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Tu me manques, mon homme – Texte: Joanie Fournier

La vie va vite. Trop vite. Une fois embarqué sur les rails, le train fonce à toute vitesse. La rou

La vie va vite. Trop vite. Une fois embarqué sur les rails, le train fonce à toute vitesse. La routine, les enfants, nos jobs, nos projets. Les enfants arrivent, on essaie de profiter d’eux. Ils poussent, ils grandissent, ils courent vers leur avenir. On court derrière eux, comme pour attraper au vol chaque souvenir avec lequel on peut s’emplir le cœur. On nous répète depuis le premier jour que ça va vite, mais on a à peine le temps de cligner des yeux pour le réaliser.

Les jobs s’enchaînent, les postes se succèdent, les défis continuent de pleuvoir. Pleuvoir tellement que parfois, les mers se déchaînent et qu’on rame de plus en plus fort pour survivre. On prend plus de dossiers, on croule sous les piles. On n’a pas le temps de tout faire, mais on continue d’accepter d’en faire plus. Parce que la vie, elle, elle coûte de plus en plus cher et qu’il faut comme en prendre toujours plus pour y arriver…

Les projets continuent de grandir, les rêves grandissent dans nos têtes. On veut voyager, on veut plus d’espace, on veut changer d’air. On veut démolir, agrandir, rénover et bâtir. Quand un projet se termine, un autre commence, comme le coq qui chante chaque matin. C’est plus fort que nous. On en veut toujours plus.

Le temps file. Les années passent. C’est facile dans cette course de s’effacer, de s’oublier. On a l’impression souvent que la vie parentale n’est qu’un grand marathon. Personne ne part en même temps, personne ne termine sa course au même moment et chacun a sa vitesse. Mais on court tous. Derrière nos enfants pour les encourager. Avec nos enfants pour prendre le temps de jouer. Devant eux pour les amener à se surpasser.

Parfois, dans cette course effrénée contre la montre, nos regards se croisent, mon homme, et le temps se fige un instant. Juste quelques minutes où on ne pense plus au cliquetis du chronomètre de nos vies. Je vois dans tes yeux que tu es aussi à bout de souffle. Je sens ta bouche qui m’appelle et qui nous hurle de prendre le temps. Je sens nos corps qui se manquent l’un à l’autre. Dans quelques années, nous regarderons le parcours derrière nous et réaliserons que nous avons franchi la ligne d’arrivée sans même nous en apercevoir. Nous chercherons des bribes de souvenirs de cette vie trop rapide.

Tu me manques, mon homme. Je m’ennuie du temps où on se contentait de dormir sur un matelas sur le sol, dans un tout petit appartement. Je m’ennuie du temps où on soupait avec des céréales parce que c’était tout ce qu’on pouvait se permettre, mais que ça nous suffisait. Je m’ennuie du temps où on passait nos nuits à rire, à parler et à se chercher. Je m’ennuie du temps où plus rien autour de nous deux n’avait d’importance.

Je pense que c’est normal. De courir après le temps. De se remémorer le temps où nos seuls soucis n’avaient en fait rien de sérieux. Ce serait si naïf de penser que vivre minimalement nous ramènerait dans ce temps-là. Parce qu’on a vieilli, changé, évolué. Une fois qu’on a appris à courir, c’est si difficile de ralentir sa cadence.

Pourtant, il va bien falloir arrêter le temps. Mettre nos vies sur pause. Confier nos enfants. Refuser de gros dossiers. Arrêter de rénover. Et prendre le temps de se retrouver. Parce que c’est si tendre d’arriver à s’ennuyer, mais il faut se souvenir des raisons qui faisaient qu’on courait ensemble. Parce que si on ne prend pas le temps de croiser nos regards, d’écouter nos corps qui s’appellent et de se rappeler combien on s’aime, on aura couru tout ce marathon pour rien. Un jour, on sera retraités. Les enfants auront quitté le nid et la société n’aura plus besoin de nous. Mais je veux sentir qu’on sera toujours unis, côte à côte, de l’autre côté de la ligne d’arrivée.

