui nous attend demain est toujours incertain, j’apprends à ne plus tenir les choses pour acquis. Je profite de tout ce renouveau que tu m’offres. Je ne me tannerai jamais de te voir découvrir le monde avec tes grandes perles bleues à grands coups de sourires. Et ces moments, j’essaie de les garder près de mon cœur pour m’en souvenir malgré le temps qui file bien vite entre mes doigts.

Mon bébé, même si demain le printemps n’est plus comme avant, il y aura toi. Tu seras mon éternel printemps !

Catherine Desgroseilliers

Les 10 commandements de la mom en confinement

Nous sommes désormais une majorité à devoir concilier travail et

Nous sommes désormais une majorité à devoir concilier travail et famille à un point qu’on n’aurait peut‑être jamais imaginé. Je ne sais pas pour vous, mais ici, on essaie de concilier, on essaie ben fort, mais par bout, on en arrache solide, soyons francs ! Depuis quelques jours, j’essaie de prendre tout ça avec humour et ça m’a donné envie de vous partager mes 10 commandements pour pas virer su’l top.

  1. Le lâcher-prise, tu appliqueras.

Je vous entends rire… même moi en l’écrivant, j’ai failli m’étouffer. J’ai de la misère à lâcher prise quand ça va bien, alors imaginez‑vous en temps de crise. Mais justement, si c’était le moment idéal ? Y’a des jouets du petit dernier éparpillés à la grandeur de ta maison, les miettes de toast du déjeuner sont encore sur le plancher en fin de journée, ton ado se réfugie dans son bordel dès que l’occasion se présente… ça dérange qui à part toi ? Personne. Tout est dit : arrête de t’en faire pis LÂCHE PRISE !

  1. Monsieur Legault, tu écouteras.

Tu appliques les mesures nécessaires pour protéger ton clan, c’est parfait ! Mais quand le premier ministre te dit qu’un petit verre de vin, ça fait pas de tort, tu dois l’écouter aussi. Anyway, qui sommes‑nous pour contredire les judicieux conseils de notre cher premier ministre ? Couche tes petits, habille‑toi en mou pis décompresse. Faut juste garder en tête qu’il ne t’a pas dit de boire la bouteille… même si des fois, l’envie est forte.

  1. Le guide alimentaire, tu trahiras.

Tu as tout à fait le droit de considérer le grilled cheese au fromage jaune comme un repas complet une fois ou deux dans la semaine. Ça vaut pour tout ce qui prend moins de trois minutes à préparer pis un minimum de vaisselle à laver. Refile trois carottes pis deux tranches de concombres à tes petits pour calmer ta culpabilité pis dis‑leur d’en profiter le temps que ça passe. Tu joueras à Ricardo demain, si ça adonne.

  1. Un moment pour toi, tu trouveras.

Lady Gaga, Katy Perry pis Jennifer Lopez n’attendent que toi pour un meeting entre filles, tu peux même inviter Isabelle Boulay si tu feeles déprimée. Paye‑toi le luxe d’une petite demi‑heure loin de ta marmaille pis va donc faire un tour. C’est simple, tu t’évades en marchant, en courant, en dansant, en braillant, en sacrant, ça te regarde (vas‑y en auto si y faut), mais tu t’évades, ta santé mentale te remerciera.

 

  1. Une vocation, tu ne t’inventeras pas.

T’es pas prof, pas plus qu’éducatrice en garderie. Une maman, c’est pas une G.O. dans un Club Med pis tes p’tits seront pas à plaindre parce que tu leur organises pas douze activités par jour. Laisse‑les donc s’ennuyer un peu, tu vas peut‑être être surprise. Ça se peut aussi que tu sois juste découragée, mais dans les deux cas, tu seras encore et toujours une maman incroyable.

  1. Ton gros possible, tu feras.

Toi pis ton chum, vous faites du télétravail avec des enfants à la maison ? Le bon côté de la chose, c’est qu’on est une méchante gang à faire pareil et ça inclut peut‑être même ton boss. Alors, il te comprend sûrement de ne pas être aussi efficace que d’habitude. Entre le besoin d’attention de l’un pis l’autre qui ne gère pas son estomac en te demandant une collation à tout bout de champ, rajoute à ça les changements de couches de ton bébé pis le nombre de chicanes entre frères et sœurs que tu gères dans un avant-midi, ce serait difficile d’être nommée l’employée du mois. Tu fais ce que tu peux, du mieux que tu le peux, pis c’est sûrement déjà excellent. Félicite-toi donc à la place de te t’autoflageller.

