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Je suis née dans un monde libre – Texte: Joanie Fournier

Je suis née dans un monde libre. Je suis née en sécurité, dans une fam

Je suis née dans un monde libre. Je suis née en sécurité, dans une famille aimante. J’ai tenu pour acquis qu’être en sécurité, aimée, respectée et stimulée, c’était normal. Et plus je côtoie des gens formidables, ouverts d’esprit, qui viennent de partout sur Terre… plus je suis reconnaissante. Je suis reconnaissante pour toutes ces petites choses, qui pendant des décennies m’ont semblé normales et acquises. Toutes ces petites choses, qui font partie du quotidien depuis tellement longtemps, qu’on en oublie la chance qu’on a de les avoir.

Je sais nager parce que j’ai de la chance. L’endroit où je vis m’a permis d’apprendre à nager dans une eau calme, cristalline et saine. J’ai appris à nager dans le calme et le plaisir, pas dans la panique et la survie.

Dès mes 5 ans, j’ai pu aller à l’école. Presque gratuitement. Aussi longtemps que j’en ai eu envie. Un autobus est passé me chercher au coin de ma rue, tous les jours, pour m’amener à l’école en sécurité, gratuitement. J’ai appris à lire, à écrire, à penser par moi-même. On m’a autorisée à avoir mes propres pensées, à les développer, à les exprimer et à les assumer.

J’ai des vêtements adaptés pour toutes les saisons. Un toit sur ma tête et un lit pour dormir. Les restants dans le frigo ne me tentent pas toujours… mais il y a toujours quelque chose à manger à l’intérieur.

J’ai commencé à travailler très jeune, pour avoir mes propres sous, pour me payer ce dont j’avais envie, quand j’en avais envie. Personne n’a jamais contrôlé mon argent ou choisi à ma place comment j’allais le dépenser.

Je marche dans la rue et je me sens en sécurité. Si je ne me sens pas en sécurité, j’appelle la police et je me re-sens en sécurité. Personne n’a le droit de me faire du mal impunément. Je n’ai jamais été témoin d’une fusillade ni vu de bombe éclater sous mes yeux. J’ai de la chance.

J’ai choisi la personne avec qui je voulais partager ma vie. J’ai choisi si c’était un homme ou une femme. J’ai choisi quelqu’un que j’aimais. J’ai choisi quelqu’un qui me respecte et qui me traite bien. Et j’ai le droit d’arrêter cette relation quand je le veux. J’ai le droit de changer d’avis, j’ai le droit de continuer, j’ai le droit d’écouter mon corps et mon cœur.

J’ai des relations sexuelles quand j’en ai envie. J’ai le droit de dire non. J’ai des orgasmes. J’ai le droit d’avoir du plaisir et de décider de la manière de m’y prendre pour l’obtenir. J’ai le droit d’avoir des enfants, autant que j’en veux. J’ai le droit de ne pas avoir d’enfant. Je peux me faire avorter. Peu importe la raison.

J’ai le droit de choisir le gouvernement qui me représente. J’ai le droit de dire que je ne suis pas d’accord. Je peux écrire ce que je veux sur Internet. Je peux dire ce que je pense et je me sens en sécurité.

J’ai toujours le choix. Personne ne peut me forcer à quoi que ce soit. Je peux devenir qui je veux. Je peux choisir mon métier. Je peux choisir mes amis. Je peux choisir ma vie.

Tout cela me semblait tellement banal jusqu’à récemment. Tout cela me semblait automatique, acquis, non négociable. Plus je côtoie des personnes qui arrivent d’ailleurs, plus je les respecte et plus je remercie la vie d’être née ici. Il faut prendre le temps de se rappeler que tout cela n’est jamais acquis pour toujours. Il faut savoir dire merci et être reconnaissant pour ce que l’on a. Il faut savoir se battre pour conserver nos droits. Rien n’est acquis. Tout peut changer. Il faut continuer cette bataille, menée par nos ancêtres. Elle ne sera jamais terminée. Tant que des humains sur Terre n’auront pas tous ces droits, cette bataille ne sera jamais terminée. Et si vous vivez ici et que vous croyez ne pas avoir tous ces droits, vous avez tort. Levez-vous, parlez, allez chercher de l’aide. Il y a des gens prêts à vous accompagner. Reprenez vos vies en main, vous avez le droit.