Joanie Fournier

Renverser la vapeur

Il y a quelques années, j’ai mis en place, à la maison, une phas

Il y a quelques années, j’ai mis en place, à la maison, une phase de renversement de la vapeur. Vous pouvez aussi dire « plan d’évacuation du trop-plein presto ». Vous saisissez l’image. Vous savez ce moment où vous ne pouvez faire autrement que faire un virage à 180.

Chez-moi, j’ai donc décidé que nous arrêtions de vouloir répondre à des standards édictés par je ne sais qui et je ne sais où.  On a cessé de vouloir bien paraitre aux yeux des autres et on a arrêté de courir après notre queue. Le seul grand prix récolté à cette course; une fatigue familiale générale. Wow ! Méchant beau cadeau !

Alors, chez-moi, avec mon mi-adulte et ma mi-ado de 9 ans, j’ai établi nos nouvelles règles. J’ai été inébranlable, solide comme le roc !

Chez-nous, c’est ICI et MAINTENANT. Chez-nous, on fait des activités, on fait du sport de compétition, on est organisé ET chez-nous on pratique l’art de ne rien faire avec un grand R.

Chez-nous, on EST davantage et on FAIT moins. La bonne nouvelle ? Notre niveau de stress a joyeusement baissé, notre énergie est remontée en flèche, on sourit davantage et on communique mieux.

Chez-nous, en début de semaine, on ne planifie pas le samedi suivant au quart de tour. On laisse place au moment présent, à ce qui nous est offert. Nous n’avons jamais eu autant de belles surprises, autant de moments uniques.

Bref, chez-moi on dit souvent « non » à des invitations qui ne nous plaisent pas réellement et qui servent seulement à plaire aux autres. Ma phrase fétiche : « on peut tout faire, mais pas tout en même temps ! » Alors parfois, on passe une journée en pyjama et on mange à n’importe quelle heure juste parce que ça nous tente. Je mets aussi mes limites aux demandes des enfants et ils ne rouspètent même plus.

Mon plus grand retour sur l’investissement ? Ma fille de 9 ans qui fait une présentation orale sur les gens qu’elle admire, qui choisit sa maman parce qu’elle lui apprend à prendre son temps !! Vous n’avez pas idée le bonheur intense d’entendre ceci. Vous imaginez, elle n’a retenu rien de matériel, non, mais un concept essentiel qui lui servira toute sa vie.

Je vous souhaite d’essayer, persévérer et ressentir tout ce bien-être !

N.B. j’ai mis 2 ans à voir les bénéfices, soyez patients et solides, ça arrivera.

J’ai accouché de l’anxiété – partie 1

Il y a quelques mois, je me suis levée, un bon matin de semaine, av

Il y a quelques mois, je me suis levée, un bon matin de semaine, avec un goût amer dans la bouche. Pourtant, la veille, je n’avais rien fait de vraiment spécial. J’avais commencé ma journée à 6 h. Je m’étais habillée avec mes vêtements choisis la veille, maquillée pour avoir l’air moins blanche que je ne l’étais déjà et aplatis mes cheveux entre deux gorgées de café. Puis, j’avais réveillé les enfants afin de débuter leur journée avec cette routine à la fois usée et rassurante : habillage, déjeuner, lavage des dents et tout le bataclan.

Puis, vint le moment de cette dernière gorgée de café froid pour aller les déposer à la garderie, leur seconde demeure.

La journée s’était déroulée comme à l’habitude. Mais je me souviens d’avoir partagé mes pensées entre la tâche demandée et mes enfants qui me manquaient effroyablement. Plus qu’à la normale.

Je vous évite la routine du soir entre le retour à la maison, les cris de supplice d’enfants affamés qui semblaient n’avoir rien mangé depuis trois semaines et le concours de celui ou celle qui aura la lourde tâche de baigner dans le bain en premier.