  1. Faire des folies, tu oseras.

Profite de cette période un peu folle pour remplir la boîte à souvenirs de ta tribu avec des moments qui sortent de l’ordinaire (pis qui ne te coûteront pas une cenne). Les matelas de tout le monde dans le milieu du salon pour une nuit de camping improvisée, la musique dans le tapis, des lumières de Noël pis voilà votre party : c’est le temps de ramasser ton humilité pis de sortir tes meilleurs moves de danse. Construisez une immense cabane de couvertes de et coussins pis vivez dedans une couple d’heures. Bref, n’importe quoi que vous ne feriez pas habituellement un mardi soir !

  1. De la technologie, tu profiteras.

On est en 2020, profitons‑en ! Installez mamie et papi au bout de la table via Facetime pendant un repas, ça leur rappellera du même coup que chez vous, c’est rarement calme. Ils apprécieront peut‑être un tout petit peu leur solitude après votre séance. Une petite heure de coloriage en ligne avec marraine pour votre grande fille. Votre traditionnel souper entre amis du samedi peut aussi avoir lieu (pis vous aurez même pas à cuisiner pour une armée). Usez et abusez de cette chance inouïe d’être ensemble même en étant séparés. En plus, ça peut s’avérer très utile pour occuper les enfants pendant que vous essayer de venir à bout de votre journée qui finit pu de pas finir !

  1. Une routine, tu établiras.

On le sait tous, les enfants ont besoin d’une routine (pis les parents aussi…), ne serait‑ce que pour le plaisir de la scraper une fois de temps en temps ! La liberté pendant une semaine, c’est cool… pendant un mois, permets‑moi d’en douter. Ils finiront certainement par s’emmerder pis toi, tu finiras sûrement internée. Tu ne veux ni l’un ni l’autre. Pas besoin de leur faire un horaire de militaires (bonjour le surplus de gestion pis de discipline que tu as zéro le temps de te taper). On commence notre journée comme si la vie avait encore un semblant de sens : on déjeune, on gère une crise ou deux, on se garde propre un minimum et on s’habille (le linge mou à la longue, c’est traître ! Remets tes jeans de temps en temps, tu me remercieras plus tard). Pour le reste de la journée, si le bordel pogne, applique simplement les commandements 1, 3 et 6 et attends patiemment l’heure du commandement 2 en te rappelant que demain est un autre jour.

  1. Pour te coller, tu en profiteras.

La distanciation sociale entre tes quatre murs, si toute ta maisonnée est en santé bien sûr, c’est loin d’être nécessaire… je dirais même que c’est à proscrire. Prends tes petits dans tes bras autant de fois par jour qu’ils en ont besoin (ou que TU en as besoin) pis fais la même chose avec ton chum. Collez‑vous, aimez‑vous, rassurez‑vous. C’est gratuit en plus d’être bon pour le moral. N’oublie pas que quand nos vies de fous vont reprendre leur cours, tu n’auras sûrement plus la chance de recevoir des gros colleux et des petits bisous baveux entre deux réunions pis un client.

Et puis un beau jour, tu te remémoreras le printemps 2020, celui qui t’a fait rusher quelque chose de rare mais que tu as traversé, bien au chaud dans ton cocon, avec les personnes les plus importantes dans ta vie. Tu te souviendras de ce moment où la vie a décidé qu’on était tous dus pour une petite leçon sur la gestion de nos priorités. Mais j’espère surtout que tu n’oublieras jamais que crise ou pas, tu fais une sacrée bonne job de maman !

Karine Arseneault

Se sentir inutile!

Est‑ce que ça vous est déjà arrivé de vous sentir inutiles? Ma

Est‑ce que ça vous est déjà arrivé de vous sentir inutiles? Mais VRAIMENT inutile? Pas juste dans un moment en particulier mais toujours?

C’est pas mal comme ça que je me sens depuis le confinement! Oui, ça doit être le cas de beaucoup de gens, je le sais! Mais comment faites‑vous, les gens hyperactifs, pour ne pas tomber? Je pose la question sincèrement!

Je suis le genre de personne qui avait mille et un projets. Ce n’était jamais assez! Je courais à gauche et à droite ; plus j’en avais, plus je carburais! La tête toujours en train de penser à demain.

– Profite de ce temps pour relaxer!

– Prends une pause!

РFais un m̩nage int̩rieur!

Je dois dire que depuis le confinement, je ne profite de rien et même que je ne dors pas! Mais pas du tout! Mon cerveau spin plus que jamais! Je rage intérieurement, je maudis la vie et je me cherche! C’est exactement ça, je me cherche et je me sens totalement perdue.