Joanie Fournier

L’endroit où je suis le plus (chez) moi – Texte: Nathalie Courcy

On me demande parfois quel est l'endroit que j’ai visité ou l'endroit où j'ai habité et que jâ€

On me demande parfois quel est l’endroit que j’ai visité ou l’endroit où j’ai habité et que j’ai préféré.

J’ai vécu jusqu’à maintenant dans 12 maisons et 5 appartements, sans compter les lieux où j’ai séjourné pendant plusieurs mois à l’étranger (Israël, Burkina Faso, France). J’ai habité en Alberta et au Québec et j’ai séjourné dans une vingtaine de pays. Pré-pandémie, je passais plusieurs semaines par année dans les autres provinces. On pourrait croire que je suis sans racines, mais je crois plutôt que je m’enracine facilement.

L’endroit où je me sens le mieux ne porte toutefois pas le nom d’une ville ou d’un pays. Il porte le nom de mes enfants. Oui! c’est dans les bras de mes enfants que je me sens le plus chez moi. Quand mes quatre poussins sont collés autour de moi, qu’on rit, qu’on jase, qu’on se confie, qu’on est, tout simplement. Ça sent l’amour, ça sent la famille, ça sent l’authenticité.

Qu’on soit autour d’une table, d’un feu, d’un jeu ou d’un film, notre complicité illumine à des milles à la ronde. On a notre propre dictionnaire, notre encyclopédie d’insides, nos souvenirs communs qui sortent de l’ordinaire, nos regards codés. On sait jusqu’où on peut aller et quelle est la limite de chacun.

On complète nos phrases, on rit (ou pas) de nos jeux de mots, on se tape rarement sur les nerfs et quand ça arrive, on se connaît assez pour respecter nos bulles, celles qui nous poppent au cerveau et celles dans lesquelles on se réfugie.

C’est avec mes enfants que j’ai tenu à refaire mon nid il y a quelques années quand mon noyau amoureux est parti au vent. J’ai tenu à créer avec eux un foyer douillet et original, à notre image, à notre rythme. J’ai tenu à ce que chacun y trouve sa place et à ce que moi aussi, j’y aie mon espace. J’ai choisi un endroit évolutif où tout le monde pourrait progresser, avancer et reculer selon ses besoins, ses choix et son moment présent. Un nid où ils se sentiraient enracinés et non enchaînés.

C’est auprès de mes enfants que je suis le plus « moi » dans toutes mes cellules. C’est avec eux que je n’ai pas besoin de m’expliquer. Que je peux m’exprimer totalement, dans mes exagérations, dans mon humour, dans mon amour, dans mes trop et dans mes pas assez. C’est avec eux que je grandis le plus et c’est avec eux que je me sens le plus constamment utile et pertinente. Même leurs yeux faussement exaspérés me rendent heureuse, parce qu’ils me prouvent qu’ils s’autonomisent et deviennent eux-mêmes.

Un jour, on ne vivra plus dans le même espace physique. Et toujours, nous partagerons une même âme.

Nathalie Courcy

Voyager en famille… du rêve, à la réalité!

S’il y a bien une chose qui était claire pour moi lorsque je suis

S’il y a bien une chose qui était claire pour moi lorsque je suis déménagée en Italie, c’était que je ferais le tour de l’Europe avec les enfants. C’est même ainsi que je me présentais aux gens : « Bonjour, je suis ici pour faire l’école à la maison à nos deux garçons (1re, 2e et 3e années pour le plus jeune; 4e, 5e et 6e années pour le plus vieux), apprendre l’italien et planifier nos voyages. Mon mari, lui, travaillera pour l’OTAN trois ans et saisira chaque occasion de partir en exploration avec nous. »

Dans mes rêves, les voyages représentaient le summum à vivre avec nos enfants. Une expérience qui irait bien au‑delà du matériel… qui toucherait presque… le spirituel! Hum hum… Oui. Légèrement intense. C’est moi ça.

Après Paris, Londres, Berlin, Rome et tant d’autres… constat du jour : voyager en famille, c’est plus dur que je l’avais imaginé!

Au cours des douze derniers mois, dont trois ont été consacrés aux voyages de toutes sortes, je peux maintenant affirmer (sans l’ombre d’un doute!) que mes envies de tour du monde se sont évaporées comme neige au soleil.