Petite routine d’un parent qui tente de bien concilier la vie de famille et le travail. Néanmoins, ce jour-là, j’avais une écœurantite aiguë de ce train de vie. J’avais un poids sur les épaules. Une belle grosse brique qui semblait vouloir m’accoter au mur l’instant d’une inspiration. Au point où les étourdissements venaient me troubler sans cesse et que le cœur ne demandait qu’à fuguer de mon corps. J’ai voulu reprendre mon souffle, mais j’avais mal.

Il se passait quoi avec mon corps? Je n’avais jamais vécu de tels symptômes physiques. Étais-je malade? Non, je n’avais pas le temps de l’être. Je devais me ressaisir.

Les semaines ont passé. Et un soir, les palpitations ont recommencé de plus belle. Plus intenses, plus douloureuses. Ce même goût amer dans la bouche aussi. Comme du métal.

Je me souviens d’avoir tourné en rond, dans le grand lit, à me demander si j’étais en train de faire une crise cardiaque. J’étais jeune et j’avais pourtant l’impression d’être sur mes derniers miles. Et plus j’avais cette idée en tête, plus j’avais cette pression constante sur mon abdomen. Je ne voulais pas mourir.

Laissez-moi vous dire que j’ai rapidement pris rendez-vous avec ma médecin de famille pour qu’elle puisse me diriger vers un cardiologue. Prenant ma demande au sérieux, la secrétaire m’a offert un rendez-vous dès le lendemain. Bien heureusement, elle avait compris ma détresse.

Après un examen complet, une panoplie de questions et une seconde vérification de mon cœur (à ma demande!), la médecin pose son diagnostic.

« Votre cœur va très bien! Je ne vous réfère pas en cardiologie puisque ce que vous avez ne provient pas directement de là. »

Oh… Intérieurement, j’ai le cœur en chamade. Des chaleurs et des palpitations et elle prétend que mon cœur n’est en rien en cause de toutes ces manifestations physiques!?

« Vous faites de l’anxiété, madame! »

Quoi? Un trouble anxieux? Mes inquiétudes constantes, c’était ça? Le cœur qui me sort littéralement de la poitrine, c’était ça aussi? Et toutes les fois où je n’ai pas réussi à faire face à une situation parce que la nausée me prenait?

« Oui, et ça vient de tout ce que vous avez vécu, madame. Dont les naissances difficiles de vos enfants… Des traumatismes qui ont laissé des traces »

(…)

Une prescription plus tard, les questions dansaient dans ma tête…
L’anxiété, c’est génétique? Est-ce que mes enfants auront le même trouble que moi? Comment bien m’outiller et les aider si c’était le cas? Mais comment allais-je trouver la sérénité pour vivre à travers cette anxiété?

Je réalisais maintenant la complexité de ce trouble, auquel j’avais donné naissance, en même temps que mes enfants…

Cette femme là…

C'est drôle, la vie. Tu passes des années à juger les autres, à les tourner en ridicule et à cl

C’est drôle, la vie. Tu passes des années à juger les autres, à les tourner en ridicule et à clamer que jamais, JAMAIS, tu ne seras comme elle et puis un matin tu te réveilles et en te croisant dans le miroir, ça te frappe en pleine gueule : tu es devenue cette femme-là.
Cette femme-là, j’en ai entendu parler si souvent que j’avais l’impression de la connaître par cœur. Cette femme-là, j’ai travaillé avec elle, je l’ai eue comme amie, je l’ai croisée dans la rue et à l’épicerie et chaque fois, je me disais tout bas “My God, c’est donc ben épouvantable, se laisser aller d’même”.
Puis là, à 33 ans, maman de jumeaux de 12 semaines, j’te dirais que j’ai un p’tit laisser-aller au niveau de l’épilation du sourcil et de la jambe, et que oui, c’est du vomi sur mon chandail. J’me suis croisée dans le miroir ce matin puis j’me suis dit “My God, c’est donc ben épouvantable, se laisser aller d’même”. Ça arrive tout seul j’pense. Tu penses que tu contrôles tout là, le ménage, la vaisselle, le souper…  T’es tellement sur l’adrénaline, tellement fière de ta nouvelle marmaille que tu roules à 100 milles à l’heure, tu jongles avec toutes les tâches de la maisonnée, tu es Wonder Woman toi, au fond!