Je me sens inutile! La vie sur pause est la même pour tout le monde, mais comment on fait pour gérer ce vide? J’aurais voulu dire que je nage en plein océan, mais si c’était le cas, au moins, j’aurais fait l’activité de nager, t’sais! Du jour au lendemain, la fille hyperactive se retrouve désactivée! Ça fait mal.

La petite boule d’énergie a juste envie de hurler.

On se serre les coudes en étant loin, on se soutient et on s’envoie de l’amour. Ben de l’amour! Je sais qu’on vit tous la même chose, mais ma petite bête noire, à moi, c’est la solitude. On fait comment pour l’apprivoiser?

D’aussi loin que je me souvienne, même ado, je n’étais jamais seule. Toujours partie!

– Tu sors encore?

– Pas capable de rester assise trente secondes?

– Re-la-xe, Di Sei, et respire!

Malgré moi, je dois apprendre à faire tout ça : m’asseoir, relaxer et respirer, mais on dirait que ça n’a pas le même impact quand on est obligé de le faire.

On dit qu’il y a un avant COVID‑19 et qu’il y aura certainement un après. J’ai peur que le « après » soit encore plus fou qu’avant. Non? Que tous les gens comme moi, hyperactifs, se défouleront encore plus dans le « après ».

Je n’ai qu’un souhait alors : transformons notre énergie folle en énergie constructive. Bâtissons quelque chose qui servira pour le « après ». Que nous tous qui avons le mal de vivre en ce moment et qui cherchons quoi faire de nos mains, rêvons et bâtissons. Ensemble, on sera encore plus productifs!

En ce moment, je me sens inutile certes, mais ce n’est que partie remise, j’en suis certaine!

Tania Di Sei

J’essaie fort, maman

En revenant de l’école, tu m’as annoncé que le monde allait sâ

En revenant de l’école, tu m’as annoncé que le monde allait s’arrêter pour deux semaines.

Que l’école était fermée, la garderie aussi. Tout simplement à cause d’un virus.

J’étais contente, mais je ne savais pas toute la charge que ça impliquait.

J’essaie fort, maman, je te promets.

Tu m’as dit que ton travail, par contre, n’allait pas changer. Que tes patients avaient toujours besoin de toi. Que tu devais continuer à travailler, que tu étais devenue un ange à présent.

Papa, aussi, est un ange. Son travail ne lui permet pas de rester à la maison avec nous quatre et le chien.

J’essaie fort, maman.

Puisque vous êtes des anges de la société, vous ne pouvez être nos anges et rester à la maison. S’occuper de nous, vous êtes incapables.

C’est donc à moi, la grande sœur de maintenant dix-huit ans, de m’occuper du troupeau.

Ce n’est pas la première fois que tu me demandes cette faveur. Loin de là.

Ça me fait toujours plaisir d’aider.

Mais cette fois, je crois que c’est trop.

J’essaie maman, je te le jure.

Lorsque tu m’as demandé, j’ai accepté avec plaisir, pour aider, comme d’habitude.

Je ne m’attendais pas à autant.

Tu m’as donc annoncé que nous partions au chalet.

Ça faisait plus de deux mois que je n’y étais pas allée. J’étais très heureuse de passer du temps avec vous en famille pour la dernière fois avant je ne sais combien de temps.

Mais lorsque la fin de semaine s’est terminée, papa et toi deviez retourner au travail, servir la population et être des anges.

C’est donc avec un congélateur rempli et du wifi piètrement fonctionnel que tu m’as laissée avec trois enfants de douze, neuf et quatre ans.

Deux semaines, ça va bien aller, pensais-je.

La plus jeune veut jouer. C’est normal, je la comprends. À la garderie, elle est over stimulée avec plein de jeunes de son âge. Les deux autres ne veulent pas aider pour aucune tâche.

Je te jure, maman, que j’essaie fort.

Je dois jongler avec les repas, surveiller pour qu’ils arrêtent de grignoter entre les repas et qu’ils mangent assez de légumes pour avoir du dessert.

Je dois surveiller leur santé. La plus vieille est asthmatique, c’est elle qui est le plus à risque.

Je dois veiller à ce que tout le monde se brosse les dents, prennent sa douche, joue assez dehors et à ce que personne ne s’entre-tue.

C’est vrai qu’il serait facile de les planter devant leur tablette à longueur de journée, mais notre wifi ne le permet pas. Et éthiquement non plus, ça ne se fait pas.