Je précise tout de suite que je n’ai pas perdu complètement le goût d’explorer de nouveaux horizons. J’ai juste mieux compris le genre d’aventures qui plaît à ma famille… et on est loin d’un marathon comme le tour du monde!

Qu’est‑ce qui s’est clarifié à travers mes essais et erreurs de la dernière année? Qu’est‑ce qui fonctionne généralement pour ma famille? Et si je devais réunir les dix ingrédients d’un voyage réussi… quelle serait ma liste?

  1. Accepter qu’on voyage comme on vit. Je suis une fille qui priorise le plaisir et le bien‑être dans la vie en général. Je ne me transforme pas soudainement en une machine performante simplement parce que je suis dans un autre pays. J’ai toujours le même objectif : passer du bon temps avec les gens que j’aime. Profiter autant du chemin que de la destination, c’est ma philosophie dans la vie ET en voyage.
  1. Assumer ses priorités. Je priorise le plaisir, alors j’accepte que je ne pourrai pas tout voir. Perfectionnisme et légèreté ne vont pas ensemble.
  1. Choisir les activités qu’on veut réellement faire, pas celles qu’il faut supposément faire. Il y a tellement de choix… Si je ne peux pas tout faire, pas question de perdre mon temps avec une sortie qui ne me plaît pas vraiment!
  1. Prévenir les enfants que ce fameux plaisir n’arrivera pas nécessairement en même temps pour tout le monde. Mes cocos savent qu’il y a des moments pour eux et des moments pour leurs parents. Nous visons toujours un certain équilibre et ils pratiquent ainsi le respect d’autrui. Tout le monde essaie très fort de ne pas gâcher l’expérience des autres.
  1. Connaître nos ennemis pour mieux les dompter… le stress! Les voyages peuvent être une grande source d’anxiété. Il faut avouer que Papa et Maman ne savent pas vraiment plus que leurs enfants ce qui les attend… Moi, comme adulte, j’ai appris l’importance de supporter ce petit sentiment de vertige qui m’accompagne lorsque je quitte ma zone de confort. Mais mes enfants, eux, sont tout simplement : des enfants. Maturité et expérience ne riment pas avec petite enfance. Je ne compte plus le nombre de fois où mes enfants auraient préféré rester à la maison, au lieu de se risquer à expérimenter un nouvel endroit ou une nouvelle rencontre… Il faut être prêt à les accompagner là-dedans… à les encourager à explorer les territoires inconnus. Ils pourront toujours juger par la suite, selon leurs intérêts et leur personnalité, de ce qu’ils apprécient ou non. Et plus souvent qu’autrement, le moteur de la passion et de la curiosité s’enflammera parce qu’ils auront découvert quelque chose qu’ils aiment. Heureusement, avec l’expérience, je peux dire que les enfants apprennent à gérer cette anxiété et avancent dans chaque voyage avec plus de confiance.
  1. Connaître nos ennemis pour mieux les dompter… la fatigue! Saviez-vous que vous avez le droit de prendre une journée de pause en plein milieu d’un voyage? Après trois ou quatre jours, je ressens toujours le besoin de me reposer. Rien ne nous oblige à maintenir constamment le même rythme. Nous ne serons que plus disposés à reprendre nos activités normales dès le lendemain.
  1. Connaître nos ennemis pour mieux les dompter… la faim! J’essaie de toujours avoir une collation et de l’eau dans mon sac. Nous faisons ainsi d’une pierre, deux coups. Nous évitons l’irritabilité qui accompagne une chute trop drastique de notre taux de sucre et nous diminuons le stress au repas. Si notre enfant n’apprécie pas son dîner, nous sommes moins inquiets de le voir chipoter dans son assiette en sachant qu’il a mangé un petit encas nourrissant il y a deux heures et que nous avons ce qu’il faut pour un goûter d’après-midi. J’emporte en voyage un sac rempli de barres tendres dès que possible!
  1. Ne pas acheter de souvenirs. On prend des photos et on dépense pour des activités, pas pour des objets. Mes enfants le savent et connaissent par cÅ“ur ma phrase fétiche : « Nos plus grands souvenirs sont dans nos têtes. » Ils ne le demandent même plus et on évite bien des batailles. Je ne magasine pas de cadeaux non plus. Je profite simplement de mes vacances. Évidemment, cette règle n’est pas coulée dans le béton… Il y a eu quelques exceptions.
  1. Privilégier les grandes villes au lieu de se déplacer de village en village. En changeant moins souvent d’emplacement, on diminue le temps de transport et les changements d’hôtels, donc le stress et la fatigue. J’apprécie aussi la grande variété d’activités qu’offre une métropole.
  1. Louer un appartement. En voyageant à quatre, il est plus économique de louer un appartement quelques jours que de dormir à l’hôtel puisque nous pouvons y cuisiner nos déjeuners et nos soupers.