Puis, à un moment donné, tu t’essouffles un peu. Tu sors le linge de la sécheuse mais les vêtements ne vont pas tout de suite dans leur armoire et leur tiroir… Ils dorment un moment dans le panier et puis, après un moment, ça n’te dérange plus vraiment d’avoir un panier de linge sale et un panier de linge propre. “C’est propre ou sale ça chéri???” “J’sais pas, sens-le”. Puis, ça s’installe peu à peu… Avant, toi tu t’arrangeais tout le temps. Même pour aller au dépanneur tu mettais un peu de mascara parce que t’es fière toi, puis t’aimes ça être belle, ça te fait sentir en contrôle. Mais là, le contrôle tu l’as laissé filer pas mal. Pas que t’es pas fière, ou que t’es pas bien, nanon. T’as juste pas le temps d’avoir du temps pour toi. Parce qu’entre deux brassées de linge et entre deux biberons, t’aimes mieux penser au souper plutôt que de te faire les ongles (d’ailleurs, mes orteils sont vraiment laids en ce moment).

Des leggings c’est plus confortable que des pantalons.  Une tache de vomi sur un chandail c’est pas une raison pour se changer.  Si tu attends assez longtemps, ta repousse va devenir un bel ombré naturel.  Manger des grains de café ça réveille pas tant que ça.

Alors tu m’excuseras, oh sainte femme! Je t’ai jugée, sans savoir! Pardonne-moi d’avoir pensé que tu te servais des enfants comme excuse et qu’au fond de toi, tu avais toujours été paresseuse. Je ne savais pas qu’en fait, tu courais le marathon de ta vie et que, malgré les cernes et les cheveux gris qui repoussaient dans ta tignasse noire, tu étais plus belle que n’importe quelle autre femme parce qu’il sortait de tes pores tout l’amour du monde, et qu’au lieu de te le donner à toi-même cet amour là, tu le partageais autour de toi, dans ta maison.

Je m’excuse, belle amie! Je ne savais pas que ton gym à toi c’est de tenir 30 livres en équilibre sur ta hanche pendant que tu parles à ta mère au téléphone et que tu prépares les lunchs du lendemain pour ton plus vieux. Pardonne-moi, ma belle inconnue! Je croyais que tu n’avais pas l’amour propre bien placé, alors que c’était moi qui avait tout faux. Je lisais des articles sur la fréquence des rapports sexuels dans un couple adulte avec enfants et je scandais haut et fort que toutes ces femmes là étaient frigides et que je ne sacrifierais jamais ma vie sexuelle, enfant ou pas. J’étais bien loin de me douter que la première fois où les enfants ont dormi plus de deux heures en ligne, mon mari et moi en avons profité pour dormir en cuillère et faire la vaisselle en baillant.

Je t’ai jugée, maintenant je t’admire! À te voir l’allure à l’épicerie, avec ton bas de pyjama et ton manteau d’hiver dans la rangée des couches, je trouvais donc que tu faisais dure! Je ne savais pas que, malgré ta fatigue, tu avais conduit dans la presque nuit pour aller chercher des couches au plus jeune et des gouttes pour l’otite de ta plus grande, qui a passé les deux derniers jours à pleurer dans tes bras en se tenant les oreilles. Je t’ai en adoration maintenant! Toi et tes deux parties de soccer par semaine l’été et tes pratiques de hockey à 7 heures le matin le samedi.  Toi et tes réunions de parents-enseignants et ta carrière à toi que tu réussis à combiner et à gérer sans l’aide de rien ni personne. Et par dessus tout je te respecte, parce que peu importe à quel point ils sont laids, tes joggings, chaque fois que ton petit te regarde, il sourit.
C’est drôle la vie parfois, tu croises une femme qui a l’air d’en arracher mais au fond, c’est elle qui a le plus beau trésor du monde : c’est une maman.