Être pris au fin fond des bois ne sert qu’à nous isoler. Du dangereux virus qui nous empêche de voir notre famille et qui pourrait mettre en danger la vie de ma sœur.

Je dois donc jouer à la mère 24/7.

J’essaie fort, maman, je te le jure.

Mais là, c’est trop.

Nous avons terminé la deuxième semaine et j’ai craqué.

Devant les enfants en plus. La voiture a brisé. Elle n’avance plus.

J’angoisse comme ça ne se peut pas. Je sais que j’ai un super talent pour le cacher, mais ce matin, c’était trop. Comment je vais faire s’il y a une urgence?

En plus, le cégep recommence. Comment vont se dérouler les cours? En ligne? Non, mon wifi ne me le permet pas. Des vidéos capsules, ça non plus. Comment je vais faire?

J’ai trois enfants à ma charge et un chien.

La jeune de quatre ans retient toute mon attention : je joue aux Playmobil, aux Barbie, aux casse-têtes et plus encore…

Celui du milieu doit être stimulé : être sur sa tablette le rendra légume d’ici la fin du mois. Donc j’organise des activités pour lui : maths, jardinage, tours de magie, quiz géographique. Je veux qu’il continue à apprendre.

Et la plus vieille, elle a terminé son année scolaire, mais son anglais… Elle l’a à peine pratiqué. J’essaie somme je peux d’écouter des films en anglais, de lui parler en anglais.

Je dois prendre aussi des marches, m’occuper du chien, lui apprendre des tours pour qu’il ne s’ennuie pas.

Je dois faire à manger, le ménage, le lavage, l’éducation et les activités. Parce que toujours des exercices, je comprends que ça peut être ennuyant à la longue. J’organise des repas thématiques, des chasses au trésor, des rallyes photo…

Où sera mon temps alloué pour mes études?

Quand vais‑je rédiger ma dissertation de 500 mots sur l’idéologie de Platon? Quand vais‑je avoir le temps de regarder un vidéo de trois heures sur la dissolution du cuivre en chimie? Quand vais‑je pouvoir lire mon livre d’anglais?

Ça fait déjà deux semaines et je suis épuisée. Je tourne en rond, j’angoisse quand je reçois un nouveau courriel de mes professeurs.

Je n’en peux plus.

Mais je dois rester, c’est la vie de ma sœur asthmatique qui est en jeu. Je ne peux pas l’abandonner.

On dit que c’est en situation de crise que nous voyons la vraie personne qui se cache en nous.

Eh bien, la voilà la vraie moi : épuisée, angoissée et incapable.

J’ai vraiment hâte que tout ça finisse et que vous reveniez à la maison.

Pouvez‑vous être mes anges au lieu d’être ceux de la société?

Ta fille qui vous aime et qui a besoin de vous.

Clara

J’ai pleuré en faisant un pain aux bananes

La grande avait la bouche pleine de sucre, la petite les deux mains

La grande avait la bouche pleine de sucre, la petite les deux mains dans la farine. La cuisine était un foutoir total. Ma tête aussi. Pleurer moins fort que le bruit de la mixette était la meilleure option que j’ai trouvée.

Je voulais travailler les fractions dans un contexte réel. J’avais des intentions et des attentes. Des bananes et des pépites.

Je me suis retrouvée à faire la vaisselle seule. Mais pourquoi dans ma classe de 26, je réussis à faire une soupe géante d’Iroquoiens et que j’ai tellement de volontaires pour laver et essuyer que je dois piger? C’est un secret bien gardé après le secret de la Caramilk ou quoi? Je sais par contre pourquoi les bananes congelées de novembre 2019 me rappellent ma tendance à procrastiner. Ça, c’est d’une évidence.

Pendant que le four cuisait ma déception, je suis allée nettoyer mon mascara. Mais pourquoi je me maquille pour faire un foutu pain aux bananes? Je suis en isolement total. En attente du résultat du test de la COVID-19 de la petite voisine que j’ai gardée le jour de la tempête. Je me regarde dans le miroir. Les doutes, ça fait vieillir.

Je n’ai pas voulu que tout soit parfait. 2019 me l’aura appris. J’ai voulu donner ce que je croyais le mieux. J’ai voulu être ce parent efficace comme Thomas Gordon le décrit dans son livre. J’ai voulu me reprendre…

Depuis une semaine, j’essaie de créer une routine sécuritaire pour les filles. Des choix, de la liberté, du temps, du plaisir dans l’incertitude. J’ai voulu me reprendre. Que tout ce que je donne à mes élèves depuis vingt ans, l’énergie, les sacrifices et les compromis, rejaillisse enfin sur ma famille.