J’aurai bientôt l’occasion de tester mes principes et de comparer ma façon de voyager, puisque je viens tout juste d’accepter l’invitation d’une amie pour aller découvrir les marchés de Noël de Vienne. Conjointe de militaire elle aussi, elle est dans la même situation que moi, c’est-à-dire temporairement seule à tenir le fort à Naples alors que mari chéri est parti servir son pays. Nous quitterons donc bientôt toutes les deux pour l’Autriche avec nos cocos respectifs. Ce sera l’occasion parfaite d’observer les trucs d’une autre famille et de pousser plus loin ma réflexion sur mes goûts en matière de voyage…

Elizabeth Gobeil Tremblay

 

Mon premier Noël d’expatriée

C’est mon premier Noël sans tempêtes ni conditions routières à

C’est mon premier Noël sans tempêtes ni conditions routières à surveiller sur MétéoMédia. Mes temps des fêtes ont toujours ressemblé à de grands pèlerinages. J’ai grandi avec un père militaire, puis épousé un militaire (ben oui !), alors j’étais toujours celle qui était loin, celle qui devait revenir. Faire une grande tournée pour retrouver la famille et les amis que je chéris particulièrement, c’est ma tradition. Cette année, j’aurais bercé le bébé tout neuf de mon amie, rencontré l’amoureuse de mon frère, festoyé avec ma cousine, mes onze cousins et toute notre belle marmaille… Mais cette fois, je suis en Italie. Loin « pour le vrai » comme dirait Daniel Blanchette de Victoriaville dans La Guerre des tuques. Partie voir le monde, mais trop loin pour faire le tour de mon monde.

Ne me demandez pas comment s’est passée mon adaptation, j’ai encore les deux pieds dedans. Pas de perspective, pas de recul qui me permettrait de dire « tout est bien qui finit bien », aucune vue de l’ensemble de l’œuvre. Juste une fille pas si sûre qu’elle aime vraiment ça, l’expatriation. Qui se dit que ce serait peut-être le fun que ce soit déjà fini. Qui s’imaginait progresser sur un chemin palpitant et qui est surprise d’avoir plutôt l’impression de mettre sa vie sur pause. Comme si la vraie vie attendait de l’autre côté de l’océan.

Je crois que je suis surtout affectée par la fatigue. Je voulais ajouter quelques remous dans ma vie et maintenant, je l’avoue, j’en ai un peu marre que rien ne soit simple. J’aimerais ça, des fois, pouvoir me mettre sur le pilote automatique. Un cerveau n’est pas fait pour s’investir à 100 % dans chaque tâche, c’est bien trop exténuant. Il y a des bons bouts de notre journée qu’on doit pouvoir faire sans grand effort mental. Cette facilité me manque. Je voudrais pouvoir accomplir un tas de trucs sans vraiment réfléchir et garder mon énergie pour ce qui compte vraiment. Mais je vois aussi que le temps fait son œuvre. Tout est déjà plus évident qu’il y a six mois. Et dans quelque temps, nous serons encore plus confortables avec notre terre d’accueil.

Notre premier Noël en Italie sera donc une autre étape de cette grande aventure. Un mélange de traditions familiales et de nouvelles expériences. Nous avons sorti notre calendrier de l’avent (les enfants attendaient leurs petits privilèges avec impatience) et notre CD de Toupie et Binou (qui peut résister à la « douce voix de miel » de Marc Labrèche qui chante Noël ?) Le sapin est décoré et nos desserts préférés cuisinés. Au lieu de prendre la route pour rejoindre notre famille, nous prévoyons célébrer avec nos nouveaux amis en Italie. Profiter des vacances pour voyager en Sicile et dormir à Alberobello, dans une curieuse maison de gnome. Admirer, de notre terrasse, les feux d’artifice du Nouvel An et rêver d’une année 2018 merveilleuse où nous aurons dompté les vagues et retrouvé notre équilibre.

Elizabeth Gobeil Tremblay