J’ai voulu me reprendre en faisant de ma table de cuisine un quartier général, un bureau géant, et de la fenêtre, un tableau. J’ai voulu recréer la classe. J’ai voulu aider dans ma posture de prof.

Mais ça reste la maison, avec le chat qui marche sur la table. Et je reste la maman qui fait du pain aux bananes avec du mascara pas waterproof.

Je ne suis plus dans ma classe. Je n’y remettrai probablement pas les pieds avant septembre. Je vis une forme de deuil. J’avais des projets pour mes élèves que je suivais depuis deux ans. J’aurais dû le faire, ce feu dans la cour pour faire cuire du pain banique avec les parents. J’aurais dû les accrocher les cabanes dans le boisé. Les mésanges ne savent rien de la pandémie. Elles ne sont pas confinées.

Dans ma classe extérieure, j’étais utile. Pas comme dans ma cuisine. J’avais le sentiment de transmettre le goût d’apprendre. C’était ma plus grande mission. Les missions héroïques tombent dans les cuisines. Les projets nobles font place aux dictatures de la gestion du temps d’écran. Je me sens inutile pendant que mon chum travaille au sous-sol pour trouver des solutions pour sa compagnie. Il s’adapte, collabore et crée. Je l’admire. Pendant que la fille de la pharmacie place des Tylenol sur les étagères, que l’emballeur emballe le souper de la famille de cinq, que la femme teste des gens dans leur char et que tous les autres font des heures supplémentaires. Je les admire. Je souhaite presque que les « mesures de guerre » viennent me chercher pour contribuer.

J’ai voulu me reprendre… Mais je passe à côté de ce qui compte, on dirait. Il faudrait me déprogrammer. Nous déprogrammer. La pédagogie sociale, c’est quoi sans les autres? J’ai perdu mes repères, mes projets. Mes filles aussi ont perdu leurs repères. Elles ont dû dire au revoir à leur papa hier, sans trop savoir quand elles le reverront. La garde partagée n’est pas recommandée en temps de pandémie. Surtout quand un des deux parents travaille. Je n’ai jamais été maman à la maison. Je les admire, les mères pleines d’espoir et de force. Mes grands-mères. Je les admire.

Je suis née pour aider. Pour créer des liens. Je ne vis pas sans les autres. J’ai besoin des autres. Mes filles aussi. Les autres, c’est nous maintenant. Avoir toutes ces idées, mais devoir attendre. J’implose dans ma cuisine.

Ma grande, celle qui avait la bouche pleine de sucre, a vidé un pot pour le remplir de petits billets écrits sur des écorces de bouleau. Des prénoms à piger pour leur rendre des services, leur faire plaisir. Sa dysorthographie est évidente sur chaque petite écorce. Et puis? Elle l’a fait pour les autres.

Ma petite, celle qui avait les deux mains dans la farine, vient de m’embrasser par en arrière et dessine un arc-en-ciel avec « Ça va bien aller ». Elle le place dans la fenêtre. Pour les autres.

Le pain aux bananes embaume la maison. Cette maison qui abrite les doutes, de la musique, les chicanes d’enfants, les danses improvisées, la peinture éclatée, la cuisine en bordel, les poèmes à minuit moins quart, les crayons sur la table de la cuisine, l’amour qui se reconstruit. La maison qui est ce repère de la famille. Cette cellule commune qui était il y a cinq jours diluée dans le travail et les faux désirs de consommation depuis trop longtemps.

Je voulais me reprendre. Je suis les réflexions qui appellent aux changements. Je suis les doutes et la force. Je suis les bananes et les pépites. Je suis la prof et la maman. Vous êtes ces parents qui doutent dans leur cuisine. Vous vous pensez seuls. Vous vous trompez. Nous sommes ensemble dans cette cuisine. Et c’est avec vous aussi que j’aimerais partager ce pain aux bananes, même si les bananes sont de 2019.

Quand tout sera terminé, que l’école aura repris, que les familles seront revenues à l’essentiel, que les mésanges auront de nouvelles cabanes, que je me sentirai utile même dans une cuisine, nous ferons un pain aux bananes collectif digne du Record Guinness. Ensemble. Nous contribuerons. Ensemble. Nous nous reprendrons.

Catherine Lapointe

https://ecolebranchee.com/pleurer-en-faisant-un-pain-aux-bananes-covid-19/